Avis n° 112 (2017-2018) de MM. Jean-Claude CARLE et Antoine KARAM , fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 23 novembre 2017

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N° 112

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2017-2018

Enregistré à la Présidence du Sénat le 23 novembre 2017

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur le projet de loi de finances pour 2018 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME III

ENSEIGNEMENT SCOLAIRE

Par MM. Jean-Claude CARLE et Antoine KARAM,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Morin-Desailly , présidente ; M. Jean-Claude Carle, Mme Catherine Dumas, MM. Jacques Grosperrin, Antoine Karam, Mme Françoise Laborde, MM. Jean-Pierre Leleux, Jacques-Bernard Magner, Mme Colette Mélot, M. Pierre Ouzoulias, Mme Sylvie Robert, vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Claude Kern, Mme Claudine Lepage, M. Michel Savin, secrétaires ; MM. Maurice Antiste, David Assouline, Mmes Annick Billon, Maryvonne Blondin, Céline Boulay-Espéronnier, M. Max Brisson, Mme Marie-Thérèse Bruguière, M. Joseph Castelli, Mmes Laure Darcos, Nicole Duranton, M. André Gattolin, Mme Samia Ghali, MM. Didier Guillaume, Abdallah Hassani, Jean-Raymond Hugonet, Mmes Mireille Jouve, Claudine Kauffmann, MM. Guy-Dominique Kennel, Laurent Lafon, Michel Laugier, Pierre Laurent, Mme Vivette Lopez, MM. Jean-Jacques Lozach, Claude Malhuret, Christian Manable, Mme Marie-Pierre Monier, MM. Philippe Nachbar, Olivier Paccaud, Stéphane Piednoir, Mme Sonia de la Provôté, MM. Bruno Retailleau, Jean-Yves Roux, Alain Schmitz.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 235 , 264 rect. , 266 rect. , 273 à 278 , 345 et T.A. 33

Sénat : 107 , 108 à 111 , 113 et 114 (2017-2018)

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Avec un montant global de plus de 70 milliards d'euros, dont près de 93 % de dépenses de personnel, qui financent plus d'un million d'emplois, la mission « Enseignement scolaire », placée sous la double responsabilité du ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche et du ministre de l'agriculture et de l'alimentation en charge de l'enseignement technique agricole, est le premier budget de l'État. Elle est aussi et surtout la plus haute responsabilité et le plus grand investissement de la Nation.

Votre commission aborde l'analyse transversale du budget de la mission « Enseignement scolaire » pour 2018 selon deux thématiques complémentaires :

- l'avis de M. Jean-Claude Carle (première partie) sur les cinq programmes relevant du ministère de l'éducation nationale, retrace les grandes évolutions de crédits et d'emplois et les effets des politiques éducatives ;

- l'avis de M. Antoine Karam (deuxième partie ) porte sur l'analyse des crédits alloués à l'enseignement technique agricole.

PREMIÈRE PARTIE - L'ENSEIGNEMENT SCOLAIRE

I. EXAMEN DES CRÉDITS

A. UN BUDGET QUI TRADUIT UNE PRIORITÉ FORTE À L'ACQUISITION DES SAVOIRS ET À LA RÉDUCTION DE L'ÉCHEC SCOLAIRE

1. La fin d'une politique centrée sur l'inflation des moyens
a) Une augmentation générale en grande partie imputable au gouvernement précédent

Les crédits de la mission « Enseignement scolaire » augmentent d'1,5 milliard d'euros (+ 2,2 %) pour atteindre 71,5 milliards d'euros , contributions au compte d'affectation spéciale (CAS) « Pensions » comprises.

Cette augmentation concerne l'ensemble des programmes de la mission avec une intensité variable.

Évolution des crédits des programmes de la mission (structure courante)

Programme

LFI 2017

PLF 2018

Évolution

P140 « Enseignement scolaire public du premier degré »

21 525,7

22 015,5

+ 2,3%

P141 « Enseignement scolaire public du second degré »

32 440,9

32 743,5

+ 0,9%

P230 « Vie de l'élève »

5 074,0

5 413,2

+ 8,3%

P139 « Enseignement privé du premier et du second degrés »

7 434,7

7 553,2

+ 1,6 %

P214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale »

2 195,8

2 352,7

+ 7,1 %

Total éducation nationale

68 594,0

70 078,1

+ 2,2 %

Source : Documents budgétaires

(1) Une augmentation qui s'inscrit dans la trajectoire définie par la loi de programmation

Le PLF 2018 s'inscrit dans la trajectoire définie par le projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022. Ce dernier prévoit que les crédits de la mission « Enseignement scolaire » augmenteront de 2,63 milliards d'euros entre 2017 et 2020 (+ 5,3 %) ; cette hausse est réalisée pour moitié à l'occasion de l'exercice 2018 (+ 1,28 milliard d'euros). Toutefois, la répartition de ces progressions de crédits par programme et par titre n'est pas connue.

Évolution des crédits de paiement (hors CAS « Pensions ») de la mission

(Md €)

LFI 2017

PLF 2018

2019

2020

Évolution 2018/2020

50,01

51,29

52,07

52,64

+ 5,3 %

Source : Projet de loi de programmation des finances publiques 2018-2022

Cette croissance des dépenses doit être comparée à celle réalisée entre 2012 et 2017 : les crédits de paiement de la mission « Enseignement scolaire » y ont progressé de 7,8 milliards d'euros, soit une hausse de 12,6 %.

(2) Une augmentation imputable en grande partie au précédent gouvernement

Contribution au CAS « Pensions » incluse, les dépenses de personnel augmentent de 1,5 milliard d'euros par rapport à 2017 , pour atteindre la somme de 66,4 milliards d'euros, soit 95 % environ des dépenses de la mission.

Outre l'augmentation « naturelle » des dépenses de personnel liées au glissement vieillesse-technicité (+ 413 millions d'euros), cette augmentation provient :

- de l'extension en année pleine du schéma d'emplois 2017 , pour un coût de 293 millions d'euros ;

- des mesures catégorielles : 412 millions d'euros, dont 373 millions au titre de la mise en oeuvre du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR) ;

- de l'extension en année pleine du coût de la revalorisation du point d'indice de la fonction publique , pour un coût de 31 millions d'euros.

b) L'exercice 2018 marque la fin de la « politique du chiffre » en matière de créations de postes
(1) La politique de recrutement menée entre 2012 et 2017 : un coût insoutenable, une qualité du service dégradée

Votre rapporteur pour avis avait émis les plus fortes réserves quant à la politique de recrutement à marche forcée menée par le précédent gouvernement, visant la création de 54 000 postes sur la durée du quinquennat.

Cette politique s'est traduite par un coût écrasant : la Cour des comptes estime à 2,7 milliards d'euros le coût total de ces créations de postes ; au total, la masse salariale des enseignants du secteur public a crû de 3,6 milliards d'euros entre 2012 et 2016, ce qui représente une croissance trois fois plus rapide que celle observée pour l'ensemble de la fonction publique 1 ( * ) .

En revanche, elle s'est heurtée à des difficultés importantes de recrutement du fait de l'insuffisante attractivité du métier d'enseignant.

Schémas d'emplois prévus et réalisés depuis 2012

(en ETP)

Exercice

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Total

Schéma d'emplois prévisionnel

4 326

9 076

8 804

9 421

10 711

11 662

54 000

Réalisation du schéma d'emplois

4 068

5 159

8 720

9 606

9 071

ND

36 624

Source : Cour des comptes, NEB 2016

Année après année, les concours de recrutement ne sont pas parvenus à pourvoir l'ensemble des postes offerts , en particulier dans les académies et les disciplines les moins attractives. À l'issue de la session 2017 du concours externe du CAPES, 1 304 postes sur 7 315 sont restés vacants, en particulier en anglais (343 postes), allemand (220 postes), mathématiques (374 postes), lettres modernes (151 postes ) et classiques (145 postes). Le ratio de candidats présents par poste offert s'élevait à 2,1 en anglais, 1,6 en mathématiques et à 1,5 en lettres modernes ; en allemand comme en lettres classiques, il y avait moins de candidats présents que de postes offerts.

La baisse des exigences de recrutement entraînée par la nécessité de pourvoir ces postes est avérée . Dans le premier degré, l'IGAENR s'inquiétait du fait « que dans certaines académies, des candidats au niveau problématique aient été admis pour ne pas laisser inoccupés trop de postes » 2 ( * ) . Dans les disciplines en tension du second degré, les barres d'admissibilité et d'admission sont trop faibles : en 2017, le seuil d'admissibilité au CAPES externe de lettres modernes s'élevait à 7 sur 20 et la barre d'admission à 7,67 sur 20. Dans les autres cas, les académies ont eu recours au recrutement de contractuels (cf. infra ).

Ainsi, tout en obérant les marges de manoeuvre du ministère en matière d'amélioration des rémunérations - qui devrait accompagner une remise à plat des conditions d'exercice du métier d'enseignant - la politique de recrutements massifs menée par le précédent gouvernement entraîne le risque d'une baisse de la qualité de l'enseignement.

(2) Une stabilité globale du schéma d'emplois en 2018

Votre rapporteur pour avis salue l'abandon de la logique d'inflation permanente des moyens par le ministère au profit de leur gestion raisonnable .

Dans sa version initiale, l'exercice 2018 présente un schéma d'emplois neutre : la création de 2 800 postes d'enseignants dans le premier degré est intégralement compensée par la suppression de 200 postes dans le programme 214 et de 2 600 postes d'enseignants stagiaires dans le second degré. Aucune création de poste n'est prévue dans les programmes 139 « Enseignement privé du premier et du second degrés » et 230 « Vie de l'élève ».

Schéma d'emplois initial des programmes
de la mission « Enseignement scolaire » relevant de l'éducation nationale

(en ETP)

Programme

Catégorie d'emplois

Schéma d'emplois

Enseignement scolaire public du premier degré

Enseignants titulaires

4 961

Enseignants stagiaires

- 2161

Total

2 800

Enseignement scolaire public du second degré

Enseignants titulaires

0

Enseignants stagiaires

- 2600

Total

- 2600

Vie de l'élève

Total

-

Enseignement privé

Total

-

Soutien de la politique de l'éducation nationale

Personnels administratifs, technique et de service

- 200

Solde mission « Enseignement scolaire »

0

Source : PAP 2018

La création de 144 ETP d'enseignants titulaires en section de technicien supérieur (STS), répartis entre le second degré public (120 ETP) et privé (24 ETP), par l'Assemblée nationale en première lecture, aboutit à un solde positif de 144 ETP pour la mission.

Votre rapporteur pour avis regrette toutefois l'absence d'une programmation pluriannuelle des effectifs et des recrutements, qui permettrait de donner de la lisibilité à l'action ministérielle . En effet, il ne faudrait pas que la fin de la politique de recrutement à tout-va soit interprétée comme l'arrêt total des recrutements et nuise à l'attractivité des concours de l'enseignement, déjà fortement dégradée.

2. L'amorce d'un véritable rééquilibrage en faveur de l'enseignement primaire
a) Une priorité clairement affichée en faveur de l'école primaire

Comme le résumait M. Éric Charbonnier, « pour une dépense globale en faveur de l'éducation dans la moyenne des pays de l'OCDE, la France se distingue des autres pays par un sous-investissement notable dans l'enseignement primaire, qu'accompagne un surinvestissement dans le lycée » 3 ( * ) . En effet, l'analyse de la dépense d'éducation par élève selon le niveau d'étude met en évidence un déséquilibre, prononcé et de longue date, au détriment de l'enseignement primaire .

Évolution de la dépense intérieure d'éducation par niveau d'enseignement
(aux prix 2016)

Primaire

Secondaire

Supérieur

Total

Total Md€

par élève (€)

Total Md€

par élève (€)

Total Md€

par élève (€)

Total Md€

par élève (€)

2014

42,6

6 230

58,2

9 700

30,2

11 930

131,1

8 500

2015

42,9

6 250

58,0

9 650

30,0

11 640

130,9

8 440

2016p*

43,3

6 300

58,7

9 720

30,3

11 510

132,4

8 480

Champ : France métropolitaine + Dom y compris Mayotte.
* Données provisoires.

Source : MEN-MESRI-DEPP

Alors même que l'enseignement élémentaire revêt une importance décisive pour l'avenir scolaire et professionnel des élèves, la France dépense ainsi 36 % de moins par élève de l'enseignement primaire que par élève de l'enseignement secondaire , et près de moitié moins que pour un étudiant. L'OCDE rappelle ainsi que la dépense « pour un élève de primaire est 15 % inférieure à celui des pays de l'OCDE alors que celui d'un élève de lycée est 37 % supérieure » 4 ( * ) .

Dans son avis sur le budget 2017, votre rapporteur pour avis avait dressé le bilan en demi-teinte de la « priorité au primaire » prévue dans le cadre de la refondation de l'école 5 ( * ) . À cette occasion, il avait souligné le caractère très relatif de sa traduction budgétaire : si la dépense par élève de l'enseignement primaire a connu une forte augmentation entre 2012 et 2017 (+ 12,1 %), elle reste cependant significativement inférieure à celle consentie pour les élèves du collège et du lycée. En outre, dans un contexte général d'inflation des moyens, les dépenses en faveur des élèves du collège et du lycée augmentent également sur la période observée, respectivement de 7,3 % et de 4,7 %.

Votre rapporteur pour avis constate donc avec satisfaction que le budget pour 2018 procède à une forme de redéploiement en faveur de l'enseignement primaire, en y réservant les créations de poste (cf. supra ). Ces dernières permettront de mettre en oeuvre les priorités du ministère ; elles renforceront également le taux d'encadrement dans l'enseignement primaire, sensiblement inférieur en France à celui observé dans les autres pays de l'OCDE 6 ( * ) .

Le rééquilibrage devrait être facilité par la diminution attendue des effectifs d'élèves de l'école primaire d'ici 2020 : le ministère prédit une baisse de 30 000 élèves en 2018, 53 500 en 2019 et près de 40 000 en 2020 7 ( * ) .

b) L'acquisition des fondamentaux érigée en priorité

Votre rapporteur pour avis est convaincu que la maîtrise des savoirs fondamentaux dès la fin du cours préparatoire est déterminante pour l'avenir scolaire et professionnel des enfants. C'est là que se forme la difficulté scolaire, à laquelle notre système éducatif peine à remédier.

