C. LES CRÉDITS DE PROMOTION DU DÉVELOPPEMENT INTERNATIONAL ET DE L'ATTRACTIVITÉ

Les actions de promotion du développement international et de l'attractivité comprennent :

- d'une part, le soutien aux exportations, à l'investissement sur le territoire français et l'appui au secteur du tourisme ;

- d'autre part, la promotion de l'attractivité de l'enseignement supérieur et de la recherche français.

1. Une réforme du soutien au commerce extérieur et aux investissements étrangers

En 2012, M. Laurent Fabius, alors ministre des Affaires étrangères a annoncé vouloir faire de la diplomatie économique une priorité forte de son action. En conséquence, à la suite de l'élargissement des compétences du ministère des Affaires étrangères au commerce extérieur et à la promotion du tourisme , intervenue en avril 2014, le périmètre du programme 185 a évolué. Le projet annuel de performance de la mission « Action extérieure de l'État » assigne notamment à ce programme l'objectif, très large, de « concourir au renforcement du développement international de la France ».

En dehors des seules activités de promotion du tourisme, portées par la subvention à l'agence de développement touristique « Atout France », cet objectif n'est toutefois pas mis en regard de crédits budgétaires spécifiques , puisqu'il est partagé par l'ensemble du réseau diplomatique dont les crédits relèvent principalement du programme 105 (« Action de la France en Europe et dans le monde »).

a) Un déficit persistant du commerce extérieur

Les chiffres du commerce extérieur pour l'année 2017 font apparaître une hausse du déficit des échanges de biens qui s'élève à -62,3 milliards d'euros contre -48,3 milliards d'euros en 2016, représentant 2,8 points de PIB. Cette dégradation reflète, pour une large part, l'augmentation de la facture énergétique, en lien avec la remontée des cours du pétrole (+28,3 % entre juin et décembre pour le baril de Brent en euros).

Les parts de marché de la France dans les exportations mondiales sont stables depuis 2011 (alors qu'elles baissaient depuis le début des années 1990), avec 3,5% de part de marché dans le commerce mondial pour les biens et services, et 3,1% de part de marché uniquement pour les biens. Après une légère amélioration à la fin de l'année 2017, le solde se dégrade à nouveau depuis le début de l'année 2018.

De fait, les exportations françaises se concentrent principalement dans certains secteurs comme l'aéronautique ou la défense, pour lesquels la demande mondiale reste très dynamique. Les parts de la France dans ces marchés restent importantes ces dernières années. Les exportations de produits chimiques, de véhicules automobiles et de produits agroalimentaires se portent également bien. L'analyse géographique de la balance commerciale révèle des déséquilibres commerciaux en Asie et dans l'Union européenne. Le solde commercial de la France demeure excédentaire vis-à-vis de l'Amérique, de l'Afrique et du Moyen-Orient.

Si le déficit des échanges de biens, souvent utilisé comme référence du commerce extérieur, est élevé, la balance des services est redevenue excédentaire en 2017 avec +5,4 milliards d'euros après un équilibre en 2016. Dans le cadre de la révision des méthodes d'évaluation des recettes touristiques, les recettes nettes issues du tourisme international ont augmenté de + 12,3 milliards d'euros. La balance des services est donc réévaluée à +17,7 milliards d'euros. Dès lors, le déficit global des échanges de biens et services s'élève à 38,3 milliards d'euros en 2017.

En revanche, peu d'entreprises françaises sont exportatrices : sur 4 millions d'entreprises en France, le nombre d'entreprises exportatrices stagne depuis 10 ans, avec 124 057 entreprises exportatrices en 2017.

Parmi celles-ci, la prégnance des grands groupes est forte : si les PME représentent 95% des entreprises françaises et 85,6% des entreprises exportatrices, elles ne réalisent que 13,5% des montants exportés. Nos exportations sont concentrées autour des grandes entreprises : 1000 entreprises réalisent 70% de notre volume d'exportation.

La réforme du dispositif de soutien au commerce extérieur, annoncée par le Premier ministre à Roubaix le 23 février 2018, a pour objectif d'améliorer le nombre d'entreprises exportatrices françaises, en particulier les PME et entreprises de taille intermédiaire (ETI).

