EXAMEN DES ARTICLES

TITRE IER - CRÉER UNE AGENCE NATIONALE POUR LA COHÉSION DES TERRITOIRES
Article 1er (sous-section 1 bis [nouvelle] du code général des collectivités territoriales) - Statut et missions de l'Agence nationale pour la cohésion des territoires

Objet : cet article, dont l'examen au fond a été délégué à votre commission, vise à créer une Agence nationale de la cohésion des territoires, dans une logique de guichet unique, pour reconstituer une capacité locale d'ingénierie et faciliter l'accès des collectivités territoriales aux ressources et conseils de l'État.

I. Le droit en vigueur

L'idée de créer une Agence nationale de la cohésion des territoires, permettant de renforcer le pilotage de la politique d'aménagement du territoire et d'offrir aux collectivités territoriales un guichet unique pour les accompagner en ingénierie dans leurs projets, n'est pas nouvelle. Il y a un an à peine, votre commission attirait déjà l'attention du Gouvernement sur la nécessité de donner un nouveau souffle à la politique de cohésion territoriale dans leur rapport d'information fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable 17 ( * ) .

À l'heure actuelle, néanmoins, la structure permettant à la fois d'impulser une politique d'aménagement et de développement pour les territoires ruraux et périurbains et de les aider dans la réalisation de leurs projets territoriaux, fait défaut. Si le Président de la République a annoncé, à l'occasion de la Conférence nationale des territoires du 17 juillet 2017 , la création prochaine d'une telle structure, dans une logique de « guichet unique » pour soutenir le développement des territoires, la concrétisation de ce projet n'est toujours pas intervenue.

Les différents opérateurs intervenant dans le cadre de la politique de la ville et de l'aménagement du territoire (Agence nationale pour la rénovation urbaine, Commissariat général à l'égalité des territoires, Agence nationale de l'habitat, Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux, Agence du numérique) revêtent des formes juridiques différentes : soit celle d'un établissement public administratif (Anah), soit celle d'un établissement public à caractère industriel et commercial (ANRU, EPARECA), soit celle d'un service à compétence nationale (Agence du numérique) ou d'un service d'administration centrale (CGET).

Ils s'inscrivent le plus souvent dans des logiques d'intervention sectorielles , qui marquent une stricte application du principe de spécialité applicable aux établissements publics en tant que principe général du droit 18 ( * ) . En outre, comme le relevaient différents rapports, tant du Conseil d'État 19 ( * ) que de l'Inspection générale des finances 20 ( * ) , la création de ces établissements et agences, dont le recensement exhaustif n'est d'ailleurs pas aisé, n'a pas fait l'objet d'une stratégie d'ensemble et a souvent répondu à des impératifs politiques ponctuels.

LES CONSÉQUENCES DE LA NATURE JURIDIQUE RETENUE
POUR L'AGENCE NATIONALE DE LA COHÉSION DES TERRITOIRES

Un établissement public (EP) est une personne morale de droit public disposant d'une autonomie administrative et financière afin de remplir une mission d'intérêt général, précisément définie, sous le contrôle de la collectivité publique dont il dépend (État, région, département ou commune). Il dispose donc d'une forme de souplesse qui lui permet de mieux assurer certains services publics. Il ne doit pas être confondu avec un établissement d'utilité publique qui relève du droit privé.

Les EP sont soumis à trois principes :

- l'autonomie : dotée de la personnalité morale, leur organisation est très variable (conseil d'administration, président, directeur...) et ils disposent d'un budget propre (subventions de l'État ou des collectivités territoriales, redevances des usagers, emprunts...) ;

- le rattachement à un niveau de l'administration (État, région, département ou commune) : afin de compenser leur autonomie en les soumettant au contrôle de ce niveau d'administration dont les modalités peuvent varier. On distingue ainsi des établissements publics nationaux, rattachés à l'État, et des établissements publics locaux rattachés à une commune (comme les caisses des écoles et les centres communaux d'action sociale), un département ou une région. Mais l'identité de l'administration de rattachement ne détermine pas la zone géographique d'action de l'établissement public. Ainsi un établissement public local peut avoir un champ d'action à l'échelle nationale ;

- la spécialité : les compétences des organes de l'EP se limitent à des compétences clairement énumérées.

