EXAMEN EN COMMISSION

I. EXAMEN DU RAPPORT

Réunie le mercredi 15 novembre 2017, la commission a examiné le rapport pour avis sur les crédits des programmes 181 « Prévention des risques » et 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » du projet de loi de finances pour 2018.

M. Hervé Maurey , président . - Nous examinons les crédits de la politique de prévention des risques. Pierre Médevielle nous a déjà présenté à trois reprises ce rapport pour avis. À chaque fois, grâce aux auditions qu'il mène et aux déplacements sur le terrain qu'il fait, il nous permet de mieux appréhender les différents aspects de ce budget.

La prévention des risques, qu'il s'agisse des risques naturels - et nous savons qu'avec le réchauffement climatique, ils se multiplient -, des risques technologiques, par exemple liés à l'industrie nucléaire ou des risques environnementaux, notamment liés à l'usage de produits chimiques, est une question d'une grande actualité et d'une très grande acuité.

Aussi, je vous cède la parole, monsieur le rapporteur, pour que vous nous disiez, d'une part, où en sont les crédits dans ce domaine, d'autre part, quelle est l'actualité du secteur, en particulier sur les dossiers dont est chargée l'Anses.

M. Pierre Médevielle , rapporteur . - Comme l'an passé, cet avis porte sur les crédits de deux programmes de la mission « Écologie, développement et mobilité durables » : le programme 181 « Prévention des risques » et le programme 217 « Conduite et pilotage des politiques de l'écologie, du développement et de la mobilité durables ».

Ces deux programmes représentent environ 3,8 milliards d'euros, soit 34 % du total de la mission « Écologie ». Je vous propose d'évoquer en premier lieu le programme 217, qui constitue le programme support des politiques des ministères de la transition écologique et solidaire et de la cohésion des territoires.

À périmètre constant, en neutralisant les mesures de transferts, les crédits du programme 217 demandés pour 2018 sont relativement stables par rapport à 2017.

Hors dépenses de personnel, ces crédits passeront de 268 à 265 millions d'euros, soit une légère baisse de 1 %, résultant essentiellement d'une diminution des dépenses immobilières.

Concernant les dépenses de personnel, toujours à périmètre constant, les crédits du programme 217 passeront de 1 879 à 1 861 millions d'euros, soit une baisse également d'environ 1 %, résultant principalement de l'effet des schémas d'emplois.

Cette évolution permet au ministère de contribuer à l'effort de réduction du déficit public à un niveau qui me semble raisonnable, sans remettre en cause la conduite des politiques publiques.

Je précise que les moyens de fonctionnement et d'intervention du Commissariat général au développement durable (CGDD), précédemment portés par le programme 217, ont été transférés vers le programme 159 « Expertise, information géographique et météorologie ».

J'en viens au programme 181 « Prévention des risques », qui finance les actions de l'État en matière de prévention des risques naturels, technologiques et miniers, ainsi que des risques sanitaires d'origine environnementale.

Dans le projet de loi de finances pour 2018, le programme comporte également l'ensemble du budget de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe).

Ce changement de périmètre a un impact important sur le volume du programme, car ses crédits s'élèveront à 854 millions d'euros en autorisations d'engagement et 843 millions en crédits de paiement, contre respectivement 238 et 227 millions en 2017.

Au sein de cette enveloppe globale, les crédits de l'Ademe sont portés par une action nouvelle n° 12, dotée de 613 millions d'euros pour 2017.

Auparavant assuré par l'affectation d'une part de la taxe générale sur les activités polluantes, le financement de l'agence était confronté à plusieurs difficultés qui ont justifié son intégration au programme 181 : le montant de l'affectation était insuffisant par rapport aux interventions de l'agence et son versement était concentré chaque année entre mai et novembre.

Cette budgétisation dans le programme 181 nous permet ainsi d'examiner l'ensemble des ressources de l'Ademe. Il s'agit d'une agence dont les missions sont structurées par les objectifs fixés par la loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte.

Pour cela, elle intervient principalement par l'intermédiaire de plusieurs fonds qui lui permettent de soutenir financièrement des initiatives des collectivités territoriales, des entreprises ou des particuliers, en faveur de la transition écologique.