Dès lors, il ne peut qu'applaudir l'objectif que s'est fixé le ministère et qui constitue le mot d'ordre de la rentrée scolaire 2017 : « 100 % d'élèves qui maîtrisent les savoirs fondamentaux (lire, écrire, compter, respecter autrui) » à l'issue de l'école primaire 8 ( * ) .

(1) Le rétablissement des évaluations diagnostiques en CP et en 6e

La rentrée 2017 voit la mise en place d'évaluations diagnostiques en entrée au cours préparatoire (CP) et en classe de sixième ; ces dernières ont pour objet de permettre aux enseignants de mesurer l'état des connaissances et des compétences de chacun de leurs élèves en français et en mathématiques et d'adapter leurs enseignements en conséquence.

Votre rapporteur pour avis salue cette mesure, qui revient sur la suppression en 2012 des évaluations qui étaient menées en fin de CE1 et de CM2 . Ces évaluations constituaient un outil essentiel d'évaluation et de pilotage du système ; le comité de suivi de la refondation de l'école se faisait ainsi l'écho des enseignants et des inspecteurs, qui déploraient « de manière massive la suppression des évaluations obligatoires des élèves en fin de CE1 et en fin de CM2 et l'absence de remontées exhaustives de données au plan national qui permettaient au niveau local de disposer d'un outil de travail pour les enseignants d'un même niveau, par exemple » 9 ( * ) . Toutefois, alors même que l'indicateur 1.1 du programme 140 mesure la maîtrise de composantes du socle par les élèves en fin de CE2 (et donc du cycle 2), ces derniers ne seront pas concernés par les évaluations diagnostiques.

Votre rapporteur pour avis constate avec satisfaction que cette mesure s'inscrit dans la volonté du ministère de développer la culture de l'évaluation dans le système éducatif . En cela, il rejoint la proposition formulée par votre rapporteur et les membres du groupe de travail sur la réforme des rythmes scolaires, de « fonder toute nouvelle réforme sur l'expérimentation, l'évaluation et la contractualisation » 10 ( * ) . Le ministère prévoit ainsi l'évaluation systématique de l'ensemble des mesures nouvelles (dédoublement des classes de CP et de CE1, stages de réussite, etc.).

(2) Le dédoublement des classes de CP et de CE1 en éducation prioritaire

Le dédoublement des classes de CP et de CE1 en réseau d'éducation prioritaire (REP) et REP renforcé (REP+) constitue une des mesures principales du Gouvernement en vue de favoriser la réussite à l'école primaire.

Au cours de ces deux années décisives pour les apprentissages fondamentaux, il s'agit d'offrir aux élèves en éducation prioritaire un taux d'encadrement d'un professeur pour 12 élèves environ . Ce taux s'élevait en 2016 à un professeur pour 22,5 élèves en REP+ et un pour 23 en REP, contre un pour 24 élèves hors éducation prioritaire 11 ( * ) .

Cette mesure représente un effort important, puisqu'elle implique la mobilisation de 11 000 enseignants d'ici 2020.

Dès la rentrée 2017, 2 500 postes sont consacrés au dédoublement d'autant de classes de CP en REP+ ; en 2018, 3 500 le seront pour le dédoublement des classes de CP en REP, pour un coût estimé à 154 millions d'euros (hors CAS) 12 ( * ) . La mise en oeuvre de cette mesure devrait se poursuivre selon le calendrier suivant :

- à la rentrée 2018, le dédoublement des classes de CP en REP et le début du dédoublement des classes de CE1 en REP+ ;

- à la rentrée 2019, l'achèvement du dédoublement des classes de CE1 en REP et REP+.

Le dédoublement des classes de CP en REP+ a conduit au redéploiement d'une partie des postes d'enseignants affectés au dispositif « Plus de maîtres que de classes » : 459 emplois ont ainsi été redéployés ; toutefois, 2 628 continuent d'être affectés à ce dispositif, dont le ministère prévoit l'évaluation parallèlement à celle du dédoublement des classes de CP.

Votre rapporteur pour avis salue cette mesure volontariste, qui vise à réduire à la racine la difficulté scolaire . Cette mesure pouvant exiger des investissements importants de la part de certaines communes, il note avec satisfaction que le Gouvernement propose à l'article 59 du PLF l'instauration d'une dotation de soutien à l'investissement local, dont une enveloppe dotée de 615 millions d'euros permettra de financer « la création, la transformation et la rénovation des bâtiments scolaires » en vue du déploiement de cette mesure.

Enfin, en vue de renforcer la stabilité des équipes pédagogiques en éducation prioritaire, le Gouvernement prévoit la revalorisation du régime indemnitaire des enseignants affectés en REP+ ; cette majoration augmentera progressivement pour atteindre 3 000 euros nets annuels . Cette mesure, qui concerne également le second degré, se traduit par un coût de 19,6 millions d'euros.

(3) La scolarisation des moins de trois ans en éducation prioritaire

Le Gouvernement poursuit les efforts pour développer la scolarisation des moins de trois ans . Le rapport annexé de la loi du 8 juillet 2013 fixait pour objectif la scolarisation de 30 % des enfants de moins de trois ans en éducation prioritaire à l'horizon 2017, fléchant à cet effet 3 000 ETP d'enseignants. Cet objectif avait été porté à 50 % pour les REP+ lors du comité interministériel « égalité et citoyenneté » du 6 mars 2015.

À la rentrée 2016, étaient recensés 1 274 ETP dédiés à la scolarisation des enfants de moins de trois ans ; le nombre d'emplois à la rentrée 2017 n'est pas connu.

La scolarisation des enfants de moins de trois ans progresse lentement ; elle a même ralenti en 2015-2016 . À la rentrée 2016, 96 600 enfants de deux ans étaient scolarisés, soit 11,9 % des enfants de cet âge. On estime à 15 700 le nombre d'enfants de 2 ans qui ont rejoint l'école entre octobre et janvier, ce qui porte le taux de scolarisation à 13,8 %. Il demeure significativement inférieur à celui constaté dans les années 2000.

L'objectif de scolariser 30 % des enfants de deux ans en REP et 50 % en REP+ n'est pas atteint : le taux de scolarisation s'élevait à la rentrée 2016 à 19,6 % en REP et à 22,8 % en REP+.

Évolution du taux de scolarisation en éducation prioritaire depuis 2010

Source: MEN-MESRI-DEPP

La situation est très contrastée selon les académies : à la rentrée 2016, l'objectif de scolariser 30 % des enfants de deux ans en REP était atteint par douze académies (elles étaient neuf dans ce cas en 2015). A contrario , quatre académies ne dépassent pas les 10 %, dont Créteil (7,6 %) et Paris (5,6 %). De même, l'objectif d'un taux de scolarisation à 50 % en REP+ n'était atteint que par les académies de Rennes et Dijon (avec respectivement des taux de scolarisation de 83,4 % et 58,5 %).

Comme le soulignait votre rapporteur pour avis l'année dernière, « l'accroissement de la scolarisation des enfants de moins de trois ans se heurte néanmoins à deux difficultés , majeures mais non insurmontables » :

- il ne répond pas forcément à une demande des populations cibles, c'est-à-dire celles qui sont les plus éloignées de l'école . L'inspection générale constate ainsi que « la demande sociale n'apparaît pas vraiment, surtout là où les besoins semblent avérés » 13 ( * ) ;

-  la situation financière des communes constitue un frein à la mise en oeuvre de cette politique ; l'IGAENR relevait ainsi que « les communes sont réticentes à implanter ce type de structure compte tenu du coût, toujours en ATSEM, souvent en mobilier, voire en garderie pré et post scolaire et au niveau de la restauration » 14 ( * ) .

(4) Les stages de réussite

La relance des « stages de réussite » en faveur des élèves de CM2 constitue un autre axe de la politique visant à réduire la difficulté scolaire.

Gratuits, ces stages de remise à niveau s'adressent aux élèves volontaires qui rencontrent des difficultés scolaires, en vue notamment de préparer l'entrée au collège. En 2017, 80 000 élèves de CM2 ont ainsi bénéficié de ce dispositif.

D'une durée de 15 heures, à raison de trois heures par jours pendant cinq jours, ils sont encadrés par des enseignants volontaires et ont lieu pendant les vacances scolaires de printemps et d'été.

35 millions d'euros sont inscrits en faveur de ces stages, contre 15 millions d'euros en 2017.

c) Un effort de réduction de la difficulté scolaire qui se poursuit dans le second degré
(1) L'accompagnement des élèves après la classe : le dispositif « devoirs faits »

Partant du constat que les devoirs pèsent souvent sur les familles et sont source d'inégalités entre les élèves, le Gouvernement a souhaité mettre en oeuvre un accompagnement après la classe auprès des élèves de collège, leur permettant de faire leurs devoirs dans l'établissement.

Gratuit, cet accompagnement est proposé à raison d'une heure par jour, sauf le mercredi, soit quatre heures par semaine. Mis en place à la rentrée des vacances de la Toussaint 2017 dans l'ensemble des établissements, ce dispositif mobilise :

- des enseignants volontaires et rémunérés en heures supplémentaires effectives (HSE) ;

- des assistants d'éducation (AED) ;

- des associations ;

- des volontaires du service civique (à ce titre, le recrutement de 10 000 volontaires supplémentaires en service civique sera mobilisé).

Le coût total pour 2018 de ce dispositif est estimé à 220 millions d'euros , hors contribution au CAS « Pensions », dont 140 millions d'euros provenant de la mission « Enseignement scolaire » et 80 millions d'euros sur la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».

Votre rapporteur pour avis porte un regard bienveillant sur cette initiative ; il estime toutefois que la participation effective des enseignants est une des conditions de son succès. Une réflexion sur les conditions d'exercice du métier d'enseignant (cf. infra ) devra intégrer l'accompagnement des élèves en dehors de la classe.

(2) Les assouplissements apportés à la réforme du collège

Tout en conservant le cadre général de l'organisation des enseignements au collège, l'arrêté du 16 juin 2017 permet aux établissements d'assouplir la mise en oeuvre des enseignements complémentaires (accompagnement personnalisé et enseignements pratiques interdisciplinaires) et d'élargir l'offre des enseignements facultatifs possibles , en renforçant la présence des langues et cultures de l'Antiquité et des langues vivantes dans l'enseignement.

Cette souplesse se traduit par la faculté, pour les établissements :

- de rétablir des classes bilangues, en levant l'exigence d'une continuité avec l'enseignement d'une langue vivante à l'école primaire, tout en maintenant l'enseignement pour tous les élèves d'une LV2 dès la classe de cinquième ;

- de proposer l'équivalent des anciennes sections européennes, en permettant aux élèves volontaires du cycle 4 de bénéficier d'un enseignement de langue et culture européennes ;

- de proposer un véritable enseignement de latin ou de grec, d'une heure hebdomadaire en cinquième et jusqu'à trois heures hebdomadaires les années suivantes.

Votre rapporteur pour avis salue le choix du Gouvernement de donner davantage d'autonomie aux établissements dans l'organisation des enseignements . Cette mesure devrait permettre de restaurer l'attractivité des collèges publics, démontrant que l'excellence et la réussite de chacun ne s'excluent pas.

(3) L'orientation : une place à consolider

À juste titre, le Gouvernement a placé l'orientation des élèves parmi ses priorités. Le nouvel objectif de la mission : « Favoriser la poursuite d'études des jeunes à l'issue de la scolarité secondaire » rend compte de l'obligation dévolue au lycée d'apporter un soin particulier à l'orientation des élèves.

Votre rapporteur pour avis considère toutefois que cet objectif gagnerait à comporter deux indicateurs supplémentaires mesurant, d'une part, l'insertion dans l'emploi des diplômés de l'enseignement professionnel et, de l'autre, la réussite en licence et dans les autres filières de l'enseignement supérieur court (IUT, STS).

Pour l'heure, l'action du Gouvernement consiste surtout à mettre en oeuvre les dispositifs lancés par son prédécesseur, à l'instar du « parcours Avenir », de classe de sixième à la classe de terminale, de la spécialisation progressive en lycée professionnel et du développement des passerelles entre les différentes voies, filières et spécialités.

Votre rapporteur pour avis s'inquiète de la disparition , dans le cadre de l'aménagement des enseignements du collège, de toute traduction dans les emplois du temps du « parcours Avenir » . Suite à la suppression de l'option « découverte professionnelle 3 heures » (DP3), la mise en oeuvre de ce dernier se faisait principalement par l'EPI « Monde économique et professionnel » ; le fait que ce dernier ne soit plus obligatoire risque d'entraîner la marginalisation du travail d'orientation, faute d'ancrage horaire.

Votre rapporteur pour avis fait ainsi sienne la recommandation formulée par notre collègue Guy-Dominique Kennel dans son rapport consacré à l'orientation scolaire, à savoir de « prévoir un horaire dédié pour la mise en oeuvre du parcours Avenir », lequel « serait entièrement fongible à l'échelle de l'année scolaire ou du cycle, et permettrait la mise en oeuvre d'activités de découverte professionnelle, de mini-entreprises ou de coopératives, ainsi que des visites d'entreprises et de lycées ou d'établissements de l'enseignement supérieur » 15 ( * ) .

d) La formation continue des enseignants : une ambition à prolonger

Votre rapporteur pour avis considère que plus que l'augmentation des moyens, l'amélioration de la qualité de l'enseignement dispensé est la condition sine qua non de l'amélioration des résultats de l'école.

La formation continue des enseignants constitue le levier principal de cette amélioration , d'autant que l'étude TALIS menée par l'OCDE met en évidence que les enseignants français sont ceux qui se sentent le moins bien préparés du point de vue pédagogique et des pratiques de classe.