Le statut d'EPIC, formé à partir de l'arrêt de principe du Tribunal des conflits Société commerciale de l'Ouest africain 21 ( * ) , emporte, dans la majorité des cas, une large soumission au droit privé . À défaut d'une qualification claire par la loi, c'est la méthode du faisceau d'indices qui est utilisée pour distinguer un service public administratif d'un service public industriel et commercial 22 ( * ) . Généralement conçu comme un gage de souplesse et de performance pour la mise en oeuvre des missions de l'opérateur, ce statut permet à l'établissement d'assurer des prestations de services rémunérées, qui contribuent à son autonomie financière. En cas de contentieux, la nature du service doit prévaloir sur celle de l'établissement.

Interrogés par votre rapporteur, le Gouvernement et l'administration ne sont pas en mesure, à ce stade, de préciser les contours des missions, le statut juridique et le périmètre d'intervention de la future ANCT, dont Serge Morvan, le nouveau Commissaire général à l'égalité des territoires doit assurer la préfiguration, à la demande du Premier ministre.

Si le Gouvernement et le CGET estiment que l'ANCT doit jouer un rôle d' « agrégateur » des différentes compétences de l'État liées à la cohésion des territoires, aucune option n'est arrêtée concernant une éventuelle reprise, par l'ANCT, des missions d'autres établissements publics intervenant sur des périmètres thématiques connexes.

Pourtant, le CGET affirme vouloir rationaliser les interventions de l'État sur ces sujets et éviter une juxtaposition des opérateurs, sans vision stratégique d'ensemble. Cette ambition intégratrice, louable, s'appuierait également sur une forte déconcentration des politiques de soutien en ingénierie et en développement économique et social.

II. La proposition de loi

Le présent article a pour objet de créer l'Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) qui, selon les auteurs de la proposition de loi, doit « aider nos territoires ruraux à trouver un nouveau souffle ».

Le premier alinéa précise que cette agence est dotée de la personnalité morale avec le statut d'établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC).

Le deuxième alinéa précise l'objet social de la future Agence, qui doit contribuer au développement économique et social des territoires ruraux et périurbains, en apportant son concours humain et financier aux collectivités territoriales et à leurs groupements et à tout organisme public ou privé qui s'inscrit dans le champ de ses missions, qui sont les suivantes :

- assurer le maintien et le développement des services publics ;

- garantir le développement des infrastructures ferroviaires et routières, ainsi que des services de transports ;

- accompagner le déploiement et l'entretien des réseaux et services de communications électroniques ;

- favoriser le développement de l'offre de soins.

Le troisième alinéa dispose que l'agence peut apporter son concours à tout projet dont la maîtrise d'ouvrage est assurée par les collectivités territoriales et leurs groupements.

Enfin, le dernier alinéa précise les conditions de ces interventions : l'agence doit, dans l'emploi de ses moyens et la fixation de ses priorités, tenir compte de la situation financière et de la richesse des territoires ainsi que de l'effort fiscal demandé à la population locale.

III. La position de votre commission pour avis

Votre rapporteur pour avis approuve l'approche retenue par les auteurs de la proposition de loi, pour ce qui concerne tant le statut juridique de la future Agence, qu'il estime adapté à la diversité des situations qu'elle pourrait rencontrer, que ses missions. Il souscrit également à l'objectif d'une intervention différenciée de l'Agence en fonction des situations que connaissent les territoires, garantie que les territoires les plus fragiles seront bien soutenus.

Votre rapporteur pour avis a néanmoins souhaité compléter les compétences de l'Agence, notamment pour intégrer la problématique des centres-bourgs, et souligner l'importance de la transition énergétique et écologique pour le développement des territoires. Les réflexions et débats entourant de nouveaux modes de production et de mobilité, plus durables, constituent une formidable opportunité pour les territoires, de nature à recréer du lien social local et à restaurer des circuits économiques de proximité, qui ont eu tendance à disparaître au cours des dernières décennies.

