III. DES MESURES INSUFFISANTES POUR FAVORISER L'EMPLOI DES HABITANTS DES QUARTIERS PRIORITAIRES

Bien que le taux de chômage ait diminué pour la troisième année consécutive dans les quartiers prioritaires pour atteindre 24,7 %, il n'en demeure pas moins que ce taux demeure 2,7 fois supérieur au taux des unités urbaines englobantes. Le taux d'activité atteint 58,8 % contre 72,4 % dans les autres quartiers.

Néanmoins, selon les réponses au questionnaire budgétaire, la situation des jeunes se détériore. Après plusieurs années de baisse, le taux de jeunes chômeurs a augmenté en 2017 dans les QPV pour atteindre 16,4 % alors même que le taux de chômage global a continué à diminuer. Le taux de jeunes sans emploi, sans formation, sans études augmente également pour atteindre 29,5 %.

Dans son plan d'action présenté en juillet dernier, le Gouvernement a annoncé :

• l'investissement de plus de 2 milliards d'euros pour la formation vers l'emploi des jeunes sans qualification et des chômeurs de longue durée ;

• le déploiement des emplois francs en direction des demandeurs d'emploi résidant dans les quartiers, quels que soient leur âge et leur niveau de qualification ;

• l'accompagnement de 100 000 jeunes des quartiers dans leur insertion professionnelle, en mobilisant les Cordées de la réussite, le parrainage et le tutorat dès 2018 ;

• l'accompagnement aux entrepreneurs des quartiers avec BPI-France ;

• la création de clauses sociales spécifiques dans les chantiers des Jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ;

• le doublement du nombre d'apprentis issus des quartiers pour le porter à 35 000 jeunes ;

• au sein du Plan d'investissement compétences (PIC), l'investissement de près d'1,5 milliard d'euros dans la lutte contre l'illettrisme et l'illectronisme.

A. UNE AUGMENTATION DES CRÉDITS DE DROIT COMMUN ET DES CRÉDITS SPÉCIFIQUES EN MATIÈRE D'EMPLOI

1. Une augmentation des crédits de droit commun en matière d'emploi

Le document de politique transversale Ville liste la contribution des différents programmes à la politique de la ville. En matière d'emploi, il mentionne les programmes 102 et 103 de la mission « Travail et emploi ». Contrairement à l'an dernier, ces crédits budgétaires augmentent, ce dont votre rapporteure se félicite.

Source : Document de politique transversale Ville.

Plusieurs dispositifs contribuant à la politique de l'emploi sont retenus au titre du programme 102 de la mission « Travail et emploi ». Parmi les principaux, on citera :

- les contrats aidés du secteur non marchand : 54,4 millions d'euros en AE et 54,3 millions d'euros en CP ;

- l'Epide : 54,4 millions d'euros en AE et CP ;

- la garantie jeunes : 114,7 millions d'euros en AE et 113,1 millions d'euros en CP ;

- les dispositifs d'insertion par l'activité économique : 180,7 millions d'euros en AE et CP ;

- les missions locales : 31,7 millions d'euros en AE et CP.

Au titre du programme 103 de la mission « Travail et emploi », ont été recensés les crédits dédiés au financement des emplois francs.

Le Gouvernement a avancé l'idée d'un rapprochement à titre expérimental entre Pôle Emploi et les missions locales. Votre rapporteure estime qu'il s'agit d'une erreur majeure d'appréciation . En effet, Pôle Emploi n'a ni le temps pour aller chercher les jeunes dans les quartiers, ni le temps de les accompagner dans la durée.

Pour votre rapporteure, réduire le taux de chômage des quartiers suppose la mise en place d'actions de proximité en direction des habitants de ces quartiers, ce que ne permet pas l'organisation de Pôle Emploi. Les missions locales accompagnent plus d'1,36 million de jeunes dans leur accès à l'emploi, dont plus de 200 000 habitent un quartier prioritaire de la politique de la ville. La moitié des jeunes entrent en situation professionnelle et 98 180 bénéficient d'un contrat de travail, 51 180 d'actions de formation et 5 940 de contrats en alternance. Votre rapporteure souhaite le maintien de ces missions locales qui ont démontré leur compétence.