Vecteur de transmission des réformes plutôt que d'amélioration des pratiques, inadaptation aux besoins des enseignants, faible présence et assiduité des stagiaires, absence d'incidence sur le déroulement de carrière : les reproches formulés à l'encontre de la politique de formation continue sont nombreux et ont été rappelés récemment par la Cour des comptes 16 ( * ) .

Votre rapporteur pour avis fait sienne la conclusion de la Cour, selon laquelle « un effort important reste à mener sur le volume de la formation continue, ses modalités et son contenu, condition indispensable pour lui donner le moment venu un caractère obligatoire » 17 ( * ) . Il conviendrait de procéder, comme l'expérimente le rectorat de Versailles depuis la rentrée 2017, à une inversion de la logique de la formation continue : sortir d'une logique prescriptive pour répondre aux demandes formulées par les équipes pédagogiques 18 ( * ) .

C'est à juste titre que le Gouvernement a fait de la formation continue une priorité , en se fixant pour objectif au moins trois jours de formation continue pour l'ensemble des enseignants du premier comme du second degrés , « afin de mieux les préparer et les accompagner dans leur métier et durant toute leur carrière et également pour renforcer les liens avec la recherche, facteur d'innovation » 19 ( * ) .

Cette mesure se traduit par une dépense supplémentaire de 10 millions d'euros supplémentaires en dépenses de titre 2. Les priorités fixées par le ministère dans le cadre de la formation continue sont, dans le premier degré, l'accompagnement du dédoublement des classes de CP en REP+ ainsi qu'un plan de formation en mathématiques à destination des professeurs des écoles.

B. LES DEMANDES D'OUVERTURES DE CRÉDITS POUR 2018

1. L'enseignement scolaire public du premier degré

Les crédits du programme 140 « Enseignement scolaire public du premier degré » s'élèvent pour 2018 à 22,01 milliards d'euros, soit une augmentation de 489 millions d'euros (+2,3 %) .

Évolution des crédits du programme 140

(en millions d'euros)

LFI 2017

PLF 2018

Évolution

1° Enseignement préélémentaire

5 210,8

5 289,8

+ 1,5%

2° Enseignement élémentaire

10 504,6

10 770,3

+ 2,5%

3° Besoins éducatifs particuliers

1 849,1

1 865,8

+ 0,9%

4° Formation des personnels enseignants

784,3

852,6

+ 8,7%

5° Remplacement

1 799,7

1 849,2

+ 2,7%

6° Pilotage et encadrement pédagogique

1 281,8

1 291,2

+ 0,7%

7° Personnels en situations diverses

95,4

96,6

+ 1,3%

Total

21 525,7

22 015,5

+ 2,3%

Source : PAP 2018

2. L'enseignement scolaire public du second degré

Il est prévu pour le programme 141 « Enseignement scolaire public du second degré » une quasi-stabilité des crédits (+ 0,9 %), soit une augmentation de 302,6 millions d'euros.

Cette augmentation est intégralement imputable à la hausse des dépenses de personnel (+ 374,1 millions d'euros). Elle est partiellement compensée par la baisse des crédits consacrés à l'acquisition des manuels scolaires : 16 millions d'euros sont prévus à ce titre au PLF 2018 pour les élèves du public et du privé (- 94 millions d'euros) .

Votre rapporteur pour avis rappelle que , dans le cadre du renouvellement qu'entraîne la réforme des programmes, le Gouvernement s'était engagé à financer le renouvellement des manuels scolaires à hauteur de 300 millions d'euros . À cette fin, 235 millions d'euros ont été budgétés en 2016 et 2017. Il manque donc une partie de la somme qui, si elle n'est prise en charge par l'État, le sera par les collèges sur leur budget de fonctionnement et donc, indirectement, par les conseils départementaux .

C'est pourquoi votre rapporteur pour avis propose un amendement (CULT.1) visant à allouer 50 millions d'euros supplémentaires à l'acquisition des manuels scolaires, afin que l'État respecte ses engagements.

3. La vie de l'élève

Évolution des crédits de paiement du programme 230

(en millions d'euros)

LFI 2017

PLF 2018

Évolution

1° Vie scolaire et éducation à la responsabilité

2 379,5

2 481,9

+ 4,3%

2° Santé scolaire

493,0

507,4

+ 2,9%

3° Inclusion scolaire des élèves en situation de handicap

799,1

1 162,8

+ 45,5%

4° Action sociale

815,5

881,5

+ 8,1%

5° Politique de l'internat et établissement à la charge de l'État

53,7

55,5

+ 3,4%

6° Actions éducatives complémentaires aux enseignements

456,1

324,0

- 28,9%

Total

4 996,9

5 413,2

+ 8,3 %

Source : PAP 2018

Les crédits du programme 230 « Vie de l'élève » connaissent une augmentation de 416 millions d'euros (+ 8,3 %).

a) L'inclusion des élèves handicapés

Les crédits de l'action n° 3 « Inclusion scolaire des élèves en situation de handicap » connaissent une très forte hausse (+ 45,5 %) , pour atteindre 1,16 milliard d'euros.

Dans un contexte de forte croissance des effectifs d'élèves en situation de handicap scolarisés en milieu ordinaire (+ 75 190 élèves en cinq ans, soit une hausse de 33,3 %, aussi bien dans le premier que dans le second degré ), le respect des orientations fixées par la loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances exige des investissements importants .

Les crédits supplémentaires permettront en particulier de financer la poursuite de la politique de professionnalisation de l'accompagnement des élèves handicapés, par la transformation de 11 200 contrats aidés en 6 400 contrats d'accompagnant des élèves en situation de handicap (AESH).

b) La santé scolaire

Les crédits consacrés à la santé scolaire croissent de 2,9 %, pour atteindre 507,4 millions d'euros . Cette augmentation finance l'extension en année pleine de la création de 100 emplois d'infirmiers et de 5 emplois de médecins scolaires à la rentrée 2017.

Ces créations n'ont toutefois pas permis d'endiguer la baisse des effectifs de médecins scolaires, du fait de la faible attractivité du métier .

Effectifs des médecins de l'éducation nationale
et des conseillers techniques depuis 2009

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Évolution 2009/2017

TOTAL

1 266

1 238

1 313

1 245

1 210

1 223

1 167

1 142

1 090

- 14 %

Créteil

87

82

78

68

65

60

57

52

50

- 43 %

Lille

114

108

108

101

98

97

90

85

80

- 30 %

Lyon

59

57

60

52

52

55

50

51

44

- 25%

Nantes

66

61

66

59

59

59

61

58

53

- 20 %

Reims

25

24

28

25

21

18

17

17

18

- 28 %

Rouen

33

31

30

26

26

24

21

23

21

- 36 %

Versailles

134

123

124

118

118

125

121

124

110

- 18 %

Source : MEN-DGRH ; personnes physiques

Votre rapporteur pour avis rappelle sa préoccupation quant au sort de la santé scolaire, qui a pour objet de favoriser la réussite scolaire des élèves et de réduire les inégalités en matière de santé.

Le taux de réalisation des visites médicales de la sixième année est très insuffisant . L'indicateur 2.1 du programme 230 met en évidence que 55,5 % des élèves scolarisés en REP+ et 49,2 % de ceux en REP n'ont pas bénéficié de la visite médicale dans leur sixième année . L'indicateur 2.1 ne concerne que les élèves scolarisés en éducation prioritaire, ce qui mène à penser que le taux de couverture serait significativement inférieur : une enquête menée en 2012-2013 par le ministère avait conclu à un taux de couverture global de 41 %, voire de 23 % selon une enquête du SNMSU-UNSA.

L'Académie nationale de médecine a récemment présenté plusieurs pistes afin de donner davantage d'attractivité à la profession de médecin scolaire et d'assurer à tous les élèves une visite médicale dans leur sixième année. L'Académie préconise en particulier d'« organiser un système de santé scolaire, de la maternelle au lycée, rattaché au ministère de la santé qui assure, d'une part, la création d'une véritable équipe de santé entre les médecins, les infirmiers(ères), les assistantes sociales et les enseignants ayant reçu une formation spécifique, et, d'autre part, un maillage extra-scolaire robuste entre les professionnels de santé concernés par l'enfant (PMI, généralistes, pédiatres, pédopsychiatres, psychologues, orthophonistes, services sociaux...) » 20 ( * ) .

Votre rapporteur pour avis considère que si l'État ne parvient pas à assurer cette mission, la piste d'un transfert aux conseils départementaux ne doit pas être exclue.

c) Les aides sociales

Compte tenu des effectifs de boursiers attendus à la rentrée 2018, de la prise en compte de la rénovation du dispositif d'attribution des bourses de lycée depuis la rentrée 2016, et de la revalorisation du montant des échelons des bourses de collège à compter de la rentrée 2017, 775,1 millions d'euros sont inscrits au titre de l'action sociale en faveur des élèves au PLF 2018, dont :

- 701,2 millions d'euros sur le programme 230 dont 641,7 millions pour les bourses et 59,5 millions pour les fonds sociaux ;

- 73,9 millions d'euros sur le programme 139 dont 68,4 millions pour les bourses et 5,5 millions pour les fonds sociaux

Ces crédits permettront de :

- financer la revalorisation des bourses de collège , qui s'est traduit par l'augmentation de 25 % du montant des échelons à la rentrée 2017 ;

- compenser l'inflation par une augmentation de 1 % des échelons des bourses de collège et de lycée au 1 er janvier 2018 ;

- poursuivre le financement de l'aide à la recherche du premier emploi , à hauteur de 8,4 millions d'euros.

d) Le financement de la réforme des rythmes scolaires

Le montant des crédits inscrits au titre du fonds de soutien au développement des activités périscolaires s'élève à 237,1 millions d'euros, soit une diminution de 135,8 millions d'euros (- 37 %) par rapport au montant prévu par la loi de finances initiale pour 2017.

Cette diminution est la conséquence de la faculté, pour les communes qui en font la demande, de revenir à la semaine de quatre jours 21 ( * ) . Selon les chiffres communiqués par le ministère de l'éducation nationale, à la rentrée 2017, 41 % des communes correspondant à 36 % des élèves avaient fait le choix d'un retour à la semaine de quatre jours.

En conséquence, l'article 36 du projet de loi de finances rectificative pour 2017 modifie l'article 67 de la loi du 8 juillet 2013 afin de réserver réserve le bénéfice des aides du fonds de soutien aux communes, EPCI et organismes de gestion des écoles privées sous contrat dont les écoles conservent l'organisation issue de la réforme 22 ( * ) .

Votre rapporteur pour avis se félicite que soient maintenues , comme le recommandait le groupe de travail du Sénat sur la réforme des rythmes scolaires 23 ( * ) , les aides du fonds de soutien au développement des activités périscolaires au profit des communes ayant fait le choix de conserver une semaine scolaire comportant cinq matinées d'enseignement.

4. L'enseignement privé du premier et du second degrés

Le programme 139 « Enseignement privé du premier et du second degrés » voit ses crédits augmenter de 118,6 millions d'euros (+ 1,6 %) par rapport à l'année précédente. Son budget s'élève à 7,55 milliards d'euros , constitué à près de 90 % de dépenses de personnel prises en charge par l'État.

La ligne budgétaire dédiée du forfait d'externat augmente de 6,9 millions d'euros ; cette hausse est liée à l'accroissement prévisionnel des effectifs à la rentrée scolaire 2017, estimée à 1,3 %, à l'évolution de leur répartition entre les différentes formations, la revalorisation des taux au regard des variations de rémunération et des taux d'encadrement des personnels non enseignants et à l'augmentation de la valeur du point d'indice de la fonction publique.

5. Le soutien de la politique de l'éducation nationale

Évolution des crédits de paiement du programme 214

(en millions d'euros)

LFI 2017

PLF 2018

Évolution

1° Pilotage et mise en oeuvre des politiques éducatives

397,1

425,9

+ 7,3 %

2° Évaluation et contrôle

79,9

82,3

+ 3,0 %

3° Communication

13,7

14,1

+ 2,6 %

4° Expertise juridique

16,6

17,1

+ 2,9 %

5° Action internationale

13,8

13,9

+ 1,2 %

6° Politique des ressources humaines

704,9

729,4

+ 3,5 %

7° Établissements d'appui de la politique éducative

154,2

156,7

+ 1,6 %

8° Logistique, système d'information, immobilier

613,7

707,1

+ 15,2 %

9° Certification

198,6

202,8

+ 2,2 %

10° Transports scolaires

3,3

3,3

-

Total

2 195,8

2 352,7

+ 7,1 %

Source : PAP 2018

Enfin, le programme 214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale », qui rassemble les crédits de l'administration centrale et déconcentrée, les services supports et de différents opérateurs, voit ses crédits de paiement augmenter fortement (+ 7,1 %), pour atteindre 2,35 milliards d'euros. Les autorisations d'engagements s'élèvent à 2,42 milliards d'euros (+ 11,2 %).

L'augmentation des dépenses d'investissement du programme, en apparence importante, tient essentiellement au transfert des crédits consacrés aux constructions scolaires du second degré à Mayotte et en Nouvelle-Calédonie depuis le programme 123 « Conditions de vie outre-mer » de la mission « Outre-mer » 24 ( * ) , pour un montant de 90,6 millions d'euros en AE et à 61,1 millions d'euros en CP.

II. LE REMPLACEMENT DES ENSEIGNANTS ABSENTS : UN ENJEU DE CONFIANCE, UN DÉFI POUR L'INSTITUTION

Remplacer les enseignants absents ne répond pas seulement à l'exigence de continuité du service public, il s'agit d'un enjeu de confiance et d'un impératif de justice envers les élèves et leurs familles.

Ce sujet revêt une sensibilité particulière, tant les enjeux sont importants pour les élèves et leurs familles ; la carence de l'État en la matière alimente la défiance et le sentiment d'injustice des usagers , d'autant que c'est dans les territoires les plus fragiles que les difficultés sont les plus prononcées, en particulier en zone rurale isolée ou en éducation prioritaire. Enfin, elle constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'État 25 ( * ) . Ainsi, un remplacement efficace constitue une condition sine qua non pour l'avènement de l'« école de la confiance » voulue par le ministre.

