CHAPITRE II
LE DÉSENGAGEMENT ANNONCÉ DE L'ÉTAT DE CERTAINES ACTIONS TERRITORIALES EN FAVEUR DES ENTREPRISES ET DES CONSOMMATEURS

I. 2019 : LA MORT ANNONCÉE DU FISAC...

A. UN FONDS DÉPOURVU DE TOUTE AUTORISATION D'ENGAGEMENT POUR 2019

Après des années de baisse, le projet de loi pour 2019 sonne le glas du fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (Fisac), le projet annuel de performances « Économie » indiquant que celui-ci « est placé en gestion extinctive ».

De fait, le fonds serait désormais uniquement doté de crédits de paiement - pour un montant de 6,10 millions d'euros - cette somme ayant pour seule ambition d'assurer le paiement d'opérations territoriales ayant fait l'objet de décisions d'octroi de subventions au cours des années passées.

L'absence d'autorisations d'engagement au budget 2019 implique en effet l'impossibilité d'apporter des financements l'année prochaine pour des projets qui n'auraient pas été arrêtés antérieurement.

Évolution des dotations du Fisac

(en millions d'euros)

PLF 2007

PLF 2008

PLF 2009

PLF 2010

PLF 2011

PLF 2012

PLF 2013

PLF 2014

PLF 2015

PLF 2016

PLF 2017

PLF 2018

PLF 2019

Autorisations d'engagement

81,5

70

70

78

64

42,7

32,3

19,3

19,3

18,1

16,5

14

0

Crédits de paiement

81,5

60

60

64

64

42,7

32,3

19,3

16,9

13,1

10

11,03

6,1

Source : réponses aux questionnaires budgétaires.

Ainsi se termine l'évolution du Fisac, un dispositif que, depuis 2014, le Gouvernement n'a plus eu l'intention de faire vivre en lui coupant graduellement les crédits , alors même que les rapports d'évaluation du Gouvernement ont montré la pertinence de cet instrument d'intervention micro-économique à fort effet de levier. 5 ( * ) En effet, depuis 2007, les fonds du Fisac seront passés de 81,5 millions d'euros à 6,1 millions d'euros en crédits de paiement.

Et encore ces chiffres ne font-ils pas apparaître la réalité des financements opérés par le biais du Fisac, compte tenu des mesures de régulation budgétaires intervenant chaque année et frappant souvent directement le Fisac . Ainsi, en 2017, le montant des autorisations d'engagement voté en loi de finances initiale - fixé à 16,5 millions d'euros - a été réduit de telle sorte que la capacité de financement effectif du fonds a atteint seulement 9,9 millions d'euros...

B. UNE MISE EN EXTINCTION QUI VA À L'ENCONTRE DE L'OBJECTIF AFFICHÉ DE REDYNAMISATION DES CENTRES-VILLES ET CENTRES-BOURGS

L'extinction programmée du Fisac est d'autant moins compréhensible qu'elle intervient alors que le Gouvernement a diffusé le 30 mai 2018 un nouvel appel à projets pour bénéficier des sommes du fonds et qu'il présentait jusqu'alors le Fisac comme l'un des instruments financiers au soutien de son plan « Action coeur de ville » .

Ainsi, le site internet de la direction générale des entreprises dédié au Fisac expose toujours que « le Ministère de l'économie et des finances prend toute sa place dans l'effort collectif de redynamisation de l'offre commerciale dans les centres des villes moyennes, matérialisé par le plan « Action coeur de ville », en mobilisant notamment les financements du Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce (FISAC). » C'est d'ailleurs bien au regard de ces objectifs qu'a été défini l'appel à projets pour 2018 du Fisac, dont le règlement indique : « le FISAC donne dès cet appel à projets une priorité à la revitalisation des centres des villes objets d'une opération de revitalisation du territoire (ORT) ou d'une convention cadre pluriannuelle `Action coeur de ville' et financera notamment l'ingénierie commerciale nécessaire aux communes et intercommunalités. »

Priorités inscrites dans l'appel à projets 2018 du Fisac

1) Priorités thématiques

a) Opérations collectives :

- L'ingénierie nécessaire à la réussite des projets de redynamisation commerciale (conseils, diagnostics, accompagnements des commerçants, interventions de managers de centre-ville...) ;

- Le développement de l'usage des outils numériques par les commerçants et les artisans ;

- La modernisation, la diversification, l'accessibilité ainsi que la sécurisation des entreprises de proximité existantes.

b) Opérations individuelles en milieu rural :

- La création, la modernisation, la diversification, l'accessibilité physique et numérique ainsi que la sécurisation des commerces multiservices en zones rurales ;

- La création, la modernisation, la diversification, l'accessibilité physique et numérique ainsi que la sécurisation du dernier commerce du secteur d'activité concerné en zones rurales ;

- La création, la modernisation, la diversification, l'accessibilité physique et numérique ainsi que la sécurisation des stations-services qui assurent le maillage du territoire et dont la gestion est assurée par un exploitant indépendant ou par une commune.