Ses principaux programmes d'intervention concernent la chaleur renouvelable, l'économie circulaire, la rénovation thermique, l'accompagnement des collectivités territoriales dans leurs démarches énergie-climat et la mise en sécurité des sites pollués. En 2018, un nouveau programme dédié à la qualité de l'air et aux mobilités sera mis en place.

Toutefois, les moyens de l'Ademe resteront contraints en 2018. En effet, le niveau élevé de ses crédits de paiement permettra d'abord de couvrir les restes-à-payer qui ont été accumulés ces dernières années, tandis que sa capacité d'engagement devrait être progressivement orientée à la baisse à partir de l'année prochaine.

Par ailleurs, tous reconnaissent, y compris l'Ademe, qu'avec 220 millions d'euros par an en moyenne ces dernières années, le fonds chaleur reste insuffisamment doté pour atteindre les objectifs ambitieux de développement de la part des énergies renouvelables dans la consommation nationale. La contribution de la chaleur renouvelable est pourtant indispensable à l'évolution globale du mix énergétique de notre pays. La promesse d'un doublement du fonds par le précédent gouvernement, réitérée lors de la campagne présidentielle par l'actuel Président de la République, ne s'est pas encore concrétisée.

J'en viens aux autres actions portées par le programme. En raisonnant à périmètre constant, c'est-à-dire hors transfert des crédits de l'Ademe, le programme connaît une hausse bien plus modeste de ses crédits, d'environ 1,3 %, en passant de 238 à 241 millions d'euros en autorisations d'engagement, et de 227 à 231 millions en crédits de paiement.

En d'autres termes, les ressources de la politique de prévention des risques sont préservées par rapport à l'année précédente, sans toutefois connaître de revalorisation majeure.

Comme l'an passé, la prévention des risques technologiques et des pollutions demeure une action importante du programme avec près de 107 millions d'euros en autorisations d'engagement et 91 millions en crédits de paiement.

En 2018, la priorité de cette action restera l'élaboration et l'application des plans de prévention des risques technologiques (PPRT) autour des sites Seveso, afin de rattraper le retard pris par rapport à la loi de 2003, qui prévoyait un achèvement du processus en 2008. Mi-2017, sur un total de 392 PPRT prescrits, 361 étaient approuvés.

En 2018, les crédits permettront de poursuivre l'élaboration des PPRT prescrits et de mettre en oeuvre les plans approuvés, en finançant des mesures d'expropriation et de délaissement, ainsi que des mesures supplémentaires de réduction des risques.

Un effort d'1 million d'euros est dégagé en faveur des PPRT, ce qui me semble être une bonne décision, compte tenu de l'importance de ces sujets pour les populations résidant autour des sites à hauts risques. Rappelons que les PPRT ont été créés en 2003 à la suite de la catastrophe de l'usine AZF à Toulouse le 21 septembre 2001.

Cette action porte également des ressources dédiées à la prévention des risques en matière de santé-environnement. Outre les activités de l'Anses en matière de produits phytosanitaires, sur lesquelles je reviendrai dans un instant, un effort d'environ 2 millions d'euros en 2018 permettra de mettre en oeuvre le troisième plan national santé-environnement. Ces actions porteront en particulier sur les perturbateurs endocriniens et les nanomatériaux.

En matière de prévention des risques naturels, l'élaboration des plans de prévention des risques naturels (PPRN) se poursuit, en mettant toujours l'accent sur la prévention des inondations, dès lors que 17 millions d'habitants résident dans une zone partiellement inondable.

L'élaboration des PPRN progresse, avec, au 1er août 2017, 11 395 communes couvertes par un PPRN approuvé, et 2 217 communes concernées par un PPRN prescrit en cours d'élaboration.

Les programmes d'actions de prévention des inondations (PAPI), portés par les collectivités territoriales avec un cofinancement de l'État, sont également des outils importants de cette politique. Ces programmes d'actions seront soumis à un nouveau cahier des charges à partir du 1er janvier 2018, qui prévoit notamment d'améliorer la coordination des programmes avec les autres politiques existantes, en particulier en matière d'urbanisme et d'aménagement du territoire.