Une grande partie des difficultés liées au remplacement provient du fait qu'il s'inscrit dans un système « corseté et intenable » 26 ( * ) . Face aux difficultés engendrées par les rigidités de gestion qui le caractérisent, le système éducatif ne parvient pas à s'en défaire mais tend au contraire à les reproduire. Comme le souligne la Cour des comptes, la question du remplacement « illustre la propension du système scolaire à ne pas s'affranchir de ses propres contraintes, quand bien même il s'agit de répondre à des besoins de souplesse et de réactivité accrue s » 27 ( * ) . Le remplacement constitue ainsi un défi pour l'éducation nationale ; tout l'enjeu est de parvenir à adapter son mode de fonctionnement à la réalité des besoins des établissements et, in fine , des élèves.

A. MALGRÉ LES MOYENS IMPORTANTS QUI Y SONT CONSACRÉS, LE REMPLACEMENT DEMEURE PROBLÉMATIQUE

1. Révélateur des rigidités du système éducatif, le remplacement repose sur des règles de gestion inadaptées et coûteuses
a) Un principe ambitieux et peu adapté à la réalité du remplacement

La Cour des comptes souligne que « le dispositif français repose sur un principe ambitieux : il vise au maintien de la continuité et de la qualité du service public d'enseignement en remplaçant un enseignant absent par un autre enseignant de la même discipline et bénéficiant du même statut » 28 ( * ) . Cela implique en particulier des obligations réglementaires de service (ORS) strictement identiques et établies sur le fondement d'un service hebdomadaire.

Le ministère de l'éducation nationale distingue le remplacement , qui permet d'assurer en cours d'année le service d'un enseignant n'occupant plus son poste (par exemple, du fait d'un départ à la retraite ou en disponibilité), de la suppléance ; dans ce dernier cas, il s'agit d'assurer le service d'un enseignant dont l'absence est temporaire. Par souci d'intelligibilité, le terme remplacement sera ici employé indifféremment .

L'efficience du remplacement est ainsi réduite par la réplication des rigidités de gestion des ressources humaines . Par exemple, si un titulaire remplaçant du premier degré effectue une heure supplémentaire d'enseignement au-delà des 24 heures hebdomadaires dues, celle-ci ouvre droit à récupération ; il n'y a aucune compensation possible avec les semaines où son service est inférieur, aboutissant ainsi, in fine, à une perte de potentiel de remplacement 29 ( * ) .

En conséquence, « cette conception et cette organisation , uniques au sein des pays développés, inscrivent la gestion du remplacement dans le cadre d'emploi contraignant des enseignants (statut, affectation au barème, service d'enseignement hebdomadaire, obligations réglementaires de service (ORS), etc.) alors que le remplacement nécessite par construction de la réactivité, de la souplesse et une gestion de proximité » 30 ( * ) .

(1) Le premier degré

Le temps de service des enseignants et le temps d'enseignement dû aux élèves y étant identiques, le recours à des enseignants titulaires pour assurer le remplacement dans le premier degré est une pratique incontournable et de longue date 31 ( * ) .

Le remplacement est assuré, dès la première demi-journée d'absence, par des remplaçants mis en réserve à cet effet . L'affectation et la gestion de ces enseignants (en moyenne, 8,7 % des enseignants d'un département) s'opère à l'échelle du département et relève du directeur académique des services de l'éducation nationale (DASEN). Ces titulaires remplaçants sont affectés dans des circonscriptions infra-départementales, les zones d'intervention localisée (ZIL), ou dans des brigades départementales dédiées au remplacement de certaines absences, en particulier les congés de maternités ou de formation continue.

(2) Le second degré

Dans le second degré, le remplacement est organisé selon des modalités différentes en fonction de la durée de l'absence .

Pour le remplacement des absences de longue durée, en pratique supérieures ou égales à quinze jours, des titulaires remplaçants, les titulaires sur zone de remplacement (TZR) , sont mobilisés ; ces personnels sont rattachés à des établissements mais susceptibles d'intervenir sur une zone définie et leur gestion relève des services académiques ; leur service est défini par le décret du 19 septembre 1999 32 ( * ) . Il s'agit d'une affectation de début de carrière : en 2011-2012, le remplacement constituait la première affectation de près de 62 % des TZR 33 ( * ) ; parmi les néotitulaires de la cohorte 2015-2016, 25 % ont été affectés en tant que TZR 34 ( * ) .

Le recours à des contractuels, les maîtres auxiliaires, y était la règle jusque dans les années 1980 35 ( * ) ; depuis, le remplacement est désormais assuré en principe par des TZR. Toutefois, « le caractère imprévisible du remplacement renforcé par le nombre de disciplines et l'étendue des territoires [n'ayant] jamais permis de faire appel aux seuls titulaires pour le remplacement » 36 ( * ) , le recours aux contractuels demeure une réalité dans le second degré : ils sont aujourd'hui majoritaires parmi les effectifs dédiés au remplacement .

Les absences de moindre durée sont, en principe, remplacées au sein de l'établissement par d'autres enseignants, sous l'autorité du chef d'établissement . L'article L. 912-1 du code de l'éducation prévoit que les enseignants « contribuent à la continuité de l'enseignement sous l'autorité du chef d'établissement en assurant des enseignements complémentaires ». Le décret « Robien » du 26 août 2005 pris en application de cette disposition prévoit que soit élaboré dans chaque établissement un protocole pour les remplacements de courte durée « qui en fixe les objectifs et les priorités ainsi que les principes et les modalités pratiques d'organisation propres à l'établissement ».

Le chef d'établissement doit rechercher « en priorité l'accord des enseignants qualifiés » pour effectuer une suppléance ; en l'absence d'accord, il « désigne les personnels chargés d'assurer des enseignements complémentaires pour pallier une absence de courte durée » 37 ( * ) . Une circulaire de 2010 permet également le recours à des TZR 38 ( * ) .

b) Une politique qui mobilise des moyens considérables

Le principe du recours à des enseignants titulaires de même statut pour assurer le remplacement emporte que « le dispositif du remplacement est structurellement coûteux puisque, dans le secteur public, il rémunère, sans certitude de les employer en permanence, des milliers d'enseignants titulaires » 39 ( * ) .

(1) Un coût considérable...

• Selon les documents budgétaires, le coût global du remplacement s'élève à 3,5 milliards d'euros, soit environ 5 % des crédits de la mission 40 ( * ) , répartis comme suit entre les différents programmes :

- 1,849 milliard d'euros dans le premier degré public (8,4 % des crédits du programme) ;

- 1,482 milliard d'euros dans l'enseignement public du second degré (4,5 % des crédits du programme) ;

- 179 millions d'euros dans l'enseignement privé du premier et du second degrés (2,4 % des crédits).

Toutefois, comme l'illustre le tableau ci-dessous, le coût du remplacement est calculé de manière différente selon les différents programmes, compte tenu des spécificités de gestion de ces derniers.

Comparaison des périmètres de coût entre programmes de la mission

P140 - Action n° 5

P141 - Action n° 11

P139 - Action n° 11

- Consommation en emploi et en crédits T2 de tous les agents titulaires et contractuels affectés sur un support budgétaire de remplaçant à l'exclusion de toutes les affectations à l'année ou sur poste vacant en cours d'année.

- Consommation en emploi et en crédits T2 de tous les agents titulaires et contractuels en CDI affectés en zone de remplacement à titre principal, à l'exclusion de toutes les affectations à l'année.

- Consommation en emploi et en crédits T2 de tous les contractuels CDD affectés en établissement pour des missions de suppléance ou de remplacement en cours d'année.

- Comprend uniquement les HSE de suppléance effectuées par les agents déjà imputés sur l'action « remplacement ».

Source : MEN - Réponse

- Consommation en emploi et en crédits T2 des contractuels maîtres-délégués affectés en cours d'année sur des missions de suppléance.

- Comprend uniquement les HSE de suppléance effectuées par les agents déjà imputés sur l'action « remplacement ».

au questionnaire budgétaire

• Près de 50 000 emplois , mesurés en équivalent plein temps travaillé (ETPT), sont consacrés au remplacement.

Dans le premier degré public , le projet annuel de performance (PAP) pour 2018 prévoit que 26 513 ETPT seront consacrés au remplacement , ce qui représente plus de 8 % des emplois d'enseignants.

Toutefois, les exercices précédents mettent en évidence un dépassement systématique des plafonds d'emplois sans que ces écarts soient justifiés : le RAP 2016 indique que 26 689 ETPT ont été consacrés au remplacement, soit un écart de 2 038 ETPT par rapport aux prévisions du PLF 2016. De même, l'exercice 2015 a vu un dépassement de 946 ETPT par rapport aux prévisions budgétaires.

Dans le second degré public, le PAP 2018 prévoit 18 935 ETPT dédiés au remplacement . Toutefois, les chiffres communiqués par le ministère sont peu lisibles et ne permettent pas d'apprécier l'ampleur des moyens consacrés au remplacement .

En effet, le ministère indique par ailleurs qu'en janvier 2017, 25 279 enseignants sont dédiés au remplacement, parmi lesquels 15 474 contractuels (soit 61 % de non-titulaires) 41 ( * ) . Votre rapporteur pour avis s'étonne de la présence parmi ces remplaçants de plus d'un millier d'agrégés (1 018, soit 10 % des titulaires remplaçants) : compte tenu de leur rémunération supérieure et de leur quotité de service réduite, cet emploi ne paraît pas de bonne administration . Dans sa réponse au questionnaire budgétaire, le ministère fait état d'un potentiel de remplacement net s'élevant à 19 419 ETP dont 12 947 ETP de contractuels (soit 66 %) 42 ( * ) , sans qu'il soit possible de s'assurer de la correspondance entre personnes physiques et ETP ainsi qu'entre ETP et ETPT ; le potentiel brut des titulaires remplaçants s'élève pour les titulaires à 9 142 ETP , ce qui signifie une perte de potentiel de remplacement de l'ordre de 30 % 43 ( * ) .

Enfin, les moyens alloués pour le remplacement dans l'enseignement privé sous contrat correspondent à 4 301 ETPT 44 ( * ) .

(2) ...qui repose sur des chiffres peu fiables

Comme le relève la Cour des comptes, « les données budgétaires [...] ne sont ni cohérentes ni intelligibles ; elles reposent en effet sur des conventions de calcul différentes pour mesurer le remplacement (poste vacant) et la suppléance (absence provisoire). De ce fait, l'agrégation des emplois [...] et des coûts [...] au niveau de la MIES est erronée » 45 ( * ) .

Particulièrement dans le second degré, « les écarts importants entre comptabilisation des emplois effectifs et emplois budgétaires attestent de ce défaut de lisibilité » 46 ( * ) .

Recommandation n° 1 : Mieux informer la représentation nationale sur le coût du remplacement :

- intégrer dans l'indicateur 2.4 du programme 214 le nombre d'heures non assurées et non remplacées, y compris pour les absences inférieures à quinze jours dans le second degré ;

- rendre compte fidèlement dans les documents budgétaires des moyens dédiés au remplacement, mesurés en euros et en emplois.

c) Un besoin de remplacement mal estimé et qui augmente, dont l'institution est pour partie responsable
(1) Un recensement satisfaisant dans le premier degré, moins dans le second degré

Si le recensement des absences dans le premier degré est relativement fidèle depuis la mise en oeuvre de l'application ARIA, il demeure insuffisant dans le second degré , en particulier pour les absences de courte durée.

Comme le relève la Cour des comptes, « les données remontant des établissements ne sont pas exhaustives » et l'unité de compte - la journée - est inadaptée, le service des enseignants étant exprimé en heures d'enseignement 47 ( * ) . En outre, des enseignants participant à une sortie scolaire ou à un jury de concours ne sont pas forcément comptabilisés comme absents alors même qu'ils créent un besoin de remplacement.

La faible fiabilité de ces statistiques s'explique en grande partie par le fait que « les chiffres à la disposition des services académiques proviennent des déclarations des chefs d'établissement qui signalent l'absence d'un enseignant et effectuent une demande de remplacement. Or, ces chiffres ne représentent pas l'ensemble des absences des enseignants et, en particulier, ne prennent pas en compte les absences de courte durée , qui peuvent parfois se reproduire à intervalles réguliers » 48 ( * ) .

Recommandation n° 2 : Mieux recenser les absences dans le second degré et leurs causes.

(2) Un volume d'absences à maîtriser
(a) Un absentéisme lié en partie à la démographie enseignante

Il ressort des statistiques publiées dans le rapport annuel sur l'état de la fonction public que les enseignants sont moins absents que les fonctionnaires des autres administrations . Les derniers chiffres disponibles, qui datent de 2012, mettent en évidence un nombre moyen de jours d'absence par agent s'élevant à 11,4, contre 13,5 dans les autres ministères.

Ces chiffres ne recouvrent cependant pas entièrement la réalité des absences , étant calculés en fonction de l'année civile ; la Cour des comptes souligne en effet que « les enseignants ont un nombre annuel de jours de travail plus réduit et effectuent leurs services pour une large part sur moins de cinq jours par semaine » 49 ( * ) .

La proportion d'enseignants ayant fait l'objet d'un arrêt maladie est en revanche élevée : en 2012, 26,5 % des agents du ministère ont pris un congé de maladie ordinaire de moins de quatre jours (contre 13,3 % dans le reste de la fonction publique d'État) et 24 % un congé de maladie ordinaire plus long (25,3 % dans les autres ministères) 50 ( * ) . Au total, durant l'année scolaire 2012-2013, 43,4 % des enseignants ont pris au moins un congé de maladie ordinaire , pour une durée moyenne de 16,2 jours 51 ( * ) .

Cette proportion relativement importante s'explique en partie par le poids des congés de maternité, liée à la féminisation du métier d'enseignant : il est particulièrement marqué dans le premier degré et dans les départements où sont affectés les plus jeunes enseignantes ; les brigades de remplacement sont particulièrement concernées. L'inspection générale relevait ainsi que « le département de Seine-Saint-Denis présente un taux de féminisation [dans le premier degré] qui approche de 90 % et la part des congés de maternité dans les congés pour raisons de santé y est proche de 50 % » 52 ( * ) .