Nombre d'exportateurs et montant des exportations de biens

b) Une réforme des dispositifs de soutien

Votre commission a entendu, le 17 janvier 2018, M. Christophe Lecourtier, directeur général de Business France, sur l'évolution des politiques publiques de promotion des exportations et de l'attractivité de la France auprès des investisseurs étrangers . M. Christophe Lecourtier a en effet remis au gouvernement, en novembre 2017, un rapport sur l'internationalisation de l'économie française.

Il en ressort que l'amélioration du service public de l'export passe par une meilleure coopération entre Business France et les Chambres de commerce, en France et à l'étranger, ainsi qu'avec BPIFrance et le secteur privé.

Au niveau territorial, le rapport préconise un guichet unique régional , réunissant Business France et les Chambres de commerce et d'industrie (CCI), avec pour mission d'identifier et de préparer les entreprises à l'export grâce à une offre de service étendue. À l'étranger, la mission de service public d'accompagnement des entreprises sera également assurée, dans chaque pays, par un acteur unique . De nouveaux outils seront créés tels qu'une plateforme digitale contribuant à assurer la continuité du suivi des entreprises tout au long de leur parcours à l'export.

En matière de développement des investissements étrangers en France , le rapport préconise une stratégie de prospection mieux concertée sous l'autorité des ambassadeurs ; en France, il propose une meilleure coordination des administrations et des acteurs en régions afin de faciliter et d'accélérer la mise en oeuvre des décisions d'investissement. Enfin, une nouvelle offre de services sera développée pour mieux répondre aux attentes des investisseurs internationaux.

S'agissant des partenariats avec les régions, trois premiers protocoles d'accord (Région, Etat, CCI régionale et Business France) ont été signés avec les Hauts-de-France, Provence-Alpes-Côte d'Azur et la Bourgogne-Franche-Comté.

S'agissant de la réorganisation des services à l'étranger, 8 pays ont déjà été désignés à titre expérimental pour un retrait en 2019 de l'activité export de Business France . Le transfert de la mission d'accompagnement de Business France à des organismes locaux se fera dans le cadre de concessions de service public, désignant cet organisme comme le correspondant unique export dans le pays.

S'agissant de la prospection et l'accueil des investissements internationaux en France, la création d'une « Team France Invest », sur le modèle de la « Team France Export », a été annoncée au printemps 2018. Une nouvelle convention entre la Direction générale du Trésor et Business France a été signée le 17 juillet 2018 aux côtés du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères et du Commissariat général à l'égalité des territoires. Cette convention définit 40 pays cibles prioritaires. La DG Trésor, via ses Services économiques et Business France, sous l'autorité de l'ambassadeur, y assureront conjointement une mission générale de promotion de l'image économique de la France.

Dans les territoires, une charte nationale des investissements étrangers en France doit constituer le socle de référence de la coopération entre services de l'État et collectivités territoriales pour améliorer l'accueil et le développement des investissements étrangers.

2. La promotion d'un secteur essentiel de l'économie : le tourisme

En 2017, la France a accueilli 87 millions de touristes internationaux , soit une hausse de 5,1 % par rapport à 2016. Cette hausse reflète le retour des touristes européens, la clientèle extra-européenne ne progressant que modérément. Ces chiffres marquent la plus forte progression depuis dix ans. La France conserve ainsi son rang de première destination touristique mondiale, devant l'Espagne (82 millions de touristes internationaux) et les États-Unis (73 millions).

La France ne se place toutefois qu'en troisième position en termes de recettes générées (54 milliards d'euros).

Parmi les mesures incitatives mises en place, la délivrance en 48 heures des visas pour 10 nouveaux pays en 2017 semble produire des effets : le premier trimestre 2018 marque en effet une progression du nombre de visas délivrés de près de 50 %, par rapport à la même période de l'année dernière, sur les destinations ayant fait l'objet de ce dispositif : Russie (+31%), Indonésie (+29%) et Thaïlande (+20%) par exemple.

L'objectif du gouvernement est de conforter cette première place, en portant le nombre d'arrivées touristiques à 100 millions de touristes internationaux à l'horizon 2020 . Cela doit s'accompagner d'une prolongation de la durée moyenne de leur séjour sur le territoire pour augmenter les recettes touristiques avec un nouvel objectif fort que se donne le gouvernement de 60 milliards d'euros en 2020 . Atteindre ce double objectif permettrait de créer 300 000 emplois supplémentaires sur l'ensemble du territoire, en métropole comme en outre-mer. Pour mémoire, le secteur touristique dans son ensemble représente près de 8% du PIB et 2 millions d'emplois directs et indirects .