Les crédits dédiés aux risques naturels enregistrent une légère baisse, qui résulte presque exclusivement d'un report de 2018 à 2019 lié à des retards dans la réalisation des travaux sur la digue ferroviaire de Tarascon.

Il faut également relever, au titre des risques naturels, le plafonnement de la ressource affectée au Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) à partir de 2018. Alimenté par un prélèvement sur les contrats d'assurance, dont le montant était supérieur à ses dépenses, le fonds a accumulé une trésorerie importante.

Le Gouvernement a donc décidé de plafonner à 137 millions d'euros le montant de cette affectation. Ce montant étant inférieur aux dépenses observées les années précédentes, la trésorerie du fonds devra sans doute être utilisée pour maintenir son niveau actuel d'intervention.

Ce plafonnement ne devrait certes pas avoir d'effet à court ou moyen terme sur la prévention des risques, tout en contribuant à la maîtrise des dépenses publiques, mais nous devrons être attentifs à l'évolution des ressources du fonds dans les prochaines années.

S'agissant de la prévention des risques miniers, le programme 181 prévoit 38,6 millions d'euros, soit une hausse de 2,4 %.

Cette action finance des mesures visant à limiter au maximum l'effet des anciennes exploitations minières sur la sécurité des personnes et des biens.

Elle s'appuie sur l'élaboration de plans de prévention des risques miniers, analogues aux PPRN, et sur la réalisation de travaux de mise en sécurité des sites miniers. Ces crédits financent également certaines mesures d'expropriation lorsque l'aléa minier menace gravement la sécurité des personnes.

J'en viens maintenant à la sûreté nucléaire et à la radioprotection. Le programme 181 apporte une dotation budgétaire à l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), autorité administrative indépendante chargée d'assurer la sûreté du secteur nucléaire. Pour cela, l'autorité s'appuie sur l'expertise de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Encore récemment, nous avons pu mesurer la réactivité de l'IRSN, qui a rapidement détecté une fuite de ruthénium, venant vraisemblablement d'un accident dans une région proche de l'Oural.

Comme je l'avais souligné l'an passé, ces deux organismes sont confrontés à un accroissement de leurs missions, avec plusieurs dossiers majeurs à traiter dans les prochaines années : les réexamens périodiques du parc vieillissant, l'application de nouveaux standards suite à l'accident de Fukushima ou encore la construction de nouvelles installations comme ITER ou l'EPR de Flamanville.

Par ailleurs, la situation financière des principaux exploitants, EDF et Areva, qui sont les premiers responsables de la sûreté nucléaire, reste fragile.

A ces problématiques s'est ajoutée la découverte de falsifications au cours de l'année 2016 dans la fabrication industrielle de certaines pièces pour l'EPR, ce qui a été un véritable « coup de tonnerre » dans le secteur.

L'ASN m'a indiqué que les exploitants se sont engagés dans une revue exhaustive de leurs commandes passées depuis 50 ans, en vue d'identifier d'autres irrégularités, et de déterminer le cas échéant si celles-ci s'accompagnent d'anomalies dangereuses pour la sûreté nucléaire.

Les ressources de l'ASN pour 2018 s'élèvent à 58,5 millions en autorisations d'engagement et 63,5 millions en crédits de paiement, soit une légère hausse d'environ 1 %. Quant à la dotation de l'IRSN apportée par le programme 190, elle est stable par rapport à 2017.

En matière d'effectifs, après avoir obtenu une hausse de 50 ETPT sur la période 2015-2017, l'ASN souhaite renforcer ses effectifs pour constituer une équipe d'inspection capable d'identifier les éventuelles fraudes. Comme les années précédentes, l'Autorité, qui vise à terme un objectif de quinze postes, n'a obtenu que partiellement satisfaction, avec un surcroît de deux emplois pour 2018.

Face à ces enjeux sans précédent, le caractère hautement prioritaire de cette mission de l'État - que je qualifierais de régalienne vu son importance pour la sécurité des populations - ne fait aucun doute. Malgré des efforts pour l'ASN, le budget de la sûreté nucléaire reste sous tension.