Les congés de maladie ordinaire connaissent une saisonnalité marquée : l'hiver voit un pic d'absence et le remplacement constitue, à cette période de l'année, un défi particulier .

(b) Une augmentation des absences observée dans le premier degré

Il semblerait toutefois que l'absentéisme augmente dans le premier degré depuis 2012 . L'inspection générale observe que, dans l'académie de Poitiers « le taux d'absence des enseignants augmente de manière régulière depuis trois ans (il est passé de 7,24 % en 2011-2012 à 7,86 % en 2013-2014 et à 8,28 % en 2015-2016) » 53 ( * ) . De même, en Loire-Atlantique, le nombre de journées d'absence des professeurs des écoles a crû de 36 132 en 2013-2014 à 51 893 en 2015-2016 54 ( * ) .

Ce phénomène s'observe dans « la grande majorité des départements », qui « font le constat d'une augmentation , parfois de près d'un point, de leur taux d'absence pour maladie , la suppression du jour de carence n'étant pas considérée comme étrangère à ce constat » 55 ( * ) .

Le rétablissement d'un jour de carence pour les agents de l'État, prévu à l'article 48 du PLF 2018, devrait permettre de limiter cette hausse , dont il conviendrait néanmoins de déterminer précisément les causes.

(3) Le poids des absences institutionnelles

Une partie du besoin de remplacement provient pour partie du fonctionnement même de l'éducation nationale ; ces absences sont ainsi dites « institutionnelles ». En effet, certaines activités, comme la formation continue ou la participation à des jurys ou à l'organisation d'examens ou de concours, ont lieu sur le temps scolaire et impliquent ainsi un remplacement de l'enseignement concerné.

Dans le premier degré, la formation continue explique 6,15 % du besoin de remplacement en 2015-2016 56 ( * ) , part bien moindre de celle des congés de maladie et de maternité mais tout de même équivalente à un tiers des absences non remplacées (cf. infra ).

D'après le ministère, la participation à une action de formation continue représente 16 % des demandes de remplacement émanant des chefs d'établissement dans le cadre du dispositif de remplacement de courte durée, 4 % proviennent de la participation à un jury et 1,8 % sont pour choix de sujet d'examen 57 ( * ) . Ces chiffres corroborent l'estimation de la Cour des comptes, selon laquelle les absences institutionnelles représentent de 20 % à 40 % du besoin de remplacement de courte durée dans le second degré 58 ( * ) .

L'indicateur 3.3 du programme 141, qui repose sur une enquête sur échantillon auprès d'établissements, met en évidence que plus de la moitié des heures de cours non assurées (54 %) le sont du fait de la fermeture de l'établissement ou de la mobilisation des enseignants pour d'autres tâches ; il ne détaille pas parmi les heures d'enseignement non assurées et non remplacées, la part liée à la formation 59 ( * ) .

Si la circulaire du 15 mars 2017 précise que « les jurys et préparations d'examen seront organisés de préférence le mercredi après-midi » et que « la formation hors temps de service d'enseignement pourra être organisée sur les petites vacances scolaires sur la base du volontariat » (la participation étant rémunérée), la mise en oeuvre de ces dispositions se heurte à une lecture restrictive des obligations réglementaires de service et à l'opposition des syndicats 60 ( * ) .

Enfin, certaines politiques du ministère tendent à l'accroissement du besoin de remplacement . C'est en particulier le cas de la politique visant à renforcer l'attractivité des postes en éducation prioritaire . Outre les avantages indemnitaires, le ministère a fait le choix d'un allégement des temps d'enseignement :

- dans le premier degré, les professeurs des écoles bénéficient d'une décharge de 18 demi-journées par année scolaire 61 ( * ) ;

- dans le second degré, les enseignants des établissements en REP+ bénéficient d'une réduction de leur service fondée sur une pondération : « chaque heure d'enseignement, pour le décompte des maxima de service [...] est affectée d'un coefficient de pondération de 1,1 » 62 ( * ) .

Comme le relève la Cour des comptes, ces dispositions « présentent l'inconvénient d'être fondées sur la diminution du temps de travail devant la classe et d'accroître la tension sur les moyens de remplacement » 63 ( * ) , nécessitant la mobilisation, par les services académiques, de remplaçants supplémentaires. Il en va de même pour la pondération des heures en cycle terminal de lycée qui remplace les heures dites « de première chaire » 64 ( * ) .

Recommandation n° 3 : Réduire les absences institutionnelles :

- en organisant les stages de formation continue et les autres tâches institutionnelles en dehors du temps d'enseignement et pendant les vacances scolaires ( a minima en proscrivant leur organisation pendant le pic hivernal d'absences) ;

- en évaluant et en revoyant les régimes d'allégement du temps d'enseignement , le cas échéant en compensant leur remise en cause par des avantages statutaires et indemnitaires.

2. Des résultats insuffisants, particulièrement dans le second degré où le remplacement de courte durée constitue une « défaillance systémique »
a) Le premier degré : une efficience à améliorer
(1) Une absence sur cinq non remplacée, un potentiel sous-utilisé

Dans le premier degré, 82,7 % des absences survenues sur l'ensemble du territoire ont été remplacées au cours de l'année scolaire 2016-2017 .

Pour mesurer l'efficacité du remplacement, le ministère emploie deux indicateurs :

- le taux de remplacement mesure l'efficacité du remplacement : il s'agit du rapport entre le nombre de demi-journées (dans le primaire) ou de journées (dans le secondaire) effectivement remplacées sur le nombre d'unités à remplacer ;

- le taux de rendement mesure l'utilisation du potentiel de remplacement : il s'agit du rapport entre nombre de demi-journées (dans le primaire) ou de journées (dans le secondaire) effectivement remplacées et le service dû en théorie par les remplaçants.

Depuis l'année scolaire 2013-2014 et la mise en service de l'application ARIA, le taux de remplacement communiqué fait référence au remplacement de l'ensemble des absences pour tous motifs confondus, au-delà des seuls congés pour maladie ordinaire et maternité, en intégrant notamment les absences pour formation continue et autres motifs d'absences sur autorisation.

Malgré l'importance des moyens consacrés au remplacement, une demi-journée d'absence sur cinq n'est pas remplacée . Le non-remplacement dans le premier degré est bien plus visible et lourd de conséquences que dans le secondaire : l'absence d'un professeur des écoles entraîne en effet la perte d'une demi-journée ou d'une journée entière de classe ; les élèves étant souvent dispersés dans d'autres classes de la même école.

Le remplacement est compliqué par le fait que le besoin n'est pas uniforme sur l'année scolaire ; le pic hivernal voit un grand nombre d'absences non remplacées. L'IGAENR observe ainsi qu'en 2016, « le département du Loiret a enregistré cent classes non remplacées au cours de la même demi-journée en janvier. À Paris, chaque jour en janvier 2016, entre 50 et 140 enseignants n'ont pas été remplacés » 65 ( * ) .

D'importants écarts sont constatés entre les académies et , au sein de celles-ci, entre les départements . En 2016-2017, si quelques académies affichaient un taux supérieur à 90 % (Poitiers, Reims, Clermont-Ferrand), d'autres présentaient un taux significativement inférieur : 72 % à Versailles, 74 % à Créteil, 77 % à Nice et 78 % à Strasbourg. Outre-mer, les taux de remplacement sont particulièrement faibles : 69 % à La Réunion, 55 % en Martinique et 5,5 % en Guyane.

Taux de remplacement et de rendement net dans le premier degré public

Taux de remplacement

Taux de rendement net

2015-2016

2016-2017

2015-2016

2016-2017

Aix-Marseille

80,26%

81,28%

74,35%

73,87%

Amiens

84,94%

86,52%

82,53%

77,19%

Besançon

84,62%

85,13%

73,38%

77,17%

Bordeaux

86,07%

87,95%

72,75%

75,69%

Caen

87,91%

88,22%

75,10%

71,02%

Clermont-Ferrand

89,14%

91,50%

76,32%

75,12%

Corse

64,69%

63,02%

65,35%

56,91%

Créteil

68,14%

73,97%

79,81%

67,46%

Dijon

84,40%

88,60%

74,49%

71,43%

Grenoble

83,95%

87,78%

83,68%

82,63%

Guadeloupe

68,41%

72,23%

46,16%

47,64%

Guyane

0,00%

5,52%

0,00%

2,09%

La Réunion

73,25%

69,17%

77,92%

72,71%

Lille

82,63%

85,48%

81,17%

73,94%

Limoges

88,58%

82,14%

62,46%

67,62%

Lyon

85,84%

89,45%

86,83%

81,23%

Martinique

44,98%

55,35%

19,86%

28,85%

Montpellier

84,01%

89,25%

77,87%

73,13%

Nancy-Metz

83,28%

86,08%

75,61%

74,12%

Nantes

87,01%

87,94%

77,08%

69,92%

Nice

75,12%

77,18%

72,12%

72,59%

Orléans-Tours

84,61%

88,29%

83,03%

80,83%

Paris

66,84%

80,77%

68,12%

75,85%

Poitiers

88,87%

91,40%

66,93%

69,84%

Reims

88,10%

90,14%

83,34%

78,98%

Rennes

86,03%

85,61%

72,02%

74,17%

Rouen

86,14%

85,67%

78,14%

82,20%

Strasbourg

76,05%

78,45%

82,06%

81,63%

Toulouse

85,62%

83,71%

70,58%

73,58%

Versailles

70,55%

72,33%

69,90%

61,55%

France

80,15%

82,66%

74,88%

72,06%

Source : MEN, réponse au questionnaire budgétaire

Le taux de rendement net est en revanche relativement faible : le potentiel de remplacement n'est employé qu'à hauteur de 72 % , avec des variations importantes selon les académies.

(2) Les mesures prises en vue d'optimiser la gestion des remplaçants

Afin d'améliorer l'efficience du remplacement, la segmentation du potentiel de titulaires remplaçants selon les catégories d'absence ou le lieu de ces dernières est abandonnée et un vivier unique constitué dans chaque département .

La circulaire du 15 mars 2017 et le décret du 9 mai 2017 fixent le département comme périmètre de nomination et d'intervention des remplaçants et rappellent la vocation de ces derniers à remplacer tout service (toute école, tout poste et pour toute durée) dans l'intérêt du service et des élèves 66 ( * ) . De plus, le décret du 9 mai 2017 prévoit qu'« entre deux remplacements, les personnels enseignants sont chargés [...] d'assurer des activités de nature pédagogique dans leur école ou service de rattachement ».

En pratique, les brigades destinées à la couverture des absences pour formation continue ont été maintenues « pour éviter que les départs en formation continue soient réduits en raison de l'absence de remplaçants » 67 ( * ) ; toutefois, les membres de ces brigades sont en théorie mobilisables en tant que besoin pour remplacer tout type d'absence.

Il semble toutefois que, du fait de leur caractère tardif par rapport à la préparation de la rentrée 2017, ces dispositions n'aient pas été pleinement mises en oeuvre dans de nombreuses académies.

b) Le remplacement des absences de longue durée dans le second degré

L'indicateur de performance 3.3 du programme 141 présente le pourcentage d'heures d'enseignement non assurées (cf. supra ). Il s'élève à 5,3 % en 2016, en hausse de 0,3 point par rapport à 2015. Il ne permet pas de mesurer la performance du système de remplacement.

Pour ce faire, le ministère se réfère également aux taux de remplacement et de rendement. Il présente un taux de remplacement élevé dans le second degré , supérieur à 97 %, et relativement uniforme selon les académies, même si quelques établissements connaissent une situation difficile.

Taux de remplacement et de rendement net dans le second degré public

Année scolaire

2011-2012

2012-2013

2013-2014

2014-2015

2015-2016

2016-2017

Taux de remplacement

97,28%

97,53%

97,18%

96,95%

97,47%

97,35%

Taux de rendement net

85,20%

86,10%

84,88%

85,17%

87,28%

89,23%

Source : MEN, réponse au questionnaire budgétaire

Toutefois, cet indicateur ne présente que les journées remplacées dans le cadre des absences dont la durée est égale ou supérieure à quinze jours . Les absences dont la durée est inférieure, pourtant les plus nombreuses, ne sont pas prises en compte et entrent dans le cadre du remplacement de courte durée.

c) Le remplacement de courte durée dans le second degré : une « défaillance systémique »

Le remplacement des absences de courte durée dans le second degré constitue une « défaillance systémique », tant est faible la proportion des heures remplacées 68 ( * ) .

(1) Un taux de remplacement très insuffisant

Le remplacement des absences de courte durée ne peut dès lors faire l'objet que d'estimations ; si le ministère évalue à un tiers le taux de remplacement , la Cour des comptes , à partir d'une enquête réalisée en 2015-2016 auprès d'un échantillon d'établissements, parvient à une estimation beaucoup plus faible, entre 5 et 20 % 69 ( * ) .

Une étude menée en septembre 2016 par l'académie de Nantes corrobore cette dernière estimation : le taux de remplacement s'y élève à 17 % ; il ne dépasse pas 25 % s'agissant des absences pour cause de formation, par définition plus prévisibles que les autres 70 ( * ) . L'IGAENR remarque à raison que « si l'institution n'arrive pas à couvrir des [remplacements de courte durée] qu'elle provoque, cela est très problématique » 71 ( * ) .

(2) Des obstacles multiples, un cadre réglementaire inappliqué

Du fait de la nature peu prévisible des besoins de remplacement et de leur brièveté, il appartient au chef d'établissement d'assurer, avec les moyens mis à sa disposition par l'autorité académique, la continuité du service au sein de son établissement . Comme le constate la Cour des comptes, « la possibilité [ de trouver au sein de l'établissement des remplacements ] se heurte à de multiples obstacles pratiques : contraintes d'emploi du temps et de locaux, réticences des enseignants, niveau de la rémunération, désapprobation syndicale » 72 ( * ) .