Les premiers résultats de 2018 sont encourageants. La croissance est particulièrement notable pour la clientèle issue d'Asie ainsi que pour les clientèles du Brésil et de l'Australie. L'objectif de 90 millions de touristes étrangers accueillis à la fin de l'année 2018 paraît atteignable.

Dans ce contexte, les missions de promotion du tourisme assurées par l'opérateur Atout France doivent être encouragées. L'opérateur réalise chaque année plus de 2 700 actions de marketing et communication dans le monde. Elles ont pour cible à la fois le grand public (campagnes de communications, éditions, événementiel, salons, etc.), les professionnels du voyage (opérations commerciales, formations, etc.) et les prescripteurs du tourisme d'affaires. Des actions spécifiques ciblent aussi la presse et les nouveaux réseaux d'influenceurs. À la demande de l'État, Atout France s'est également engagé dans les candidatures et l'accompagnement de grands événements, favorisant l'attractivité de la destination, organisés en France et à l'étranger tels que la Ryder Cup 2018, la Coupe du monde féminine de Football 2019, la Coupe du monde de Rugby 2023, les Jeux Olympiques et Paralympiques 2024, Goût de/Good France.

Vos rapporteurs regrettent les initiatives visant à réduire les crédits d'Atout France 5 ( * ) , au motif que notre pays se suffirait à lui-même pour attirer des visiteurs ou que la compétence « tourisme » aurait été transférée aux régions.

Le tourisme est en effet un secteur particulièrement concurrentiel à l'échelle mondial e, nécessitant la mise en oeuvre d'une politique de compétitivité spécifique, menée par des acteurs bien identifiés par le secteur.

Il est également reproché à la politique touristique de ne pas être suffisamment évaluée. Or, comme pour l'ensemble de ses opérateurs, l'État a mis en place des outils d'évaluation et de contrôle , dans le cadre d'un contrat d'objectifs et de performance (COP) conclu pour la période 2016-2018. Un nouveau COP est en cours d'élaboration. Par ailleurs, le directeur général d'Atout France se voit remettre chaque année une lettre d'objectifs déclinant et précisant les mission du COP qu'il doit plus particulièrement mettre en oeuvre sur l'année et dont l'accomplissement fera l'objet d'une évaluation. Enfin, le financement par les ministères de tutelle de projets spécifiques fait l'objet de conventions dédiées prévoyant une évaluation de performance et de résultats en fin de mise en oeuvre. L'évaluation de la politique touristique pourrait probablement être améliorée, sans que cela ne justifie de la remettre en cause.

Atout France dispose d'un réseau à l'international constitué de 33 bureaux répartis dans 30 pays (avec une zone d'intervention sur plus de 70 pays). En PLF 2019, le plafond d'emplois de l'opérateur Atout France est stable et s'établit à 288 ETPT sous plafond et 60 ETPT hors plafond (siège et réseau confondus).

En 2018, le budget initial d'Atout France revient à un niveau similaire aux budgets d'avant l'année 2017, au cours de laquelle un soutien de 10 M€ avait été alloué dans le cadre d'un fonds d'urgence. Ce budget s'élève ainsi à 71,6 M€. Le montant de la subvention pour charge de service public est de 32 M€, niveau légèrement supérieur à 2017 du fait d'un niveau de réserve plus bas. Cette subvention est complétée par :

- 4 M€ d'attributions de produits 6 ( * ) (comme en 2016) grâce à une hausse des recettes visas en 2017 ;

- 1,5 M€ dédiés à la promotion de la gastronomie ;

- 0,5 M€ de subventions spécifiques.

Les ressources propres de l'opérateur, constituées des cotisations et des recettes de partenariats, s'élèvent à 33 M€, soit 46% des recettes totales, à un niveau stable par rapport aux recettes hors fonds d'urgence.

Les crédits alloués à la subvention pour charge de service public sont également stabilisés dans le PLF 2019 par rapport à 2018, avec un montant de 32,7 M€ (réserve non déduite).

