Avis n° 113 (2017-2018) de M. Gérard CORNU , fait au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, déposé le 23 novembre 2017

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N° 113

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 novembre 2017

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable (1) sur le projet de loi de finances pour 2018 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME V

TRANSPORTS FERROVIAIRES, COLLECTIFS ET FLUVIAUX

Par M. Gérard CORNU,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. Hervé Maurey , président ; MM. Claude Bérit-Débat, Patrick Chaize, Gérard Cornu, Ronan Dantec, Alain Fouché, Guillaume Gontard, Didier Mandelli, Frédéric Marchand, Mme Nelly Tocqueville, M. Michel Vaspart , vice-présidents ; Mmes Nicole Bonnefoy, Pascale Bories, MM. Jean-François Longeot, Cyril Pellevat , secrétaires ; Mme Éliane Assassi, MM. Jérôme Bignon, Joël Bigot, Jean Bizet, Jean-Marc Boyer, Mme Françoise Cartron, M. Guillaume Chevrollier, Mme Marta de Cidrac, MM. Jean-Pierre Corbisez, Michel Dagbert, Michel Dennemont, Mme Martine Filleul, MM. Jordi Ginesta, Éric Gold, Mme Christine Herzog, MM. Jean-Michel Houllegatte, Benoît Huré, Olivier Jacquin, Mmes Christine Lanfranchi Dorgal, Nadège Lefebvre, MM. Olivier Léonhardt, Jean-Claude Luche, Philippe Madrelle, Pierre Médevielle, Louis-Jean de Nicolaÿ, Jean-Jacques Panunzi, Philippe Pemezec, Rémy Pointereau, Mme Angèle Préville, MM.  Jean-Paul Prince, Christophe Priou, Charles Revet, Mmes Nadia Sollogoub, Michèle Vullien .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 235 , 264 rect. , 266 rect. , 273 à 278 , 345 et T.A. 33

Sénat : 107 , 108 à 112 et 114 (2017-2018)

LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION

La commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, réunie le mercredi 8 novembre 2017, a examiné le rapport de Gérard Cornu sur les crédits consacrés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux figurant, d'une part, dans le budget de l'agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), d'autre part, dans le projet de loi de finances pour 2018, au sein du programme 203 de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et du compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ».

Le rapporteur a salué la démarche engagée par le Gouvernement pour redéfinir les priorités de la politique des transports dans le cadre des Assises de la mobilité et du Conseil d'orientation des infrastructures afin de les inscrire dans une loi de programmation garantissant leur financement. Il importe en effet que la soutenabilité des dépenses d'infrastructures puisse être rétablie et le Parlement mieux associé à leur détermination.

Compte tenu de cette réorientation à venir de la politique des transports, l' augmentation limitée du budget d'intervention de l'Afitf, de 2,2 à 2,4 milliards d'euros, peut être considérée comme une mesure d'attente, même si ce budget conduira sans doute l'agence à retarder certains paiements, comme elle l'a fait par le passé.

Dans ce contexte budgétaire contraint, le rapporteur a obtenu un engagement ferme de la Ministre chargée des transports, Élisabeth Borne, sur le financement des matériels roulants des trains d'équilibre du territoire promis par l'État aux régions Centre-Val de Loire et Hauts-de-France en échange du transfert de ces services, alors que des doutes persistaient à ce sujet jusqu'à la veille de son audition devant la commission, le 8 novembre.

Le rapporteur a également constaté la relative stabilité des crédits du programme 203 consacrés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux. Il a enfin rappelé les évolutions de l'offre des trains d'équilibre du territoire et du compte d'affectation spéciale qui les finance.

Enfin, le rapporteur a souhaité mettre en exergue le travail réalisé par la Cour des comptes sur l'activité de fret du groupe public ferroviaire , qui s'est traduit par l'envoi d'un référé aux Ministres compétents le 3 juillet dernier. Ce document donne l'alerte au sujet de la situation extrêmement préoccupante de Fret SNCF, et souligne les incohérences de l'État dans sa politique de promotion du fret.

Sur proposition de son rapporteur pour avis, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du projet de loi de finances pour 2018 consacrés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le présent rapport pour avis analyse les crédits consacrés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux figurant, d'une part, dans le budget de l'agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), d'autre part, dans le projet de loi de finances pour 2018 au sein de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » et du compte d'affectation spéciale « Services nationaux de transport conventionnés de voyageurs ».

Ce budget présente les caractéristiques d'un budget de transition, alors que le Gouvernement a annoncé une réorientation profonde de la politique des transports, mettant l'accent sur les transports du quotidien et la modernisation des réseaux existants. La démarche engagée dans le cadre des Assises de la mobilité et du Conseil d'orientation des infrastructures doit permettre de hiérarchiser les priorités dans le domaine des infrastructures, et de garantir leur financement. Une loi d'orientation des mobilités, qui comportera la programmation de ces projets, sera ensuite présentée au Parlement, au début de l'année 2018.

Ce travail répond à plusieurs préoccupations : les risques pesant sur la soutenabilité financière de l'agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), la faible association du Parlement à la détermination des dépenses d'infrastructures, et l'état inquiétant des réseaux existants.

La libéralisation du transport ferroviaire de voyageurs, dont le cadre devra être fixé au 1 er janvier 2019 pour les TGV, pour une mise en oeuvre effective en décembre 2020, et au 3 décembre 2019, pour les services conventionnés (TER et trains d'équilibre du territoire), doit également être organisée au plus vite, pour permettre à l'ensemble des acteurs de s'y préparer. C'est l'objet de la mission confiée par le Premier ministre à Jean-Cyril Spinetta.

Dans ce contexte, le budget pour 2018 revêt nécessairement les caractéristiques d'un budget de transition. L'augmentation du budget d'intervention de l'Afitf de 2,2 à 2,4 milliards d'euros devrait permettre à l'agence d'assumer un certain nombre d'engagements passés, en retardant certains paiements comme elle l'a fait ces dernières années. Alors qu'un doute subsistait, dans les régions Centre-Val de Loire et Hauts-de-France, sur le financement promis par l'État du renouvellement des matériels roulants des trains d'équilibre du territoire, en échange de leur transfert aux régions, votre rapporteur a obtenu de la Ministre chargée des transports l'engagement que ce financement serait assuré début 2018.

L'ensemble de ces éléments ont conduit votre rapporteur à considérer que le budget proposé pour 2018 pouvait être accepté comme tel, dans l'attente des évolutions prévues à partir de l'année prochaine.

Lors de sa réunion du 8 novembre 2017, la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, suivant votre rapporteur pour avis, a émis un avis favorable à l'adoption des crédits du projet de loi de finances pour 2018 consacrés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux.

I. VERS UNE RÉORIENTATION DE LA POLITIQUE DES TRANSPORTS

A. LA NÉCESSITÉ DE REDÉFINIR UNE STRATÉGIE SOUTENABLE POUR LES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT, AVEC LE PARLEMENT

Les gouvernements précédents ont eu tendance à promettre et même engager la réalisation de nombreux projets d'infrastructures, sans nécessairement s'assurer de leur faisabilité financière. Sur le plan budgétaire, cette politique s'est traduite par une inadéquation entre les ressources et les dépenses de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf).

Cette agence est chargée depuis 2005 de financer, pour le compte de l'État, les projets d'infrastructures, mais aussi, de façon plus récente, la part de l'État dans les contrats de plan État-régions (CPER), des investissements de régénération ou de sécurisation des réseaux routiers, ferroviaires et fluviaux, des projets de création ou de développement de transports collectifs et le renouvellement des matériels roulants des trains d'équilibre du territoire. Ce mécanisme de financement répond à une logique de report modal , puisque les ressources de l'agence sont exclusivement issues de la route : il s'agit de la redevance domaniale et d'une fraction de la taxe d'aménagement du territoire, applicables aux sociétés d'autoroutes, d'une fraction de la taxe intérieure à la consommation sur les produits énergétiques (TICPE), d'une fraction du produit des amendes radar, et de la contribution exceptionnelle des sociétés d'autoroutes négociée dans le cadre du plan de relance autoroutier conclu en 2015.

DÉPENSES DE L'AFITF DEPUIS 2010

Dépenses (en millions d'euros)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Routes

771

869

763

664

705

739

779

831

Ferroviaire

1031

688

643

729

668

705

820

961

Fluvial

45

73

44

66

35

64

83

102

Portuaire et littoral

53

58

59

69

30

58

55

50

Transports collectifs

187

265

315

349

268

172

213

236

Divers (PEI Corse, aires de contrôle des poids lourds)

46

26

33

32

8

17

22

20

Total - hors frais financiers et hors indemnité versée à Écomouv

2133

1979

1857

1909

1714

1755

1972

2200

RECETTES DE L'AFITF DEPUIS 2010

Recettes (en millions d'euros)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017 1 ( * )

2018 2 ( * )

Fraction de la taxe d'aménagement du territoire (applicable aux sociétés d'autoroutes)

539

542

535

538

571

555

560

565

472

Redevance domaniale (applicable aux sociétés d'autoroutes)

189

193

198

300

314

326

331

350

355

Fraction du produit des amendes radars

126

177

272

170

203

233

360

400

450

Fraction de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE)

1139

715

735

1076

Contribution exceptionnelle des sociétés d'autoroutes négociée dans le cadre du plan de relance autoroutier

100

100

100

60

Droit d'entrée A 63

400

Produits divers

1

2

Subvention budgétaire (Programme 203)

915

974

900

560

656

Subvention budgétaire (Plan de relance)

331

Versement de la région Normandie (dans le cadre de l'accord sur les trains d'équilibre du territoire)

35

Total recettes hors avance France Trésor

2097

2287

1907

1568

1743

2354

2066

2150

2448

Source : direction générale des infrastructures, des transports et de la mer

Depuis 2013, l'Afitf rencontre des difficultés budgétaires, d'abord dues aux reports successifs de l'entrée en vigueur de l'écotaxe, puis à son abandon, décidé à la fin de l'année 2014. L'agence devait en effet bénéficier d'une grande partie de ses recettes annuelles, soit 700 à 800 millions d'euros, à la place d'une subvention budgétaire que lui versait chaque année l'État. Mais celui-ci a commencé à réduire le montant de cette subvention dès 2013, alors que l'Afitf ne percevait aucune recette supplémentaire. Les ressources de l'Afitf ont ainsi diminué fortement, passant de 1,9 milliard d'euros en 2012 à 1,6 milliard en 2013 et 1,7 milliard en 2014.

Le manque à gagner résultant de l'abandon définitif de l'écotaxe n'a été que partiellement compensé par l'affectation d'une fraction de la taxe intérieure à la consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Si cette fraction s'est élevée à 1,1 milliard d'euros en 2015, l'Afitf a dû assumer, cette même année, 528 millions d'euros de frais résultant de la résiliation du contrat avec la société Ecomouv', qui avait été chargée de la collecte de l'écotaxe (le paiement de la totalité des frais de résiliation, soit près de un milliard d'euros, étant échelonné sur plusieurs années). Dans les lois de finances initiales pour 2016 et 2017, la part de TICPE affectée à l'Afitf a été réduite à respectivement 715 puis 735 millions d'euros.

En 2017, alors que les besoins de financement de l'agence étaient estimés à 2,5 milliards d'euros par son ancien président, Philippe Duron, son budget s'est élevé à 2,2 milliards d'euros.

En conséquence, l'agence a accumulé des restes à payer. À la fin de l'année 2016, ils s'élevaient à 12,3 milliards d'euros , auxquels il convient d'ajouter les engagements correspondant aux contrats de plan État-région 2015-2020, soit 6,9 milliards d'euros et les projets de construction d'une ligne ferroviaire à grande vitesse entre Lyon et Turin et du canal Seine-Nord Europe.

Dans un référé du 10 juin 2016 , la Cour des comptes a déploré l'accumulation de ces restes à payer, faisant peser « de sérieux doutes sur la capacité de l'Afitf à faire face à ses engagements. » De fait, l'Afitf permet à l'État de s'affranchir des principes du droit budgétaire. En particulier, les engagements financiers ne font l'objet d'aucun plafonnement dans la loi de finances et sont autorisés par le seul conseil d'administration de l'agence, indépendamment de la norme d'évolution des dépenses de l'État. La régulation s'effectue donc année après année par les crédits de paiement.

Dans ce contexte, l'agence a régulièrement été contrainte de reporter certains paiements et a accumulé une dette vis-à-vis de Réseau ferré de France puis SNCF Réseau , qui s'élevait à 447 millions d'euros à la fin de l'année 2016, dont 37 millions d'euros de pénalités financières. Ce montant est certes en diminution, mais n'en reste pas moins important.

DETTE DE L'AFITF VIS-À-VIS DE SNCF RÉSEAU

Montants en millions d'euros

Fin 2015

Fin 2016

Fin 2017

(prévision)

Principal

LGV Est 2

159

0

27

LGV SEA

512

406

255

Autres

6

4

0

Sous-Total

677

410

282

Intérêts

Pénalités financières

30

37

46

Total

707

447

328

Source : direction générale des infrastructures, des transports et de la mer

Outre l'enjeu du rétablissement de la soutenabilité de sa trajectoire financière, le financement des projets d'infrastructures par l'Afitf ne permet pas d'associer suffisamment le Parlement à la détermination de ces dépenses . En effet, la loi de finances détermine les plafonds de recettes dont l'agence peut disposer, mais non ses dépenses. Son budget est généralement arrêté en décembre de l'année précédant l'exercice, soit après les débats relatifs à la loi de finances. Aussi le projet de loi de finances ne donne-t-il qu'une indication, estimative, des dépenses de l'agence.

La priorité donnée aux nouveaux projets d'infrastructures a également eu des effets négatifs sur l'état du réseau ferroviaire . Comme l'a montré l'audit réalisé par l'École polytechnique de Lausanne sur l'état du réseau ferré national en 2005, actualisé en 2012 3 ( * ) , le sous-investissement dans l'entretien et la régénération du réseau a accéléré son vieillissement. L'âge moyen des voies est de 31 ans 4 ( * ) . En conséquence, le réseau est désormais plus difficile et plus coûteux à entretenir, et de nombreuses plages de travaux doivent être libérées, parfois au détriment du trafic de voyageurs et surtout du fret.

Le financement des lignes à grande vitesse a également contribué à creuser la dette du gestionnaire du réseau , Réseau ferré de France puis SNCF Réseau, qui approche désormais 45 milliards d'euros 5 ( * ) , et s'aggrave chaque année de 3 milliards d'euros.

Mais cette dette s'explique surtout par le dérapage des dépenses d'exploitation lié au sous-investissement sur le réseau et la montée en charge des investissements de remise à niveau, que n'a pas compensé l'augmentation pourtant dynamique des péages. En effet, d'après la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer, entre 2010 et 2016, la réalisation simultanée des quatre grands projets de lignes à grande vitesse (LGV Sud Europe Atlantique, LGV Bretagne - Pays-de-la-Loire, LGV Est, contournement ferroviaire de Nîmes et de Montpellier) en tant que telle n'est responsable que d'un quart de l'augmentation de 15 milliards d'euros de la dette de SNCF Réseau.

B. LA DÉMARCHE ENGAGÉE PAR LE GOUVERNEMENT

Le Gouvernement a initié une réorientation de la politique des transports, en décidant de mettre l'accent sur les transports de la vie quotidienne et le maintien de la qualité et de l'efficacité des réseaux de transport existants.

Le 1 er juillet 2017, le Président de la République, Emmanuel Macron, a annoncé une pause dans la réalisation des grands projets d'infrastructures , le temps de réévaluer les besoins et la stratégie de l'État dans ce domaine . Pour cela, la Ministre chargée des transports, Élisabeth Borne, a lancé, le 19 septembre, des Assises de la mobilité , dont les travaux doivent aboutir à la présentation d'une loi d'orientation des mobilités au premier semestre de l'année 2018. Un Conseil d'orientation des infrastructures , présidé par Philippe Duron et dont votre rapporteur est membre, abordera plus particulièrement la question de la hiérarchisation des projets d'infrastructure.

Cette loi comportera une programmation des projets et des financements de l'État sur cinq ans, ce qui permettra, d'une part, d'associer le Parlement à la définition des dépenses d'infrastructures , d'autre part, de garantir les ressources nécessaires à la réalisation des projets .

Votre rapporteur soutient pleinement cette démarche, et se félicite de la volonté de la Ministre chargée des transports de « ne pas être la ministre des promesses irréalisables. »

C. LA LIBÉRALISATION PROCHAINE DU TRANSPORT FERROVIAIRE DE VOYAGEURS

Le Gouvernement a également confié à Jean-Cyril Spinetta la mission de réfléchir à la refonte du modèle du transport ferroviaire dans le cadre d'un marché ouvert à la concurrence .

Le quatrième paquet ferroviaire européen , adopté à la fin de l'année 2016, impose la libéralisation du transport ferroviaire de voyageurs à partir du 3 décembre 2019 pour les services conventionnés de voyageurs (en France, les services de TER et les trains d'équilibre du territoire). À cette date, les autorités organisatrices de transport devront a minima avoir la possibilité d'ouvrir leurs services de transport à la concurrence. Pour les services non conventionnés (les TGV) , le cadre juridique de la libéralisation devra être fixé au 1 er janvier 2019 au plus tard, pour une entrée en vigueur effective au 14 décembre 2020, soit pour l'horaire de service 2021 .

Comme l'ont indiqué Hervé Maurey et Louis Nègre dans l'exposé des motifs de leur proposition de loi relative à l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs, déposée le 6 septembre 2017, « il est donc impératif de définir le cadre de cette réforme majeure au plus vite, pour permettre aux différents acteurs, dont l'opérateur historique, de s'y préparer dans les meilleures conditions. » C'est la raison pour laquelle ils ont rédigé une proposition de loi 6 ( * ) qui fixe le cadre de cette réforme.

Le Premier ministre, Édouard Philippe, a donné trois axes de travail à Jean-Cyril Spinetta :

- la stratégie de desserte par le transport ferroviaire à horizon 2030 ;

- la remise à plat du modèle économique de la gestion du réseau, structurellement déficitaire, et de l'exploitation des services de transport ferroviaire, en cohérence avec la stratégie de desserte ;

- l'ouverture à la concurrence du transport de voyageurs.

Ce travail pourra également conduire à un réexamen du contrat de performance signé entre l'État et SNCF Réseau le 20 avril 2017, comme l'a indiqué la Ministre chargée des transports lors de son audition devant votre commission, le 8 novembre. Cette évolution est positive, car votre commission s'était opposée à la signature de ce contrat de performance, pour des raisons de fond comme de forme.

En effet, ce contrat avait reçu un avis extrêmement critique de l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (Arafer), qui avait appelé à la « révision profonde du projet de contrat avant sa signature » , soulignant le fait que ce contrat s'appuie sur des « hypothèses économiques fragiles » et « peu crédibles en l'état » et souffre d' « engagements peu définis » et de « carences dans le choix et la définition des indicateurs de performance de SNCF Réseau » . En conséquence, ce contrat rend très peu probable la perspective d'un redressement de la trajectoire financière du gestionnaire du réseau, qu'il est censé garantir. De fait, la dette du réseau, qui dépassera 63 milliards d'euros dans dix ans, aura augmenté de plus de 40 % d'ici 2025 sans qu'aucune mesure ne soit même envisagée par l'État pour y faire face. Le régulateur ajoute même qu' « il est à craindre que l'évolution de l'endettement de SNCF Réseau ne soit en réalité plus dynamique et, partant, le niveau de la dette en 2026 sous-estimé ».

Sur la forme, votre commission avait regretté la signature de ce contrat engageant SNCF Réseau et l'État pour dix ans à la veille du premier tour des élections présidentielles, alors même que le ministère avait refusé de se rendre devant la commission pour une audition et que le projet de contrat n'avait pas été transmis au Parlement comme le prévoit pourtant la loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire.

Votre commission suivra évidemment avec attention les résultats de la mission menée par Jean-Cyril Spinetta et les travaux de définition du cadre juridique de la libéralisation du transport ferroviaire de voyageurs.

II. UN BUDGET DE TRANSITION POUR 2018

A. UNE AUGMENTATION LIMITÉE DU BUDGET DE L'AGENCE DE FINANCEMENT DES INFRASTRUCTURES DE TRANSPORT DE FRANCE

Le budget opérationnel de l'Afitf augmentera de 2,2 à 2,4 milliards d'euros en 2018 7 ( * ) . S'y ajoutera une contribution de 48 millions d'euros versée à la société Écomouv', qui avait été chargée de la collecte de l'écotaxe, au titre de l'indemnité de rupture du contrat de partenariat.

Le besoin de financement de l'agence avait pourtant été estimé dans un premier temps à 3,6 milliards d'euros puis 3,2 milliards d'euros , après un premier ajustement des calendriers de paiement en fonction de l'avancement des projets.

D'après le ministère chargé des transports, le budget d'intervention de l'Afitf a pu être fixé à 2,4 milliards d'euros compte tenu :

- de la pause dans la réalisation des grands projets (concernant l'A 45, la liaison ferroviaire entre Lyon et Turin et le canal Seine-Nord Europe), et du lissage des financements encore dus pour certaines lignes à grande vitesse ;

- de la redéfinition des échéanciers de financement du renouvellement des trains d'équilibre du territoire pour les lignes continuant à être gérées par l'État.