De surcroît, la faculté , attribuée au chef d'établissement par le décret « Robien » de 2005, de désigner d'autorité un remplaçant parmi les enseignants disponibles de l'établissement n'est pas mise en oeuvre . En 2011, l'IGAENR observait que « les textes de 2005 ont [...] reçu partout une application très réduite ; ils ont en effet été mal perçus par beaucoup d'enseignants et par les organisations syndicales ; les chefs d'établissements n'ont pas voulu faire de ce sujet un point de conflit » 73 ( * ) . Rares sont les protocoles à avoir dépassé le stade purement formel et à avoir été renouvelés.

Le rappel périodique de ces dispositions et l'édiction de mesures nouvelles , à l'instar de la circulaire de 2010, n'ont pas amené d'évolution significative , les dispositions du décret de 2005 demeurant largement inappliquées.

(3) Les mesures prises par le ministère en vue de limiter le besoin de remplacement demeurent insuffisantes

La circulaire du 15 mars 2017 précitée :

- atténue la distinction entre remplacement de courte et de longue durée , en disposant « qu'aucun délai de carence ne doit être imposé aux chefs d'établissement pour la sollicitation d'un TZR ou d'un contractuel pour une mission de remplacement de courte durée » 74 ( * ) ;

- réactive les protocoles « Robien » pour le remplacement de courte durée, dans le cadre d'un pilotage académique renforcé ;

- érige au rang de priorité la lutte contre les absences perlées , à savoir des absences courtes et récurrentes, difficiles à remplacer, qui nuisent considérablement à la continuité du service.

Des protocoles contre les absences perlées

Après expérimentation dans les académies de Caen, Nantes et Rennes, le ministère a institué à partir de la rentrée 2017 des protocoles qui ont pour objet :


• de repérer les absences perlées, qui peuvent révéler un besoin d'accompagnement de l'enseignant ;


• de recevoir l'enseignant au sein de la cellule ressources humaines et de l'accompagner afin que des solutions soient trouvées avec lui (tutorat, allègement de service, retrait temporaire de service, etc.) et ainsi d'anticiper les modalités de son remplacement.

Source : MEN, réponse au questionnaire budgétaire

Votre rapporteur pour avis partage les doutes de la Cour des comptes quant à l'efficacité de la réactivation des protocoles Robien : « comme aucune mesure renforçant les prérogatives des proviseurs de lycée et principaux de collège n'accompagne les décisions ministérielles, il est à craindre que cette nouvelle initiative n'ait pas plus d'effets que la précédente » 75 ( * ) .

Le principe édicté par ces protocoles est sain : en effet, le remplacement de courte durée doit être du ressort des établissements , « pour la bonne raison qu'aucune solution réelle ne peut exister par ailleurs » 76 ( * ) . Toutes les modalités de remplacement ne se valent pourtant pas. Aux yeux de votre rapporteur, il convient de privilégier l'échange de services entre enseignants de la même classe et de disciplines différentes au recours à un enseignant peu au fait de la progression de la classe. Cette modalité est largement pratiquée dans l'enseignement agricole et dans l'enseignement privé sous contrat ; elle permet de garantir une continuité dans l'enseignement dispensé et dans le suivi de la classe. Elle nécessite toutefois une souplesse, qui fait aujourd'hui défaut, dans la définition des services des enseignants et des emplois du temps des élèves .

B. UNE SITUATION QUI RISQUE DE SE DÉGRADER ET QUI APPELLE UNE RÉFLEXION PLUS LARGE SUR LE SERVICE DES ENSEIGNANTS

1. Des viviers de remplaçants de plus en plus contraints
a) De nombreuses académies connaissent une « pénurie de ressource enseignante », amenée à s'aggraver à court-terme
(1) De fortes tensions sur le vivier des enseignants qui obèrent le potentiel de remplacement

De manière paradoxale, après cinq années marquées par la création de 54 000 postes, l'on constate une véritable « pénurie de ressource enseignante », en particulier dans les académies les moins attractives 77 ( * ) . Ces dernières ne parviennent que très difficilement à pourvoir les postes créés ; les inspecteurs généraux font ainsi le constat qu' « il ne sert à rien de multiplier les créations d'emplois si le ministère ne trouve pas les personnes nécessaires pour occuper ces nouveaux emplois. Or dans l'immense majorité des académies, les services rectoraux ne disposent pas des personnes suffisantes, dans certaines disciplines, pour pourvoir aux remplacements, voire même dans certains cas pour occuper les emplois de titulaires » 78 ( * ) .

Les causes de ce phénomène, qui touche tant le premier degré que le second, sont :

- le faible rendement des concours, tant en quantité qu'en qualité ; pour le premier degré, dans les académies les moins attractives et, dans le secondaire, dans certaines disciplines à l'instar des lettres, des mathématiques ou de l'anglais 79 ( * ) ;

- la déperdition d'enseignants du fait d'une hausse des sorties : départs en retraite tendanciellement sous-estimés par la DGRH, accroissement des demandes de sortie et de reconversion, augmentation des démissions en formation ou après l'affectation ; ces dernières sont dans peu nombreuses mais, dans un contexte de pénurie, sont durement ressenties ;

- la structure du réseau des écoles et des établissements qui, dans de nombreux départements, tant ruraux qu'urbains, n'a pas été adaptée à l'évolution démographique - la création massive d'emplois a peu incité à la rationalisation ;

- enfin, l'évolution des besoins d'enseignement ; la réforme des collèges est à l'origine d'un besoin en professeurs de langues vivantes, en particulier d'espagnol, que de nombreuses académies peinent à pourvoir.

Cette situation n'est pas sans conséquence sur le potentiel de remplacement. Dès la rentrée 2016, l'inspection générale soulignait que le « fait marquant de [la rentrée 2016] est la mobilisation des enseignants remplaçants sur des postes à l'année ou sur des remplacements longs dès la rentrée » 80 ( * ) ; les exemples abondent : un mois après la rentrée, « dans de nombreuses disciplines, l'académie de Limoges ne dispose plus de TZR, car ceux-ci sont en grande majorité affectés à l'année ou sur des suppléances ou remplacements longs », la part des TZR affectés à l'année s'élevait à 51,8 % dans l'académie de Nancy-Metz et à 78 % dans l'académie de Poitiers 81 ( * ) .

Rien ne laisse présager une amélioration de la situation à la rentrée 2017 . Au contraire, dans le premier degré, l'IGAENR observe que « la mise en place des dédoublements [des classes de CP en REP+] diminue fortement le potentiel de remplacement », alors même que les académies, et à plus forte raison celles ayant de nombreuses classes en éducation prioritaire, « butent sur une insuffisance chronique en personnels titulaires » 82 ( * ) . Dans l'académie de Versailles, qui a vu son stock de titulaires diminuer entre 2012 et 2017, cette situation a eu pour conséquence l'affectation au 1 er septembre de 80 % des 2 118 ETP de TZR sur des postes à l'année 83 ( * ) .

(2) Un recours aux contractuels qui se pérennise
(a) Une forte croissance du recours aux contractuels, qui concerne désormais le premier degré

Conséquence des rigidités de gestion et de la pénurie de personnels titulaires, le recours aux contractuels s'amplifie . L'IGAENR décrit, du fait de « l'épuisement des viviers » d'enseignants titulaires, un « changement structurel d'ampleur » : le recrutement de contractuels « s'amplifie et s'installe dans la durée à tous les niveaux d'enseignement » 84 ( * ) .

Par exemple, dès la rentrée scolaire 2016, l'académie de Versailles a été contrainte de recruter plus de 280 contractuels dans l'enseignement primaire et plus de 3 100 dans le second degré ; à la rentrée 2017, ces recrutements sont de l'ordre de respectivement 580 et 3700, l'académie envisageant de recruter 700 contractuels dans le premier degré et 4 200 dans le second sur la durée de l'année scolaire 2017-2018 85 ( * ) .

Dans le second degré, où le recours aux contractuels n'a jamais cessé, en particulier dans l'enseignement professionnel, celui-ci a fortement crû entre 2007 (15 004 non-titulaires recensés) et 2011 (26 776), avant de croître de nouveau à partir de 2014. On compte ainsi 31 607 contractuels dans le secondaire pour l'année 2016-2017, représentant 26 903 ETP sur l'année scolaire.

La nouveauté provient du fait que le recours aux non-titulaires concerne désormais le premier degré , où il était jusque-là relativement marginal (on dénombrait 265 contractuels en 2008 et 849 en 2012). Au printemps 2017, les contractuels dans le premier degré représentaient 2 369 ETP , principalement dans les académies d'outre-mer (560 ETP à Mayotte, 326 en Guyane) et dans les académies déficitaires d'Île-de-France (485 ETP à Créteil, 321 à Versailles).

Cette tendance devrait également s'accentuer encore à la rentrée 2017 ; l'inspection générale prédit que « dans la très grande majorité des académies et à l'exception de celles qui connaissent une forte attractivité, le recours à des enseignants contractuels va s'avérer une nécessité, et parfois de façon massive » 86 ( * ) .

(b) Un vivier à fidéliser et à accompagner

L'accueil de ces contractuels constitue un défi pour le système éducatif, au-delà du seul enjeu quantitatif lié à leur recrutement : il ne suffit pas de mettre une personne devant une classe, encore convient-il de s'assurer de la qualité de l'enseignement dispensé .

Les inspections générales, dans un rapport de 2014 87 ( * ) , faisaient le constat de « dispositifs d'accueil, d'accompagnement et de formation très inégaux mais globalement insuffisants » et mettaient en évidence les lacunes du processus de recrutement, parfois limité à un entretien téléphonique, l'absence de formation préalable à la prise de poste, etc. 88 ( * )

Confronté à un recours massif et permanent à des contractuels, le rectorat de Versailles a mis en place un pôle dédié auprès de sa direction des ressources humaines, mobilisant une quinzaine de personnes. Outre la professionnalisation du recrutement et de l'accueil, le rectorat s'est engagé dans une démarche d'attractivité et de fidélisation en proposant des contrats d'une année entière, et non pas d'une année scolaire, ainsi qu'une formation avant la prise de poste.

Tirant les enseignements de cette expérience, le décret du 29 août 2016 institue un nouveau cadre pour la gestion de ces personnels 89 ( * ) . Il prévoit en particulier :

- un contrat à l'année lorsque la personne est recrutée pour un besoin couvrant l'intégralité de l'année scolaire ;

- la possibilité de majorer la rémunération en fonction « de l'expérience professionnelle détenue, de la rareté de la discipline enseignée ou de la spécificité du besoin à couvrir » ;

- la mise en oeuvre d'une « formation d'adaptation à l'emploi selon leur parcours professionnel antérieur et, en tant que de besoin, d'un accompagnement par un tuteur » ;

- l'instauration d'une « évaluation professionnelle » au moins tous les trois ans, pouvant donner lieu à une réévaluation de la rémunération.

Si ce nouveau cadre de gestion « est jugé facilitateur pour constituer les viviers et fidéliser les personnes » 90 ( * ) , la Cour des comptes pointe le « risque de rigidifier les conditions d'emploi » des personnels contractuels 91 ( * ) . Il est ainsi mis fin à la possibilité, pour les académies, de recruter des vacataires pour assurer des services limités à deux cents heures par année scolaire.

Le décret demeure vague s'agissant de l'accompagnement des personnels contractuels . L'inspection générale formule plusieurs préconisations en la matière, en particulier l'instauration, préalablement au recrutement, d'un « entretien systématique mené par un inspecteur », dont on peut s'étonner qu'il ne soit pas déjà la règle, un tutorat au sein de l'établissement ainsi qu'une « visite conseil dans les trois premiers mois » 92 ( * ) .

Recommandation n° 4 : Améliorer les conditions d'accueil, d'accompagnement et de formation des enseignants contractuels.

(c) Un élargissement nécessaire du vivier des contractuels

L'attention de votre rapporteur pour avis a été attirée sur les obstacles statutaires et réglementaires auxquels se heurte le recrutement de personnels contractuels , tant dans l'enseignement public que dans le privé.

Les représentants de l'enseignement catholique ont souligné le caractère « absurde » de certains pans de la réglementation actuelle, qui conduit « en temps de pénurie, à empêcher des enseignants volontaires et compétents d'effectuer des suppléances au motif d'impossibilités administratives » 93 ( * ) .

Certaines rigidités statutaires font obstacle à l'exercice d'une suppléanc e ; c'est le cas d'enseignants retraités qui ne peuvent justifier d'un titre de master ou de licence et ayant perdu la capacité à enseigner parce qu'ils ont été rayés des cadres, ou encore des enseignants en disponibilité . D'autre part, certains enseignants se voient refuser l'exercice d'une suppléance dans une discipline connexe (par exemple, un professeur d'histoire-géographie volontaire pour remplacer un professeur de lettres).

Lorsqu'elles ne le rendent pas impossible, les contraintes statutaires peuvent complexifier le recours à certaines catégories de personnels . L'inspection générale propose ainsi de faire évoluer les procédures applicables aux assistants d'éducation , au nombre de 60 000 dans les établissements du second degré, « l'assistant d'éducation ne pouvant pas être rémunéré en heures supplémentaires et étant obligé de démissionner pour signer un contrat d'enseignant » 94 ( * ) . Comme le souligne le SNPDEN-UNSA, permettre aux assistants d'éducation « par l'accès aux heures supplémentaires, d'augmenter leur temps de service, [...] constituerait une expérience valorisante » pour ceux qui se destinent au professorat, et constituerait ainsi une forme de prérecrutement 95 ( * ) .

Recommandation n° 5 : Engager une démarche de réduction des obstacles statutaires et réglementaires au recrutement de remplaçants.

b) L'enseignement privé : une situation traditionnellement favorable qui tend à se dégrader

L'enseignement privé sous contrat se distingue de l'enseignement public par l'absence d'enseignants dédiés au remplacement ou de surnombres, à l'instar de ce qui existe dans l'enseignement public. Ainsi, les emplois affichés dans les documents budgétaires (cf. supra ) ne correspondent pas à des emplois permanents ; ils sont la traduction des heures supplémentaires et des heures-poste allouées pour le remplacement.

