II. LA RÉNOVATION DES RELATIONS FINANCIÈRES ENTRE L'ÉTAT ET LA SÉCURITÉ SOCIALE (ART. 36 DU PLF ET ART. 19 DU PLFSS 2019)

A. LA RÉNOVATION DES RELATIONS FINANCIÈRES ENTRE L'ÉTAT ET LA SÉCURITÉ SOCIALE

1. Jusqu'à présent, l'État compensait toute mesure affectant les recettes ou charges de la sécurité sociale, selon le « principe général de compensation »

En principe , dès lors que les exonérations et les allègements résultent de politiques décidées par l'État, leur compensation est nécessaire pour éviter des transferts de charges entre l'État et les organismes de sécurité sociale . Le principe de compensation des exonérations de cotisations sociales par l'État est régi par l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale , au terme duquel l'État doit compenser intégralement aux régimes de sécurité sociale concernés :

- toute mesure de réduction ou d'exonération de cotisation , « pendant toute la durée de leur application ». Cette règle concerne également toute mesure de réduction ou d'abattement d'assiette ;

- tout transfert de charges opéré entre l'État et les régimes et organismes de protection sociale .

Conformément au IV de l'article LO. 111-3 du même code , seules les lois de financement de la sécurité sociale peuvent déroger au principe général de compensation . En 2018, les dispositifs d'allègements généraux de cotisations sociales et les mesures d'exonérations ciblées représentent un montant total estimé à 38,7 milliards d'euros pour l'ensemble des régimes obligatoires de sécurité sociale, en hausse de 2 % par rapport à 2017. Le montant des exonérations ciblées est évalué à 7,1 milliards d'euros, dont 0,9 milliard d'euros de mesures non compensées.

En outre, l'article L. 131-7 précité liste un certain nombre d'exceptions au principe général de compensation intégrale à l'euro l'euro , parmi lesquelles les allègements généraux de cotisations patronales de sécurité sociale mais aussi les principales mesures du Pacte de responsabilité et de solidarité. Ces mesures font pourtant bien l'objet d'une compensation par l'État mais celle-ci n'est pas effectuée à l'euro l'euro en d'autres termes, aucune dette de l'État n'est constatée si la perte de recettes est supérieure à la prévision initiale - ce qui correspond à une dérogation au principe de compensation de droit commun.

2. Le rapport Charpy-Dubertret propose de faire évoluer ce principe, dans le cadre d'une rénovation des relations financières entre l'État et la sécurité sociale

L'article 27 de la loi programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 39 ( * ) a prévu que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur la rénovation des relations financières entre l'État et la sécurité sociale , avant la fin du premier trimestre 2018. Celui-ci devait préciser les modalités concrètes de participation de la sécurité sociale au redressement des finances publiques .

Dans ce cadre, le Gouvernement a confié à MM. Charpy et Dubertret une mission préparatoire de réflexion sur ce thème, donnant lieu à la remise d'un rapport au Parlement l e 8 octobre dernier.

Ce rapport 40 ( * ) préconise, pour l'avenir, un partage entre l'État et la sécurité sociale du coût des baisses de prélèvements obligatoires en fonction de l'affectation de ces derniers, sans qu'il soit nécessaire ensuite de procéder à des transferts de compensation dans un sens ou dans l'autre. Il répond ainsi au souhait du Gouvernement de faire évoluer les modalités d'application du principe de compensation intégrale des pertes de la sécurité sociale .

Les nouvelles relations financières entre l'État et la sécurité sociale s'articuleraient autour de trois principes :

- une prise en charge intégrale par l'État des exonérations spécifiques de cotisations, par crédits budgétaires, pour compenser les pertes de recettes de la sécurité sociale (voir infra ) ;

- une simplification des transferts financiers et notamment une rationalisation des recettes fiscales de la sécurité sociale , en restituant à l'État l'ensemble des recettes qui ne sont ni des cotisations sociales ou de la CSG, ni des recettes visant à se substituer à des cotisations, ni des taxes comportementales ou constitutives de leviers directs sur les politiques de sécurité sociale. L'ensemble des recettes qui seraient réaffectées au budget de l'État auraient vocation à être compensées par un transfert de TVA ;

- une solidarité financière entre les deux sphères, impliquant le partage des baisses de la fiscalité, dans le contexte d'un retour durable à l'équilibre de la sécurité sociale, du maintien d'un déficit budgétaire de l'État élevé et d'un renforcement des dispositifs d'allègement du travail. Les baisses de prélèvements obligatoires seraient assumées à la fois par l'État et la sécurité sociale sans donner lieu à des compensations croisées.

Le présent article et l'article 36 du projet de loi de finances mettent en oeuvre ces principes comme suit :

- les pertes de recettes résultant de mesures adoptées en loi de financement de la sécurité sociale pour 2018 seront intégralement compensées par l'État ;

- après leur refonte pour tenir compte des nouveaux allègements généraux, les exonérations spécifiques de cotisations seront toujours prises en charge par l'État (par crédits budgétaires) ;

- les baisses de prélèvements obligatoires décidées en lois financières pour 2019 ne donneront pas lieu à compensation ;

- les mesures de transfert entre l'État et la sécurité sociale donneront lieu à l'affectation d'une fraction de TVA supplémentaire ;


* 39 Loi n° 2018-32 du 22 janvier 2018 de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022

* 40 Rapport de la mission d'information confiée à MM. Charpy et Dubertret, « Les relations financières entre l'État et la sécurité sociale », remis au Parlement le 8 octobre 2018.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page