Dans ce contexte budgétaire contraint, votre rapporteur s'est assuré que les engagements pris par l'État pour le renouvellement des matériels roulants des trains d'équilibre du territoire transférés aux régions seront tenus 8 ( * ) . La Ministre chargée des transports, Élisabeth Borne, s'est engagée sur ce point lors de son audition devant votre commission.

Dès lors, et dans l'attente de la redéfinition du programme d'investissements dans le cadre de la loi sur les mobilités, le budget de l'Afitf pour 2018 peut être accepté comme tel, tout en gardant à l'esprit le fait qu'il obligera sans doute l'agence à reporter à nouveau certains paiements, comme cela a été le cas les années précédentes.

S'agissant des dépenses de l'Afitf, le Gouvernement a fourni un budget à titre prévisionnel, qui devra être confirmé lors de l'adoption définitive du budget en décembre. Ce budget prévoit à ce stade une augmentation des crédits consacrés au réseau ferroviaire, de 672 à 729 millions d'euros , dont 32 millions supplémentaires pour la modernisation des réseaux existants et 38 millions d'euros pour les volets des contrats de plan État-régions concernant le domaine ferroviaire. Les crédits permettant le financement du matériel roulant des trains d'équilibre du territoire devraient augmenter de 259 à 271 millions d'euros. En revanche, les montants consacrés à l'intermodalité et au fret devraient diminuer, de 33 à 28 millions d'euros.

BUDGET PRÉVISIONNEL DE L'AFITF

B. LA RELATIVE STABILITÉ DES CRÉDITS DU PROGRAMME 203

Les crédits consacrés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux figurent dans le programme 203 « Infrastructures et services de transports » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables », dans les actions suivantes :

- l'action n° 41 « Ferroviaire » ;

- l'action n° 42 « Voies navigables » ;

- l'action n° 44 « Transports collectifs » ;

- l'action n° 45 « Transports combinés » ;

- l'action n° 47 « Fonctions supports » ;

- l'action n° 51 « Sécurité ferroviaire ».

Il s'agit d'une nouvelle maquette, qui détaille plus précisément les crédits consacrés à chaque mode de transport, alors que la précédente nomenclature les regroupait parfois.

L'action n° 41 « Ferroviaire 9 ( * ) » regroupe des crédits destinés à l'amélioration de la performance du réseau ferroviaire. Elle se compose essentiellement de la contribution de l'État à SNCF Réseau , fixée à 2,42 milliards d'euros (en autorisations d'engagement et crédits de paiement).

Cette contribution se décompose de la façon suivante :

- 1 668 millions d'euros pour le financement de la redevance d'accès facturée par SNCF Réseau pour l'utilisation du réseau ferré national hors Île-de-France par les trains régionaux de voyageurs (TER) ;

- 528 millions d'euros pour le financement de l'utilisation du réseau ferré national par les trains d'équilibre du territoire (TET), dont l'État est l'autorité organisatrice ;

- 224 millions d'euros pour le financement de l'utilisation du réseau ferré national par les trains de fret. Cette enveloppe comprend 79 millions d'euros au titre de la « compensation fret », par laquelle l'État finance une partie du coût marginal d'utilisation imputable au fret pour éviter aux entreprises de subir une hausse élevée des péages qui les détournerait de ce mode de transport.

La contribution de l'État à SNCF Réseau diminue de 6 millions d'euros par rapport à la loi de finances pour 2017, mais cette évolution est liée, pour 4,5 millions d'euros, à un changement de périmètre. Ce montant correspond à la redevance de quai, due par les régions. À partir de 2018, cette redevance leur sera compensée dans le cadre du programme 119 « Concours financiers aux collectivités territoriales et à leurs groupements » et ne sera donc plus financée par le programme 203.

Les crédits de l'action 41 permettent également de financer la part française de l'exploitation et de la maintenance de la ligne à grande vitesse franco-espagnole Perpignan-Figueras. Depuis fin 2016, la société LFP, filiale de la SNCF et de l'ADIF, gestionnaire du réseau espagnol, a repris la gestion de cette ligne suite à la liquidation du concessionnaire TP Ferro. 1,25 million d'euros de crédits de paiement sont prévus à ce titre en 2018 pour le financement du transfert de l'exploitation et de la maintenance à LFP ainsi que pour couvrir le déficit d'exploitation de la ligne.

Les crédits de l'action n° 41 sont complétés par des fonds de concours provenant de l'Afitf, qui correspondent essentiellement à la part de l'État dans le financement des opérations contractualisées dans les contrats de plan ou de projets État-régions. Ils sont évalués à 170 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 169 millions d'euros en crédits de paiement (CP). Il s'agit toutefois encore d'une estimation, le budget de l'Afitf pour 2018 n'étant arrêté qu'en décembre.

L'action n° 42 « Voies navigables 10 ( * ) » comprend la subvention pour charges de service public versée à l'établissement public Voies navigables de France (VNF) , fixée à 251 millions d'euros en AE et en CP, un montant proche de celui prévu par la loi de finances pour 2017 (en diminution de 4 %).

Cette subvention vise, en complément des moyens dégagés par VNF sur ses ressources propres et sur les recettes affectées, à :

- moderniser et sécuriser le réseau existant, notamment par la fiabilisation du réseau à grand gabarit, des écluses et la modernisation des barrages afin de renforcer sa disponibilité ;

- développer la capacité du réseau, notamment via la mise en oeuvre des opérations décidées dans les contrats de projets État-régions.

Cette action est complétée par un fonds de concours de l'Afitf, à hauteur de 1,4 million d'euros en CP et de 1,3 million d'euros en AE.

L'action n° 44 « Transports collectifs 11 ( * ) » est dotée de 27,3 millions d'euros en AE et en CP.

20,4 millions d'euros correspondent à la compensation versée à SNCF Mobilités pour les huit tarifications sociales nationales décidées par l'État afin de favoriser l'accès de certaines populations au transport ferroviaire. Il s'agit, par ordre décroissant d'utilisation, des billets familles nombreuses, des billets d'allers-retours populaires, des abonnements élèves, étudiants et apprentis, qui représentent à eux trois 90 % du trafic concerné, ainsi que des abonnements de travail, des tarifs réformés et pensionnés de guerre, du tarif accompagnateur de personnes handicapées civiles, du tarif promenade d'enfants et du permis de visite aux tombes. Cette enveloppe est en diminution de 5 millions d'euros par rapport à celle annoncée dans le projet de loi de finances pour 2017. Les évolutions de la tarification apportées par l'opérateur, qui multiplie les offres promotionnelles en parallèle des tarifs sociaux, expliquent la diminution de ces crédits depuis plusieurs années.

4,7 millions d'euros doivent être versés à la région Grand Est en conséquence de la mise en service de la deuxième tranche de la ligne à grande vitesse, en application de l'article L. 2121-8 du code des transports qui dispose que « les modifications des services d'intérêt national, liées à la mise en service d'une infrastructure nouvelle ou consécutives à une opération de modernisation approuvée par l'État et qui rendent nécessaire une recomposition de l'offre des services régionaux de personnes, donnent lieu à une révision de la compensation versée par l'État au titre du transfert de compétences dans des conditions prévues par décret en Conseil d'État. »

1,75 million d'euros est prévu au titre de la contribution de l'État au financement des enquêtes-ménages-déplacements et d'autres d'études relatives à la mobilité, ainsi que d'expériences innovantes dans le cadre de la relance des transports collectifs et des nouvelles pratiques de déplacements (covoiturage, auto-partage...), comme en 2017.

De la même façon, 450 000 euros sont destinés au développement de l'usage du vélo, en appui des propositions et des actions du coordonnateur interministériel nommé à cet effet.

190 millions d'euros (en AE) et 185 millions d'euros (en CP) de fonds de concours provenant de l'Afitf sont également prévus. Ils correspondent à la part de l'État dans le financement des opérations contractualisées (CPER 2015-2020 et contrats de projets 2007-2013) pour les volets relatifs aux transports collectifs, et principalement en Île-de-France afin de permettre la réalisation du plan de mobilisation pour les transports (prolongement du RER E, schémas directeurs des RER, prolongement de la ligne 11 du métro, lignes de tramway, etc.).

L'action n° 45 « Transports combinés 12 ( * ) » vise à développer les transports effectués par la route mais utilisant sur une partie de leur parcours un mode alternatif (ferroviaire, fluvial ou maritime). Elle s'élève à 22,4 millions d'euros en CP et 77,4 millions d'euros en AE.

Dans cette enveloppe, 10,4 millions d'euros en AE et CP sont destinés au soutien du transport combiné ferroviaire .

Ces crédits couvrent deux types de dépenses :

- le financement de services d'autoroutes ferroviaires , notamment du nouveau service public de ferroutage franco-italien qui doit succéder au service exploité depuis 2003 entre Aiton et Orbassano, conformément aux termes de l'accord de Luxembourg du 9 octobre 2009 relatif au service de ferroutage entre la France et l'Italie ;

- les aides financières versées pour soutenir le transport combiné .

En outre, 60 millions d'euros en AE et 5 millions d'euros en CP sont prévus pour l'autoroute ferroviaire alpine . Les autorisations d'engagement correspondent au nouveau contrat de concession conclu pour l'exploitation de cette autoroute ferroviaire.

7 millions d'euros en AE et CP sont prévus pour le soutien au transport combiné maritime de courte distance et fluvial .

L'action n° 47 « Fonctions supports 13 ( * ) » comprend les dépenses transversales au programme « Infrastructures et services de transport ». Ses crédits de paiement sont fixés à 15,6 millions d'euros , en diminution de 3 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2017. Elle regroupe, d'une part, les dépenses d'études générales et de prospective, d'autre part, les dépenses de logistique de la DGITM ou de services qui lui sont rattachés.

L'action n° 51 « Sécurité ferroviaire 14 ( * ) » comporte 1 million d'euros en CP et 7,5 millions d'euros en AE pour renforcer la robustesse du GSMR , le système de communication qui assure les liaisons radio sol-trains, perturbé par les émissions des opérateurs de réseaux ouverts au public dans les bandes 800 et 900 MHz.

Elle est complétée par 27 millions d'euros en AE et CP de fonds de concours devant être versés par l'Afitf pour la mise en sécurité des passages à niveau et des tunnels sur le réseau ferroviaire.

III. LE COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « SERVICES NATIONAUX DE TRANSPORT CONVENTIONNÉS DE VOYAGEURS »

A. L'ÉVOLUTION DE L'OFFRE DES TRAINS D'ÉQUILIBRE DU TERRITOIRE

Depuis 2011, l'État est l'autorité organisatrice des trains d'équilibre du territoire, qui désignent les services nationaux de transport conventionnés de voyageurs assurés par les trains Corail et Intercités. En conséquence, il en définit la consistance et verse à SNCF Mobilités une subvention pour couvrir le déficit d'exploitation. Ces éléments sont définis dans une convention conclue entre l'État et l'opérateur de transport . La première convention, signée en 2010 pour trois ans (2011-2013), a été prorogée à deux reprises, jusqu'au 31 décembre 2015.

Ces services ont fait l'objet de nombreuses critiques ces dernières années. L'offre proposée, héritée de l'histoire et non définie en fonction des besoins, apparaissait inadaptée et souffrait d'une absence de coordination avec l'offre proposée par les régions dans le cadre du transport express régional (TER). Le matériel roulant vieillissant - âgé de plus de 35 ans en moyenne - ainsi que la qualité du service rendu ont également détourné nombre de voyageurs de ce mode de transport, qui a subi une baisse de fréquentation notable. Aujourd'hui, le taux de remplissage de ces trains est de 33 %.

Les carences du pilotage de cette offre par l'État ont notamment été soulignées par la Cour des comptes dans son rapport particulier de juillet 2014 sur les trains d'équilibre du territoire, rendu public le 13 février 2015.

En conséquence, l'État a entamé un travail de redéfinition de cette offre. En novembre 2014, une commission sur « l'avenir des trains d'équilibre du territoire », présidée par Philippe Duron et composée de parlementaires, d'élus régionaux et de personnalités qualifiées, a été créée à cet effet. Elle a remis ses conclusions le 25 mai 2015, en soulignant elle aussi la nécessité d'un exercice effectif, par l'État, de son rôle d'autorité organisatrice.

Une mission de concertation avec les régions a ensuite été confiée au préfet François Philizot, pour discuter des évolutions de desserte à mettre en oeuvre en articulation avec les services de TER.

Ces travaux ont abouti à l'élaboration d'une nouvelle stratégie pour les trains d'équilibre du territoire , et à une redéfinition de l'offre . L'État a conservé six lignes structurantes, dont trois érigées en lignes « à haute performance », dans son giron 15 ( * ) , ainsi que deux lignes de nuit 16 ( * ) . Les autres lignes de nuit ont été supprimées.

Pour les autres lignes de jour, l'État a conclu six accords prévoyant la reprise par les régions de nombreux services de TET d'intérêt régional ou local , en contrepartie d'une participation de l'État au renouvellement des matériels roulants, à leur entretien, ou à la couverture de leur déficit d'exploitation .

CONTENU DES ACCORDS CONCLUS ENTRE L'ÉTAT ET LES RÉGIONS SUR LA REPRISE DES TRAINS D'ÉQUILIBRE DU TERRITOIRE

Région Normandie

La région récupérera les cinq lignes de TET desservant la Normandie (Paris-Caen-Cherbourg/Trouville-Deauville, Paris-Rouen-Le Havre, Paris-Evreux-Serquigny, Caen-Le Mans-Tours, Paris-Granville) le 1 er janvier 2020. En contrepartie, l'Afitf doit financer le renouvellement du matériel roulant des lignes Paris-Caen-Cherbourg/Trouville-Deauville et Paris-Rouen-Le Havre pour 720 millions d'euros. La région reverse quant à elle 70 millions d'euros à l'Afitf correspondant à deux années de déficit des lignes reprises. Une convention de financement entre l'État, l'Afitf et la région a été conclue en novembre 2016 en application de cet accord. La commande des nouvelles rames a, depuis, été passée à Bombardier.

Régions Grand-Est, Bourgogne-Franche-Comté et le Syndicat des transports d'Ile-de-France (Stif)

La région Grand Est a repris les lignes Hirson-Metz et Reims-Dijon le 1 er janvier 2017 et récupérera la ligne Paris-Troyes-Belfort le 1 er janvier 2018. En contrepartie, l'État finance via l'Afitf l'acquisition de 19 rames Coradia Liner Alstom pour la ligne Paris-Troyes-Belfort et participe à ses coûts de fonctionnement à hauteur de 13 millions d'euros par an. La région Bourgogne-Franche-Comté et le Stif se sont engagés à appuyer la région Grand Est dans son rôle d'autorité organisatrice de ces lignes.

Région Nouvelle-Aquitaine

La région reprendra les services Bordeaux-La Rochelle, Bordeaux-Limoges et Bordeaux-Ussel le 1 er janvier 2018. L'État doit financer en contrepartie, par l'Afitf, cinq rames Régiolis Alstom, et participer aux coûts de fonctionnement de ces services à hauteur de 6,7 millions d'euros par an en 2018 et 2019, et de 5 millions d'euros par an en 2020, 2021 et 2022.

Région Occitanie

La région reprendra la ligne Clermont-Ferrand-Nîmes (dite du Cévenol) le 1 er janvier 2018, et la ligne Clermont-Ferrand-Béziers, dite de l'Aubrac, fera l'objet d'une cogestion par l'État et la région en 2017 et 2018, avec cofinancement. En contrepartie, l'État finance, par l'Afitf, l'acquisition de trois rames Coradia Liner Alstom pour le Cévenol, et participe aux coûts de fonctionnement de cette ligne à hauteur de 4,5 millions d'euros par an entre 2018 et 2022.

Région Hauts-de-France

La région reprendra les lignes Paris-Amiens-Boulogne et Paris-Saint-Quentin-Maubeuge/Cambrai le 1 er janvier 2019. En contrepartie, l'État doit financer via l'Afitf le renouvellement du matériel roulant de ces lignes, avec d'une part l'acquisition de 10 rames de type Régiolis Alstom, et d'autre part le versement à la région de 250 millions d'euros destinés notamment à l'acquisition de matériels à deux niveaux. L'État doit également participer aux coûts de fonctionnement des lignes reprises à hauteur de 15 millions d'euros par an.

Région Centre-Val de Loire

La région reprendra les lignes Paris-Orléans-Tours, Paris-Bourges-Montluçon et Paris-Montargis-Nevers le 1 er janvier 2018. En contrepartie, l'État doit financer, par l'Afitf, le renouvellement du matériel roulant de ces lignes, avec d'une part l'acquisition de trois rames Régiolis Alstom, et d'autre part les versements à la Région de 480 millions d'euros destinés principalement à l'acquisition de matériels à deux niveaux. L'État doit également participer aux coûts de fonctionnement des lignes reprises à hauteur de 49 millions d'euros par an en 2018 et 2019, 39,2 millions en 2020, 34,3 millions en 2021 et 24,5 millions par an à compter de 2022.

Source : direction générale des infrastructures, des transports et de la mer

Des incertitudes ont pesé sur le financement du renouvellement des matériels roulants promis par l'État dans les régions Centre-Val de Loire (soit 480 millions d'euros) et Hauts-de-France (soit 250 millions d'euros). Quelques jours avant la présentation de son avis, votre rapporteur avait obtenu un document du ministère indiquant que la confirmation précise de ces opérations de renouvellement « dépendra[it] toutefois des financements mobilisables sur le budget de l'Afitf. »

Ces incertitudes ont été levées par un engagement de la Ministre chargée des transports lors de son audition devant votre commission , en réponse à une question de votre rapporteur. La Ministre a précisé que les conventions relatives au renouvellement des matériels roulants dans ces deux régions seraient soumises au conseil d'administration de l'Afitf au début de l'année 2018.

L'État a également signé, le 27 février 2017, une nouvelle convention avec SNCF Mobilités pour l'exploitation des trains d'équilibre du territoire, couvrant la période 2016-2020.

En parallèle, l'État a poursuivi sa politique de renouvellement des matériels roulants engagée en 2013 :

- en application d'un accord conclu en décembre 2013, 34 nouvelles rames Coradia Liner, d'un montant total de 510 millions d'euros, ont été financées par l'Afitf et sont en cours de déploiement sur les lignes Paris-Troyes-Belfort, Nantes-Bordeaux et Nantes-Lyon ;

- en application d'un accord conclu en février 2017, 30 autres rames Alstom, d'un montant de 362 millions d'euros, doivent être financées par l'Afitf et livrées entre 2018 et 2019 sur les lignes Paris-Boulogne, Toulouse-Hendaye, Bordeaux-La Rochelle, Bordeaux-Limoges, Bordeaux-Ussel, le Cévenol et la desserte de Montluçon ;

- en application d'un accord conclu en avril 2016 avec la région Normandie, une quarantaine de rames Omneo Premium de Bombardier, d'un montant de 720 millions d'euros, doivent être livrées entre 2019 et 2021 sur les lignes Paris-Caen-Cherbourg/Trouville-Deauville et Paris-Rouen-Le Havre, avec une participation de la région de 70 millions d'euros.

B. LES CRÉDITS DU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE

Le compte d'affectation spéciale sert à financer les trains d'équilibre du territoire . Il couvre en particulier :

- les contributions versées à SNCF Mobilités pour l'exploitation de ces services ;

- les contributions relatives aux matériels roulants , à l'exception des dépenses relatives au renouvellement des matériels roulants, qui sont financées par l'Afitf ;

- les dépenses résultant des enquêtes de satisfaction sur la qualité de service et des frais d'études et de missions de conseil juridique, financier ou technique directement liés à l'exercice par l'État de ses responsabilités d'autorité organisatrice ;

- à partir de cette année 17 ( * ) , les contributions versées par l'État aux régions au titre de sa participation aux coûts d'exploitation des services nationaux de transports de voyageurs qui leur sont transférés à compter de 2017.

Le montant total des crédits du compte d'affectation spéciale passera de 358 millions d'euros à 383,2 millions d'euros en 2018 , soit une augmentation de 7 %.

Le ministère chargé des transports explique cette augmentation par plusieurs facteurs. En premier lieu, le transfert des lignes aux régions, qui a commencé en 2017 pour certaines d'entre elles, s'échelonnera sur plusieurs années, jusqu'à 2020. Dans l'intervalle, l'État continuera à financer leur exploitation. Par ailleurs, ce montant comprend 73 millions d'euros de compensations versées aux régions en contrepartie du transfert de certaines lignes.

Les crédits du compte d'affectation spéciale se décomposent entre les crédits consacrés à l'exploitation des trains d'équilibre du territoire, soit 302 millions d'euros, dont 1,5 million d'euros correspondent aux frais d'enquêtes, d'études et de conseil, et les crédits consacrés au matériel roulant, soit 81 millions d'euros. Ils couvrent l'amortissement et les frais financiers relatifs aux matériels roulants, car les dépenses relatives à l'achat de nouveaux matériels roulants sont prises en en charge par l'Afitf.

Ce compte est abondé par les trois recettes suivantes :

- la contribution de solidarité territoriale (CST), due par les entreprises de service de transport ferroviaire de voyageurs ;

- la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires (TREF), acquittée par les entreprises de service de transport ferroviaire de voyageurs dont le chiffre d'affaires soumis à la CST est supérieur à 300 millions d'euros ;

- une fraction de la taxe d'aménagement du territoire payée par les sociétés concessionnaires d'autoroutes.

