INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Le présent rapport pour avis porte sur trois des quatre programmes que compte la mission « Sécurités » du projet de loi de finances pour 2018 : les programmes 152 « Gendarmerie nationale », 176 « Police nationale » et 207 « Sécurité et éducation routières ». Le programme 161 « Sécurité civile » fait quant à lui l'objet d'un avis distinct présenté par notre collègue Catherine Troendlé.

L'examen des crédits alloués à ces trois programmes par le projet de loi de finances pour 2018 intervient une nouvelle fois dans un contexte sécuritaire tendu. La prégnance de la menace terroriste, l'importance de la pression migratoire à laquelle notre pays fait face depuis désormais plus de deux ans de même que le maintien d'un niveau élevé de délinquance ont impliqué au cours des derniers mois une mobilisation sans précédent des forces de sécurité intérieure sur notre territoire.

Eu égard au niveau élevé et à la diversité des menaces, les gouvernements successifs ont engagé au cours des dernières années un effort budgétaire et élaboré des plans de lutte contre le terrorisme et contre l'immigration clandestine. Ainsi, les effectifs des forces de police et de gendarmerie ont été renforcés au cours des derniers exercices budgétaires et un effort de mise à niveau sur les moyens matériels a été initié, sans toutefois atteindre le niveau exigé par l'aggravation de la situation.

Conformément aux récentes annonces du Président de la République aux forces de sécurité intérieure, le budget de la mission « Sécurités » sera en hausse en 2018. Dans le projet de loi de finances initial, les crédits des trois programmes examinés par le présent rapport pour avis se montaient en effet à 19,8 milliards d'euros en autorisations d'engagement et à 19,26 milliards d'euros en crédits de paiement, soit des augmentations respectives de 2,36 % et 1,34 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.

Cet effort budgétaire demeure toutefois bien en-deçà des attentes et des besoins des forces de sécurité intérieure, dont les conditions matérielles continuent de se dégrader, contribuant au mal-être généralisé au sein de la police nationale comme de la gendarmerie nationale.

Enfin, par-delà la présentation des crédits de la mission, votre rapporteur a souhaité, au regard des priorités budgétaires définies dans le projet de loi de finances, présenter de manière plus approfondie les dispositifs mis en oeuvre en matière de lutte contre l'immigration irrégulière.

I. UNE CONSOLIDATION BUDGÉTAIRE ENGAGÉE MAIS ENCORE INSUFFISANTE AU REGARD DE LA DÉGRADATION DU CONTEXTE SÉCURITAIRE

Dans un contexte budgétaire contraint, la mission « Sécurités » connaît depuis 2010 une augmentation de ses crédits.

Cet effort budgétaire, plus que nécessaire dans un contexte sécuritaire tendu, nécessite toutefois d'être accentué afin de conférer aux forces de sécurité les moyens de mener à bien leurs missions.

A. DES MENACES ÉLEVÉES ET DIVERSES

1. Un niveau de délinquance toujours élevé

Malgré des évolutions contrastées au cours des cinq dernières années, la délinquance se maintient à un niveau élevé sur notre territoire. Si l'on peut se féliciter de la réduction récente de la commission de certaines infractions, on observe toutefois une tendance générale à la hausse des indicateurs de la délinquance au cours de la dernière décennie, tendance qui se traduit nécessairement par une augmentation importante de l'activité des forces de sécurité intérieure .

La délinquance d'appropriation , terminologie qui recouvre les vols en tout genre ainsi que les cambriolages, connaît des évolutions contrastées depuis 2012. Ainsi, le nombre de vols à main armée a baissé d'environ 35 % au cours des cinq dernières années, le nombre des vols violents sans arme de 20 %. De même, les vols de véhicules ont baissé d'environ 8 % depuis 2012, et de 22 % depuis 2008. En revanche, le nombre de vols sans violence contre les personnes a connu, entre 2012 et 2016, une augmentation de 11 %. De même, le nombre de cambriolages est en très forte hausse au cours de la dernière décennie, de 44 %, même s'il s'est stabilisé depuis 2012 (+ 2 % entre 2012 et 2017).

En ce qui concerne les atteintes aux personnes , les faits constatés sont, dans l'ensemble, en hausse. Les coups et blessures volontaires ont connu une augmentation progressive au cours des dernières années (+ 6% depuis 2012, + 8 % depuis 2008). Le nombre d'homicides, qui s'était réduit de 13,5 % entre 2008 et 2012, a augmenté de près de 14 % depuis cette dernière date, une hausse qui s'explique principalement par les attentats commis sur le territoire français en 2015 et en 2016. Les mises en cause sexuelles ont également connu une augmentation importante entre 2008 et 2017, de 58 %.

Enfin, le trafic de stupéfiants a sensiblement progressé au cours de la dernière décennie, le nombre de mises en cause pour trafic ou revente de stupéfiants ayant augmenté de près de 30 % entre octobre 2008 et octobre 2017.

2. L'émergence de nouvelles menaces

Depuis 2015, la France est confrontée à l'émergence de nouvelles menaces, qui ont fortement contribué à la dégradation du climat sécuritaire et nécessité une mobilisation sans précédent des forces de sécurité.

La menace terroriste demeure à un niveau particulièrement élevé . Depuis 2015, 239 personnes sont mortes en France dans des attentats terroristes. Selon les informations communiquées par le ministère de l'intérieur, 13 attentats auraient été déjoués par les forces de sécurité intérieure depuis le 1 er janvier 2017, preuve de la prégnance de la menace sur notre territoire.

Lors de son audition devant votre commission, le mardi 14 novembre 2017, le ministre de l'intérieur a précisé que cette menace, devenue durable, avait toutefois changé de nature, soumettant les services de renseignement et de sécurité à une pression sans précédent et les contraignant à une adaptation permanente de leurs méthodes. Jusqu'à présent exogène, autrement dit principalement basée sur des capacités de projection de groupes armés situés dans la zone syro-irakienne, elle serait devenue au cours des derniers mois plus endogène, fruit de l'action d'individus isolés, et par conséquent plus diffuse.

En parallèle, notre pays fait face depuis deux ans à une pression migratoire sans précédent, qui nécessite la mobilisation de moyens exceptionnels (voir III. infra ).

Le rétablissement des contrôles aux frontières intérieures de l'espace Schengen depuis novembre 2015, et la révision récente du code frontières Schengen ont entraîné une aggravation conséquente de la charge opérationnelle des forces de sécurité intérieure. Au-delà des effectifs de la police aux frontières, traditionnellement affectés à cette mission, l'ensemble des forces de sécurité intérieure sont aujourd'hui impliquées, qu'il s'agisse des forces de police (compagnies républicaines de sécurité, forces de sécurité publique, service du renseignement intérieur, etc .) ou des forces de gendarmerie.

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