Votre commission a ainsi adopté l'amendement COM-61, qui traduit cette ambition.

Votre commission propose à la commission des lois d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 2 - Champ d'intervention de l'Agence nationale de la cohésion des territoires

Objet : cet article, dont l'examen au fond a été délégué à votre commission, vise à déterminer le champ d'intervention de l'Agence nationale pour la cohésion des territoires (ANCT).

I. Le droit en vigueur

À l'heure actuelle, il n'existe pas d'opérateur spécifiquement dédié aux besoins d'ingénierie des territoires ruraux et périurbains et à l'objectif de garantie de la cohésion territoriale entre ces derniers et les métropoles et villes.

La création de l'Agence nationale pour la cohésion des territoires vise donc à favoriser un développement économique équilibré, durable et harmonieux des territoires urbains, périurbains et ruraux.

L'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) cible son action sur les 751 zones urbaines sensibles existantes (ZUS), notamment sur les quartiers les plus fragiles dans le cadre du programme national pour la rénovation urbaine (PNRU) institué par la loi du 1 er août 2003 pour la ville et la rénovation urbaine 23 ( * ) et qui représente un investissement de 47 milliards d'euros.

L'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (Acsé ), créée par la loi du 31 mars 2006 24 ( * ) , a vu ses missions transférées à l'État au 1 er janvier 2015 25 ( * ) : elles sont désormais assurées au sein du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET).

L'Agence nationale de l'habitat (Anah) , créée par le décret n° 71-806 du 29 septembre 1971, intervient à travers différents programmes de rénovation de bâtiments dégradés et de revitalisation de quartiers fragiles et déploie près de 800 millions d'euros en budget d'intervention pour 2018.

L'Établissement public national d'aménagement et de restructuration des espaces commerciaux et artisanaux (Epareca) , créé en 1996 26 ( * ) , intervient en tant que promoteur, investisseur et accompagnateur des collectivités territoriales dans leurs besoins d'équipements commerciaux et artisanaux de proximité. Il bénéficie de près de 6 millions d'euros de subventions pour charges de service public et devrait engager environ 80 millions d'euros d'investissements dans le cadre d'un programme spécifique 27 ( * ) .

Le Programme Action coeur de ville , annoncé par le ministre de la Cohésion des territoires le 27 mars dernier, cible 222 villes moyennes et devrait mobiliser plus de 5 milliards d'euros sur cinq ans 28 ( * ) .

Enfin, la Banque des territoires , dont le lancement a été officialisé par la Caisse des dépôts et consignations le 30 mai dernier, vise à s'inscrire en complémentarité des acteurs existants et à intervenir en amont de la définition des besoins des territoires, avec un appui en ingénierie, puis au stade du financement des projets. Elle prévoit d'apporter en moyenne 20 milliards d'euros par an aux territoires, sous la forme de prêts et d'investissements sur fonds propres.

II. La proposition de loi

Le présent article prévoit que l'Agence nationale de la cohésion des territoires intervient sur le territoire des communes et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre qui sont éligibles à la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR) , mentionnée à l'article L. 2234-32 du code général des collectivités territoriales. Ce champ d'intervention, qui répond à des critères géographiques , de densité démographique et de richesse , permettra également aux départements et aux régions d'être associés aux actions qui seront mises en oeuvre par l'Agence dans les domaines numérique, sanitaire et social, économique et de transition énergétique et écologique.

Interrogée par votre rapporteur pour avis, la Direction générale des collectivités locales (DGCL) précise que 34 389 communes et 1 120 EPCI à fiscalité propre sont éligibles à cette dotation . Ce large champ d'intervention correspond à la vocation de l'Agence de soutenir en priorité les petites communes, les territoires ruraux, les bourgs et les périphéries urbaines qui cumulent difficultés économiques et sociales et besoins en ingénierie.