La répartition de ces trois recettes est modifiée cette année, puisque les deux premiers produits, en réalité issus de SNCF Mobilités, vont diminuer, tandis que le troisième va augmenter :

Recettes du compte d'affectation spéciale (en millions d'euros)

Loi de finances pour 2017

Projet de loi de finances rectificative pour 2017

Projet de loi de finances pour 2018

Contribution de solidarité territoriale

116

40

16

Taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires

200

226

226

Sous-total correspondant à la contribution de SNCF Mobilités

316

266

242

Fraction de taxe d'aménagement du territoire

42

92

141,2

Total

358

358

383,2

Le Gouvernement s'est en effet engagé à diminuer, à partir de 2017, la fiscalité pesant sur SNCF Mobilités. Cette mesure figure à l'article 2 du projet de loi de finances rectificative n° 384 pour 2017. L'augmentation de la fraction de taxe d'aménagement du territoire applicable aux sociétés concessionnaires d'autoroutes est compensée par une diminution de la fraction de taxe d'aménagement du territoire affectée à l'Afitf.

IV. FOCUS SUR LE FRET FERROVIAIRE

La Cour des comptes a récemment réalisé une série d'enquêtes relatives à l'activité de transport ferroviaire de marchandises du groupe SNCF au cours de la période 2008-2016. Les principaux enseignements de ce travail figurent dans un référé du 3 juillet 2017 adressé au Ministre de la transition écologique et solidaire, Nicolas Hulot, et à la Ministre chargée des transports, Élisabeth Borne, qui souligne la situation préoccupante de Fret SNCF et les incohérences de l'État dans sa politique de soutien au fret.

A. LA SITUATION PRÉOCCUPANTE DE FRET SNCF

L'activité de transport ferroviaire de marchandises du groupe SNCF est assurée, d'une part, par Fret SNCF , composante de l'établissement public à caractère industriel et commercial SNCF Mobilités, d'autre part, par Voies ferrées locales et industrielles (VFLI) , filiale de statut privé détenue par SNCF Mobilités et créée en 2008 pour permettre au groupe de s'adapter à l'ouverture à la concurrence du fret, effective depuis 2006.

Après avoir bénéficié d'une recapitalisation de 1,4 milliard d'euros en 2005, Fret SNCF a fait l'objet d'un travail important d'adaptation et de réorganisation , salué par la Cour des comptes. Son personnel a quasiment été divisé par deux entre 2008 et 2015, passant de 14 933 à 7 420 agents. Une grande partie de son matériel roulant, soit 262 engins moteurs, a été vendue à la filiale de la SNCF Akiem, société de gestion d'actifs créée en 2008 pour optimiser la gestion du parc de locomotives de fret de la SNCF. Elle n'en a repris qu'une centaine en location. Ses activités ont également été rationalisées pour subir moins de pertes : l'activité de wagon isolé a évolué vers une offre « multi-lots multi-clients. ».

Mais Fret SNCF reste très pénalisé par le coût et le régime de travail de ses personnels . Sa masse salariale reste importante, malgré la réduction des effectifs. Par rapport à un opérateur privé, le surcoût lié à l'organisation du temps de travail est de 20 %, voire de 30 % si l'on prend en compte l'absentéisme très élevé qu'il subit. Le nombre moyen de jours d'absence par agent et par an chez Fret SNCF, soit 12,8 en 2014, est en effet proche du double de celui observé chez VFLI, soit 6,6.

La loi du 4 août 2014 portant réforme ferroviaire devait donner l'opportunité à l'État et au groupe public ferroviaire de réduire le différentiel de compétitivité entre l'opérateur public et les autres entreprises ferroviaires ainsi que les transporteurs routiers. Mais cette occasion a été manquée : dans le contexte des grèves liées à la loi El Khomri et de l'Euro de football, l'État a imposé à la SNCF un accord d'entreprise très favorable aux agents, « qui maintient, voire améliore, pour les salariés de Fret SNCF, leur régime de travail. »

La marge opérationnelle de Fret SNCF est restée constamment négative entre 2008 et 2015, et son endettement financier net a plus que doublé entre 2008 et 2014, passant de 1,8 milliard d'euros à plus de 4 milliards d'euros. Il devrait dépasser les 5 milliards d'euros en 2020.

Ainsi, « la Cour constate, comme le font au demeurant les responsables de la SNCF, que Fret SNCF ne parvient pas, en l'état, à un résultat opérationnel équilibré et, a fortiori , à dégager les marges nécessaires au financement du renouvellement de ses outils de production. Le règlement de cette situation apparaît aujourd'hui comme crucial, d'autant qu'il constituerait un préalable à toute nouvelle aide éventuelle de l'État en capital à Fret SNCF. »

Or, pour être validée par l'Union européenne, une telle aide ne pourrait être versée sans une clarification préalable du référentiel comptable de SNCF Mobilités, qui a été refusé à deux reprises par l'Arafer. En tout état de cause, le statu quo ne saurait être maintenu pour Fret SNCF.

La Cour des comptes préconise à l'État de fixer à Fret SNCF des objectifs significatifs de progression de sa productivité et de s'assurer de leur mise en oeuvre, après avoir relevé que le contrat de performance signé entre l'État et SNCF Mobilités ne prévoit que des engagements très généraux à cet égard, sans indicateur de suivi.

À l'inverse, VFLI a su tirer parti de la souplesse de son offre, de son cadre social et de son modèle économique.

B. LES INCOHÉRENCES DE LA POLITIQUE DE L'ÉTAT

Entre 2008 et 2014, la part du transport ferroviaire dans le transport terrestre de marchandises a reculé, de 10,2 % à 9,5 %. Le total des marchandises transportées est passé de 40,4 milliards d'euros de tonnes-kilomètre en 2008 à 32,2 en 2014, soit une baisse de 21 %. Comme le rappelle la Cour des comptes, cette évolution doit être considérée en tenant compte de l'évolution générale de l'économie française, en particulier du recul du secteur industriel. Mais elle a été aggravée par le mauvais état du réseau, dont les travaux de rénovation ont contribué à dégrader la fiabilité des sillons octroyés pour le fret ferroviaire.

L'État a toujours affiché un soutien au fret ferroviaire. Mais il n'a pas toujours réalisé les investissements nécessaires et a pris des décisions qui le pénalisent fortement, dans un contexte où la concurrence du transport routier est vive. Ainsi en est-il de l'abandon de l'écotaxe . De même, le cadre social applicable à la branche , négocié à la suite de la loi de réforme ferroviaire du 4 août 2014, a alourdi l'organisation du travail pour les opérateurs ferroviaires privés.

Dans les années à venir, les entreprises de fret seront en outre confrontées à une augmentation des redevances d'infrastructures , puisque le contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau prévoit un rattrapage en dix ans du coût d'usage de l'infrastructure, soit une évolution moyenne des péages de l'ordre de 4,5 % par an au-delà de l'inflation ferroviaire, dont une part fixe de 1,3 % et une part complémentaire conditionnée à une amélioration de la qualité des sillons délivrés.

L'équation deviendra donc de plus en plus compliquée pour les entreprises de fret ferroviaire, si l'État n'élabore pas de stratégie globale pour défendre ce mode de transport face à la route.

Il existe par ailleurs de fortes incertitudes sur le maintien des lignes capillaires fret , qui dépendront surtout de l'implication des acteurs locaux. D'après la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer, sur la période 2015-2017, l'État s'est engagé, par une dotation de l'Afitf, à participer à hauteur de 10 millions d'euros par an pour assurer la pérennisation de 800 kilomètres de lignes. Le taux de subvention varie entre 10 et 35 % selon les opérations. Un engagement similaire de l'État est prévu sur la période 2018-2020.

ANNEXE - ÉVOLUTION DE L'OFFRE DES TRAINS D'ÉQUILIBRE DU TERRITOIRE

Lignes de trains d'équilibre du territoire gérées par l'État au 31 décembre 2015

Évolution prévue

LIGNES DE JOUR

Paris-Orléans-Limoges-Toulouse

Paris-Clermont-Ferrand

Bordeaux-Toulouse-Marseille-Nice

Quimper-Nantes-Bordeaux-Toulouse

Nantes-Tours-Lyon

Toulouse-Hendaye

Lignes continuant à être gérées par l'État :

Paris-Orléans-Limoges-Toulouse

Paris-Clermont-Ferrand

Bordeaux-Toulouse-Marseille

Nantes-Bordeaux

Nantes-Tours-Lyon

Toulouse-Hendaye

Hirson-Charleville-Metz

Reims-Dijon

Transfert à la région Grand Est effectif depuis le 1 er janvier 2017

Clermont-Ferrand-Béziers

Cogestion entre l'État et la région Occitanie en 2017 et 2018

Paris-Troyes-Belfort

Transfert à la région Grand Est le 1 er janvier 2018

Bordeaux-La Rochelle

Bordeaux-Limoges

Bordeaux-Ussel

Transfert à la région Nouvelle-Aquitaine le 1 er janvier 2018

Clermont-Ferrand-Nîmes

Transfert à la région Occitanie le 1 er janvier 2018

Paris-Orléans-Tours

Paris-Bourges-Montluçon

Paris-Montargis-Nevers

Transfert à la région Centre-Val de Loire le 1 er janvier 2018

Paris-Amiens-Boulogne

Paris-Saint-Quentin-Maubeuge/Cambrai

Transfert à la région Hauts-de-France le 1 er janvier 2019

Paris-Caen-Cherbourg/Trouville-Deauville

Paris-Évreux-Serquigny

Paris-Rouen-Le Havre

Caen-Le Mans-Tours

Paris-Granville

Transfert à la région Normandie le 1 er janvier 2020

LIGNES DE NUIT

Paris-Toulouse-Latour-de-Carol/Cerbère-Port Bou

La ligne de nuit Paris-Toulouse-Latour-de-Carol/Rodez est gérée par l'État 18 ( * )

Paris-Toulouse/Rodez-Albi

Paris-Briançon/Nice

Maintien de la ligne Paris-Briançon , gérée par l'État

Suppression de la ligne Paris-Nice à partir du 8 décembre 2017

Paris-St Gervais/Bourg-St-Maurice

Supprimée depuis le 1 er octobre 2016

Luxembourg/Strasbourg-Nice/Cerbère

Supprimée depuis le 1 er octobre 2016

Paris-Tarbes-Hendaye

Supprimée depuis 1 er juillet 2017

Source : commission de l'aménagement du territoire et du développement durable, à partir de documents fournis par la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer

TRAVAUX EN COMMISSION

I. AUDITION DE LA MINISTRE

Réunie le mercredi 8 novembre 2017, la commission a entendu Mme Élisabeth Borne, ministre auprès du ministre d'État, ministre de la Transition écologique et solidaire, chargée des Transports.

M. Hervé Maurey , président . - Madame la Ministre, nous sommes très heureux de vous accueillir, pour la deuxième fois depuis que vous êtes au gouvernement, devant notre commission. Nous vous avons invitée pour discuter des crédits du projet de loi de finances consacrés aux transports et à la mobilité, mais aussi pour évoquer les nombreux sujets d'actualité de ce secteur en pleine mutation. Je rappelle à nos nouveaux collègues que lorsque vous êtes venue devant la commission le 20 juillet dernier, c'était pour nous présenter votre feuille de route. Vous avez ainsi lancé, au mois de septembre, les Assises de la mobilité, destinées à redéfinir les priorités dans ce secteur. Elles doivent déboucher sur une loi d'orientation, qui permettra notamment la programmation des projets et des financements de l'État sur cinq ans.

S'agissant du budget pour 2018, nous nous interrogeons - comme les années précédentes - sur les ressources de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France, l'Afitf. Certes, son budget devrait augmenter, de 2,2 à 2,4 milliards d'euros. Mais Philippe Duron, l'ancien président de l'Afitf, estimait en août dernier qu'il lui faudrait un budget de 3 milliards d'euros dès 2018 pour assumer l'ensemble des engagements de l'État... Comment l'agence va-t-elle pouvoir faire face à cette insuffisance de financements ?

Après votre propos liminaire, je laisserai la parole aux différents rapporteurs pour avis des crédits consacrés aux transports - Nicole Bonnefoy pour les transports aériens, Jean-Pierre Corbisez pour les transports routiers, Gérard Cornu pour les transports ferroviaires, collectifs et fluviaux et Charles Revet pour les transports maritimes - pour qu'ils puissent vous poser des questions précises sur ces différents aspects du budget des transports.

Je voudrais juste ouvrir quelques pistes pour lancer nos débats. Et je me contenterai des deux grands domaines de préoccupation récents de la commission. Le premier concerne le financement de l'entretien et de la régénération du réseau routier national, sur lequel la commission a donné l'alerte cet été. Nous attendons que vous nous disiez si l'augmentation des crédits prévus pour 2018 sera suffisante pour enrayer la dégradation du réseau.

Dans le domaine ferroviaire, le Premier ministre a confié à Jean-Cyril Spinetta la mission ambitieuse de réfléchir à la refondation du système ferroviaire. Nous avons entendu de nombreuses inquiétudes de la part des territoires concernant les dessertes. Par ailleurs, mes collègues Michel Dagbert, Gérard Cornu et moi-même, qui siégeons au Conseil d'orientation des infrastructures, avons été très étonnés de constater l'absence du critère de l'aménagement du territoire dans les critères d'évaluation d'un projet. Pour nous, il est incompréhensible que l'utilité d'un projet ne soit examinée qu'à l'aune de sa rentabilité financière.

Je ne reviendrai pas sur l'ensemble des enjeux à traiter, mais en voici quelques-uns. Tout d'abord, la dette de SNCF Réseau va dépasser les 50 milliards d'euros à la fin de l'année et augmente de 3 milliards d'euros chaque année : c'est un sujet de préoccupation majeur pour nous, qu'envisagez-vous ?

Je souhaite également évoquer le contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau, signé quelques jours avant les élections présidentielles, malgré un avis très négatif de l'Arafer et sur lequel nous avions émis de vives réserves, tant sur la forme que sur le fond. Allez-vous rouvrir ce chantier pour corriger les insuffisances du contrat et en faire un véritable outil d'amélioration de la performance de l'opérateur ?

Enfin, l'Arafer demande depuis 2011 une réforme de la tarification du réseau. En 2015, l'Arafer avait exigé que cette réforme soit effective pour l'année 2018. Mais SNCF Réseau n'a pas respecté ce délai, et vous avez signé un décret lui permettant de s'affranchir de l'avis conforme de l'Arafer pour 2018. Or, ce décret est contestable à plusieurs égards : tout d'abord, il est en contradiction avec la loi de réforme ferroviaire de 2014. Ensuite, il permet à SNCF Réseau, pour 2018, d'indexer ses péages conformément au contrat-cadre signé avec l'État, alors que l'Arafer s'est vivement opposée à cette indexation. Enfin, il n'encourage pas les opérateurs à mettre en oeuvre les réformes nécessaires dans les temps.

Cette dernière remarque me permet de passer à un autre sujet : la libéralisation du transport de voyageurs. Une proposition de loi, issue des travaux de la commission, devrait être examinée en début d'année prochaine. Je reste en effet très inquiet au sujet du calendrier de mise en oeuvre de cette réforme. Les échéances fixées à l'échelle européenne nous laissent très peu de temps pour légiférer. Ce sujet sera-t-il traité dans la loi d'orientation sur la mobilité annoncée pour le premier semestre 2018 ? Le cadre législatif de cette réforme d'envergure pourra-t-il être définitivement fixé au 1 er janvier 2019, comme les textes européens le prévoient pour les TGV ? Enfin, les régions pourront-elles ouvrir à la concurrence leurs services TER dès le 3 décembre 2019, comme l'impose le quatrième paquet ferroviaire ? L'administration a régulièrement entretenu une certaine confusion à ce sujet ces dernières années. Ainsi, la lettre de mission du Premier ministre à M. Spinetta parle d'une période de transition. Quelle en est la signification ? En effet, par définition, une période transitoire va exister, car la mise en concurrence se fera au fur et à mesure de l'arrivée à échéance des contrats actuels.

Mme Élisabeth Borne, ministre . - Mesdames et Messieurs les Sénateurs, je suis très heureuse d'être devant votre commission, que je sais compétente et engagée dans le domaine des transports. Elle est également enrichie de nouveaux talents depuis mon audition du 20 juillet dernier au terme du renouvellement sénatorial de septembre.

En juillet dernier, j'avais présenté ma feuille de route, articulée autour de trois objectifs : orienter, protéger, soutenir. Orienter, c'est préparer les mobilités des prochaines décennies, avec un objectif clair, celui de la mobilité pour tous, et dans tous les territoires, adaptée aux besoins de la population et de l'économie. Protéger, ensuite, c'est dans un monde de plus en plus ouvert, définir les conditions dans lesquels les opérateurs vont agir et anticiper les risques. Mais c'est aussi donner des garanties pour que cette ouverture ne se fasse pas au détriment des salariés, des entreprises et des consommateurs, face aux distorsions qu'elle peut créer. Soutenir, enfin, c'est structurer et appuyer les filières économiques, de la logistique, de l'industrie et de la mer.

Beaucoup de travaux ont été engagés depuis juillet. Ainsi, les Assises nationales de la mobilité ont été lancées le 19 septembre dernier. Le Sénat est pleinement associé à ces travaux - c'était d'ailleurs une attente forte de votre commission. Par ailleurs, le conseil d'orientation des infrastructures, présidé par Philippe Duron et auquel vous avez bien voulu vous associer Monsieur le Président, ainsi que deux de vos collègues, MM. Cornu et Dagbert, a été mis en place. J'ai confié à Jean-Cyril Spinetta une mission sur le modèle du transport ferroviaire. En outre, Anne-Marie Idrac vient d'être désignée Haut responsable de la stratégie nationale pour le véhicule autonome, et une mission lui a également été confiée sur ce thème.

Les défis ne manquent pas et je porte une politique ambitieuse et réaliste. Je ne souhaite pas être la ministre des promesses irréalisables. Il est en effet temps de regarder la réalité des besoins, et pas seulement les projets qui ont été promis depuis des décennies. Il est également temps de mettre en adéquation nos moyens et nos ambitions. Il peut paraitre paradoxal de prévoir pour 3 milliards d'euros de dépenses sur le budget de l'Afitf, alors que les ressources ne sont que de 2,2 milliards d'euros.

Le budget pour l'année 2018 est ainsi un budget de transition, dans l'attente de l'aboutissement des chantiers ouverts. Je sais que je pourrai compter sur votre commission pour nous aider à mieux définir les priorités soutenables, comme nous y aide aussi la mobilisation de nos concitoyens et de nombreux acteurs du secteur. Ce projet de loi de finances 2018 n'est qu'une nouvelle étape de la réorientation que nous avons engagée en faveur des transports du quotidien et de la remise à niveau des réseaux existants.

Assises, budget 2018, loi d'orientation des mobilités et de programmation, conclusions de la mission Spinetta vont rythmer ces prochains mois et concrétiser ma feuille de route dont les cinq axes sont les suivants : mettre en place une stratégie des mobilités adaptée aux besoins de nos populations ; rétablir un financement réaliste de nos infrastructures ; veiller à ce que l'ouverture à la concurrence du ferroviaire soit bénéfique pour l'ensemble du secteur ; veiller à soutenir les filières logistiques et industrielles ; relever les nouveaux défis en matière de sécurité et de sureté et améliorer l'efficience de l'action publique.

En ce qui concerne la mise en place d'une stratégie des mobilités adaptée aux besoins des populations, les Assises de la mobilité qui se déroulent jusqu'à la fin de l'année déboucheront sur une loi d'orientation des mobilités qui sera présentée au Parlement début 2018. Il nous faut donner la priorité aux transports de la vie quotidienne, à l'entretien et la modernisation des réseaux existants. C'est la raison pour laquelle, les crédits consacrés à la réalisation des contrats de partenariat État-Régions (CPER), outil précieux permettant la réalisation d'ambitions partagées entre les régions, les collectivités et l'État, ne sont pas concernés par la pause que j'ai demandée. Ils pourront en outre être augmentés dans le cadre du budget de l'Afitf. De même, les crédits consacrés à la régénération et à la modernisation du réseau routier national vont connaître une hausse très significative de 25 %, soit 100 millions d'euros. Toutefois, nous ne sommes pas au bout des efforts nécessaires pour remettre en état le réseau routier, mais nous avons voulu engager une première marche. Le mouvement est également engagé sur le fluvial, où 10 millions d'euros supplémentaires sont prévus, soit une hausse de 14 %. Par ailleurs, les commandes de l'État pour les trains d'équilibre du territoire pourront être honorées en totalité, pour l'ensemble des régions, en 2018.

Deuxièmement, je souhaite un rétablissement d'un financement réaliste et sincère de nos infrastructures. Il n'est plus acceptable de promettre des projets sans assurer leur financement. Un changement complet de méthode, en la matière, s'impose.