À titre personnel, je regrette qu'au-delà de ces concessions au coup par coup, une véritable trajectoire budgétaire crédible n'ait pas été définie par une réforme du financement de la sûreté nucléaire en France.

Des solutions crédibles existent pourtant, comme la mise en place au profit de l'ASN d'une contribution due par les exploitants d'installations nucléaires, ou l'augmentation du plafond pour le prélèvement qui bénéficie à l'IRSN. Ces évolutions permettraient d'accroître les ressources de la sûreté nucléaire, en valorisant à leur juste valeur les services rendus par ces organismes publics aux exploitants.

Pour terminer, je souhaiterais évoquer la contribution de l'Anses en matière de santé-environnement. Outre ses travaux de recherche et d'expertise sur des sujets majeurs comme les perturbateurs endocriniens et les nanomatériaux dans le cadre du plan national santé-environnement, l'Anses joue un rôle essentiel par l'évaluation et l'autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques et biocides.

Dans le cadre d'un déplacement au siège de l'Anses, j'ai pu échanger avec les services de l'agence sur ces différents sujets. Ces discussions ont été passionnantes et je ne peux qu'encourager notre commission à s'y rendre, compte tenu de l'importance des sujets traités par l'Anses.

Je souhaiterais tout d'abord rappeler qu'en matière de produits phytopharmaceutiques, un partage des tâches est établi entre le niveau européen et le niveau national : au niveau européen, l'évaluation et l'autorisation portent sur les substances actives, comme actuellement le glyphosate ; au niveau national, l'évaluation et l'autorisation portent sur les préparations, qui intègrent des substances actives et d'autres coformulants.

Au niveau européen, les États membres contribuent au traitement des demandes d'autorisation des substances actives, et la Commission européenne leur soumet en fin de procédure une proposition d'autorisation ou de non-autorisation.

Depuis le 1 er juillet 2015, l'Anses est chargée d'évaluer et d'accorder les AMM pour les préparations. Ce sujet avait été discuté par notre commission l'an dernier, car l'augmentation attendue des dossiers déposés nous faisait craindre une possible saturation des travaux de l'agence.

Afin de faire face à ce surcroît d'activité, l'Anses a prévu une augmentation de ses effectifs consacrés aux produits réglementés de 123 ETPT d'ici 2022, dont 15 emplois supplémentaires dès 2018. Cette évolution suivra l'augmentation de ses recettes, tout en étant sécurisée par un excédent de fonctionnement courant permettant de faire face à une éventuelle diminution des recettes.

Je pense que nous pouvons saluer cette stratégie de priorisation des actions de l'agence, en faveur d'une activité importante pour la santé publique, et pour laquelle la sensibilité de la société civile ne fait que s'accroître.

Comme vous le savez par ailleurs, en application de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, l'Anses a été chargée par le législateur d'établir un bilan des solutions de substitution ou des méthodes alternatives aux produits comprenant des substances de la famille des néonicotinoïdes, qui seront interdits le 1er septembre 2018, avec la possibilité de dérogations accordées par le Gouvernement jusqu'au 1er juillet 2020.

Ce bilan sera rendu au premier semestre 2018. En 2017, l'Agence a publié un avis précisant la méthodologie et les critères retenus pour évaluer les solutions de substitution. Lors des échanges avec les services de l'agence, j'ai été informé que la part d'utilisations dites « orphelines » suite à l'interdiction, qui était initialement estimée à plus de 30 %, devrait être plus faible que prévu compte tenu des solutions alternatives disponibles. Si cette perspective se confirme, il s'agit d'une bonne nouvelle, qui facilitera la transition vers des produits moins risqués.

Je terminerai sur ce sujet en soulignant qu'il est indispensable d'accorder le temps et les moyens nécessaires à l'expertise scientifique pour établir sereinement des connaissances, et, le cas échéant, identifier les incertitudes persistantes, avant une prise de décision politique sur des sujets aussi complexes.