Les absences de courte durée , si elles ne font l'objet d'aucun suivi statistique, semblent convenablement remplacées . Les représentants de l'enseignement catholique soulignent que celles-ci « ne constituent pas un problème », le remplacement étant assuré au sein de l'établissement 96 ( * ) . L'autonomie des établissements privés et les moyens limités dont ils disposent incite à avoir recours à « des stratégies de remplacement n'impliquant pas l'attribution de moyens supplémentaires » 97 ( * ) . À cet effet, l'inspection générale souligne « l'efficacité des stratégies mises en place pour les établissements pour faire face aux absences » : échange de services entre enseignants, recours à un autre enseignant de la même discipline ou d'une discipline connexe, voire organisation de devoirs surveillés 98 ( * ) .

S'agissant des absences plus longues , le remplacement est assuré par des contractuels, les maîtres délégués, recrutés à cet effet après agrément de la direction diocésaine et de l'établissement . L'indicateur 4.2 du programme 139 n'est pas renseigné « du fait d'une refonte de la méthodologie de calcul ». Avant sa refonte, cet indicateur affichait d'excellentes performances pour le remplacement des absences de plus de quinze jours (97,9 % en 2013) 99 ( * ) .

Il semble toutefois que la situation tende à se dégrader de manière significative du fait d'une contraction importante du vivier de remplaçants . Ce qui est décrit par les responsables de l'enseignement comme une « pénurie aggravée » de remplaçants procède avant tout d'un phénomène de « concurrence déloyale » : les contractuels de l'enseignement privé sont rémunérés sur les échelles indiciaires des maîtres auxiliaires, nettement moins favorables que celles de leurs homologues de l'enseignement public . Cet écart est sensiblement accru par la majoration de la rémunération des contractuels dans les académies et les disciplines déficitaires . Comme le souligne M. Yann Diraison, adjoint au secrétaire général de l'enseignement catholique, « le différentiel de rémunération peut atteindre 600 euros par mois, ce qui est considérable pour des enseignants rémunérés moins de 1 200 euros net » 100 ( * ) .

Votre rapporteur considère qu'un tel écart de rémunération est contraire au principe de parité inscrit dans la loi Debré 101 ( * ) ; il n'est ni juste ni souhaitable que les viviers de remplaçants de l'enseignement privé soient ainsi réduits - le remplacement n'est pas un jeu à somme nulle.

Recommandation n° 6 : aligner la rémunération des maîtres délégués de l'enseignement privé sur celle des personnels contractuels de l'enseignement public.

2. La nécessité d'une réflexion plus globale sur le service des enseignants
a) Définir un volume d'enseignement dû aux élèves

Comme le relevait l'IGAENR, ce que l'institution doit aux élèves n'est nulle part inscrit , à l'exception notable du baccalauréat professionnel. Si la durée (théorique) de l'année scolaire est définie, « trente-six semaines au moins » 102 ( * ) , ainsi que les horaires hebdomadaires des élèves par discipline, « la multiplication des horaires hebdomadaires des élèves par 36 n'a jamais été effectuée » 103 ( * ) .

Ces trente-six semaines demeurent largement théoriques du fait de l'organisation des examens qui, dès le mois de juin, amputent le temps d'enseignement.

L'annualisation du volume d'heures-élève permettrait d'organiser autrement le travail des élèves et de s'affranchir en tant que besoin du cadre hebdomadaire, facilitant l'échange de services entre enseignants et permettant l'organisation de journées ou de semaines dédiées à certaines matières .

Recommandation n° 7 : définir, de manière explicite, un nombre annuel d'heures dû aux élèves dans chaque discipline pour préparer le diplôme devant sanctionner leur cycle d'études.

b) Faire concorder les obligations de service avec la réalité du métier d'enseignant et les besoins du système éducatif

Si le décret du 20 août 2014 fait référence « à la réglementation applicable à l'ensemble des fonctionnaires en matière de temps de travail » 104 ( * ) , soit 1 607 heures par an, dans les faits, « la seule obligation chiffrée à laquelle sont tenus les enseignants en vertu de ces décrets demeure d'assurer le nombre d'heures de cours hebdomadaire comme par le passé » 105 ( * ) .

Pourtant, l'annualisation des obligations règlementaires de service des enseignants revêt de nombreux avantages : elle donnerait une souplesse aux établissements dans l'organisation du remplacement, la définition des emplois du temps, le soutien aux élèves en difficulté, voire « de mieux gérer les périodes de fin d'année scolaire marquées par des pertes de temps d'instruction dues aux passages des examens » 106 ( * ) .

Votre rapporteur pour avis fait sienne cette solution, prônée par la Cour des comptes ainsi que notre collègue Gérard Longuet. Ce dernier recommandait de « redéfinir les obligations règlementaires de service sur une base annuelle » et de « permettre aux chefs d'établissement de « puiser » dans [un stock d'heures dues] en fonction des besoins naissant en cours d'année scolaire » 107 ( * ) . Quelle qu'en soit la forme, il ne fait aucun doute que l'annualisation du service d'enseignement « améliorerait la capacité à assurer les remplacements », de courte comme de longue durée 108 ( * ) . Il en va de même de la bivalence , c'est-à-dire de la capacité des professeurs à enseigner deux disciplines, qui permettrait de réduire les situations de sous-service ou de service partagé tout en facilitant le remplacement .

S'agissant des professeurs agrégés , il conviendrait , comme le recommande la Cour, de faire en sorte que ces enseignants « ne soient plus affectés au collège , y compris en créant pour ces enseignants une obligation de mobilité » ni à des missions de remplacement 109 ( * ) . Hors enseignement en classes préparatoires aux grandes écoles (CPGE) , notre collègue Gérard Longuet propose également l'alignement de leurs obligations de service sur celles des professeurs certifiés 110 ( * ) .

Dans le premier degré , où les obligations de service sont déjà partiellement annualisées, il conviendrait de préciser que la formation continue est dispensée en dehors du temps d'enseignement et de donner plus de flexibilité à l'emploi des titulaires remplaçants, par l'annualisation partielle de leur service d'enseignement .

Les nouvelles obligations de service ainsi définies devraient intégrer la mission de remplacement , en application de l'article L. 912-1 du code de l'éducation, et la formation continue qui, tout en étant partie intégrante du service, serait effectuée en dehors des temps d'enseignement.

Comme le recommande la Cour des comptes, cette remise à plat des obligations de service doit s'inscrire dans une démarche globale , allant de pair avec une amélioration des rémunérations, déjà partiellement engagée dans le cadre de l'accord PPCR, en vue de renforcer l'attractivité du métier d'enseignant.

Recommandation n° 8 : Faire concorder les obligations de service avec la réalité du métier d'enseignant et les besoins du système éducatif, en revoyant les obligations de réglementaires de service.

*

* *

Sous réserve de l'adoption de son amendement, votre rapporteur pour avis propose à la commission d'émettre un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire » du projet de loi de finances pour 2018.

SECONDE PARTIE - L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE

I. U NE HAUSSE DES MOYENS QUI PROCÈDE DE LA PRIORITÉ ACCORDÉE À L'ÉDUCATION ET À LA FORMATION PROFESSIONNELLE

A. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS POUR 2018, UNE AUGMENTATION SOUTENUE, PORTÉE PAR LE HORS TITRE 2

1. Une hausse globale de 2,5 %

Dans la version initiale du projet de loi de finances (PLF) pour 2018, les crédits consacrés à l'enseignement technique agricole s'élèvent à 1 452,5 millions d'euros . Ils connaissent une hausse de 34,8 millions d'euros en AE et en CP par rapport au budget précédent, soit une hausse de 2,5 % , comparable à l'évolution constatée en 2017. Cette évolution est équivalente à celle inscrite pour l'éducation nationale en 2018 (+ 2,7 %).

Évolution des crédits de l'enseignement agricole LFI 2017-PLF 2018

Crédits de paiement
(millions d'euros)

Ouverts en LFI 2017

Demandés en PLF 2018

Évolution en montant

Taux d'évolution

Titre 2 (dépenses de personnel)

934,55

955,60

+ 21,06

+ 2,3 %

Hors titre 2

483,12

496,85

+ 13,73

+ 2,8 %

Total

1 417,67

1 452,46

+ 34,79

+ 2,5 %

Source : Ministère de l'agriculture et de l'alimentation, PAP 2018

Le projet de loi de finances pour 2018 prolonge le mouvement d'augmentation des crédits consacrés à l'enseignement agricole : entre 2012 et 2017, ceux-ci ont augmenté de 8,8 %.

Évolution des crédits de paiement du programme 143 depuis 2012

LFI 2012

LFI 2013

LFI 2014

LFI 2015

LFI 2016

LFI 2017

Évolution 2012-2017

PLF 2018

Montant (M€)

1 303,1

1 324,6

1 342,7

1 377,3

1 384,5

1 417,7

114,6

1 452,5

Évolution (%)

+0,9 %

+1,6 %

+1,3 %

+2,6 %

+0,5 %

+2,4 %

+ 8,8 %

+2,5 %

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

2. Les crédits hors dépenses de personnel

Il est prévu une augmentation des crédits hors titre 2 de l'enseignement public de 7,2 millions d'euros (+ 20 %) . Elle finance :

- la revalorisation de la dotation relative aux 1 247 ETP d'assistants d'éducation (+ 3,9 M€) afin de permettre une meilleure couverture de leur rémunération ;

- une meilleure prise en compte de la compensation des charges de pension des agents titulaires sur budget (ATB) des CFA et CFPPA (+ 1,0 M€), qui renverse une baisse tendancielle de ce poste budgétaire ;

- la modernisation des systèmes d'information de l'enseignement technique agricole, que permet une dotation complémentaire de 2 millions d'euros ;

- la majoration des dépenses d'investissement et de fonctionnement des établissements des collectivités d'outre-mer (+ 0,25 M€).

Évolution des crédits de paiement hors titre 2 de l'action n° 1

LFI 2017 (M€)

PLF 2018 (M€)

PLF 2018/
LFI 2017 (M€)

PLF 2018/ LFI 2017 (%)

Total action n° 1 : « Mise en oeuvre des enseignements dans les établissements publics »

38,2

45,4

+ 7,2

+ 19 %

dont pensions des CFA-CFPPA

1,1

2,1

+ 1,0

+ 91 %

dont assistants d'éducation

29,5

33,4

+ 3,9

+ 13 %

dont actions ponctuelles à caractère pédagogique

1,9

3,9

+ 2,0

+ 105 %

dont fonctionnement et investissements dans les lycées agricoles d'outre-mer

0,75

1,0

+ 0,25

+ 33 %

Source : Ministère de l'agriculture et de l'alimentation

L'autre augmentation majeure concerne les crédits de l'action n° 3 « Aide sociale aux élèves (enseignement public et privé) », en hausse de 5,4 millions d'euros (+ 7,2 %). Cette dernière est répartie entre :

- les bourses et fonds sociaux (+3,5 M€), liés à la mise en oeuvre de la réforme des bourses de l'enseignement secondaire et à l'introduction de l'aide à la recherche du premier emploi ;

- les crédits destinés à la prise en charge du handicap qui augmentent d'un million d'euros (+14,4 %), finançant le recrutement d'auxiliaires de vie supplémentaires (AVS) et la transformation de 20 % des contrats aidés en emplois d'accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH).

B. UNE CONSOLIDATION DU SCHÉMA D'EMPLOIS, APRÈS CINQ ANNÉES DE CRÉATIONS DE POSTES

1. Une stabilisation des effectifs

Dans le cadre de la refondation de l'école, 1 015 postes devaient être créés sur la durée de la précédente législature, dont 820 d'enseignants (sous plafond d'emplois) et 195 d'assistants d'éducation et d'AVS (hors plafond).

Cet objectif a été globalement réalisé. La comparaison des plafonds d'emplois montre une augmentation de 716 ETPT d'enseignants entre 2011 et 2018. Pour toutes les catégories de personnels, l'augmentation est de 649 ETPT entre 2012 et 2018.

Évolution du plafond d'emplois à périmètre constant (en ETP)

2008

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

Enseignement agricole (P143)

15 457

14 706

14 597

14 819

14 987

15 123

15 274

15 355

Ensemble du ministère

34 427

31 544

31 017

31 001

31 375

30 238

30 253

30 362

Ratio

44,9 %

46,6 %

47,0 %

47,8 %

47,8%

50,0 %

50,5 %

50,6 %

Source : Ministère de l'agriculture et de l'alimentation

Aucune création de poste n'est prévue en 2018 - cette stabilité doit s'apprécier au regard de la baisse globale des effectifs (cf. infra ) , de la faiblesse des effectifs par classe et de la baisse des effectifs dans l'enseignement secondaire de l'éducation nationale .

Pour l'exercice 2018, le plafond d'emplois du programme est fixé à 15 355 emplois temps plein (ETP) , soit une hausse de 81 ETP qui découle :

- de l'extension en année pleine du schéma d'emplois 2017 (+ 97 ETP) ;

- des flux d'entrées/sorties sur 2018 (-16 ETP).

2. L'évolution des dépenses de personnel

Dans sa version initiale, le projet de loi de finances pour 2018 prévoyait une hausse de 21,1 millions d'euros de la masse salariale du programme (+ 2,3 %) . Outre le financement du glissement vieillesse-technicité (+ 10 M€) et l'extension en année pleine des créations d'emplois survenues en 2017 (+ 3,7 M€), cette augmentation finançait la mise en oeuvre de l'accord « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR).

La traduction budgétaire de l'accord PPCR

Le protocole sur la modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations (PPCR) se traduit par une restructuration des grilles indiciaires des différents corps de fonctionnaires entre 2016 et 2020. Il prévoit également une transformation d'une partie des primes en points d'indice, dite « transfert primes/points ». Sa mise en oeuvre devait se traduire en 2018 par une dépense supplémentaire de 2,8 millions d'euros (hors contributions au CAS « Pensions »).

Source : Ministère de l'agriculture et de l'alimentation

Outre celles des personnels de l'enseignement public, les dépenses de personnel du programme comprennent les rémunérations versées aux enseignants de l'enseignement privé du temps plein, pour un montant de 242 millions d'euros en 2018.