Dans le cadre de la priorité à l'entretien et à la régénération des réseaux, j'ai lancé des audits des réseaux routiers et fluviaux afin de connaître leur état réel, à l'instar de ce qui avait dû être fait en urgence pour le ferroviaire. Je suis consciente de cette absolue nécessité de mieux connaître nos réseaux avant de décider d'une vraie politique de rénovation à la hauteur des enjeux et sans attendre leur dégradation trop avancée. En effet, une fois arrivé à un tel état de dégradation, il est ensuite très difficile et coûteux de remettre les réseaux en état. C'est ce que l'on souhaite éviter dans le domaine des réseaux routiers et fluviaux. Il fallait aussi stabiliser les deux grands projets européens que sont la ligne ferroviaire Lyon-Turin et le canal Seine-Nord Europe. Nous travaillons pour d'une part, financer sur plusieurs décennies - dans un montage en financement de projet - des infrastructures construites pour durer plus d'un siècle, d'autre part, dégager des ressources dédiées, de façon à ce que ces projets ne viennent pas obérer la capacité à financer quoi que ce soit d'autre dans le cadre de l'Afitf.

Le Conseil d'orientation des infrastructures prépare les choix soutenables qui seront soumis au Parlement début 2018 dans la loi de programmation des infrastructures.

Sans attendre les conclusions de ces travaux qui rendront possibles la sortie de la pause annoncée par le Président de la République le 1er juillet 2017, et en lien avec la première priorité aux réseaux existants que j'ai développée, il nous est apparu nécessaire d'augmenter de 200 millions d'euros les recettes de l'Afitf dès 2018.

Au-delà des financements de l'Afitf, le grand plan d'investissement et les actions combinées avec le ministère de la Transition énergétique et solidaire nous permettront d'accélérer la transition énergétique des transports, notamment dans le domaine de la motorisation, mais aussi en favorisant les mobilités collectives ou partagées pour les personnes, et les modes les plus respectueux de l'environnement pour les marchandises.

Le troisième axe est celui de la régulation et de la transformation du secteur des transports, en général, et du ferroviaire en particulier. Cela suppose de rétablir un modèle économique qui n'est plus soutenable dans le domaine ferroviaire : chacun a en tête que la dette de SNCF est de 45 milliards d'euros en 2017. Elle augmente de 3 milliards d'euros par an alors que l'État versera, en 2018, 2,4 milliards d'euros de concours ferroviaires via le programme 203.

Cette « remise en ordre » du secteur ferroviaire est indispensable à la veille d'une ouverture à la concurrence prévue dans le cadre du 4 è paquet ferroviaire dont nous devons faire une réussite pour tous les acteurs : voyageurs, cheminots, régions, autorités organisatrices. J'ai pu pointer le déséquilibre des dessertes TGV : 70 % de celles-ci sont aujourd'hui déficitaires, alors même que les voyageurs trouvent que le prix des billets est souvent élevé. J'ai aussi souligné que le mode de desserte que nous avons retenu, dans lequel les TGV ne circulent pas uniquement sur des voies à grande vitesse, mais assurent une desserte fine des territoires, a un coût. Pour autant, je pense que chacun est attaché à ce mode de desserte. Il n'est pas question de le remettre en cause. Toutefois, il nous faut avoir une stratégie d'ensemble cohérente, vis-à-vis de la SNCF, et ne pas demander tout à la fois des TGV qui assurent une desserte fine des territoires, des billets moins chers, et des péages élevés. Cela renvoie à la question des péages. Là encore, nous sommes dans une période de transition. Compte tenu de la réflexion qui est engagée, il nous fallait prendre des dispositions pour l'année 2018. Mais je vous confirme que le rôle de l'Arafer est particulièrement précieux. C'est une corde de rappel utile, par rapport à une approche qui pourrait être exclusivement comptable, alors que les péages sont pour moi un levier fondamental de la politique des transports. Je suis attachée à ce que le TGV reste un mode de transport pour tous, qui continue à assurer une desserte des territoires. Il faut en tirer les conclusions s'agissant des péages.

La régulation, c'est aussi le cadre européen pour les transports, avec notamment les discussions qui s'engagent sur le paquet « mobilité », dans la suite de celles qui ont pu être conclues au conseil des ministres du travail sur la directive « travailleurs détachés ». Ce seront des discussions qui seront très certainement soutenues.

C'est également au niveau de l'Europe que se dessinent la modernisation du contrôle aérien et les investissements qui l'accompagnent, portés en France par le budget annexe « contrôle exploitation aériens », dans un contexte de hausse des trafics. Par ailleurs le dernier protocole social de la DGAC a permis d'améliorer la flexibilité du travail pour répondre de façon efficace aux pointes.

C'est, en revanche, au niveau national que nous devrons définir un cadre législatif pour les plateformes numériques permettant tout à la fois de libérer les initiatives, de protéger les usagers et les travailleurs et d'assurer une concurrence loyale entre les acteurs.

Le quatrième axe vise à soutenir les filières logistiques et industrielles. Il se retrouve dans deux grands programmes. Tout d'abord dans les crédits de la DGAC, pour lesquels, il nous a semblé indispensable de revenir à un niveau qui se rapproche des montants de l'Allemagne ou de l'Angleterre - soit un soutien de 135 millions d'euros pour 2018, pour la recherche aéronautique civile. C'est important dans un secteur qui représente près de 200 000 emplois et aura recruté près de 8 000 nouveaux collaborateurs en 2017. Toutefois, les crédits de Recherche et Développement avaient été ramenés à zéro en 2017.

Ces enjeux se retrouvent également dans la stratégie portuaire et maritime que le Premier ministre présentera aux assises de l'économie de la mer le 21 novembre au Havre. Le Gouvernement doit encore préciser ses positions tant fiscales que budgétaires en tenant compte des décisions récentes du Conseil d'État et de la Commission européenne.

Le cinquième axe concerne les nouveaux défis en matière de sécurité et de sûreté et d'amélioration de l'efficience de l'action publique. Le premier défi, c'est d'abord de rendre plus sûrs tous les transports. La sécurité est toujours au coeur des préoccupations, notamment dans les transports publics. Depuis 2001, la sûreté est devenue tout aussi critique et nous connaissons malheureusement des menaces terroristes avérées.

En matière de sûreté, le transport aérien est en première ligne dans un cadre défini au niveau international, celui de l'OACI, ou européen. Le gouvernement dispose d'un processus national efficace de décision associant toutes les forces de sécurité s'appuyant sur un service technique, le STAC (service technique de l'aviation civile), très compétent et internationalement reconnu. Il intègre maintenant l'évaluation des aéroports étrangers d'où pourraient venir les menaces.

Les transports terrestres et maritimes vont aussi devoir intégrer ces exigences, y compris en capitalisant sur l'expérience de l'aviation civile via des comités interministériels terrestres, maritime et portuaire. Vous avez eu à vous prononcer sur la loi dite Savary. De nouveaux moyens ont été mis en place dans ce domaine. Nous avons pu avec le Premier ministre nous rendre sur le terrain, vendredi dernier, pour mesurer la mobilisation des opérateurs et l'efficacité des mesures mises en place, suite à cette loi. Nous allons devoir continuer à travailler sur ces sujets : outre la présence humaine, les enjeux de vidéo-protection sont encore très importants. Nous avons encore des marges de progrès, en mettant en oeuvre des technologies de vidéos intelligentes.

Ces exigences auront sans doute vocation à trouver une traduction budgétaire directe sur les programmes 203 et 205. Le programme 203, au-delà des subventions au ferroviaire, permet notamment des interventions dans le domaine des infrastructures routières (y compris en termes d'exploitation), dans le domaine fluvial, via VNF, ainsi que l'ensemble des régulations des transports terrestres. Il est en légère hausse de 0,4 % et recevra ensuite le rattachement des fonds de concours de l'Afitf pour l'État, en tant que maître d'ouvrage des routes nationales. Dans le domaine maritime, c'est l'ensemble du système des affaires maritimes qui est porté par le programme 205, dont le périmètre a été réduit par le départ de la pêche au Ministère de l'agriculture. Il est en baisse de 13 %.

Il s'agit donc d'un budget de transition qui traduit déjà la réorientation des priorités que j'ai souhaitée et qui, je crois, trouve un écho dans les priorités de votre commission Ainsi, la priorité à la mobilité du quotidien est déjà engagée à travers l'augmentation des ressources consacrées à la régénération des réseaux routiers, ferroviaires, fluviaux et portuaires.

Mais c'est également un budget de transition parce que les travaux engagés dans le cadre des Assises de la mobilité et avec le Conseil d'orientation des infrastructures devront trouver leur traduction dans la loi d'orientation des mobilités qui visera à définir le cadre propice au développement des mobilités de demain. La loi de programmation qui sera portée aura pour objectif de sortir de la spirale des promesses non tenues et de présenter une trajectoire plus adaptée aux réalités des besoins de notre pays. Je tiens à vous assurer, Monsieur le Président, que les enjeux d'aménagement du territoire seront bien pris en compte. Il s'agit de rétablir la confiance que les collectivités et nos concitoyens peuvent avoir dans les engagements de l'État.

M. Gérard Cornu . - Vous avez plusieurs fois rappelé que c'est un budget de transition. On peut le constater. J'approuve également votre méthodologie et le fait que vous souhaitez rompre avec la spirale des promesses non tenues. La pause demandée dans la construction des infrastructures devra se traduire, grâce au Conseil d'orientation des infrastructures et aux diverses commissions mises en place, par des effets concrets. J'espère que nous arriverons à trouver une méthode différente de celle existant auparavant.

Ma première question concerne le transfert des trains d'équilibre des territoires au TER. Vous nous avez dit qu'un accord avait été trouvé avec toutes les régions. Or, il me semblait qu'il y avait encore des problèmes dans deux régions, à savoir Les-Hauts-de-France et le Centre-Val-de-Loire, où il n'y aurait pas de formalisation de cet accord. Les montants sont importants : 480 millions d'euros pour la région Centre-Val-de-Loire et 250 millions d'euros pour Les-Hauts-de-France. Je tiens à rappeler que l'État s'est engagé à renouveler le matériel roulant. Or, des doutes subsistent. Pouvez-vous nous donner plus de précisions sur ce sujet ?

La Cour des comptes vous a envoyé, en juillet dernier, un référé sur le fret ferroviaire. À ma connaissance, vous n'y avez pas encore apporté de réponse. Le référé pointe les incohérences de l'État - à une époque où vous n'étiez pas ministre -, puisque malgré une volonté affichée de soutenir le fret ferroviaire, l'État n'a cessé de prendre des décisions le pénalisant fortement. On se souvient ainsi de l'abandon de l'écotaxe, de l'autorisation de circulation donnée aux poids lourds de 44 tonnes, ou encore de l'adoption d'un régime social très favorable pour la branche ferroviaire. Quelle est votre vision du fret ferroviaire ? Jusqu'à présent, si tout le monde est d'accord pour soutenir le fret, cela ne se traduit pas dans les faits.

M. Jean-Pierre Corbisez . - Le budget de l'Afitf va connaître une augmentation de 200 millions d'euros. Je m'en félicite, toutefois son budget reste très contraint et imposera de retarder des projets, ou d'échelonner les dépenses et les paiements. Fin 2016, l'agence avait déjà pris des engagements financiers pour un montant de 12,6 milliards d'euros, alors même que le contrat de plan 2015-2020 venait à peine d'être entamé. Ce qui est regrettable, c'est que le résultat de l'audit de nos voiries nationales ne sera connu qu'en décembre prochain. L'augmentation de 100 millions d'euros pour la rénovation du réseau routier sera-t-elle suffisante ? Par ailleurs, le nouveau président de l'Afitf sera-t-il prochainement nommé ?

Le gouvernement a récemment annoncé avoir trouvé un compromis pour le canal Seine Nord Europe. Toutefois, plusieurs points restent à préciser. Ainsi, la société du projet pourrait emprunter un milliard d'euros pour le compte de l'État. Ce dispositif envisagé sera-t-il respecté, sans instauration de nouvelles taxes touchant les populations du territoire des Hauts-de-France ? Par ailleurs, vous avez rappelé votre intention de soutenir la filière logistique. Or actuellement, lorsque l'on évoque le projet du canal Seine Nord Europe, on ne parle que du canal, mais pas des aménagements pour le développement économique, ou encore de construction de plateformes multimodales. Il serait ainsi anormal de construire dans un premier temps un canal, puis de réfléchir aux infrastructures logistiques, avant de se rendre compte qu'il faille détruire une partie du canal pour construire une plateforme multimodale.

Mme Nicole Bonnefoy . - Je salue la clarté de vos propos et votre détermination. Vous avez annoncé la tenue d'assises du transport aérien en 2018. J'y vois une volonté du gouvernement de soutenir la compétitivité de notre pavillon et de notre industrie aéronautique. Pouvez-vous d'ores et déjà nous donner des éléments sur le contenu de ces assises ? Peut-être pouvez-vous présenter des premières propositions ? Je pense notamment à l'avenir de la taxe Chirac, ou au coût de la sureté dans le transport aérien.

Vous avez parlé de la priorité que vous souhaitez accorder aux transports de la vie quotidienne. À ce sujet, je pense à la ligne Limoges-Angoulême, qui est dans un état désastreux. Or, c'est un train du quotidien pour des travailleurs, apprentis, lycéens, et des familles. Pouvez-vous non confirmer que la réhabilitation de cette ligne est une priorité ? Quel en sera le calendrier ?

Dans le cadre des Assises de la mobilité, des conférences des territoires ont été organisées. Il y en a eu une dans mon département. Ce qui remonte des territoires, et notamment des territoires ruraux, c'est la volonté de pouvoir expérimenter une taxe poids lourds. Vous le savez, mon département de la Charente est traversé par deux nationales, la nationale 10 et la nationale 141, qui sont un flot continu de poids lourds, lesquels fatiguent la chaussée, provoquent des accidents, engendrent des nuisances. Ils n'apportent ainsi pas un juste retour sur le plan économique aux territoires qu'ils traversent. Il y a une volonté des collectivités - des communautés de communes, mais aussi de la région Nouvelle-Aquitaine - d'avoir la possibilité d'expérimenter au plus tôt une taxation régionale des poids lourds.

Enfin, je vais me faire porte-parole des riverains de la LGV, en particulier ceux de la ligne Tours-Bordeaux, victimes de nuisances sonores très importantes. La semaine dernière, j'ai posé une question orale à ce sujet, et la réponse obtenue ne me satisfait qu'à moitié. J'ai bien noté que le ministère était informé de cette situation, et que des études acoustiques sont en cours. Mais la méthode utilisée pour ces dernières ne satisfait ni les riverains, ni les élus, qui souhaiteraient que soient mieux pris en compte le ressenti et les pics sonores. En outre, il a été évoqué l'utilisation du fonds de solidarité territoriale pour participer financièrement à la construction d'un mur anti-bruit. Je tiens à rappeler que ce fonds est destiné aux communes et collectivités traversées par les LGV, afin de les dédommager des préjudices subis, et non à la construction de murs anti-bruit. Les élus locaux m'ont fait part de leur mécontentement face à cette annonce.

M. Charles Revet . - J'ai été rapporteur de la réforme portuaire de 2008, créant les grands ports maritimes français. À de très nombreuses reprises, j'ai répété que la France dispose d'une place privilégiée - notamment Marseille et Le Havre qui sont les ports géographiquement les mieux placés en Europe du Sud et du Nord. Or aujourd'hui, on ne peut que constater le recul de l'activité de nos 7 grands ports maritimes. Ainsi, il y a 20-25 ans, le Havre traitait autant de conteneurs qu'Anvers. Aujourd'hui, Anvers traite plus de conteneurs que l'ensemble des ports français réunis. Nous sommes géographiquement les mieux placés, mais sommes les derniers en Europe. Comment expliquer cette situation ?

En outre, envisagez-vous de décentraliser la gouvernance des ports ? Je ne parle pas d'un transfert des ports aux régions ou aux autres collectivités, mais simplement d'une décentralisation de leur gouvernance. En effet, en Europe, il n'y a que deux États, où les ports sont des ports d'État : l'Espagne et la France. Il y a quelques années, l'Espagne a décidé d'en décentraliser la gouvernance. Depuis, le trafic maritime y a augmenté.

Le projet de loi de finances pour 2018 supprime l'exonération des charges patronales introduite par la loi pour l'économie bleue de 2016. Je ne développerai pas d'avantage - je pense que notre collègue Didier Mandelli le fera - mais je voudrais avoir votre position sur ce sujet.

Enfin, nous devons préparer nos ports à l'ouverture du canal Seine Nord Europe. L'actuel Premier ministre - qui était le maire du Havre - n'y était pas très favorable mais ce canal est souhaité par l'Union européenne et par l'ensemble des collectivités. Pour moi, le canal se fera. Il faut alors que nos ports soient prêts, notamment ceux de l'axe de la Seine, afin qu'ils ne payent pas le prix de cette ouverture. Actuellement, 85 % du post et préacheminement des marchandises vers et en provenance des ports se fait par la route ; à peine 15 % par voie fluviale ou ferroviaire. Envisagez-vous de mettre en place un équipement, afin que les ports de la Seine soient opérationnels et dans de bonnes conditions, avant l'ouverture du canal ?

M. Hervé Maurey , président . - Nous allons sans doute organiser au mois de décembre une table ronde sur la question du canal Seine Nord Europe. Les services du ministère seront naturellement étroitement associés.

Mme Fabienne Keller . - Tout comme nombre de mes collègues, je salue votre démarche, claire, structurée et courageuse. Vous proposez une grande remise à plat, en examinant tous les projets.

Sur l'écotaxe, vous avez évoqué le fait qu'il faudrait pouvoir faire payer les poids lourds en transit. Nous sommes tous d'accord sur ce point. L'idée d'une taxe régionale a été évoquée. Mais comment garantir une cohérence à l'échelle nationale ? L'augmentation de la TICPE, remplace certes cette année encore les recettes attendues de l'écotaxe, mais elle ne présente pas la même dynamique potentielle que cette dernière.

Vous nous avez dit avoir confié une mission sur les péages et le droit de passage des trains. En effet, le péage décourage parfois l'exploitant de faire des propositions de trains supplémentaires en raison du coût. Il préfère plutôt accoupler les trains, car cela revient à un péage moins cher au final. Je souhaitais vous interroger sur ce point.

Enfin, en cette période de COP 23, je me permets de rappeler une proposition que nous avions faite dans le cadre des travaux préparatoires pour la COP 21. Elle concernait les carburants des avions et les carburants maritimes, qui sont souvent des bitumes et carburants de mauvaise qualité, contribuant à une pollution importante, notamment dans les ports. Ces carburants ne sont pas fiscalisés aujourd'hui. Ne pourrait-on pas appliquer, au niveau mondial, une toute petite taxe sur ces derniers, qui alimenterait le fonds vert ?

Mme Élisabeth Borne, ministre. - Les engagements que l'État a pris concernant le renouvellement du matériel des trains d'équilibre du territoire seront bien tenus pour l'ensemble des régions. J'ai eu l'occasion de l'indiquer aux deux présidents de régions concernés. Nous réfléchissons actuellement à la façon dont l'État va lisser cette dépense. Chacun doit être conscient que l'on parle de montants considérables. Ce sont en effet 3,7 milliards d'euros supplémentaires qui doivent être trouvés dans le budget de l'Afitf, alors même qu'aucune recette supplémentaire n'a été dégagée. Mais nous honorerons nos engagements. Les deux conventions que vous avez mentionnées seront soumises au conseil d'administration de l'Afitf début 2018.

La situation n'est pas satisfaisante s'agissant du fret ferroviaire. En effet, les trafics ont chuté d'un tiers au cours des quinze dernières années. Le trafic s'est stabilisé entre 2010 et 2015, avec même une légère progression. Mais l'année 2016 a été mauvaise, pour diverses raisons, qui vont de la très mauvaise récolte céréalière, aux mouvements sociaux que la SNCF a pu connaître. L'année 2017 ne se présente pour l'instant pas très bien. Il en est de même pour Fret SNCF, qui avait amorcé un redressement significatif avec une réduction de son déficit. Toutefois, ce dernier a plafonné en 2016, et ne devrait pas être dans une situation satisfaisante en 2017. Les trafics ne repartent pas à la hausse en 2017, alors que nous l'avions espéré après le creux de 2016. Dans l'ensemble, la situation des acteurs du secteur ferroviaire de marchandises n'est pas satisfaisante. Certes, on pourrait se consoler en se disant que toutes les entreprises ferroviaires connaissent actuellement des difficultés en Europe. Mais la situation est pire chez nous.

Lors des Assises de la mobilité, il est prévu de traiter de la mobilité des personnes et de la logistique du dernier kilomètre, qui sont déjà, en soi, des sujets très vastes. C'est la raison pour laquelle, à la fin du mois, nous lancerons une autre concertation visant à tirer parti de toutes les réflexions menées sur l'amélioration de la filière fret et de la logistique. Il ne s'agit pas de refaire des rapports, mais de s'appuyer sur toutes les réflexions déjà conduites - je pense notamment à France Logistique 2025 - afin de proposer une stratégie dans le domaine du fret et de la logistique.

Nous devrons, dans ce cadre nous pencher sur la situation du fret ferroviaire. Nous savons déjà que nous devons progresser sur la qualité des sillons pour le transport de marchandises. Aujourd'hui, on ne sait pas tracer un sillon qui traverse notre territoire de façon satisfaisante. SNCF Réseau est en train de réfléchir à une organisation de son exploitation prenant mieux en compte les grands axes de transports de marchandises. J'espère que cela permettra d'assurer la qualité que les chargeurs sont en droit d'attendre. La qualité du service est d'ailleurs l'un des sujets principaux.