Je serais tenté d'établir un parallèle entre la situation observée aujourd'hui sur le glyphosate, et ce que nous avions constaté à propos du Levothyrox dans le domaine médical. Des polémiques vives et aussi soudaines qu'éphémères font parfois prévaloir une approche très politique, voire caricaturale, avant même que l'état de la science n'ait été établi. À ce titre, l'Anses nous a confirmé que le classement du glyphosate parmi les substances cancérigènes reste incertain, au regard de la littérature scientifique existante.

Si la transparence et l'impartialité des procédures d'évaluation sont des enjeux majeurs pour la confiance en matière sanitaire, il ne s'agit pas de créer un climat de soupçon permanent qui conduirait à décrédibiliser a priori le rôle des organismes publics.

Pour conclure, vous l'aurez compris mes chers collègues, les crédits examinés dans le cadre de cet avis pour 2018 témoignent davantage d'un effort de priorisation à moyens contraints que d'un souffle nouveau en faveur de la prévention des risques. Toutefois, la hiérarchisation des enjeux me semble responsable et appropriée, dans le cadre d'un effort budgétaire global.

Tout en restant critiques et vigilants sur les mesures qui seront proposées dans les prochains mois par le Gouvernement, et sous réserve des informations que nous apportera le ministre lors de son audition prévue demain, je vous proposerai donc d'émettre un avis favorable à l'adoption de ces crédits.

M. Hervé Maurey , président . - Merci Monsieur le rapporteur pour ce rapport très intéressant. Je précise que nous attendrons d'avoir entendu le ministre demain avant de donner un avis sur ces crédits. Il en sera de même pour les crédits dédiés à la biodiversité.

Mme Nadia Sollogoub . -Je partage tout à fait l'avis du rapporteur sur la nécessité de moyens suffisants pour disposer d'une expertise scientifique solide.

J'ai été maire de Neuvy-sur-Loire pendant plusieurs années, et cette commune est située à proximité immédiate de la centrale nucléaire de Belleville ainsi qu'au bord de la Loire, ce qui m'a amenée à m'intéresser à la fois à la sûreté nucléaire et à la prévention des inondations.

Concernant le nucléaire, il faut être absolument vigilant mais c'est une technologie majeure. Néanmoins, on ne bénéficie pas d'un PPRT lorsque l'on se situe autour d'une centrale nucléaire, ce qui m'étonne compte tenu des enjeux en matière de risques technologiques. Le sujet du démantèlement est un vrai sujet, ainsi que le stockage du combustible, qui semble devenir un problème à l'usine de la Hague, avec peut-être la nécessité de construire des piscines de stockage supplémentaires.

S'agissant des inondations, j'ai eu l'occasion d'assister à plusieurs réunions sur un PAPI. À ma grande déception, une grande partie des crédits semblait destinée à des actions de communication et d'information - ce qui est important - mais il est également essentiel de financer des travaux.

M. Claude Bérit-Débat . - Je partage la conclusion du rapporteur. À propos de l'Anses, le législateur lui a fait confiance sur le sujet des néonicotinoïdes. Il est intéressant de savoir que l'on progresse sur les alternatives. Sur le glyphosate, si l'agence confirme que le constat scientifique est nuancé, il faut défendre la parole de l'expertise publique.

Concernant l'Ademe, l'augmentation des crédits du programme doit lui permettre d'honorer ses engagements passés, ce qui me semble important. En tant qu'élus locaux, il nous est arrivé par le passé d'être confrontés à des difficultés de financement de l'Ademe, notamment pour la réhabilitation de sites pollués. Il faudra également être vigilant sur l'évolution de sa trésorerie.

Mme Nicole Bonnefoy . - Pour avoir travaillé à de nombreuses reprises avec l'Anses, en particulier dans le cadre de la mission commune d'information de 2012 sur les pesticides dont j'étais rapporteure, avec notre collègue Sophie Primas comme présidente, je fais confiance à notre agence nationale.

Parmi nos recommandations, nous avions proposé la publication annuelle d'un rapport de l'Anses sur ses missions et ses travaux, ce qu'elle fait désormais. Je suggérerais que notre commission entende au moins une fois par an l'agence, en vue de mieux suivre ses activités et d'exprimer nos préoccupations.