2) Zones géographiques privilégiées

- Les communes classées en zones de revitalisation rurale (ZRR) ;

- Les villes moyennes engagées dans un processus contractuel avec l'État au titre d'une opération de revitalisation du territoire (ORT) ou d'une convention cadre pluriannuelle « action coeur de ville ».

Source : direction générale des entreprises.

Certes, le Gouvernement a expliqué qu'afin d'assurer en 2019 le financement de l'appel à projets du FISAC diffusé le 30 mai 2018, « des crédits non utilisés, initialement affectés à d'anciennes opérations dont le financement s'est finalement avéré moins élevé que prévu, seront mobilisés. Cet effort budgétaire permettra d'honorer les engagements de l'État ». Au cours de son audition par votre rapporteur, M. Jean-Philippe de Saint-Martin, secrétaire général de la direction générale des entreprises du ministère de l'économie et des finances, a précisé que les reliquats de crédits - constatés par le Régime social des indépendants (RSI), gestionnaire du Fisac - devraient s'élever à 10 ou 12 millions d'euros. Au total, les montants disponibles en 2019 pour financer les actions engagées à l'issue de la procédure d'appel à projets 2018 devraient donc être de l'ordre de 16 à 18 millions d'euros.

Il n'en reste pas moins que votre commission est d'autant plus opposée à cet arrêt définitif du Fisac que le Sénat avait au contraire entendu en faire l'un des éléments de la reconquête commerciale des centres-villes. L'article 8 de la proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs, présentée par MM. Martial Bourquin et Rémy Pointereau ainsi que 232 de nos collègues, adoptée à l'unanimité par le Sénat le 14 juin 2018, prévoyait ainsi d'élargir l'objet du fonds en le transformant en un « fonds pour la revitalisation par l'animation et le numérique des centres-villes et centres-bourgs », en fléchant prioritairement ses crédits sur les communes ayant adhéré à une opération de revitalisation locale.

Article 8 de la proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs

« Le fonds pour la revitalisation par l'animation et le numérique des centres-villes et centres-bourgs contribue prioritairement à la dynamisation du commerce de proximité dans les centres-villes et centres-bourgs.

« Les opérations éligibles aux aides du fonds sont prioritairement destinées à favoriser le recrutement de personnes chargées de l'animation commerciale des centres-villes et centres-bourgs, la transition numérique du commerce de proximité, la création, le maintien, la modernisation, l'adaptation, en particulier pour les travaux de mise aux normes, des établissements recevant du public, la transmission des entreprises commerciales et artisanales de proximité.

« Sont éligibles par priorité au fonds, les communes ou les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre signataires d'une convention relative à une opération de sauvegarde économique et de redynamisation mentionnée à l'article 1 er de la loi n° du portant pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs.

« Les maires des communes et les présidents des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre signataires d'une convention relative à une opération de sauvegarde économique et de redynamisation constituent une commission placée aux côtés du représentant de l'État dans le département. Elle fixe chaque année les catégories d'opérations prioritaires et les taux minimaux et maximaux de subvention applicables à chacune d'elles.

« Le représentant de l'État dans le département arrête chaque année, suivant les catégories et dans les limites fixées par la commission, la liste des opérations à subventionner ainsi que le montant de la subvention de l'État qui leur est attribuée. Il porte à la connaissance de la commission la liste des opérations qu'il a retenues.

« Un décret détermine les modalités d'attribution des concours financiers du fonds dans le cadre d'un guichet unique placé auprès du représentant de l'État dans le département. »

Texte n° 125 (2017-2018, Sénat), adopté le 14 juin 2018.


* 5 Le rapport d'activité sur le Fisac (1992-2016) indique en effet : « Il semble donc que les entreprises aidées par le FISAC soient plus pérennes que la moyenne constatée par l'INSEE pour les entreprises de commerce qui repose sur un échantillon plus large et sans restriction géographique sur la taille des communes . (...) Au final, on peut considérer que le FISAC contribue directement ou indirectement à la pérennité de la dernière activité commerciale dans plus de 8 communes rurales sur 10. »

Page mise à jour le

Partager cette page