Nous menons également une réflexion continue sur le transport modal. Une consultation sur l'autoroute ferroviaire alpine a été lancée avec nos voisins italiens, et prochainement, nous allons lancer un appel à manifestation d'intérêt pour l'autoroute ferroviaire entre l'Espagne et le Nord de la France. Enfin, j'attends prochainement les conclusions des réflexions en cours sur l'aide aux transports combinés. Au final, c'est un ensemble de mesures que nous devons prendre. C'est un sujet que j'aborde avec beaucoup de modestie, car cela fait quinze ans que les trafics s'effondrent, alors que chacun exprime sa volonté d'une relance du fret ferroviaire. Nous allons essayer de trouver les bons leviers. Mais il est vrai que personne ne peut comprendre qu'il y ait aussi peu de fret ferroviaire sur nos rails, et autant de camions sur les routes.

Des démarches sont en cours pour renouveler le président de l'Afitf. Toutefois, cela peut prendre un peu de temps en raison du renforcement des contraintes pesant sur la nomination de ce dernier, notamment concernant la vérification de l'absence de conflits d'intérêts. Nous avons besoin d'un certain délai pour tout vérifier. Mais il est sûr que l'agence ne peut rester durablement sans président.

L'augmentation des ressources de l'Afitf est un premier pas, mais le compte n'y est toujours pas. Aussi, le conseil d'orientation des infrastructures va devoir réfléchir à une priorisation des projets, mais aussi à de nouvelles ressources. On ne peut pas rester durablement à ce niveau de ressources pour l'Afitf.

L'année 2018 sera consacrée en priorité à la régénération des réseaux. Cependant, il est clair que l'augmentation de 100 millions d'euros ne suffira pas si on se donne l'ambition de revenir à l'état du réseau routier d'il y a dix ans. Il faut, certes, aller plus loin dans la régénération des réseaux, mais aussi honorer les contrats de plan, financer les engagements pris sur le renouvellement de matériel de trains d'équilibre du territoire. Le parlement aura à décider du niveau des recettes de l'Afitf, qui devront être plus élevées que celles disponibles pour cette année de transition.

Pour le canal Seine-Nord Europe, les discussions sont en cours avec les collectivités territoriales qui ont proposé - et le gouvernement l'a accepté - d'avoir une gouvernance régionale pour la réalisation de cette infrastructure. Que ce soit pour la ligne Lyon-Turin, ou pour le canal Seine Nord Europe, il s'agit d'infrastructures d'une ampleur exceptionnelle. On ne peut pas s'obliger à les financer en crédits budgétaires, sur la durée du chantier. Nos voisins européens ne procèdent pas ainsi. Pour le tunnel entre l'Italie et l'Autriche, ou entre l'Italie et la Suisse, ce sont des sociétés de projet qui les financent sur une période de 40 à 50 ans. Nous devons nous aussi adopter ce genre de mécanisme. Mais, pour que l'emprunt soit remboursé, fût-ce sur une période de 40 ou 50 ans, il faudra trouver des recettes. C'est le sens de la réflexion en cours avec les collectivités territoriales, afin de dégager des recettes permettant le remboursement de cet emprunt.

Nous avons beaucoup d'ambition pour la refondation de notre politique des transports. Toutefois, il faut procéder de façon séquentielle. Aussi, nous organiserons début 2018 les assises du transport aérien. Nous souhaitons avoir une approche globale et ne pas se limiter à la question de savoir si les redevances des aéroports sont trop élevées, ou si les compagnies aériennes payent trop de charges. La dimension de la performance économique sera abordée. Mais nous voulons aussi nous intéresser à la performance au service des territoires. J'étais en début de semaine à Aurillac et j'ai pu constater à quel point des petits aéroports, avec des obligations de service public, peuvent être une réponse rapide et pragmatique au désenclavement des territoires. Cette dimension de la performance du transport aérien au service des territoires est un enjeu important.

L'impact environnemental du transport aérien, à la fois sur les émissions de gaz à effet de serre, sera également à l'ordre du jour. À ce sujet, vous savez d'ailleurs que ce secteur s'est engagé à plafonner ses émissions au niveau mondial. Il faut concrétiser ces engagements, notamment par le développement de carburants adaptés. Enfin, l'enjeu des nuisances sonores pour les riverains des aéroports ne sera pas oublié. Mais nous voulons également discuter de la performance et de l'innovation au service des passagers. Dans ce domaine, comme dans les autres domaines du transport, la révolution digitale peut faciliter le voyage et donner des services supplémentaires aux usagers. En outre, la performance sociale est un sujet important.

Je suis consciente des difficultés rencontrées sur la ligne ferroviaire Limoges-Angoulême, qui est malheureusement représentative d'un certain nombre de lignes UIC 7 à 9 - c'est-à-dire des lignes qui ne supportent pas un tonnage très important - mais qui sont essentielles aux déplacements de la vie quotidienne de beaucoup de concitoyens. Il s'agit typiquement d'une ligne ayant connu un retard d'entretien et de régénération, qui est aujourd'hui menacée d'une réduction de vitesse à 40km/h. Les choix que nous avons faits ces dernières années, collectivement, d'inaugurer trois lignes TGV - une quatrième doit ouvrir d'ici la fin de l'année - se sont faits au détriment de l'entretien et de la régénération de certaines lignes du quotidien. Je souhaite que les CPER, qui portent un certain nombre de projets sur ces lignes soient honorés. Mais il y a également un certain nombre d'infrastructures dont l'état est préoccupant et qui ne figurent pas dans les CPER. C'est tout le sens de la réflexion confiée à M. Spinetta sur la place du ferroviaire, ainsi qu'au conseil d'orientation des infrastructures sur les ressources à affecter à chaque politique. Des travaux urgents ont été programmés sur la ligne Limoges-Angoulême. Mais au travers de l'état de cette ligne, c'est un sujet de fond qui est posé.

Sur la taxation des poids lourds, nous ne souhaitons pas refaire l'écotaxe, dont chacun a pu apprécier les différents rebondissements. Mais il nous faut trouver une façon de faire payer les poids lourds, spécifiquement ceux en transit. Les régions qui connaissent ces trafics sont toutes volontaires - région Nouvelle Aquitaine, Occitanie, Grand Est. Toutefois, je pense que l'on aura à réfléchir à une approche nationale. Je me réjouis d'avoir des régions souhaitant s'investir sur ce sujet, mais nous devons étudier la question de près, y compris d'un point de vue constitutionnel. En effet, est-il possible d'avoir des approches trop différenciées ? Un cadre national devra sans doute être posé, a minima pour que chacun ne réinvente pas sa solution technologique. Une des difficultés de l'écotaxe avait été les coûts importants de perception. En tout cas, il s'agit d'une piste de ressources sur laquelle le gouvernement souhaite avancer, évidemment en concertation avec les transporteurs routiers. Nous devons également nous assurer que le système retenu ne pénalisera pas un certain nombre de régions qui s'étaient fortement mobilisées au moment de l'écotaxe. Il faut en effet tenir compte des territoires plus éloignés du coeur des marchés européens.

Mon ministère a été alerté des nuisances sonores pour les riverains de la LGV Sud Europe atlantique. Nous avons d'ailleurs les mêmes difficultés sur la ligne Bretagne-Pays de la Loire. Les règles sont simples et définies dans le cadre des contrats de partenariat et des concessions. Les concessionnaires doivent respecter les normes fixées. Si elles ne le sont pas, ils doivent procéder aux travaux nécessaires. Toutefois, une fois cela dit, il est vrai que la réglementation dans le domaine du ferroviaire table sur un bruit moyen. C'est le sens des mesures en cours. Il faudra sans doute les compléter par une vérification d'une absence de pics sonores particulièrement pénalisants. Certes, la réglementation est basée sur le bruit moyen, mais cela ne veut pas dire que l'on ne va pas traiter cette situation. Nous devrons trouver un cadre adapté, si on ne peut pas s'appuyer sur les réglementations existantes et les obligations des concessionnaires.

Le gouvernement a beaucoup d'ambition pour les ports. Ce sont des outils majeurs du développement de l'économie de notre pays, que ce soit pour la compétitivité de nos exportations - nous savons qu'il est important de permettre à davantage d'entreprises de se positionner sur des marchés à l'export - mais aussi pour l'importation. Il y a, à ce sujet, une importante valeur ajoutée à capter, au travers des activités logistiques dans les zones portuaires. Le gouvernement souhaite permettre aux ports français de jouer à armes égales dans la compétition des ports européens. C'est ce à quoi nous allons nous attacher dans le cadre du comité interministériel de la mer (CIMER), et c'est le message que le Premier ministre portera à l'occasion des assises de l'économie de la mer.

En effet, compte tenu de leurs positionnements et de la situation géographique de notre pays, il est étonnant d'être dans une situation où un conteneur sur deux arrivant en France ne soit pas passé par un port français. Ce constat ouvre toute une série de sujets que l'on développera dans le cadre du CIMER qui se tiendra prochainement.

Cela pose aussi la question de la desserte de ces ports, sur laquelle nous avons à progresser, notamment en matière de desserte ferroviaire. Les parts de marchés du fret ferroviaire ne sont ni satisfaisantes, ni à la hauteur de ce que l'on peut constater dans les grands ports européens. On outre, plus le transport maritime va vers du transport massifié, avec des porte-conteneurs de plus en plus gros, plus il est important d'être capable d'acheminer ces conteneurs, avec des modes massifiés. Imaginons ce que serait la situation si la desserte des ports était uniquement réalisée par des poids lourds ! On assisterait à une congestion phénoménale. Des investissements sont déjà prévus dans le cadre du contrat de plan interrégional-État, à hauteur de 600 millions d'euros. Nous devons arriver à avoir, pour chacun des ports, des axes de fret ferroviaires performants, avec l'ambition d'un hinterland le plus large possible, connecté aux autres pays européens.

Nous devons également valoriser la desserte fluviale. J'ai en tête les inquiétudes en Normandie concernant le canal Seine-Nord. En même temps, il existe déjà une autoroute fluviale - la Seine - sur laquelle un certain nombre de travaux sont prévus. Il faut s'assurer de la performance de ce passage fluvial - il y a d'ailleurs un débat en cours au port du Havre pour s'assurer de la performance optimale de la desserte fluviale du port.

Le gouvernement et le Premier ministre sont très attachés au portage d'une ambition portuaire nationale, qui ne nous semble pas forcément compatible avec l'idée d'une gouvernance décentralisée pour nos deux principaux ports. Le gouvernement est attaché aux ports de l'axe Seine et de Marseille, qui sont d'importance nationale. Toutefois, il est nécessaire que cette ambition nationale s'accompagne d'un travail étroit avec les collectivités territoriales, qui sont, elles-mêmes, fortement mobilisées.

Le principe de l'exonération de charges patronales votées dans la loi pour l'économie bleue avait été retenu lors du précédent CIMER. Le coût prévu pour cette exonération au cours de l'année 2017 avait été provisionné. Toutefois, nous n'avons pas encore eu de retour de la Commission européenne, à laquelle nous avons notifié cette nouvelle exonération de charges. Aussi, les crédits n'ont pas encore été dépensés. Les contraintes de l'exercice de 2018 n'ont pas permis, jusqu'à présent, d'inscrire à nouveau cette prise en charge pour l'année 2018. J'ai noté la sensibilité de cette question. Nous allons être amenés à nous repencher sur le sujet, notamment à l'occasion du prochain CIMER.

Pour répondre à Madame la Sénatrice Keller, j'ai donné quelques éclairages sur la taxe poids lourd et il faudra trouver une cohérence nationale sur ces sujets en prenant bien en compte les motivations de certaines régions et en travaillant également avec les entreprises de la branche qui ne profitent guère de marges. Il faut que nous travaillions à un système ne pénalisant pas le pavillon français qui est déjà en grande difficulté.

Les péages ferroviaires représentent un vaste sujet sur lequel M. Jean-Cyril Spinetta va se pencher. Il faut sortir de la logique selon laquelle on fait semblant de penser que la dette, à l'origine de la création de RFF devenu depuis lors SNCF Réseau, peut être assumée grâce au péage. C'est ainsi qu'on atteint des situations absurdes comme l'augmentation massive des péages sur les lignes à grande vitesse qui s'est répercutée sur le prix des billets et a provoqué, en retour, la réduction du nombre de voyageurs et de la desserte. Le réseau SNCF s'étend avec moins de trains le parcourant. Remettre le système sur ses pieds implique de sortir de cette fuite en avant.

Ce qui m'amène à évoquer le contrat de performance entre l'État et SNCF Réseau, qui marque un engagement dans la durée sur les crédits de régénération. Cette démarche est indispensable si l'on souhaite sortir des difficultés actuelles que l'on rencontre sur de trop nombreuses lignes. Les péages sont un outil majeur de la politique des transports, au-delà de leur dimension budgétaire. Un certain nombre d'attendus du contrat devront ainsi être réexaminés à l'aune des travaux que nous conduisons actuellement. Ainsi, en termes de théorie économique, je suis quelque peu surprise que l'augmentation des prix, notamment des sillons, génère soi-disant une demande accrue. Il faudra ainsi s'assurer que l'ensemble des paramètres du contrat entre l'État et SNCF Réseau est bien cohérent.

S'agissant de la COP23 - avant laquelle M. Nicolas Hulot a présenté un plan climat ambitieux - et de ses conséquences, nous réfléchissons actuellement, dans le cadre des assises de la mobilité, sur une mobilité plus propre encore. Il est important de tracer des perspectives pour l'ensemble des acteurs du secteur.

En effet, les constructeurs sont désorientés par les changements incessants des types de véhicules qu'il s'agit de produire. Notre vision du type de motorisation à retenir, à la fois pour les véhicules particuliers et collectifs, doit être prospective. Cette réflexion est en cours.

Pour autant, les règles de taxation du kérosène sont d'origine internationale : qu'il s'agisse de celles de l'Organisation maritime internationale ou de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI), il nous faut éviter de trop nous singulariser. De toute manière, il nous est impossible d'agir lors des trajets internationaux et les mesures qu'il nous faudrait déployer ne concerneraient que ceux qui se déroulent sur notre territoire. Clairement, il y a là un risque de pénalisation du pavillon français, sans pour autant faire progresser les ressources au niveau mondial. Si la France peut porter ces sujets à l'échelle internationale, il est hautement souhaitable qu'elle ne se singularise pas en prenant des mesures contraires aux intérêts de son pavillon.

M. Hervé Maurey , président . - Je vous remercie, Madame la ministre, pour vos réponses extrêmement précises aux questions des rapporteurs.

M. Rémy Pointereau . - J'ai participé aux assises décentralisées de la mobilité dans mon département où nos concitoyens ont exprimé de réelles souffrances concernant à la fois le transport de proximité et les dessertes nationales, voire européennes. J'y ai ressenti comme un sentiment d'abandon. Vous avez d'ailleurs évoqué le Cantal qui se sentait oublié des réseaux modernes. Quelle réponse allez-vous apporter aux départements ruraux qui sont confrontés à une sorte de double-peine avec, d'une part, la hausse du diésel - très présent dans les milieux ruraux - d'autre part, la mise en oeuvre de solutions pas forcément idoines, comme le covoiturage ?

Par ailleurs, vous souhaitez ne pas faire de promesse irréalisable, mais il n'est pas interdit de réfléchir à plus long terme que les cinq prochaines années, comme le faisait, en son temps, la DATAR, comme on l'a fait à un moment donné, avec l'excellent rapport de M. Philippe Duron sur l'avenir des trains, avec des projets prioritaires à l'horizon 2030, voire plus lointains, quelle est votre position sur de tels projets ? Le Lyon-Turin va-t-il se réaliser ? Le projet POCL peut-il se réaliser, malgré le souhait d'interrompre la construction de nouvelles lignes à grande vitesse ?

M. Olivier Léonhardt . - Dans le cadre de la préparation de la loi sur les mobilités annoncée pour le mois de février 2018, le Président de la République a souhaité mettre l'accent sur les transports du quotidien. Des assises sont ainsi organisées dans les préfectures avec les acteurs départementaux. Je salue cette initiative à laquelle j'ai participé dans l'Essonne lundi dernier.

La situation des transports en Ile de France est aujourd'hui catastrophique. Si la zone dense - Paris, la Petite Couronne - bénéficie d'un réseau assez qualitatif, les habitants de la Grande Couronne sont, quant à eux, confrontés à des difficultés qui s'accroissent d'année en année. La vétusté des RER A, B et C, qui desservent la grande banlieue, les problèmes répétés d'irrégularités de ces lignes, tandis que l'augmentation du flux des voyageurs est continue, avive l'urgence d'une intervention de la puissance publique. En effet, une personne, qui vit en banlieue, passe en moyenne 2h30 par jour dans les transports, lorsque tout va bien !

Cette situation reflète une immense inégalité : toutes les personnes qui habitent la banlieue et travaillent à Paris subissent en permanence, outre leur éloignement géographique, des retards et annulations répétés de trains, des conditions de transport déplorables, dans des wagons surchargés. On parle ici de 2 700 000 usagers quotidiens. Le RER C, que j'ai pris ce matin pour venir ici, transporte 600 000 voyageurs par jour. Ce qui aujourd'hui nous met dans des situations analogues à celle survenue à Brétigny-sur-Orge, il y a quelques années. Que comptez-vous faire pour que les investissements dans les transports soient mieux répartis et ne soient pas intégralement absorbés par Paris et sa très proche couronne ?

Mme Nelly Tocqueville . - Merci Madame la Ministre pour les précisions que vous avez apportées, s'agissant notamment de la situation du Canal Seine-Nord qu'en tant qu'élue de Seine-Maritime je suis tout particulièrement. Je souhaite rappeler que les inquiétudes sur le projet du Canal Seine-Nord, qu'a d'ailleurs rappelées mon collègue Charles Revet, n'ont pas été dissipées.

Je souhaiterais, pour ma part, vous interroger sur les plateformes multimodales qui conditionnent la desserte des ports de Rouen - premier port céréalier d'Europe - et du Havre. Vous avez affirmé - ce qui nous rassure - votre ambition pour les ports et votre projet d'investissement et d'entretien dans ces infrastructures. La question demeure quant au devenir de ces ports et du déploiement des containers. Or, le Port du Havre s'interroge puisque les containers arriveront bien plus dans les ports du nord de l'Europe de façon évidente. Je souhaiterais également revenir sur le dégagement de ressources dédiées. De quelles ressources parlez-vous ?

Enfin, concernant le Canal Seine-Nord, la région Normandie est très impliquée dans le développement de cet axe naturel de développement qu'est la Seine. Où en est la réflexion de la région Ile-de-France qui nous semble moins avancée ?

M. Alain Fouché . - J'ai siégé avec ma collègue Fabienne Keller à RFF et il m'est apparu que la dette de la SNCF est principalement le fait des politiques qui ont exigé, tous horizons politiques confondus, la construction de lignes LGV et fait conduire des études en ce sens, dont fort peu ont abouti. Les élus nationaux sont ainsi responsables de cette dette.

J'ai été l'auteur d'un rapport sur la sécurité dans les gares et les transports. L'autre jour, vous étiez avec le Premier Ministre Gare du Nord, où vous avez expliqué les mesures qui ont été déployées. Pouvez-vous nous donner des informations sur les mesures prises dans le Métro par la RATP dont vous avez été la présidente ?

Mon troisième point concernera la fraude qui représente chaque année 500 millions d'euros de pertes, dont 200 millions d'euros pour la RATP. Lors des contrôles et des verbalisations, les cartes d'identité périmées ne permettent pas de retrouver les personnes qui commettent des infractions ; ce qui, en retour, induit des pertes considérables pour la RATP et la SNCF. Dans la Loi Savary, il était prévu de fiabiliser ces adresses et un décret devait être rendu en ce sens. Où en est-on ? Il est en effet important que les adresses des contrevenants soient fiables.

M. Guillaume Gontard . - Merci Madame la Ministre pour votre exposé très précis. Vous venez de nous faire part de votre ambition pour le secteur ferroviaire français, malgré l'endettement structurel qui pénalise SNCF Réseau. À ce titre, je salue la décision du Gouvernement de mettre en pause un certain nombre de projets coûteux et souvent écologiquement controversés, comme le Lyon-Turin.

Comme vous le précisez, le réseau ferroviaire régional n'est pas un réseau secondaire. C'est effectivement le réseau du quotidien, pour l'immense majorité de nos concitoyens et la seule alternative à la voiture qui permet de limiter nos émissions de CO 2 .

Vous parliez à cet égard de mobilité plus propre. Or, depuis toujours, ce réseau souffre de la priorité des investissements accordée aux LGV. Les infrastructures sont aujourd'hui vieillissantes et nécessitent d'importants travaux de rénovation et de modernisation. L'enjeu n'est pas seulement matériel. En effet, dans nos territoires ruraux, ce sont les restrictions de personnels qui entraînent une baisse de qualité sur de nombreuses lignes, de leur fréquentation et ainsi de leur rentabilité qui entraîne leur fermeture progressive. C'est un cercle vicieux qui est insupportable alors qu'il est indispensable de renforcer nos réseaux ferroviaires régionaux, tant pour le transport des passagers que des marchandises, afin notamment de désengorger nos routes et nos agglomérations.