III. La position de votre commission pour avis

Votre rapporteur pour avis se félicite que les auteurs de la proposition de loi se soient référés à la DETR pour la définition du champ d'action de la future ANCT, alors que les projets du Gouvernemen t ont tendance à négliger, à ce stade, les territoires ruraux et périurbains.

Cette disposition apparaît donc essentielle pour permettre à de très nombreuses collectivités, qui rencontrent des difficultés pour répondre aux appels à projets et qui ne sont pas destinataire d'un programme ministériel spécifique, de poursuivre leur développement.

Votre rapporteur pour avis souhaite néanmoins préciser la rédaction actuelle de l'article sur trois points. Il s'agit tout d'abord de renforcer la coordination entre les actions de l'ANCT et celles des autres services de l'État, en particulier celles menées à destination des collectivités territoriales, en prenant appui sur la conférence territoriale de l'action publique créée par la loi du 7 août 2015 29 ( * ) . Il a, en outre, proposé à votre commission de prévoir que l'action de l'ANCT prend en compte les schémas de planification régionaux . Enfin, afin que la création de l'ANCT ne se traduise pas in fine par la juxtaposition d'une nouvelle structure aux entités qui évoluent sur des périmètres connexes, votre rapporteur pour avis a suggéré de prévoir la possibilité de rattacher d'autres établissements publics de l'État (ANRU, Anah, ADEME, EPARECA, CEREMA par exemple) à l'Agence .

Sous le bénéfice de ces observations, votre commission a adopté l'amendement COM-62.

Votre commission propose à la commission des lois d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 3 - Création de filiales et participation au capital
d'organismes publics ou privés

Objet : cet article, dont l'examen au fond a été délégué à votre commission, prévoit que l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) peut créer des filiales et intervenir au capital d'organismes actifs dans le champ de ses missions, déterminées par l'article 1 er de la présente proposition de loi.

I. Le droit en vigueur

Afin d'exercer au mieux leurs compétences, certains établissements publics créent des filiales et prennent des participations au capital de sociétés, de groupements ou d'organismes qui opèrent dans le champ de leurs missions.

Cette possibilité a notamment été prévue pour l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) par l'article 3 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, qui a complété les dispositions de l'article 10-3 de la loi précitée du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

II. La proposition de loi

Le présent article prévoit la possibilité pour l'ANCT de créer ou céder des filiales, d'acquérir, d'étendre ou de céder des participations dans des sociétés, groupements ou organismes actifs dans ses domaines de compétence : maintien et développement des services publics dans les territoires ruraux et périurbains, développement des infrastructures ferroviaires, routières et plus largement des services de transport, établissement des réseaux et services de communications électroniques et développement de l'offre de soins.

III. La position de votre commission pour avis

Votre commission est favorable à cette disposition, qui doit permettre à la future ANCT de répondre au mieux aux besoins des territoires ruraux et périurbains. L'association de l'ANCT au capital de sociétés locales, par exemple, est de nature à accélérer la mise en oeuvre des programmes de développement économique et social durable locaux.

Votre rapporteur souligne, à la suite des observations formulées par la Cour des comptes en juin 2014 dans son rapport consacré à l'ANRU 30 ( * ) , que ces décisions de création d'entités et de prise de participation doivent néanmoins faire l'objet d'une évaluation préalable approfondie , pour évaluer les risques auxquels elles exposent l'agence et la valeur ajoutée qu'elles apportent par rapport à l'action d'autres opérateurs.

Votre commission propose à la commission des lois d'adopter cet article sans modification.

Article 4 - Action internationale de l'Agence

Objet : cet article, dont l'examen au fond a été délégué à votre commission, créé un cadre pour une action internationale de l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT).

I. Le droit en vigueur

Certains établissements publics industriels et commerciaux ont reçu de la loi une compétence pour conduire une action à l'échelle internationale. Il en va ainsi, par exemple, de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU), aux termes de l'article 10-4 de la loi du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine 31 ( * ) , et, dans une moindre mesure, de l'Agence française pour la biodiversité, aux termes de l'article L. 131-9 du code de l'environnement.