Je partage également la priorité identifiée par le rapporteur en matière de santé-environnement. Je regrette toutefois le signal négatif envoyé par la remise en cause du risque chimique dans le compte pénibilité. Il s'agissait d'un progrès important du précédent gouvernement, car ces risques, qui tuent pourtant régulièrement, font rarement l'objet d'une reconnaissance, notamment en raison d'un manque de suivi de l'exposition. J'espère que la mission récemment annoncée par la ministre sur ce sujet permettra de progresser. La disparition des comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) me semble également être un mauvais signal.

M. Didier Mandelli . - Le FPRNM, dont les dépenses s'élevaient en 2016 à 233 millions d'euros, avait déjà fait l'objet d'un prélèvement de 55 millions d'euros. Le plafonnement à 137 millions envisagé cette année me semble dangereux, alors que les dépenses du fonds augmentent : 100 millions d'euros en 2007 devenus 233 millions en 2016. Cela traduit la multiplication des risques dans notre pays, qui devrait se poursuivre à l'avenir. Ce fonds est alimenté par les assurés à travers leurs primes d'assurance, mais l'évolution proposée pour 2018 va transformer ce mécanisme en taxe indirecte au bénéfice de l'État.

Concernant les activités polluantes, à l'heure où la feuille de route sur l'économie circulaire est en cours de rédaction, on peut regretter l'absence d'affectation de la TGAP au profit de l'Ademe. Si son produit était intégralement affecté à l'agence, en 10 ans nous aurions équipé notre pays pour faire face à l'enjeu environnemental, et nous aurions répondu aux besoins de nos collectivités territoriales.

Mme Nelly Tocqueville . - Ayant entendu les mêmes organismes dans le cadre de mon rapport sur la recherche, j'adhère aux conclusions du rapporteur.

En ces temps médiatiques, on entend souvent des discours passionnés fondés sur des arguments erronés ou déformés. Il faut donc effectivement laisser du temps et des moyens à l'expertise.

Concernant les autorisations de mise sur le marché, les taxes perçues par l'Anses peuvent dans une certaine mesure créer des pressions pour l'agence, car cela lui apporte des ressources. J'ai rencontré hier ses représentants, qui m'ont garanti que cela n'interférait pas dans leurs activités.

À propos du glyphosate, l'expertise sur la substance en elle-même est importante mais le choix de société et de modèle agricole incombe au pouvoir politique. J'ai par ailleurs découvert que certains produits aujourd'hui mis en avant comme alternatives ont parfois une composition mal identifiée et peuvent être encore plus dangereux.

M. Guillaume Gontard . - Concernant l'Ademe, je m'inquiète de la faiblesse des moyens, et de la baisse des effectifs. C'est problématique, à l'heure où le bâtiment représente 20 % des émissions de gaz à effet de serre.

S'agissant du glyphosate, j'entends bien les doutes qui peuvent subsister mais je pense que la dangerosité du produit justifie d'aller progressivement vers l'arrêt de son utilisation, compte tenu des risques pour les agriculteurs.

M. Jean-Pierre Corbisez . - Le FPRNM est abondé par les citoyens et assurés, qui risquent de payer à nouveau avec la taxe qui pourra être mise en place par les EPCI dans le cadre de la compétence Gemapi. Les particuliers vont donc payer plusieurs fois pour une responsabilité qui devrait être assurée par l'État.

Dans les bassins miniers, nous sommes non seulement confrontés à des inondations « par le dessus », c'est-à-dire des ruissellements, mais également « par le dessous ». Les territoires miniers s'enfoncent dans le temps, souvent de plusieurs mètres, au niveau de l'eau, voire en dessous. Il devient parfois nécessaire d'investir dans de l'assainissement étanche, pour ne pas drainer de l'eau parasitaire. La loi ne traite pas ces risques particuliers d'inondation.

M. Charles Revet . - Je viens d'un département qui est doté de deux centrales. Nous devons progresser vers les énergies renouvelables mais le nucléaire reste un élément majeur pour notre pays. EDF s'est engagé dans la construction de centrales au Royaume-Uni. Il me semble que le directeur financier de l'e ntreprise a démissionné en raison des risques financiers pesant sur ce projet. Or de tels risques pourraient avoir des répercussions importantes sur notre filière nucléaire.