Pour vous donner un seul exemple situé dans mon département, la ligne Grenoble-Veyne-Gap - l'Etoile ferroviaire - représente l'unique desserte entre les Alpes du Sud et du Nord et est aujourd'hui menacée de disparition. Les investissements promis n'arrivent pas, les gares ferment les unes après les autres, les retards se multiplient. Et pourtant, le nombre de voyageurs continue de s'accroître sur cette ligne essentielle pour la vitalité de nos territoires montagneux enclavés. La mobilisation massive des élus locaux et des citoyens est là pour en témoigner.

Même si les Assises de la mobilité sont en cours, pourriez-vous, Madame la Ministre, nous préciser les intentions du Gouvernement pour renforcer et pérenniser le réseau ferroviaire régional ?

M. Patrick Chaize . - Vous avez évoqué l'augmentation des crédits des CPER pour les infrastructures routières. Des priorités ont-elles d'ores et déjà été fixées en la matière ? De quels montants parle-t-on ? S'agissant des liaisons TGV, vous nous avez indiqué qu'il n'y avait pas de remise en cause du modèle par la desserte du TGV en milieu plus rural, sur les lignes hors grande vitesse. Néanmoins, l'éventuelle fermeture des gares TGV dans ces territoires ruraux suscite de nombreuses inquiétudes. Vous avez évoqué le coût important de ces gares, en évoquant le péage, avec un risque d'augmentation du coût des transports. Est-ce le cas ? Pourquoi ne pas envisager plutôt la solidarité entre les territoires afin de pouvoir maintenir ces gares très utiles pour irriguer nos territoires ruraux.

M. Claude Bérit-Débat . - Je vous remercie pour votre langage de vérité. Vous pouvez également ajouter la Dordogne au Cantal et à la Charente. Il y a quelques mois, je vous avais interrogée sur l'avenir de la ligne Bergerac-Bordeaux et vous aviez alors évoqué votre espoir de trouver une solution. Un parlementaire local dit que la solution est toute trouvée et j'aimerais que vous nous apportiez des précisions là-dessus.

Par ailleurs, que souhaitez-vous faire pour les ateliers SNCF de Chamiers qui assurent l'entretien des trains-corails qui sont voués à disparaître prochainement. L'État peut-il intervenir pour que la SNCF arrête une stratégie industrielle dans ce domaine ? Enfin, s'agissant de la régénération des routes, que va devenir la Route nationale 21qui est un axe important pour la région Nouvelle Aquitaine ?

M. Frédéric Marchand . - Madame la Ministre, les questions d'aménagement du territoire et de fret ferroviaire étant au coeur de nos préoccupations communes, je vous interrogerai sur le site de Somain, qui est très important pour la région du Nord et l'arrondissement de Douai. Ce site était, hier encore, troisième site de triage de France et les élus se sont, avec les décideurs économiques, fortement mobilisés puisque, dans le cadre du plan de renouveau du bassin minier, des perspectives ont été tracées par l'État. Les élus sont désormais en attente, car ce site correspond à ce que vous nous avez annoncé en matière de fret ferroviaire, ne serait-ce qu'avec la perspective d'une autoroute ferroviaire Atlantique, le raccord à une immense zone industrielle ou encore un technocentre qui ne demande qu'à revivre. Bref, les perspectives sont réunies pour que ce centre connaisse une nouvelle vie. Madame la Ministre, serait-il possible que ce projet soit remis sur les rails en 2018 et réponde aux attentes des élus du territoire?

M. Michel Vaspart . - Aujourd'hui, les collectivités locales sont de plus en plus sollicitées pour contribuer à la rénovation des lignes secondaires. Leur financement est d'ailleurs majoritaire ! Cependant, nous n'arrivons pas à obtenir de transparence sur l'utilisation des fonds publics - y compris ceux issus des collectivités territoriales - pour le financement des études et des travaux conduits par la SNCF. Ces montants sont absolument considérables et il nous semble désormais nécessaire que la SNCF accepte d'être transparente sur l'utilisation de ces fonds.

Par ailleurs, la baisse de qualité de service concerne autant le fret que les voyageurs. De nombreuses lignes connaissent une baisse de la vitesse des trains qui l'empruntent, ce qui peut générer une désaffection du secteur ferroviaire ! Ce qui est un comble, puisque nous avons lancé des travaux de rénovation des lignes secondaires. C'est là une situation particulièrement difficile. Certes, tant que nous n'aurons pas réglé le problème de la dette, nous ne pourrons être exigeants vis-à-vis de la SNCF. Mais se pose également le problème du fonctionnement de cette société et de sa gestion.

Mme Angèle Préville . - La COP23 entend assurer l'articulation entre les transports et le climat. Nous voulons des transports plus propres, émetteurs de moins de pollution et consommateurs de moins d'énergie. Le ferroviaire semble être la solution idéale et imbattable. Je suis élue du Lot et vais vous parler de la ligne ferroviaire qui s'étend sur trois départements : la Corrèze, le Lot et le Cantal. Beaucoup de travaux ont été réalisés sur cette ligne pour aboutir à moins de trains et de voyageurs. Les correspondances avec certains trains, qui se rendent notamment à Paris, voire à Brive, ont disparu. Les voyageurs, notamment les jeunes qui se rendent pour leurs études à Aurillac et à Brive, se découragent. Ne faudrait-il pas, à l'inverse, mettre en oeuvre des incitations très fortes sur ce genre de transport ?

M. Didier Mandelli . - Je me réjouis que la priorité soit accordée aux lignes secondaires, comme la ligne Lyon-Bordeaux. Ma question portera cependant sur l'économie maritime.

J'ai eu la chance d'être le rapporteur de la Loi Leroy pour l'économie bleue qui a été saluée par l'ensemble des professionnels du secteur. Ses différentes dispositions me paraissent être détricotées les unes après les autres, à l'instar du taux de liquidation de la TVA. Vous n'y êtes pour rien, puisque c'est le Gouvernement précédent, avec la Loi Sapin 2, qui est revenu sur cette disposition, prise pour faciliter la liquidation de la TVA dans les ports. Vous évoquiez les 50 % de marchandises destinées au territoire français qui sont débarquées en dehors de notre territoire national. Or, le taux de liquidation devait faciliter les choses et aboutir à la création de 13 000 emplois. On a également réduit le champ à la moitié des entreprises initialement concernées, en supprimant notamment les PME du dispositif.

Comme l'a évoqué notre collègue Charles Revet, l'exonération de charges - le net wage - a fait l'objet d'une décision européenne préconisant l'extension de ce dispositif aux personnels français embarqués sur les bateaux à pavillon européen. C'est ainsi deux millions d'euros supplémentaires qui s'ajoutent aux dix-huit millions d'euros estimés pour l'application de cette disposition. Je regrette que, pour 20 millions d'euros, on ait retiré une disposition importante attendue par les professionnels, dans un secteur ultra-concurrentiel, un an et demi après le vote de la loi au Parlement. Nous y voyons bien sûr la main du ministère de l'économie et des finances. Ainsi, pour cette loi comme pour d'autres, le Parlement et le Gouvernement auront-ils priorité sur l'avis de Bercy ?

M. Jean Bizet . - Le manque de lisibilité de la stratégie de l'État dans le secteur aérien m'inquiète. J'ai plusieurs questions à vous poser. Depuis pratiquement une quinzaine d'années, la part du pavillon national est passée de 63 à 43 % et je sais que les assises du transport aérien, prévues en 2018, apporteront un certain nombre de réponses. Nous serons exigeants sur cette question.

Autre question : si le financement de la sûreté aéroportuaire représente onze euros par billet émis, l'État y participe, quant à lui, à hauteur d'un euro. Cette mission est pourtant régalienne. Quelle sera l'évolution en la matière ?

S'agissant de la concurrence avec les Pays du Golfe, je sais que le mandat confié à la Commission européenne est en cours. Certains pays comme le Qatar y souscrivent, tandis que d'autres, comme les Émirats arabes unis, le refusent. Où en êtes-vous sur cette question, ainsi que sur une éventuelle négociation sectorielle avec le Royaume-Uni dans le cadre du Brexit ?

Enfin, le projet Charles de Gaulle Express correspondra-t-il avec sa maquette financière initiale de 1,7 milliard d'euros, qui représente le coût de 1,40 euro par billet, ce qui, additionné à d'autres contributions, peut s'avérer problématique.

La situation du Paris-Granville devient caricaturale, avec, comme dernier avatar en date, la rupture unilatérale, par la SNCF, de la desserte par autocar de la partie du Mont-Saint-Michel, au profit de la voie par TGV. Est-ce vraiment en raison d'un problème de logiciel comme la SNCF me l'a annoncé ? Je vous confirme, Madame la Ministre, qu'il est difficile de dialoguer avec la SNCF au sujet de cette ligne !

M. Guillaume Chevrollier . - J'aurais également quelques questions à vous poser, en tant qu'élu des Pays de la Loire. Vous n'avez pas parlé du projet de l'aéroport de Notre Dame des Landes à l'heure de la médiation qui fait débat.

Sur la dette ferroviaire, qui a atteint 50 milliards d'euros tandis que les besoins de maintenance sont immenses, quel a été l'impact de la loi dite Macron, avec ses flottes de bus, sur le chiffre d'affaires de la SNCF ?

Par ailleurs les réseaux routiers, essentiels au développement des territoires ruraux, sont mal entretenus et des retards réels existent. Dans ce contexte, l'État ne peut tout assumer. Dans mon département, le Conseil départemental souhaite récupérer la Route nationale 62 pour la passer en deux fois deux voies ; cette démarche étant une priorité départementale et non nationale. Je vous demande votre aide dans ce domaine pour accélérer ce transfert, qui n'est nullement un cas isolé dans notre pays.

Autre point : je souhaitais vous alerter sur les problèmes induits par la mise en service de la nouvelle ligne LGV Bretagne-Pays de la Loire. Si mettre Laval à soixante-dix minutes de Paris est une bonne chose, les modifications d'horaires sur les TER ne répondent plus aux attentes de certains usagers et de nombreux problèmes de nuisance sonore ont été relayés par des riverains et des élus. L'appréciation du bruit fait ainsi débat et je vous demande de bien vouloir faire preuve de discernement sur ce sujet.

M. Michel Dagbert . - Madame la Ministre, j'ai été très attentif à la réponse que vous venez de faire à mon collègue Jean-Pierre Corbisez et je ne reviendrai pas davantage sur le projet du Canal Seine-Nord, sauf, en mon ancienne qualité de vice-président de Conseil départemental du Pas-de-Calais, pour rappeler la forte mobilisation des collectivités territoriales.

Comme notre président l'a rappelé, je participe aux travaux du Conseil d'orientation sur les infrastructures et c'est plus au sujet de votre propre vision de l'aménagement du territoire que je vous adresse ces questions, s'agissant notamment de la desserte des lignes à grande vitesse sur le territoire. J'ai bien noté la commande passée à Monsieur Jean-Cyril Spinetta, dont nous sommes impatients de lire le rapport. Notre impatience exprime notre inquiétude. Notre pays connaît actuellement une véritable fracture. Il est important de maintenir la cohésion territoriale et par conséquent, je me dois de vous alerter sur la fragilité supposée d'un certain nombre de dessertes dans mon département, à l'instar d'Arras et de Béthune qui pourraient être remises en cause. Au titre des solidarités territoriales, les départements restent très attentifs, mais, à un moment donné, la charge devient tellement lourde que d'épineux choix devront être faits, alors qu'il faut que les collectivités agissent au titre de la solidarité humaine et territoriale.

M. Jean-François Longeot . - Je vous remercie pour votre pragmatisme que j'apprécie particulièrement. Je ne reviendrai pas sur l'écotaxe et sur le nécessaire financement de nos réseaux, alors que nombre de poids-lourds, notamment étrangers, quittent l'autoroute pour prendre les routes départementales et nationales. Ma question portera sur Alstom qui a souffert, à un moment donné, de la faiblesse de la commande publique. Tel n'est plus le cas aujourd'hui. Or, la direction de ce groupe a déclaré, notamment par écrit aux organisations syndicales qui souhaitent désormais être reçues par le ministre de l'économie, M. Bruno Le Maire, nécessaire de fabriquer à bas coût et de délocaliser, pour ce faire, en Inde. C'est là un paradoxe que la commande publique soit fabriquée ailleurs que sur nos sites nationaux !

Mme Pascale Bories . - Madame la Ministre, j'ai bien noté votre discours sur les Assises de la mobilité et le transport du quotidien. A l'heure où nous devons réduire les émissions de gaz à effet de serre, votre gouvernement souhaite s'engager avec force dans ce sens et il est plus que nécessaire de développer l'accès au transport ferroviaire. La LGV permet de traverser la France, certes de manière onéreuse, mais souvent de façon moindre que si l'usager devait utiliser le transport autoroutier ou la voie aérienne.

Concernant le Sud de la France, il nous faut évoquer la ligne avec l'Espagne, dont l'amélioration est nécessaire, notamment avec l'extension de la LGV Montpellier-Perpignan. La région est déjà porteuse de ce dossier et l'ensemble des élus d'Occitanie ont écrit au Premier ministre à ce sujet.

Concernant les transports du quotidien, j'ai bien noté votre ambition sur la régénération des réseaux et la sortie de nouveaux projets. À ce sujet, j'évoquerai la ligne Rive droite du Rhône espérée depuis plus de vingt ans. La Région a accepté le portage de ce projet qui serait au stade de projet d'études pour la SNCF. Comment comptez-vous opérer auprès de la SNCF, afin que ce projet structurant, puisse aboutir dans un délai raisonnable ?

S'agissant des déplacements en vélo, vous avez annoncé, le 19 septembre dernier, que de nouveaux axes de développement seraient présentés. Le développement des vélos électriques représente une alternative intéressante au niveau local, où j'ai pu soutenir le principe de subventions avant que l'État ne prenne le relais. J'aimerais rappeler que le vélo électrique est une alternative importante pour réduire l'autosolisme.

Au-delà du vélo électrique, il est important d'aider les collectivités à accélérer la mise en oeuvre de leur schéma de circulation douce, notamment sur les routes départementales. Que comptez-vous faire pour améliorer la sécurité des voies douces sur les routes nationales ?

M. Louis-Jean de Nicolaÿ . - J'aurais deux remarques et une question. Madame la Ministre, les élus ne comprennent pas que les pics de nuisance de la ligne LGV ne soient pas pris en compte. Mon deuxième point concerne le projet d'aéroport de Notre-Dame-des-Landes qui, je l'espère, sera réglé pour l'échéance des assises du transport aérien et qu'il contribuera enfin au développement économique du territoire de l'Ouest. Enfin, la SNCF est-elle prête à revendre des lignes désaffectées pour les transformer en voies vertes ou en pistes cyclables ?

Mme Élisabeth Borne. - Je vous remercie pour les très nombreuses questions, qui montrent que le sujet intéresse. Je ne vais pas forcément être en mesure d'apporter des réponses précises à chacun, mais je m'engage à vous faire transmettre les éléments complémentaires dans les prochains jours.

Monsieur le Sénateur Pointereau, je vous confirme que les différentes assises, qui se déroulent dans des territoires enclavés, périurbains, dans les quartiers relevant de la politique de la ville ou des territoires ruraux, font remonter les grandes difficultés auxquelles nombre de nos concitoyens sont confrontés. Un Français sur quatre a dû renoncer à une offre d'emploi ou à une formation, faute de transport pour s'y rendre. Un tel exemple illustre l'importance des enjeux des transports de la vie quotidienne.

Il va nous falloir faire des choix : nous ne pourrons pas assurer la régénération des réseaux, tout en continuant à réaliser quatre lignes TGV concomitamment, à moins que le Parlement ne décide d'augmenter massivement les ressources allouées au secteur !

Les enjeux sont de deux ordres : l'enclavement, d'une part, - comment sort-on ou rentre-t-on dans le territoire - qui implique, à terme, l'usage de la voiture, dont la technologie continuera d'évoluer, et le développement de nouveaux services.

Il nous faudra ainsi réfléchir à une nouvelle gouvernance : 40 % des Français habitent dans des territoires situés en dehors des périmètres couverts par les transports urbains. Certes, les régions ont une compétence générale en termes d'intermodalité, mais comment s'organise-t-on pour coordonner les différentes offres qui peuvent être mises en oeuvre dans ces territoires ? Certes, de nombreuses innovations se font jour dans ces secteurs, à l'instar du covoiturage dont les marges de progression, s'agissant notamment du covoiturage domicile-travail, me semblent réelles, à la condition de se doter des bons outils.

Hier, j'assistais au lancement d'un robot-taxi dont je souhaite qu'il soit expérimenté dans le monde rural. Nous avons devant nous un chantier important pour mieux répondre aux attentes de nos concitoyens et nous allons nous y atteler dans le cadre des prochaines Assises de la mobilité.

Vous avez raison de le souligner : il faut avoir une vision réaliste sur les prochaines années et promettre les choses que l'on peut tenir. Notre vision peut porter sur les grandes infrastructures que vous avez mentionnées, mais mon ambition concerne aussi le secteur ferroviaire dont je souhaite qu'il joue davantage son rôle dans la périphérie des agglomérations. Au moins, nous avons des RER, certes perfectibles, mais qui sont en mesure de transporter chaque jour jusqu'à un million de voyageurs. Or, dans la périphérie de nos autres métropoles, nous sommes loin d'avoir des infrastructures modernisées susceptibles d'éviter, à nombre de nos concitoyens, de perdre quotidiennement des heures dans la congestion autoroutière. Il faut se donner des ambitions de long terme comme la dotation de RER dans un certain nombre de nos grandes métropoles.

En réponse à Monsieur le Sénateur Léonhardt, je suis consciente des difficultés des voyageurs en Ile de France. Nous sommes sur des ordres de grandeur très différents de ceux que l'on rencontre ailleurs sur notre territoire, avec quinze millions de voyageurs dans les transports publics chaque jour. Les ressources mobilisées sont toutefois à la hauteur de ces enjeux, avec un contrat de plan qui représente 7,5 milliards d'euros. Chaque année, la RATP, gestionnaire d'infrastructures, et SNCF Réseau mobilisent un milliard d'euros pour la régénération des réseaux. En outre, nous réalisons deux cents kilomètres de nouvelles lignes de métro autour de Paris. Certes, ce métro est plutôt sur la limite de la petite Couronne. Ile-de-France Mobilités devra réfléchir à l'évolution des transports de banlieue à banlieue, qui sont structurants pour l'Ile-de-France, afin qu'ils bénéficient à l'ensemble des territoires et ne soient pas assimilables à une nouvelle frontière, comme le périphérique a pu l'être à un moment donné.

Madame la Sénatrice Tocqueville, nous nous préoccupons de l'Axe Seine. L'ambition est portée par le Gouvernement. Le Premier ministre a confié une mission au préfet François Philizot sur la méthode pour tirer parti des synergies, dans le prolongement d'AROPA pour soutenir le développement de l'ensemble des ports de l'Axe Seine. C'est bien à cette échelle qu'il nous faut réfléchir et agir, notamment en termes de zones logistiques, riches en créations d'emplois qui devront accompagner le développement de nos ports.

Sur les ressources dédiées, notre réflexion est particulière s'agissant du Lyon-Turin et du Canal Seine-Nord. En effet, le Lyon-Turin se trouve dans une zone de montagne et le texte européen permet des sur-péages. Un fonds spécifique récupère également les dividendes des sociétés tunnelières. Il est tout à fait possible de réfléchir, ailleurs, à d'éventuels sur-péages en s'inspirant notamment des dispositifs mis en oeuvre par la Société du Grand Paris. Certaines régions aspirent, à mon sens légitimement, à des mesures comme des taxes spéciales d'équipement ou des redevances assises sur des surfaces de bureaux ou d'activités. Je compte sur le conseil d'orientation des infrastructures et sur le groupe qui travaille sur la soutenabilité et le financement de nos projets pour faire preuve d'imagination, tant les besoins de financement sont importants.

Monsieur le Sénateur Fouché, je partage votre analyse : les cheminots ne sont pas responsables du montant de leur dette. Celle-ci a d'abord été constatée en 1997 et résultait du financement, par la SNCF, des lignes à grande vitesse. Ce point est important et c'est la raison pour laquelle cette réflexion globale a été confiée à M. Jean-Cyril Spinetta. Il faut que l'État se dote enfin d'une stratégie d'ensemble cohérente sur le ferroviaire. Il nous faut sortir des injonctions contradictoires données à la SNCF, à la fois sur le fait qu'elle devrait baisser ses coûts tout en augmentant ses dessertes et qu'elle devrait, par ailleurs, commander des trains.

La sécurité des gares et des transports est un enjeu majeur et la loi de mars 2016 atteste de notre mobilisation. Les décrets d'application ont bien été mis en oeuvre, y compris ceux qui renforcent la vigilance lors du recrutement dans les entreprises de transport et qui accordent de nouvelles prérogatives aux agents de sécurité de la SNCF et de la RATP. Tous ces sujets ont avancé.

Le volet fraude, également porté la loi de mars 2016, a avancé. On s'est toutefois heurté à une difficulté, quant à la consultation du fichier qui visait à obtenir un meilleur taux de recouvrement des amendes. La Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) a donné un avis négatif sur la première version du décret qui lui a été soumis. Nous allons donc soumettre une seconde version du décret permettant de retrouver les fraudeurs, tout en respectant le cadre fixé par la CNIL.