II. La proposition de loi

Le présent article prévoit, sur le même modèle que l'ANRU, que l'ANCT est « habilitée à entreprendre des actions concourant à promouvoir l'expertise française en matière d'aménagement et de développement équilibré des territoires. À ce titre, elle est habilitée à participer à l'élaboration et à la mise en oeuvre d'accords de coopération internationale et à réaliser des prestations de services rémunérés ».

III. La position de votre commission pour avis

Votre rapporteur pour avis relève que cette faculté peut être exercée par l'Agence, dans le respect du principe de spécialité et de son objet social, sans qu'il soit utile de le préciser dans la loi.

En outre, il souhaite que l'Agence se concentre avant tout sur ses missions de développement économique et social durable dans les territoires , avant d'envisager son positionnement à l'échelle internationale. C'est pourquoi notre commission a adopté l'amendement COM-63 de suppression de l'article.

Votre commission propose à la commission des lois de supprimer cet article.

Article 5 - Conseil d'administration de l'Agence

Objet : cet article, dont l'examen au fond a été délégué à votre commission, fixe les modalités d'administration de la future Agence nationale de la cohésion des territoires.

I. Le droit en vigueur

Les établissements publics sont généralement administrés par un conseil d'administration, parfois secondé par un conseil de surveillance. Les membres qui y siègent sont choisis en fonction de leur compétence et représentent les différentes parties prenantes aux missions assumées par l'établissement. Si la fixation du nombre de leurs membres revêt un caractère réglementaire, la structure des différents collèges peut être fixée par la loi.

Plusieurs modèles sont possibles, mais les conseils d'administration des établissements publics administratifs ou industriels et commerciaux font généralement intervenir plusieurs collèges.

À titre d'exemple, le conseil d'administration de l' Agence française pour la biodiversité compte, parmi les membres à voix délibérative : un collège de représentants de l'État, un collège de représentants des établissements publics nationaux, un collège de personnalité qualifiées, des représentants des secteurs économiques concernés, des représentants des associations agréées de protection de l'environnement ou d'éducation à l'environnement et des gestionnaires d'espaces naturels, des représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements, des représentants de l'Assemblée nationale et du Sénat ainsi que des représentants du personnel 32 ( * ) .

L'Agence nationale pour l'habitat présente une organisation plus simple : un collège composé des représentants de l'État et de ses établissements publics, un collège d'élus et de représentants locaux et un collège de personnalités qualifiées.

La présence de représentants du personnel peut également s'avérer nécessaire.

II. La proposition de loi

Le présent article fixe l'administration et l'organisation déconcentrée de la future Agence nationale de la cohésion des territoires.

Son premier alinéa précise que l'Agence est administrée par un conseil d'administration dont les membres se composent, à parité, de représentants de l'État et de représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements.

Le second alinéa dispose que le représentant de l'État dans le département est le délégué territorial de l'Agence et qu'il peut subdéléguer ses attributions et sa signature, par exemple au secrétaire général de la préfecture ou aux sous-préfets d'arrondissement, dans des conditions qui restent à préciser par décret.

III. La position de votre commission pour avis

Votre commission pour avis souhaite apporter plusieurs précisions relatives au conseil d'administration.

S'agissant de la composition du conseil d'administration, elle souhaite que des parlementaires y soient présents . Votre rapporteur pour avis propose également à votre commission de prévoir l'application des règles de parité homme/femme dans la composition du conseil et des différents organes de direction de l'Agence : ces deux précisions ont été adoptées par votre commission dans l'amendement COM-65.