2. Une augmentation des crédits spécifiques en matière d'emploi du programme 147

Les crédits dédiés à l'emploi et au développement économique par le programme 147 sont répartis au sein de l'action 1 et de l'action 2. Ils représentent 101,5 millions d'euros pour 2019.

L'action 1 du programme a ainsi prévu 57,3 millions d'euros, 49,4 millions étant dédiés à l'emploi et 7,9 millions d'euros au développement économique.

Répartition des crédits de l'action 1 consacrés à l'emploi et au développement économique (en euros)

Source : réponse au questionnaire budgétaire.

Ces crédits ont augmenté dans une proportion moindre (+2,8 %) que les crédits prévus pour les autres piliers de l'action 1 . Leur part dans les crédits de l'action 1 baisse passant de 27,6 % à 22,5 %, ce qui est particulièrement regrettable à l'heure où le chômage des jeunes augmente dans les quartiers prioritaires. Le CGET a expliqué cette moindre augmentation par le fait que ces crédits avaient déjà bénéficié d'une importante augmentation l'an dernier.

Les crédits de l'action 2 « Revitalisation économique et emploi » diminuent de 12 % pour atteindre 44,2 millions d'euros. Si les crédits dédiés au fonctionnement de l'établissement public d'insertion de la défense (EPIDe) demeurent stables (28,8 millions d'euros), ceux dédiés à la compensation des exonérations de charges sociales pour les entreprises installées en zone franche urbaine (ZFU) diminuent en raison de l'extinction progressive de cette exonération (15,4 millions d'euros).

? EPIDe

Le maintien du niveau des crédits en 2019 pour l'EPIDe permettra de financer l'ouverture d'un nouveau centre près d'Alès fin 2020. Dans sa note d'analyse de l'exécution budgétaire 2017, la Cour des comptes a souligné que les sites dans lesquels l'EPIDe était implanté n'étaient pas « cohérents » avec la géographie prioritaire et a proposé de transférer la subvention à l'EPIDe prévu par le programme 147 au programme 102 de la mission « Travail et emploi ».

Évolution de la subvention versée à l'EPIDe en fonction des programmes budgétaires

Source : rapports annuels de performances annexés au projet de loi de règlement et d'approbation des comptes pour 2008, 2009, 2010, 2011, 2012, 2013, 2014, 2015, 2016 et 2017, projets annuels de performances annexés aux projets de loi de finances pour 2018 et 2019.

? Zones franches urbaines (ZFU)

Depuis 2015, le montant des compensations pour les ZFU a été sous-estimé. Le CGET a indiqué que ces difficultés résultaient :

- de l'absence d'évaluation du stock d'entreprises bénéficiaires du dispositif, certaines ayant pu basculer dans le droit commun ;

- de l'absence de mesure de l'évolution de la masse salariale des entreprises concernées.

La Cour des comptes a invité le Gouvernement à mettre en place une mission d'inspection IGF-IGAS auprès des caisses de sécurité sociale pour identifier les raisons pour lesquelles les entreprises ne demandent pas l'application des dispositifs du CICE.

? Agence France Entrepreneur

En matière d'accompagnement à l'entrepreneuriat, votre rapporteure constate l'extinction des crédits budgétaires de la mission « Économie » dédié au financement de l'Agence France Entrepreneur . Pour mémoire, les crédits du programme 147 dédié à l'appui à la création et à l'accompagnement des entreprises ont été transférés en 2016, au sein de la mission « Économie » afin que les crédits alloués à l'Agence soient réunis dans une seule et même mission. L'Agence avait vocation à coordonner les actions en faveur de l'entrepreneuriat dans les « territoires fragiles », comme les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Néanmoins, le Gouvernement a estimé que le bilan de l'agence était plutôt négatif et a décidé son intégration à compter du 1 er janvier 2019 au sein de BPI France. Votre rapporteure fera le bilan de cette intégration lors du prochain projet de loi de finances.

Page mise à jour le

Partager cette page