Monsieur le Sénateur Gontard, nous essayons de conduire une stratégie équilibrée dans le domaine ferroviaire. Je pense que le Parlement aura à se prononcer sur la part des lignes à grande vitesse, dont je pense qu'elle pourrait ne pas rester au niveau actuel. 1 % des déplacements sont de longue distance et on a consacré 16 % de l'ensemble des ressources - tous financeurs confondus - au financement des TGV au cours des dernières années. Pour autant, il va nous falloir investir davantage sur les réseaux existants et investir davantage où le ferroviaire peut avoir toute sa pertinence, c'est-à-dire dans le transport de masse en dehors de l'Ile-de-France.

Monsieur le Sénateur Chaize, les priorités du CPER route ne sont pas décidées depuis Paris. Elles ont été décidées en lien avec les collectivités. Tout ne pourra pas être fait l'année prochaine, mais je me suis attachée à préserver des ressources pour les contrats de plan, dont les discussions seront conduites au niveau local.

Par ailleurs, il n'y a pas de stratégie de réduction des dessertes de TGV qui ne doivent pas se limiter aux métropoles. La solidarité existe : 70 % des dessertes de TGV sont aujourd'hui déficitaires et sont financées par les dessertes rentables. Toutefois, comme le Président l'a fait remarquer sur le quatrième paquet ferroviaire, les perspectives d'ouverture à la concurrence vont nous amener à nous interroger sur les modalités du maintien de cet équilibre, après l'ouverture à la concurrence. La solidarité joue à plein et devrait être plus prégnante encore, s'agissant du niveau des péages, dans les comptes de SNCF Mobilités, comme c'est le cas aujourd'hui.

Monsieur le Sénateur Marchand, je vous confirme que le site de Somain reste important pour le transport de marchandises en France et qu'en complément des perspectives portées par le projet de redynamisation du site, animé localement par le sous-préfet avec des fonctionnalités intermodales rail-route, un projet est bel bien porté par SNCF Logistique pour conforter ce site comme plateforme de relais national et international, avec la constitution de trains longs et lourds. Par ailleurs, le site de Somain fait partie des sites considérés dans le cadre de la desserte entre l'Espagne et la France, au travers des autoroutes ferroviaires.

Monsieur le Sénateur Vaspart, il va falloir, en effet, qu'on réfléchisse à la transparence des coûts des études et des travaux. Je m'engage à regarder ce point avec SNCF Réseau. On est, il est vrai, assez souvent surpris par le coût des travaux et une telle réflexion pourrait être conduite avantageusement par SNCF Réseau. Ce constat vaut de manière générale. Ce moment de pause peut nous amener à réfléchir sur le caractère pragmatique des réponses apportées. Il nous faut progresser sur ce point et ne pas reproduire les mêmes schémas, que ce soit en matière d'infrastructures routières ou ferroviaires. Un peu de pragmatisme ne nuirait pas et, par ailleurs, coûterait moins cher. Mais il est vrai que la multiplication des travaux de rénovation peut impliquer une phase de dégradation de la qualité du service rendu aux voyageurs. C'est d'ailleurs ce que vivent les voyageurs en Ile-de-France lors des opérations de rénovation. Sans doute faudrait-il concentrer les travaux sur une période plus courte plutôt que de les effectuer, sur la durée, petit à petit. Sans doute devrons-nous creuser cette question avec SNCF Réseau.

Sur la ligne Brive-Aurillac, si nous avons déjà financé des travaux, d'autres sont encore à effectuer. Le niveau de fréquentation n'y est manifestement pas très élevé. Cette situation est analogue à celle des Alpes : dans des secteurs où les infrastructures routières ne répondent pas aux besoins en toutes saisons, comment faire pour que l'infrastructure ferroviaire accueille plus de voyageurs qu'aujourd'hui ? Le service public a un coût et peut se répercuter sur celui acquitté par le voyageur.

Monsieur le Sénateur Mandelli, le Gouvernement n'a pas l'intention de détricoter les apports de la Loi Leroy. Je regarderai attentivement s'il est possible d'améliorer cette situation, mais des règles ont été introduites pour éviter les fraudes, s'agissant notamment des enjeux d'honorabilité. Le principe de l'auto-liquidation de la TVA n'a pas été remis en cause. La réflexion sur le net wage se poursuit.

Monsieur le Sénateur Bizet, la stratégie du pavillon national est en effet importante. En même temps, l'évolution de la part de marché que vous avez mentionnée se place dans un environnement marqué par le développement du transport aérien et l'exacerbation de la concurrence. La concurrence est rude, avec l'émergence notamment des compagnies low cost et des compagnies du Golfe. La Commission, avec le soutien de la France, a posé un nouveau cadre pour la régulation et la lutte contre la concurrence déloyale. Nous avons évité que ce dossier soit occulté. Les travaux vont s'engager sur cette lutte avec des pavillons dont on sait très bien qu'ils sont fortement subventionnés, d'une manière ou d'une autre. En attendant, la Commission assume le mandat de l'ensemble des pays européens pour conduire les négociations avec les Pays du Golfe. Je ne suis toutefois pas certaine que le traitement de ce dossier connaisse une rapide accélération, l'un conditionnant tout de même l'autre : s'assurer que nous sommes dans une situation de concurrence loyale est tout de même un préalable à la négociation de droits de trafic. Je pense que la Commission le voit aussi de cette façon.

Si certaines compagnies se préparent au Brexit en devenant des compagnies européennes, les discussions avec nos partenaires britanniques n'ont pas été engagées, pour l'heure ; les préalables n'étant pas remplis. Je suis enfin consciente que la situation de la ligne Paris-Granville n'est pas satisfaisante et qu'il va falloir qu'on se saisisse, sur cette question, de réelles marges de progrès.

Monsieur le Sénateur Chevrollier, je ne vous surprendrai pas en vous rappelant que la mission sur l'aéroport Notre-Dame-des-Landes est en cours et que nous en attendons les conclusions.

Sur l'impact des dessertes en autocar librement organisées, la fréquentation de ces cars provient, pour un tiers, de la route, d'un autre tiers, du rail et enfin, de déplacements rendus possibles par cette nouvelle possibilité. Il est important que ces cars aient permis, à un certain nombre de nos concitoyens qui ne pouvaient jusque-là se déplacer, de trouver une réponse à leurs besoins.

Je n'ai pas d'information immédiate sur la RN62, mais dans le cadre des Assises de la mobilité, nous allons ouvrir des réflexions sur des gouvernances évolutives, comme la possibilité de mettre en place des péages au-delà de ce qui existe actuellement dans le réseau routier. On pourra, sur ce point, vous répondre ultérieurement de façon plus précise. Sur la LGV BPL, j'ai bien noté un certain nombre d'insatisfactions, mais, tout de même, j'espère que celles-ci n'éclipsent pas totalement les satisfactions exprimées, puisque cette ligne a mobilisé d'importants financements.

Monsieur le Sénateur Dagbert, les dessertes ferroviaires devront continuer à faire l'objet d'une solidarité nationale. Je suis consciente que les collectivités territoriales sont sollicitées de manière importante pour le financement du ferroviaire. Je crois qu'il est essentiel de s'emparer de ce sujet avec lucidité. La remise en état du réseau représente des sommes colossales. Il nous faudra prioriser et nous ne pourrons remettre en état l'ensemble des infrastructures. Autant dans certains secteurs la solution ferroviaire est irremplaçable comme transport de masse, autant dans d'autres secteurs où les infrastructures routières sont de qualité, les régions, en leur qualité d'autorité organisatrice, doivent regarder le coût par voyageur et la qualité du service rendu, certaines dessertes pouvant avantageusement être assurées par la route, que ce soit par autocars ou minibus. Je le dis d'autant plus que je pense, a contrario, que le ferroviaire n'est pas assez utilisé pour le transport de marchandises et dans la périphérie de nos agglomérations. Pourtant, on peut constater en Ile de France qu'avec une voie dans chaque sens, on sait transporter plus d'un million de voyageurs par jour. Assurer, de la sorte, le transport de plusieurs dizaines de milliers de nos concitoyens dans nos agglomérations ne manquerait pas de bénéficier au fonctionnement de nos villes, ne serait-ce que par la réduction des taux de pollution que chacun peut connaître.

Monsieur le Sénateur Longeot, j'espère également que le milliard d'euros de commandes publiques, que nous allons passer pour soutenir le site d'Alstom-Belfort, conduira bien à des emplois en France.

Madame la Sénatrice Bories, avec l'émergence des compagnies low cost , le TGV est plus cher que l'avion. En effet, lorsqu'une infrastructure comme Sud-Europe-Atlantique coûte plus de neuf milliards d'euros, les collectivités peuvent la financer à 100 % ou alors une partie est portée par le prix du billet. Chacun peut constater que se rendre depuis Paris à Bordeaux, par la ligne SEA, en deux heures, est une expérience très agréable, mais qu'il est moins onéreux de le faire par l'avion. On pourrait ouvrir le débat des émissions de gaz à effet de serre. J'ai demandé à mes services de dresser le bilan carbone de la construction de cette ligne. En effet, construire ce genre d'infrastructure, à coups de béton et d'acier, doit s'amortir dans la durée pour atteindre un bilan carbone satisfaisant.

Le vélo est au coeur de nos réflexions et des assises de la mobilité. Nous allons réfléchir à un nouveau dispositif destiné à soutenir les vélos à assistance électrique, mais plutôt en synergie qu'en alternative aux aides apportées par les collectivités. Il faudra continuer à soutenir les circulations douces et l'État à accompagner les collectivités territoriales.

Monsieur le Sénateur de Nicolaÿ, je ne vois pas pourquoi la politique de cession, par la SNCF, des lignes désaffectées s'arrêterait. Nous pouvons ainsi obtenir des voies vertes d'une très grande qualité, en reprenant des infrastructures qui ne sont plus utilisées par le ferroviaire.

M. Hervé Maurey , président . - Merci beaucoup, Madame la Ministre, pour le temps que vous nous avez accordé, pour votre écoute et la qualité de votre réponse. Vos propos ont été appréciés, comme en témoignent les applaudissements qui viennent de ponctuer votre intervention, et nous attendons qu'ils soient désormais suivis d'effets. Vous pouvez compter, à cet égard, sur notre soutien.

II. EXAMEN DU RAPPORT

Réunie le mercredi 8 novembre 2017, la commission a examiné le rapport pour avis sur les crédits « Transports ferroviaires, collectifs et fluviaux » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables ».

M. Hervé Maurey , président . - Je donne la parole à M. Gérard Cornu, pour nous présenter les crédits du projet de loi de finances pour 2018 consacrés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux.

M. Gérard Cornu , rapporteur pour avis . - Je remercie Jean-Pierre Corbisez pour sa présentation de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf), qui me permettra d'abréger mon propos sur cette agence. Après une présentation des crédits consacrés aux transports ferroviaires, collectifs et fluviaux du projet de loi de finances pour 2018, je vous ferai un rapide exposé sur la situation et les perspectives du fret ferroviaire.

Pour revenir d'abord sur le budget de l'Afitf, il est toujours très difficile de se prononcer au moment des débats relatifs à la loi de finances, car le budget définitif n'est arrêté qu'en décembre.

Le ministère en charge des transports, qui en a la tutelle, nous a indiqué que le budget annoncé de 2,4 milliards d'euros devrait suffire pour 2018, à condition d'échelonner certains paiements ou de retarder la mise en oeuvre de certains projets. Mais, dans ce cas, il faut bien noter qu'on ne fait que reporter dans le futur les difficultés budgétaires de l'agence, qui sont réelles.

Je rappelle que l'Afitf avait encore, à la fin de l'année 2016, une dette de 447 millions d'euros vis-à-vis de SNCF Réseau, dont 37 millions au titre des pénalités. Ce montant est en diminution, mais il n'est pas négligeable et mérite d'être souligné.

En réalité, l'Afitf doit assumer de nombreux engagements pris par le passé, sans avoir les ressources correspondantes. Dans ce contexte, je suis extrêmement favorable à la démarche engagée par la Ministre Élisabeth Borne pour redéfinir, avec le Parlement, les priorités et les inscrire dans une loi de programmation, en garantissant leurs financements. Nous devons, à l'avenir, être plus rationnels dans nos choix d'investissements, en nous assurant de leur faisabilité financière.

J'en viens aux crédits du programme 203. Dans le domaine ferroviaire, les dépenses de l'État se composent essentiellement de la contribution de l'État à SNCF Réseau, fixée en 2018 à 2,4 milliards d'euros, un montant très proche de celui retenu en 2017. Pour vous donner une idée de la répartition entre les crédits de l'État et ceux de l'Afitf, je vous indique que la contribution de l'Afitf pour les transports ferroviaires devrait s'élever à 1 milliard d'euros. La contribution du programme 203 finance 1,67 milliard d'euros de redevance d'accès au réseau pour les TER, qui est prise en charge par l'État, 528 millions d'euros de redevance d'accès au réseau pour les trains d'équilibre du territoire, et 224 millions d'euros pour le financement de l'utilisation du réseau par les trains de fret.

S'ajoutent à cette enveloppe deux dépenses d'un montant beaucoup plus limité : 1,25 million d'euros pour financer l'exploitation et la maintenance de la ligne à grande vitesse Perpignan Figueras, qui a été reprise par une filiale de la SNCF et de son homologue espagnol à la suite de la liquidation du concessionnaire et 1 million d'euros pour améliorer la robustesse du GSMR, le système de communication du réseau ferroviaire qui assure les liaisons radio sol-train, perturbé par les émissions des opérateurs de réseaux.

Pour soutenir les transports collectifs, l'État versera 20 millions d'euros à SNCF Mobilités pour compenser les tarifications sociales nationales qu'il lui impose. Il s'agit par exemple des billets « familles nombreuses ». Cette enveloppe est en diminution ces dernières années, en raison des évolutions de la tarification chez l'opérateur, qui multiplie les offres promotionnelles en parallèle de ces tarifs sociaux. Près de 5 millions d'euros seront versés à la région Grand Est pour compenser l'impact de la mise en service du TGV sur les services ferroviaires régionaux, conformément à ce que prévoit la loi SRU. Enfin, l'État soutient l'ensemble des transports collectifs en finançant des enquêtes et des études, ou des expériences innovantes, à hauteur de 1,75 million d'euros. De plus, 450 000 euros sont destinés au développement de l'usage du vélo.

J'en viens aux crédits consacrés aux transports combinés, qui sont effectués par la route mais utilisent, sur une partie de leur parcours, un mode alternatif, qu'il soit ferroviaire, fluvial ou maritime. Ils s'élèvent à 22 millions d'euros en crédits de paiement et 77 millions d'euros en autorisations d'engagement. Parmi ces crédits, 60 millions d'euros correspondent au nouveau contrat de concession conclu pour l'exploitation de l'autoroute ferroviaire alpine.

Enfin, pour le transport fluvial, la subvention versée par l'État à Voies navigables de France est fixée à 251 millions d'euros, un montant proche de celui adopté l'an dernier.

Le programme 203 comprend également des dépenses transversales au titre des fonctions support, pour la réalisation d'études et les dépenses de logistique de la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM) ou des services qui lui sont rattachés. Ils s'élèvent à 15,6 millions d'euros, un montant en diminution de 3 % par rapport à l'année dernière.

Je vais désormais vous présenter les dernières évolutions relatives aux trains d'équilibre du territoire, et le compte d'affectation spéciale qui les finance. À la suite d'un rapport de la Cour des comptes encourageant l'État à mieux exercer son rôle d'autorité organisatrice, le Ministre Alain Vidalies avait mis en place une commission sur l'avenir de ces trains, présidée par Philippe Duron. Il avait également confié au Préfet François Philizot la mission de discuter avec les régions des évolutions de desserte à mettre en oeuvre, en articulation avec les services de TER.

Ces travaux ont abouti, d'une part, à la réduction de l'offre gérée par l'État, désormais composée de six lignes de jour, considérées comme structurantes, et de deux lignes de nuit, d'autre part, au transfert d'un certain nombre de lignes aux régions, en l'échange d'une participation de l'État au renouvellement du matériel roulant et à la couverture d'une partie de leur déficit d'exploitation. Vous trouverez dans mon rapport écrit le détail de ces accords. L'État a signé, pour les services qu'il continue à gérer, une nouvelle convention avec SNCF Mobilités, dans laquelle il exige des gains de productivité. Des matériels roulants neufs ont aussi été commandés pour certains de ces services.

Malgré cette reconfiguration des services, les crédits du compte d'affectation spéciale, qui finance l'exploitation des trains d'équilibre du territoire, continuent d'augmenter. Ils passeront de 358 millions d'euros en 2017 à 383 millions d'euros en 2018. De fait, le transfert des lignes aux régions, qui a commencé en 2017 pour certaines d'entre elles, s'échelonnera sur plusieurs années, jusqu'à 2020. Dans l'intervalle, l'État continuera à financer leur exploitation. En outre, le compte d'affectation spéciale financera, à hauteur de 73 millions d'euros, les premières compensations versées aux régions en contrepartie du transfert de certaines lignes. Je précise en revanche que le compte d'affectation spéciale ne financera pas le renouvellement du matériel roulant, qui sera pris en charge par l'Afitf.

Du côté des recettes, le compte est essentiellement alimenté par deux taxes applicables à SNCF Mobilités - la contribution de solidarité territoriale et la taxe sur le résultat des entreprises ferroviaires -. S'y ajoute une fraction de la taxe d'aménagement du territoire imposée aux sociétés concessionnaires d'autoroutes. Mais, en 2018, la contribution de la SNCF sera réduite, comme l'État s'y est engagé : elle passera de 316 à 242 millions d'euros. La fraction de la taxe d'aménagement du territoire revenant au compte d'affectation spéciale sera augmentée en conséquence.

La refonte de l'offre des trains d'équilibre du territoire était très attendue et va dans le sens suggéré par la Cour des comptes. Mais plusieurs points de vigilance demeurent. Tout d'abord, il est indispensable que l'État exerce pleinement son rôle d'autorité organisatrice et effectue un suivi des performances demandées à SNCF Mobilités. Si elles ne sont pas respectées, il devra en tirer les conséquences.

Ensuite, deux régions ne sont pas assurées que les engagements pris par l'État pour le renouvellement des matériels roulants seront respectés : les régions Centre-Val de Loire et Hauts de France, à qui l'État avait promis respectivement 480 et 250 millions d'euros au moment du transfert des lignes. D'après le ministère, la « confirmation précise » de ces crédits « dépendra des financements mobilisables sur le budget de l'Afitf » , ce qui n'est pas très rassurant. Or, ces engagements faisaient partie des accords globaux par lesquels les régions ont accepté de récupérer des lignes. Sans ces nouveaux matériels, il sera impossible de les rendre attractives et leur déficit va se creuser, au préjudice des deux régions.

J'ai préparé cette intervention avant l'audition de la Ministre qui, tout à l'heure, s'est engagée sur le déblocage de ces crédits au début de l'année 2018. C'est une très bonne nouvelle : si la Ministre s'engage ainsi devant la représentation nationale, nous pouvons être rassurés sur ce point.

J'ai terminé la présentation des crédits et voudrais désormais aborder avec vous la question du fret ferroviaire. La Cour des comptes a récemment réalisé une série d'enquêtes sur l'activité de transport de marchandises du groupe SNCF, et adressé un référé à ce sujet aux ministres Nicolas Hulot et Élisabeth Borne. J'ai jugé intéressant de porter ce travail à votre connaissance, après avoir entendu deux magistrats de la Cour.

Au sein de SNCF Mobilités, l'activité « fret » est partagée entre Fret SNCF, qui est une composante de l'établissement public à caractère industriel et commercial SNCF Mobilités, et VFLI, une filiale de droit privé de SNCF Mobilités. Cette filiale a été créée en 2008 pour que l'entreprise puisse s'adapter au nouveau contexte de l'ouverture à la concurrence du fret, effective depuis 2006.

Après avoir bénéficié d'une recapitalisation de 1,4 milliard d'euros en 2005, Fret SNCF a fait l'objet d'un travail important de réorganisation : son personnel a quasiment été divisé par deux entre 2008 et 2015 ; une grande partie de son matériel roulant a été vendue ; et ses activités ont été rationalisées pour subir moins de pertes. Mais il reste très pénalisé par le coût et le régime de travail de ses personnels. Par rapport à un opérateur privé, le surcoût lié à l'organisation du temps de travail est de 20%, voire de 30% si l'on prend en compte l'absentéisme très élevé qu'il subit ! C'est colossal.

Ainsi, malgré les efforts évoqués plus haut, Fret SNCF a continué à perdre des parts de marché et accumulé les pertes, son endettement atteignant 4 milliards d'euros en 2014. Il n'est aujourd'hui toujours pas en mesure d'obtenir des résultats équilibrés. Dans ce contexte, la question d'une nouvelle recapitalisation risque de se poser. Pour obtenir l'autorisation de Bruxelles, il faudra au préalable que SNCF Mobilités améliore son référentiel comptable, pour éviter tout soupçon de financements croisés. Or, ce référentiel a été rejeté à deux reprises par l'Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières.

Dans tous les cas, l'État devrait imposer à Fret SNCF des gains significatifs de productivité. Or, dans le contrat pluriannuel signé avec SNCF Mobilités, les engagements pris dans ce domaine restent très généraux, sans indicateur de suivi.

À l'inverse, et cette fois-ci c'est une bonne nouvelle, la filiale de SNCF Mobilités VFLI a connu de très bons résultats, grâce à la souplesse de son offre et de son cadre social.