Enfin, dans l'esprit des auteurs de la proposition de loi comme dans celui de votre rapporteur, le conseil d'administration de l'agence doit jouer un rôle de premier plan dans l'orientation de ses actions . Au-delà des conditions générales d'organisation, de fonctionnement et de gestion administrative et financière de l'établissement (rapport annuel, prévisions de recettes et de dépenses, bilan annuel, compte de résultats, conclusion d'emprunts, création de filiales, gestion des biens immobiliers et prises, extensions ou cessions de participations financières), le conseil d'administration est responsable de la mise en oeuvre des contrats d'objectifs avec l'État et des programmes de politique publique dont le ministre de tutelle a la charge . Il est essentiel que cette volonté du législateur trouve une traduction réglementaire.

Votre commission propose à la commission des lois d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 6 - Ressources de l'Agence nationale pour la cohésion des territoires

Objet : cet article, dont l'examen au fond a été délégué à votre commission, vise à déterminer les recettes de l'Agence nationale pour la cohésion des territoires.

I. Le droit en vigueur

Les ressources prévues pour les établissements publics à caractère industriel et commercial (EPIC) sont comparables d'un établissement à l'autre.

Ainsi, aux termes de l'article L. 131-14 du code de l'environnement 33 ( * ) , l' Agence française pour la biodiversité voit son financement assurer par :

« 1° Des subventions et contributions de l'État et, le cas échéant, des gestionnaires d'aires marines protégées et des collectivités territoriales et de leurs groupements ;

2° Les contributions des agences de l'eau prévues au V de l'article L. 213-9-2 ;

3° Toute subvention publique ou privée ;

4° Les dons et legs ;

5° Le produit des ventes et des prestations qu'elle effectue dans le cadre de ses missions ;

6° Des redevances pour service rendu ;

7° Les produits des contrats et conventions ;

8° Les revenus des biens meubles et immeubles ;

9° Le produit des aliénations ;

10° D'une manière générale, toutes les recettes autorisées par les lois et règlements. »

Autre exemple, les recettes de l' Agence nationale pour la rénovation urbaine sont constituées, aux termes de l'article 12 de la loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine 34 ( * ) par :

« 1° Les subventions de l'État ;

2° Les contributions de la société mentionnée à l'article L. 313-19 du code de la construction et de l'habitation ;

3° Les subventions de la Caisse des dépôts et consignations ;

4° (Abrogé) ;

5° Le produit des emprunts qu'elle est autorisée à contracter, dans la limite d'un plafond fixé par décret ;

6° La rémunération des prestations de service de l'agence, les produits financiers, les produits de la gestion des biens entrés dans son patrimoine et le produit de la vente des biens et droits mobiliers et immobiliers ;

7° Les dons et legs ;

8° Exceptionnellement, en 2011,2012 et 2013, une fraction, fixée conformément au plafond prévu au I de l'article 46 de la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, du produit de la taxe locale sur les locaux à usage de bureaux, les locaux commerciaux et les locaux de stockage, affecté à l'établissement public " Société du Grand Paris ", créé par l'article 7 de la loi n° 2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand Paris, en application du C du I de l'article 31 de la loi n° 2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificative pour 2010 ;

9° Les dividendes et autres produits des participations qu'elle détient dans ses filiales ou dans les sociétés dans lesquelles elle détient une participation ;

10° Les concours financiers de la Caisse de garantie du logement locatif social ;

11° Les contributions issues du fonds mentionné au premier alinéa de l'article L. 452-1-1 du code de la construction et de l'habitation.

Le législateur prévoit généralement plusieurs sources de financement pour les établissements publics porteurs d'une mission d'intérêt général, leur permettant de mieux participer à des projets qui associent une importante diversité d'acteurs publics et privés.

II. La proposition de loi

Sur un modèle comparable à celui des établissements publics susmentionnés, le présent article prévoit que les recettes de la future Agence nationale de cohésion des territoires (ANCT) sont formées par :

1° Les subventions de l'État ;

2° Les subventions de la Caisse des dépôts et consignations ;

3° Le produit des emprunts qu'elle est autorisée à contracter, dans la limite d'un plafond fixé par décret ;

4° La rémunération des prestations de service de l'agence, les produits financiers, les produits de la gestion des biens entrés dans son patrimoine et le produit de la vente des biens et droits mobiliers et immobiliers ;

5° Les dividendes et autres produits de participations ;

6° Les dons et legs.