En 2017, Atout France n'a pas pu bénéficier de recettes de droits de visa, en raison de la conjoncture, alors même que le contexte nécessitait un effort important de promotion. C'est pourquoi il a été annoncé lors du Conseil interministériel du Tourisme de janvier 2018 que les modalités de calcul de la part des recettes issues des droits de visa serait revue. Cette part sera fixée, à compter de 2019, à 3 % des recettes des droits de visa de l'année n-1.

La somme ainsi générée sera répartie de manière pérenne entre le financement des vacataires nécessaires à la délivrance des visas (25%) et le financement de la promotion du tourisme via Atout France (75%).

Compte tenu des prévisions de recettes de droits de visa pour 2018, le montant des crédits qui seront reversés à l'agence est estimé entre 4,5 et 5 M€ .

Lors de son audition devant votre commission le 3 octobre 2018, M. Maurice Gourdault-Montagne, secrétaire général du ministère de l'Europe et des affaires étrangères 7 ( * ) , a précisé que les opérateurs Atout France et Business France entraient bien dans le champ de la réforme « Action publique 2022 » . En outre, une mission a été demandée par le Premier ministre à l'Inspection générale des finances (IGF) et à l'Inspection des affaires étrangères sur leur rapprochement.

Dans l'hypothèse d'un rapprochement, il faudra toutefois bien veiller à maintenir l'identité de la politique touristique , distincte des autres missions de Business France. C'est d'autant plus essentiel qu'aucun ministre ou secrétaire d'État ne porte aujourd'hui cette mission dans l'intitulé de ses fonctions. Ce rapprochement doit également préserver l'affectation des recettes de droits de visa, complément devenu indispensable à la politique touristique.

Feuille de route du gouvernement pour le tourisme

Six chantiers prioritaires ont été identifiés par le Gouvernement :

- La qualité de l'accueil et la sécurisation des sites ;

- La structuration de l'offre touristique ;

- Le soutien étatique en matière d'investissements ;

- La formation et l'emploi ;

- La numérisation et le partage d'information ;

- L'accès aux vacances pour le plus grand nombre.

Par ailleurs, onze chantiers ont été lancés :

- limiter à 48 heures le délai de délivrance des visas dans 10 nouveaux pays d'ici juin 2018 8 ( * ) ;

- réduire le temps d'attente aux frontières dans les aéroports, à 30 minutes pour les ressortissants européens et 45 minutes pour les autres à compter du 1 er janvier 2018 ;

- établir un plan d'entretien des autoroutes entre les aéroports franciliens et Paris ;

- préparer un plan d'investissement dans les stations mer et montagne ;

- augmenter le nombre de contrats d'apprentissage dans le secteur ;

- signer un accord d'engagement de développement de l'emploi et des compétences pour répondre aux besoins du secteur ;

- mobiliser l'expertise publique au profit des territoires pour accompagner les projets touristiques des collectivités territoriales ;

- fluidifier les opérations de détaxe , notamment dans les aéroports ;

- lancer la plateforme « DATAtourisme » à l'automne 2017 pour collecter, uniformiser et diffuser en open data les données d'information produites par les acteurs touristiques territoriaux ;

- mettre en place une convention-cadre interministérielle visant à soutenir et promouvoir la filière du tourisme culturel ;

- organiser les deuxièmes Rencontres Nationales du Tourisme Outre-Mer et mettre en place un Conseil du Tourisme dans les Outre-mer.

Source : réponses au questionnaire de vos rapporteurs pour avis


* 5 Comme l'a proposé M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial, lors de l'examen des crédits de la mission « Action extérieure de l'Etat » par la Commission des finances le 5 novembre 2018.

* 6 Décret n° 2015-1819 du 30 décembre 2015 portant attribution de produits au budget du ministère de l'Europe et des Affaires étrangères.

* 7 Audition de M. Maurice Gourdault-Montagne, secrétaire général du ministère de l'Europe et des affaires étrangères, par la Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, le 3 octobre 2018.

* 8 Il s'agit de la Russie, la Thaïlande, les Philippines, le Cambodge, le Laos, la Birmanie, l'Indonésie et l'Inde. À plus long terme, l'Arabie saoudite et le Vietnam pourraient également bénéficier du dispositif de délivrance de visas en 48 heures. Depuis 2014, ce dispositif est en place pour la Chine (24 heures depuis le 1 er janvier 2016), Singapour, l'Afrique du sud, le Qatar, le Koweït, Bahreïn, Oman et la Turquie.

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