De façon plus générale, la Cour des comptes a relevé les incohérences de l'État dans le domaine du fret ferroviaire qui, s'il affirme régulièrement son soutien au fret ferroviaire, a pris plusieurs décisions qui le pénalisent fortement ces dernières années, comme l'abandon de l'écotaxe ou l'autorisation de circulation donnée aux poids lourds de 44 tonnes. Plus récemment, les négociations sur le cadre social commun prévu par la loi de réforme ferroviaire d'août 2014 ont alourdi les contraintes des opérateurs privés, ce qui a encore augmenté leurs coûts. La situation est pire pour Fret SNCF, dont le régime de travail a été rigidifié, alors que c'était l'inverse qui était recherché.

Il faut également signaler qu'à l'avenir, les entreprises de fret seront confrontées à une augmentation des péages, qui sont aujourd'hui sous-évalués par rapport à ce que prévoit le droit européen. Une partie de cette augmentation dépendra de l'amélioration de la qualité des sillons proposée par SNCF Réseau. L'activité de fret est en effet la première impactée lorsque le gestionnaire de réseau réalise des travaux ou annule des sillons.

Pour l'instant, l'État prend en charge une partie de ces péages, par la « compensation fret », qui représentera 79 millions d'euros en 2018. Mais cette compensation devrait progressivement diminuer. L'équation deviendra donc de plus en plus compliquée pour le fret, si l'on n'élabore pas de stratégie globale pour le défendre face à la route.

Je vous rappelle enfin que nous devrons traiter un sujet majeur l'année prochaine : l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs. Comme vous le savez, notre Président a déposé une proposition de loi, avec notre ancien collègue Louis Nègre, pour accélérer la mise en oeuvre de cette réforme. Les TER et TET devront en effet être ouverts à la concurrence à partir du 3 décembre 2019, et les TGV à partir de décembre 2020, ce qui suppose l'adoption d'une loi dès l'année prochaine. L'étude sur le fret que je viens de vous exposer démontre les gains de productivité que nous pouvons attendre d'une telle réforme. Il nous reviendra donc de suivre avec attention le résultat de la mission confiée à Jean-Cyril Spinetta, et de veiller à ce que le cadre juridique de cette réforme soit correctement défini, pour garantir les conditions d'une concurrence effective, libre et loyale entre les différents opérateurs.

Pour conclure, le budget proposé pour 2018 comporte des éléments positifs, comme l'augmentation du budget de l'Afitf - même s'il faut garder en tête qu'elle ne lève pas tous les doutes sur la soutenabilité financière de l'agence, et que l'agence devra continuer en 2018 à retarder certains engagements ou certains paiements, comme les années précédentes.

Ces sujets seront néanmoins bientôt abordés dans le cadre de la loi sur les mobilités annoncée par le Gouvernement. Cette loi doit permettre de repenser la stratégie de notre pays en matière d'infrastructures de transport, dans un cadre pluriannuel et en accord avec le Parlement. C'est une démarche que je soutiens, car nous ne pouvons plus continuer, comme par le passé, à promettre la réalisation de projets sans avoir vérifié leur faisabilité financière. Nous examinons donc cette année un budget de transition.

J'ai par ailleurs été rassuré par la Ministre sur le respect de l'engagement de l'État concernant le renouvellement des trains d'équilibre du territoire en Centre-Val de Loire et dans les Hauts-de-France.

Je vous propose donc d'émettre un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

De grands chantiers nous attendent, et la Ministre a montré sa volonté d'associer le Parlement. Nous sommes trois sénateurs à siéger au Conseil d'orientation des infrastructures, avec notamment le Président Maurey. La démarche va dans le bon sens et fait montre de pragmatisme. Nous ne pouvons plus continuer à faire des annonces, qui certes font plaisir, mais ne sont pas soutenables sur le plan financier.

M. Hervé Maurey , président . - M. Michel Dagbert siège aussi au Conseil d'orientation des infrastructures, de même que trois députés. Nous y avons fait valoir la nécessité d'inscrire le critère de l'aménagement du territoire comme une priorité pour les choix qui devront être faits.

Je vous remercie pour ce rapport très clair et précis, sur un sujet qui se caractérise par des enchevêtrements de crédits très compliqués, et pas toujours rationnels.

Comme me le disait la Ministre tout à l'heure, on exige souvent de la SNCF qu'elle se comporte en vraie entreprise. Mais pour cela, il faudrait que l'État la traite comme une vraie entreprise. En ce qui concerne le financement des missions de service public et d'aménagement du territoire, le dispositif actuel revient à ce que la SNCF finance elle-même les contraintes qui lui sont imposées. Lorsque l'on évoquait le souhait de prise en compte, par l'État et par la SNCF, du critère de l'aménagement du territoire, les charges qui en découlent ne doivent pas être supportées par l'entreprise, mais par l'État.

M. Benoît Huré . - Merci pour cet exposé, et d'avoir précisé que lorsque nous avons des ambitions d'aménagement du territoire, il faut déterminer qui les porte. La clarté acquise dans ce domaine pourrait ouvrir de nouvelles perspectives à la SNCF.

S'agissant de l'incidence de l'autorisation de circulation donnée aux poids lourds de 44 tonnes, a-t-on une idée de la captation du trafic que cette mesure a engendrée au détriment de la SNCF ? Je rappelle que cette autorisation était surtout réclamée dans les territoires frontaliers, pour éviter des distorsions de concurrence. Dans les Ardennes, qui ont plus de 170 kilomètres de frontières avec la Belgique, nous voyions des entreprises de transport ardennaises s'installer de l'autre côté pour bénéficier de cette autorisation de circulation et rouler sur nos propres routes.

M. Jérôme Bignon . - Je vous remercie pour la clarté de cet exposé, sur un sujet complexe. J'émettrai aussi un avis favorable à l'adoption de ces crédits, compte tenu des explications apportées par la Ministre, qui a l'air de vouloir faire avancer les choses dans le bon sens. À budget de transition, vote favorable de transition.

Puisque nous avons la chance d'avoir avec nous les trois sénateurs qui siègent au Conseil d'orientation des infrastructures, pourriez-vous nous en dire plus sur le calendrier et les perspectives de ce travail, si cela n'est pas couvert par une obligation de confidentialité ?

M. Michel Vaspart . - Il y a une dégradation impressionnante du service proposé par la SNCF, sur les lignes secondaires, voire sur les TGV, sans parler du fret. Il y a de plus en plus d'incidents et de difficultés. Au-delà de ce qu'a pu faire l'État en matière d'infrastructures - ou ce qu'il n'a pas pu faire et fait financer par la SNCF -, il y a un réel problème de gestion et de management de cette entreprise. C'est le constat que je fais depuis que je suis ici, soit depuis trois ans.

Lors de mes nombreux trajets en train, je traverse des espaces avec de plus en plus de matériels roulants laissés à l'abandon, avec des vitres cassées, des tags, etc. Qu'en est-il de la filière de déconstruction de ces matériels du côté de la SNCF, en sachant que les entreprises privées ont, quant à elles, des obligations dans ce domaine ?

M. Gérard Cornu , rapporteur pour avis . - Monsieur Huré, je n'ai pas encore approfondi la question de l'impact de l'autorisation de circulation donnée aux 44 tonnes. Les questions de distorsion de concurrence sont toujours très compliquées. À cet égard, la pause et la réflexion initiée par la Ministre sur les systèmes de transport dans leur globalité me semblent importantes.

Pour répondre à Jérôme Bignon, je me félicite tout d'abord que les trois membres du Conseil d'orientation des infrastructures soient issus de notre commission. Ce n'était pas évident. Nous sommes la commission de l'aménagement du territoire et du développement durable et nous avons imposé l'aménagement du territoire parmi les critères de sélection des projets, au même titre que le critère économique. Le Conseil est présidé par Philippe Duron, qui connaît bien ces sujets. Le travail à réaliser est important, alors que les délais sont courts : nous devions initialement remettre nos conclusions à la mi-décembre, mais aurons un mois supplémentaire pour le faire. Nous avons un programme extrêmement dense, mais sommes attachés à ce que la voix du Sénat soit représentée, en particulier sur l'aménagement du territoire. Nous avons commencé par une série d'auditions générales, mais il faudra ensuite aborder les projets un par un.

M. Hervé Maurey , président . - La tâche la plus compliquée de ce Conseil sera d'établir un ordre de priorité pour les grandes infrastructures.

M. Gérard Cornu , rapporteur pour avis . - Avec des engagements qui ont déjà été pris : je pense aux projets bénéficiant de financements européens, tels que la ligne Lyon-Turin. Ce ne sera pas simple.

Pour répondre à M. Michel Vaspart, il existe un vrai problème de gestion à la SNCF. Mais il ne faut pas trop charger l'entreprise. Guillaume Pépy avait essayé de progresser sur le cadre social, mais il a été désavoué par le Gouvernement, dans le contexte des manifestations autour de la loi El Khomri. L'État a donc sa part de responsabilité.

En ce qui concerne la filière de déconstruction, je n'ai pas encore abordé le sujet. Les trains abandonnés ou en très mauvais état ne donnent pas une très bonne image de la France. Le sujet est important, je le regarderai et nous l'aborderons à nouveau. Le sujet du fret ferroviaire m'a paru prioritaire, compte tenu de la volonté du public à le voir se développer.

M. Hervé Maurey , président . - Je partage tout à fait les propos du rapporteur sur la SNCF. Je disais tout à l'heure que l'État aussi devait traiter la SNCF comme une entreprise. Vous avez bien fait de rappeler les événements de l'année dernière, qui démontrent l'attitude criminelle du Gouvernement envers la SNCF, en l'obligeant à abandonner sa réforme sociale pour des raisons purement politiques et conjoncturelles : la loi El Khomri et le championnat d'Europe de football. Je rappelle également qu'à l'époque, le Premier ministre avait annoncé, en compensation, qu'il s'intéresserait à la question de la reprise de la dette. Or, à peine deux mois plus tard, est sorti un rapport du Gouvernement préconisant de reporter le sujet à plus tard, à une échéance de trois ou quatre années. L'État a été totalement irresponsable dans son rapport avec la SNCF et on ne peut qu'espérer que le Gouvernement actuel ait une position différente.

M. Jean-Marc Boyer . - Merci pour les explications très claires de votre exposé. Comme nous avons trois sénateurs et trois députés membres du Conseil dont vous avez fait état, je souhaiterais connaître la définition de l'aménagement du territoire que vous retenez. Est-ce bien essayer de mettre tous les territoires au même degré de qualité, de maillage en termes de service public, et de faire en sorte que les territoires les plus éloignés puissent bénéficier du même service que les autres territoires, plus proches de grandes ou moyennes villes ? Est-ce bien la définition défendue par la commission ? Sur nos territoires, notamment le territoire auvergnat, on a vu des travaux importants réalisés sur certaines lignes. Or, on y observe de moins en moins de voyageurs et de fret, et quasiment plus de trafic ferroviaire. Les habitants et les élus s'interrogent, ils se demandent pourquoi autant d'investissements - de 3 à 5 millions d'euros - ont été réalisés. C'est pourquoi je partage l'interrogation de notre collègue M. Michel Vaspart sur la gestion de l'ensemble des infrastructures.

M. Gérard Cornu , rapporteur pour avis . - Je suis d'accord avec votre définition de l'aménagement du territoire, tout en sachant qu'on ne pourra pas avoir de lignes TGV partout. La priorité des transports quotidiens irriguant tout le territoire est une préoccupation essentielle. Il s'agit de trouver un juste milieu entre l'aménagement du territoire au plus profond des territoires, d'une part, et l'activité économique, d'autre part. Cela est conciliable. C'est pourquoi il était important d'avoir trois sénateurs au sein du conseil d'orientation des infrastructures.

M. Jean-Claude Luche . - Je souhaiterais réagir aux propos de notre collègue Jean-Marc Boyer. Pour moi, l'aménagement du territoire, notamment dans un département rural, doit, certes, concerner le train, mais également l'avion et la route. Il faut arriver à croiser ces trois modes de déplacements pour apporter à nos concitoyens le meilleur service. Dans certains départements et dans certaines régions, cela peut être le train ou le TGV, dans d'autres, l'avion. Je sais pertinemment que dans mon département, l'Aveyron, je n'aurai jamais le TGV. Il faut donc que nous imaginions comment compenser ce handicap par des accès routiers dignes de ce nom, voire - et le sujet a été abordé par Madame la Ministre - des lignes aériennes dignes de ce nom. Or, aujourd'hui, parfois, les billets d'avion pour ces destinations peuvent être très élevés : un billet Paris-Rodez peut coûter trois fois le prix d'un billet Paris-New York ! Pendant des décennies, quel que soit le Gouvernement en place, nous avons totalement oublié cette vision de l'aménagement du territoire. Je veux bien recevoir des milliers de touristes dans mon département en juillet et en août. Mais pour les recevoir dans de bonnes conditions, nous avons besoin d'un minimum de services pour ceux qui y résident aux mois de janvier et février. Ce serait un juste équilibre.

M. Benoît Huré . - Le moment est venu, peut-être au sein de cette commission, de nous remettre d'accord sur ce que nous entendons par l'aménagement du territoire. Il y a parfois beaucoup de démagogie sur le sujet. Pour moi, il consiste à permettre à des personnes qui habitent dans des espaces excentrés, par nécessité ou par choix, de pouvoir accéder à la « moyenne » des services offerts aux populations. Vouloir la même chose que dans une grande métropole n'est pas possible. C'est de la démagogie. Cela pourrait être l'occasion d'un séminaire de réflexion pour notre commission.

M. Hervé Maurey , président . - Nous ne referons pas, ce matin, le débat sur l'aménagement du territoire. Je vous rappelle que nous devons nous prononcer sur les crédits des transports ferroviaires, collectifs et fluviaux.

M. Michel Dagbert . - Je souhaiterais ajouter quelques mots sur le besoin de clarifier l'aménagement du territoire et, autant que faire se peut, de partager la même définition. Je suis très attentif à ce qui vient d'être dit. En effet, on a parfois une lecture un peu punitive de celles et ceux qui, par nécessité ou par choix, vivent dans les espaces ruraux. En conséquence, un certain nombre de services leur sont facturés plus cher, sous prétexte qu'ils y vivent. La bonne grille de lecture serait sans doute la méthodologie que nous avons utilisée dans nombre de départements pour élaborer le schéma départemental pour améliorer l'accessibilité des services au public. Les départements ont joué un grand rôle dans cette opération, que ce soit pour les infrastructures routières, ou l'ingénierie, qu'ils mettent à disposition des élus locaux. Ils sont arrivés à la conclusion que, depuis des décennies, l'État « déménage » son territoire là où les collectivités territoriales s'efforcent de l'aménager. La bonne grille de lecture est l'analyse des services que nos concitoyens arrivent à trouver dans des rayons de dix à quinze minutes, de trente minutes ou dans un temps plus long. Cette grille de lecture a été utilisée pour les infrastructures de transport, en cherchant à savoir quelle distance les populations étaient prêtes à parcourir pour atteindre l'arrêt de bus, la gare ou l'aéroport les plus proches. Nous pourrions réussir à trouver un consensus sur la définition de ce que nous souhaitons en matière d'aménagement du territoire, à condition qu'il ne soit pas punitif à l'égard de ceux qui vivent dans les espaces ruraux.

Mme Nelly Tocqueville . - Sur la notion d'aménagement du territoire, je souhaiterais prendre l'exemple du projet de la Ligne Nouvelle Paris-Normandie (LNPN), devenue totalement indispensable compte tenu des difficultés qui s'y multiplient presque quotidiennement. Si la nécessité de cette ligne est avérée, elle ne devra pas être réalisée à n'importe quel prix. Une approche de l'aménagement du territoire doit prévaloir dans la réflexion d'organisation de la desserte des territoires et notamment des territoires ruraux. Il s'agit, d'une part, ne pas faire passer des trains sur des espaces agricoles, dont on sait que le besoin va se faire de plus en plus sentir, d'autre part, de créer des dessertes pour ces mêmes territoires, qui en ont également besoin.

M. Olivier Léonhardt . - Je souhaiterais alerter la commission sur le fait que l'organisation des Jeux olympiques à Paris en 2024 entraîne déjà des phénomènes de ponction sur les crédits alloués à des projets de transport en région parisienne. Par exemple, dans l'Essonne, il vient d'être annoncé que le projet de tram-train, pourtant très ancien, qui doit permettre d'avoir une liaison transversale, va être reporté de deux ans, compte tenu des investissements nécessaires à déployer pour l'organisation des jeux olympiques de Paris. Pourrait-on interroger le Gouvernement à ce sujet ?

M. Gérard Cornu , rapporteur pour avis . - Je constate que nous partageons presque tous la même idée sur l'aménagement du territoire, quelle que soit notre orientation politique. En tant que sénateurs, nous avons tous « viscéralement » en charge l'aménagement du territoire. Nous devons rester vigilants sur le fait que la haute administration de l'État ne partage pas nécessairement cette préoccupation.

S'agissant des Jeux olympiques, nous souhaiterions en effet que les financements de l'Afitf soient plus importants mais il semble inévitable que l'organisation des Jeux conduira à différer certains projets d'aménagement. Je ne vois pas comment nous pourrions faire autrement.

M. Benoît Huré . - Sur ce dernier point, il serait utile d'entendre les responsables du Grand Paris. Si je comprends bien, nous décalerions des ordres de priorités.

M. Hervé Maurey , président . - Nous avons déjà organisé des auditions sur le Grand Paris, mais nous pourrions organiser une table ronde, comme nous allons en faire une prochainement sur le Canal Seine-Nord Europe. Nous pourrions la programmer pour le début de l'année 2018.

La commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits « Transports ferroviaires, collectifs et fluviaux » de la mission « Écologie, développement et mobilité durable » du projet de loi de finances pour 2018.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Mercredi 25 octobre 2017

Direction générale des infrastructures, des transports et de la mer : M. François Poupard , directeur, et Mme Isabelle Andrivon , cheffe de service de l'administration générale et de la stratégie.

Jeudi 26 octobre 2017

Cour des comptes : MM. Jean-Yves Perrot , conseiller maître, et Arnauld Marrou , rapporteur.


* 1 D'après le budget rectificatif du 15 juin 2017.

* 2 Budget prévisionnel.

* 3 Audit sur l'état du réseau ferré national français, par MM. Robert Rivier & Yves Putallaz, École polytechnique fédérale de Lausanne - LITEP Laboratoire d'Intermodalité des Transports et de Planification, 7 septembre 2005, et audit revisité sur l'état du réseau, par MM. Yves Putallaz et Panos Tzieropoulos, École polytechnique fédérale de Lausanne - LITEP Laboratoire d'Intermodalité des Transports et de Planification, septembre 2012.

* 4 Source : Arafer, bilan annuel du transport ferroviaire de voyageurs pour les années 2015-2016.

* 5 44,9 milliards d'euros en normes IFRS, 42 milliards d'euros en normes françaises, au 31 décembre 2016.

* 6 Proposition de loi n° 711 relative à l'ouverture à la concurrence du transport ferroviaire de voyageurs, présentée par MM. Hervé Maurey et Louis Nègre (Sénat, 2016-2017).

* 7 Cf. tableau des recettes de l'Afitf supra, pour le détail des différentes recettes.

* 8 Cf. infra, partie III sur les trains d'équilibre du territoire.

* 9 Qui correspond en partie à l'action n° 10 « Infrastructures de transports collectifs et ferroviaires » de la maquette du projet de loi de finances pour 2017.

* 10 Qui correspond à une partie de l'action n° 11« Infrastructures fluviales, portuaires et aéroportuaires » de la maquette du projet de loi de finances pour 2017.

* 11 Qui correspond à une partie de l'action n° 10 « Infrastructures de transports collectifs et ferroviaires » et une partie de l'action n° 13 « Soutien, régulation, contrôle et sécurités des services de transports terrestres » de la maquette du projet de loi de finances pour 2017.

* 12 Qui correspond à une partie des actions n° 10 « Infrastructures de transports collectifs et ferroviaires », n° 13 « Soutien, régulation, contrôle et sécurité des services de transport terrestres » et n° 14 « Soutien, régulation, contrôle dans le domaine des transports fluviaux, maritimes et aériens » de la maquette du projet de loi de finances pour 2017.

* 13 Qui correspond à l'action n° 15 « Stratégie et soutien » de la maquette du projet de loi de finances pour 2017.

* 14 Qui correspond à une partie de l'action n° 13 « Soutien, régulation, contrôle et sécurité des services de transport terrestres » de la maquette du projet de loi de finances pour 2017.

* 15 Les trois lignes à haute performance sont les suivantes : Paris-Orléans-Limoges-Toulouse ; Paris-Clermont-Ferrand ; Bordeaux-Toulouse-Marseille. Les autres lignes restant gérées par l'État sont : Nantes-Bordeaux, Toulouse-Hendaye et Nantes-Lyon. Pour une vision globale de l'évolution de l'offre des trains d'équilibre du territoire, cf. supra, annexe I.

* 16 Paris-Briançon et Paris-Rodez/Latour de Carol.

* 17 En application de l'article 22 du projet de loi de finances.

* 18 Cette ligne est issue de la fusion des lignes de nuit Paris-Toulouse/Rodez et Paris-Toulouse-Latour de Carol. La desserte Toulouse-Cerbère-Port Bou a été supprimée depuis le 11 décembre 2016.

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