III. La position de votre commission pour avis

Votre rapporteur est favorable à ce que les financements de l'Agence nationale de la cohésion des territoires reflètent la réalité et l'étendue de ses missions . Aussi, le périmètre retenu pourrait être enrichi et c'est le sens de l'amendement COM-64 qui prévoit, comme pour l'Agence française pour la biodiversité, que d'autres recettes autorisées par les lois et les règlements pourront être affectées à l'Agence .

Dans le droit fil de cette idée, votre rapporteur pour avis souligne qu'il serait particulièrement opportun d'intégrer plusieurs ressources dans le financement de l'ANCT, en cohérence avec son rôle dans les territoires et son objet social .

Ainsi, à l'occasion de la prochaine loi de finances, il pourrait être prévu de lui affecter, la taxe sur les friches commerciales (article 1530 du code général des impôts et créée par la loi du 30 décembre 2006 de finances rectificative pour 2006 35 ( * ) ).

En outre, votre rapporteur pour avis salue la réflexion engagée par nos collègues Rémy Pointereau et Martial Bourquin , dans leur proposition de loi portant Pacte national de revitalisation des centres-villes et centres-bourgs 36 ( * ) . Les articles 26 et 27 de ce texte prévoient ainsi la création de deux nouvelles taxes (contribution pour la lutte contre l'artificialisation des terres et taxe sur les livraisons liées au commerce électronique), insérées dans la section VII du chapitre I er du titre I er de la deuxième partie du livre Ier du code général des impôts. De telles taxes pourraient utilement contribuer à la montée en puissance de l'Agence et s'inscrivent en cohérence avec ses missions.

Votre commission propose à la commission des lois d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 7 - Décret en Conseil d'État

Objet : cet article, dont l'examen au fond a été délégué à votre commission, prévoit qu'un décret en Conseil d'État détermine l'organisation et le fonctionnement de l'Agence nationale pour la cohésion des territoires.

I. Le droit en vigueur

L'intervention d'un décret en Conseil d'État est souvent nécessaire pour compléter la création ou la transformation d'un établissement public , même en dehors des cas où il est prévu par une loi si l'on entend déroger à des dispositions fixées par décret en Conseil d'État.

En général, ces décrets comportent quatre titres, consacrés respectivement aux dispositions générales, à l'organisation et au fonctionnement de l'établissement public en question, à son régime financier et à des dispositions diverses.

Il s'agit, notamment de préciser :

- le ministre de tutelle , qui doit assurer, dans ses missions, le service public dont il est prévu de confier la gestion ;

- les missions de l'établissement , au regard du respect du principe de spécialité, qui signifie que la personne morale en cause n'a pas de compétence générale 37 ( * ) ;

- le siège de l'établissement ;

- le régime administratif de l'établissement et le fonctionnement de ses organes dirigeants (conseil d'administration, direction, conseil de surveillance) ainsi que sa structure. L'effectif des membres du conseil d'administration doit ainsi être précisé par décret, de même que ses attributions et la fréquence de ses réunions ;

- les pouvoirs du responsable exécutif de l'établissement , dont la fonction peut être distincte ou cumulée avec celle de président du conseil d'administration ;

- l' organisation interne de l'établissement, notamment son régime financier, la structure des services et le recrutement des personnels. Il conviendrait également d'identifier et de désigner les services de l'État qui apporteront leur concours au fonctionnement de l'Agence dans les territoires ;

- enfin, la procédure nécessaire à la dissolution éventuelle de l'établissement et notamment les règles de consultation.

En outre, plusieurs textes s'imposent aux établissements publics : il en va ainsi de la loi n° 83-675 du 26 juillet 1983 relative à la démocratisation du secteur public pour ce qui concerne la composition et le fonctionnement de certains conseils d'administration, également la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public et le décret n° 79-153 du 26 février 1979 relatif à la durée du mandat de président et de dirigeant des établissements publics.