Concernant les produits phytosanitaires, l'agriculture est souvent mise en cause mais les agriculteurs achètent des produits qui sont bien autorisés. La question est donc : ces produits ont-ils fait l'objet de suffisamment de tests en amont pour éviter les situations que l'on observe aujourd'hui ?

M. Pierre Médevielle , rapporteur . - Concernant les centrales nucléaires, je crois que nous partageons les mêmes préoccupations en matière de sûreté, y compris pour l'avenir, avec l'objectif reporté de 50 % de nucléaire dans la production d'électricité. Nous avons peut-être sous-estimé les enjeux et le coût du démantèlement. Par ailleurs, il sera sans doute nécessaire de bâtir de nouveaux EPR pour rester à 50 %. Avec les compétences acquises lors des premiers chantiers, en France ou à l'étranger, on peut espérer que le coût et le délai de réalisation des prochains équipements diminuent. On pourrait également évoquer le CEA, qui est confronté dès à présent à un démantèlement de grande ampleur, tout en ayant des contraintes budgétaires fortes. Le financement de la sûreté reste donc tendu.

L'Anses est une agence appelée à jouer un rôle de plus en plus important. Lors de notre déplacement, nous avons évoqué une autre contribution du rapport de nos collègues Nicole Bonnefoy et Sophie Primas, avec la création d'un dispositif de phytopharmacovigilance. Nous pouvons nous en féliciter car au-delà des AMM, qui sont une étape majeure et pour laquelle l'expertise s'est indéniablement renforcée, il sera désormais possible de suivre dans le temps les produits autorisés, en s'appuyant sur un réseau d'acteurs, notamment le monde agricole avec la participation de la MSA, et sur un système d'alerte.

Concernant le FPRNM, nous avons les mêmes préoccupations et on peut regretter le plafonnement avec les conséquences que cette décision a sur la destination de cette taxe. Avec un peu plus de 200 millions d'euros de trésorerie, le décalage entre recettes et dépenses consommera en quelques années ces ressources accumulées. Nous avons déjà observé des choix de la sorte dans le cadre d'autres dispositifs. Il faudra suivre cela de près. Quant à la TGAP, on peut également s'interroger sur la non-affectation, et son reversement au budget général.

À propos de la place de l'expertise dans les choix politiques, je souhaiterais évoquer l'OPECST, dont la présidence a été récemment confiée à notre collègue député Cédric Villani, qui a siégé dans de nombreux organismes européens. L'office devrait jouer un rôle accru d'interface entre le monde scientifique et le monde politique, et nous devons lui donner les moyens de le faire.

Quant au glyphosate, il y a un partage clair des tâches entre l'autorisation de la substance au niveau européen, et l'autorisation des préparations au niveau national. À ce titre, l'Anses a décidé en 2016 le retrait de 132 autorisations de produits comprenant un mélange glyphosate-tallowamine, compte tenu des risques associés à cette composition. Concernant l'utilisation qui est faite du glyphosate, certains problèmes sont avérés comme le montrent les conséquences environnementales dans le golfe du Mexique. Même autorisées, il faut un usage raisonnable de ces substances, dans des conditions qui protègent la santé des agriculteurs. Les initiatives de l'Anses pour faciliter le développement des méthodes de biocontrôle sont également bienvenues.

Je partage les regrets de Monsieur Gontard sur les moyens de l'Ademe. Nous ne nous sommes pas encore donné les moyens d'atteindre les objectifs ambitieux que nous nous sommes fixés en matière de transition énergétique.

Enfin, pour donner des premiers éléments de réponses à la remarque de notre collègue sur les territoires miniers, je relève que le FPRNM intègre dans son périmètre d'action des opérations de reconnaissance et des travaux de comblement des cavités souterraines et des marnières.

M. Hervé Maurey , président . - Merci Monsieur le rapporteur pour la présentation de cet avis ainsi que pour vos réponses. Comme je l'ai indiqué avant votre intervention, nous voterons sur ces crédits après avoir entendu le ministre demain.

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