II. La proposition de loi

Comme c'est le cas pour la plupart des établissements publics, le présent article prévoit qu'un décret en Conseil d'État détermine l'organisation et le fonctionnement de l'Agence nationale pour la cohésion des territoires ainsi que la façon dont les services de l'État apporteront leur concours à son fonctionnement.

Les deux délégués territoriaux de l'ANCT (préfet et secrétaire général de la préfecture sans doute) pourront s'appuyer sur les directions départementales des territoires et de la mer (DDT(M)) et rendre des avis adressés au directeur général de l'ANCT pour l'instruction des projets. Un comité ad hoc pourrait examiner les projets et préparer les décisions du conseil d'administration avant que celles-ci soient mises en oeuvre par les services déconcentrés de l'État.

III. La position de votre commission pour avis

Votre rapporteur pour avis souhaite souligner la nécessité, pour le pouvoir réglementaire, de respecter l'esprit de la loi, qui a notamment pour objet de faire du conseil d'administration une instance majeure dans le pilotage et la mise en oeuvre des actions de la future Agence nationale de la cohésion des territoires. Il ne s'agit pas, en effet, comme c'est le cas parfois dans certains établissements publics, que le conseil d'administration ait un rôle essentiellement administratif et de gestion . Tout l'intérêt de l'Agence et l'ambition de la proposition de loi sont, au contraire, de faire de cette instance un espace de décision stratégique , en associant l'État, les représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements et les parlementaires.

Votre commission propose à la commission des lois d'adopter cet article sans modification.


* 17 Aménagement du territoire : plus que jamais une nécessité . Rapport de MM. Hervé Maurey et Louis-Jean de Nicolaÿ au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, enregistré à la Présidence du Sénat le 31 mai 2017.

* 18 CE, Sect., 4 mars 1938, Consorts le Clerc.

* 19 Étude annuelle 2012, Les agences : une nouvelle gestion publique ?

* 20 Rapport n° 2011-M-044-01, L'État et ses agences, mars 2012.

* 21 TC, 22 janvier 1921.

* 22 CE, 16 novembre 1956, 26549, Union syndicale des industries aéronautiques.

* 23 Loi n° 2003-710 du 1 er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

* 24 Loi n° 2006-396 du 31 mars 2006 pour l'égalité des chances.

* 25 Article 14 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

* 26 Article 25 de la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville.

* 27 Contrat d'Objectifs et de Performance 2016-2020.

* 28 Le Ministère de la Cohésion des territoires précise que ces 5 milliards seront abondés selon le schéma suivant : « 1 Md€ de la Caisse des dépôts en fonds propres, 700 M€ en prêts, 1.5 Md€ d'Action Logement et 1,2 Md€ de l'Anah. D'autres ressources pourront venir compléter ces enveloppes de crédits. » http://www.cohesion-territoires.gouv.fr/communique-de-presse-programme-action-coeur-de-ville-la-grande-transformation-pour-les-centres-villes-demarre .

* 29 Loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 30 Enquête réalisée à la demande de la commission des finances du Sénat, en application de l'article 58-2° de la loi organique du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

* 31 Créé par l'article 3 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

* 32 Article L. 131-10 du code de l'environnement.

* 33 Créé par l'article 21 de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages.

* 34 Modifié par : la loi n° 2009-323 du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion, la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011, la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012, la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine, la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové et la loi n° 2016-918 du 29 décembre 2016 de finances rectificative pour 2016.

* 35 Article 126 de la loi n° 2006-1771 du 30 décembre 2006, modifié par l'article 2 de la loi n° 2009-1673 du 30 décembre 2009 de finances pour 2010 et par l'article 83 de la loi n° 2012-1509 du 29 décembre 2012 de finances pour 2013.

* 36 Texte n° 460 (2017-2018), enregistré à la Présidence du Sénat le 20 avril 2018.

* 37 Conseil d'Etat, Section des travaux publics, 7 juillet 1994, n° 356089, Avis « Diversification des activités d'EDF/GDF ».

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