Le remplacement mobilise 8,4 millions d'euros, qui financent 110 ETP d'enseignants, 43 ETP de personnels administratifs et techniciens ainsi que des vacataires sous la limite de 200 heures annuelles. Du fait de la dispersion des établissements, ces moyens ne sont pas des personnels permanents à l'instar des TZR de l'éducation nationale mais un plafond de dépense pour le recrutement de contractuels. L'absence d'indicateur sur la performance du remplacement est regrettable : jusqu'en 2014, seule existait une enquête de satisfaction des usagers sur la qualité de la formation dispensée. De surcroît, le ministère fait état d'une « d'une difficulté croissante des DRAAF à assurer les remplacements, notamment en raison d'une forte hausse des mi-temps thérapeutiques » 111 ( * ) .

L'attention de votre rapporteur pour avis a été attirée sur la situation des personnels contractuels de l'enseignement public agricole. Leur nombre est estimé à la rentrée 2018 à 1 500 sur moins de 8 000 enseignants, soit une proportion bien supérieure à celle observée dans l'éducation nationale. Ces personnels connaissent un turn-over élevé, que les syndicats attribuent à un différentiel de rémunération avec leurs homologues de l'éducation nationale. Votre rapporteur pour avis souhaite que la parité s'applique également dans ce domaine.

C. L'ENJEU DU FINANCEMENT DE L'ENSEIGNEMENT PRIVÉ : À LA RECHERCHE D'UNE SOLUTION ÉQUILIBRÉE

Les crédits prévus dans le projet de loi de finances pour 2018 au titre des subventions aux établissements privés reprennent les montants inscrits en 2017. En effet, les protocoles d'accord conclus en 2013 avec les établissements privés ayant expiré fin 2016, ceux-ci avaient été reconduits pour l'année 2017.

Le PLF 2018 prévoit donc des montants identiques à 2017, soit :

- pour l'enseignement privé dit « du temps plein », une subvention de fonctionnement de 127 millions d'euros et 242 millions d'euros au titre de la prise en charge des dépenses de personnel ;

- pour l'enseignement privé dit « du rythmes approprié », une subvention visant à couvrir le fonctionnement de l'établissement et la rémunération des formateurs s'élevant à 215,6 millions d'euros ;

- enfin, une aide financière de 500 000 euros est allouée à l'établissement privé de Mayotte, établissement non affilié et donc en dehors du champ des protocoles d'accord.

De nouveaux protocoles d'accord étant en cours de négociations avec les trois familles de l'enseignement privé (CNEAP, UNMFREO, UNREP), ces crédits devraient être majorés en exécution.

Votre rapporteur pour avis formule le voeu que les négociations engagées avec les fédérations de l'enseignement privé aboutissent à une revalorisation substantielle des subventions, conformément à l'esprit des dispositions de la « loi Rocard » 112 ( * ) .

C'est, dans un contexte de restriction budgétaire, l'incapacité de l'Etat à appliquer les dispositions issues de cette loi qui a mené à la conclusion d'accords dérogatoires visant à encadrer le montant des subventions versées : accords Gaymard-Forissier de 2004, protocoles Barnier de 2009 et, dernièrement, les protocoles conclus en 2013.

Ces accords successifs n'ont pas permis un rattrapage substantiel de l'écart de financement entre le public et le privé : le financement des établissements privés stagne depuis plusieurs années alors que le coût unitaire de formation par élève dans l'enseignement public augmente de manière significative. L'indicateur 2.1 du programme, le coût unitaire de formation par étudiant (CUFE) dans l'enseignement public, révèle une augmentation de 23 % en euros courants entre 2010 et 2018.

Outre la stricte application du droit, la revalorisation des subventions à l'enseignement privé doit avoir pour objet de mettre fin à la « logique malthusienne » dénoncée par notre collègue Françoise Férat 113 ( * ) . Les établissements privés du temps plein comme du rythme approprié prennent en effet leur pleine part au développement de l'enseignement agricole, en particulier outre-mer : la Guyane compte un lycée du CNEAP et deux maisons familiales rurales (MFR), quand Mayotte compte un établissement privé non affilié et deux MFR.

II. UNE FILIÈRE D'EXCELLENCE QU'IL CONVIENT DE VALORISER

A. DES RÉSULTATS ENVIABLES EN MATIÈRE D'INSERTION PROFESSIONNELLE

1. Une insertion facile et rapide dans l'emploi

Taux d'insertion des diplômés de l'enseignement agricole
sept mois après l'obtention de leur diplôme (%)

Diplôme

2012

2013

2014

2015

2016

(provisoire)

2017

(Prévision actualisée)

BTSA

80,8

74,3

76,7

75

76

77

Bac Pro

75,9

69,6

66,1

67,2

64

65

CAPA

38,5

36,9

39,3

36,5

35,6

36

Source : Projet annuel de performance pour 2018

Si l'indicateur 1.2 du projet annuel de performance pour 2018 met en évidence une certaine dégradation de l'insertion professionnelle des diplômés de l'enseignement agricole, ces résultats demeurent bien supérieurs à ceux observés dans l'éducation nationale.

Il conviendra toutefois de déterminer les causes de cette dégradation et les moyens d'y remédier.

S'agissant en particulier du baccalauréat professionnel , dont le bilan très contrasté de la rénovation avait été dressé l'année dernière 114 ( * ) , trois groupes de travail issus du conseil national de l'enseignement agricole se sont réunis à l'automne 2016 et début 2017 afin d'améliorer l'efficacité du nouveau « bac pro ».

Le ministère a fixé quatre orientations :

- renforcer la cohérence et l'attractivité de la voie professionnelle en valorisant les expériences d'engagement citoyen des élèves et des apprentis ;

- mieux valoriser la période de formation en milieu professionnel ;

- conforter les dispositifs d'individualisation ;

- relancer la dynamique d'accompagnement des enseignants et des équipes pédagogiques.

Comparaison des taux d'insertion dans l'emploi sept mois après l'obtention du diplôme (%) (2016 EN/2015 ETA)

Diplôme

Enseignement

agricole

Éducation

nationale

Écart

BTS

76

63,3

12,7

Bac Pro

64

45,9

18,1

CAP

35,6

30,4

5,2

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication d'après les documents budgétaires

En 2016, sept mois après la sortie de formation, l'écart en matière de taux d'insertion par rapport aux titulaires d'un diplôme équivalent de l'éducation nationale s'établit à 12,7 points en faveur des titulaires d'un BTSA, et l'écart avec les titulaires d'un baccalauréat professionnel et d'un CAPA respectivement de 18,1 et 5,2 115 ( * ) .

À plus long terme, l'insertion professionnelle des diplômés de l'enseignement agricole demeure très satisfaisante : trente-trois mois après l'obtention de leur diplôme dans la voie scolaire, 63,3 % des titulaires d'un CAPA sont en emploi, comme 82,5 % des bacheliers professionnels et 87,1 % des titulaires d'un brevet de technicien supérieur agricole (BTSA).

Insertion professionnelle des diplômés de l'enseignement agricole
33 mois après l'obtention du diplôme

Diplôme

Année

Population

Taux d'emploi (%)

CAPA

2014

élèves

63,3

2014

apprentis

78,5

2011

élèves

66,5

2011

apprentis

77,4

Baccalauréat professionnel

2015

élèves

82,5

2015

apprentis

85,9

2012

élèves

85,7

2012

apprentis

89,3

BTSA

2013

étudiants

87,1

2013

apprentis

92,4

Source : Ministère de l'agriculture et de l'alimentation

Si la reprise économique ne semble pas traduire par une amélioration de l'emploi des jeunes diplômés, l'excellente performance de l'enseignement agricole en matière d'insertion professionnelle reflète la qualité des formations dispensées et leur adéquation avec les besoins du tissu économique local .

À l'heure où le Gouvernement engage une réflexion sur la formation professionnelle et l'apprentissage, l'enseignement agricole constitue un exemple intéressant dont il conviendrait de s'inspirer .

2. Des poursuites d'études nombreuses

Contrairement à certaines idées reçues, l'enseignement agricole ne ferme par la porte à l'enseignement supérieur ; au contraire, après l'obtention du diplôme, la grande majorité des élèves et des étudiants poursuit des études.

Une part importante de ces poursuites d'études s'effectue dans des formations de l'éducation nationale, que cela soit en vue de l'obtention d'un diplôme de niveau supérieur ou dans une spécialité différente.

Ainsi, 19,5 % des titulaires d'un CAPA, 41,5 % des titulaires d'un baccalauréat professionnel, 62 % des titulaires d'un baccalauréat S et 68 % des titulaires d'un BTSA poursuivent ainsi leur formation dans l'éducation nationale.

Poursuite d'études des diplômés de l'enseignement agricole,
33 mois après l'obtention du diplôme

Diplôme

Population

Taux de poursuite d'études (%)

CAPA

(enquête 2014)

élèves

64,2

apprentis

51,4

Baccalauréat professionnel

(enquête 2015)

élèves

60,7

apprentis

41,3

Baccalauréat technologique

(enquête 2012)

élèves

93

Bac S

(enquête 2012)

élèves

98,8

BTSA

(enquête 2013)

élèves

62,3

apprentis

38,0

Source : Ministère de l'agriculture et de l'alimentation

Ces transitions sont facilitées par les équivalences entre les formations proposées : c'est le cas notamment des formations connexes à celles délivrées par le ministère des sports (en matière hippique ou de développement durable). Par exemple, le BTSA « Gestion et protection de la nature » bénéficie, depuis 2012, d'une équivalence partielle avec le diplôme d'État de la jeunesse, de l'éducation populaire et du sport spécialité « Animation socio-éducative ou culturelle », mention « Développement de projets, territoires et réseaux ».

B. L'ÉVOLUTION PRÉOCCUPANTE DES EFFECTIFS D'ÉLÈVES

1. Une baisse des effectifs qui se poursuit

À la rentrée 2017, les effectifs de l'enseignement agricole sont de 161 919 élèves, soit une baisse de 2 855 élèves (- 1,7 %) par rapport à la rentrée précédente.

Les effectifs d'élèves régressent donc en-deçà de la barre des 165 000, franchie l'année dernière et qui constitue un point bas historique depuis vingt ans ; c'est à la rentrée 1996 que le nombre d'élèves avait dépassé ce niveau. Par rapport à la rentrée 2008, la baisse globale des effectifs est de 5 %.

Évolution des effectifs scolarisés dans l'enseignement agricole

Rentrée scolaire

2008

2009

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Effectif total

170 314

171 175

171 686

174 104

170 108

170 991

165 662

166 028

164 774

161 919

Variation annuelle

N/A

+ 0,5 %

+ 0,3 %

+1,4 %

-2,3 %

+ 0,5 %

- 3,6 %

+ 0,5 %

- 0,8 %

- 1,7 %

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

2. Un phénomène observé dans l'ensemble des filières, à rebours des évolutions démographiques

La diminution des effectifs d'élèves concerne l'ensemble des niveaux d'enseignement : elle est plus marquée dans les classes de collège (- 3,5 %) et de l'enseignement supérieur court (- 2,6 %) qu'en lycée (- 1,4 % dans la voie professionnelle, stabilité en voie générale et globale).

Parce qu'il concentre les formations du premier cycle et qu'il est comporte davantage de formations professionnelles, l'enseignement privé est plus touché par la diminution des effectifs, perdant 2 200 élèves (- 2,2 %).

La diminution des effectifs au collège est expliquée par le redécoupage des cycles d'enseignement, le cycle 4 allant de la 5 e à la 3 e et décourageant ainsi un changement d'établissement en cours de cycle. Notre collège Françoise Férat l'expliquait également par le fait que « certaines académies ont eu pour objectif de réduire l'orientation des élèves de collège vers une MFR ou une classe de l'enseignement agricole, considérées comme des « filières de dérivation » et vers lesquelles l'orientation serait la sanction d'un échec » 116 ( * ) .

3. Promouvoir l'enseignement agricole comme filière d'excellence

L'enseignement agricole demeure une filière trop méconnue et les stéréotypes à son sujet encore prégnants. Si les services du ministère et les établissements ne sont pas inactifs (cf. infra ), leurs actions visent principalement les élèves issus des milieux ruraux et agricoles.

Votre rapporteur pour avis plaide pour une campagne de promotion, menée en partenariat avec l'éducation nationale, en vue de l'orientation des élèves , tant auprès de ces derniers et de leurs familles que des principaux et des équipes enseignantes de collège de l'éducation nationale.

Il s'agirait de mettre en avant les réussites de l'enseignement agricole, la diversité des formations et des métiers - qui ne se limitent pas, bien au contraire, à la seule production agricole, et ses atouts indéniables que sont la taille réduite des classes, la pédagogie de projet, l'internat, la coopération internationale.

D'autres modalités pourraient être envisagées : par exemple, des stages de découverte, sur le modèle des « stages de la réussite », pourraient être proposés pendant les vacances scolaires à des jeunes de collège dans des établissements de l'enseignement agricole. Cela permettrait de faire découvrir les formations proposées et les spécificités de ces établissements, comme l'internat ou les exploitations.

Les actions du ministère visant à faire connaître l'enseignement agricole

L'enseignement agricole participe chaque année à trois salons majeurs de couverture nationale que sont le salon international de l'agriculture, le salon de l'éducation et alternativement le salon international de l'alimentation et celui du machinisme agricole. À ceux-ci, s'ajoute la participation des directions régionales de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt (DRAAF) et d'établissements d'enseignement agricole à de nombreux salons ou forums régionaux et locaux. Enfin, les établissements se mobilisent pour organiser des journées événementielles telles que les portes ouvertes pour communiquer largement auprès des jeunes et de leurs familles et proposer des parcours fluides avec l'éducation nationale.

A ces modes d'information ponctuels, le ministère ajoute des modalités de réponses aux demandes directes du grand public, qui continuent à être mises en oeuvre tout au long de l'année par réponses aux courriers et courriels.

Le site institutionnel du ministère porte à la connaissance du grand public l'offre de formation, les établissements et les caractéristiques du système éducatif agricole 117 ( * ) . L'enseignement public agricole possède un site spécifique 118 ( * ) et chaque établissement possède son propre site de communication pour présenter la diversité des formations offertes.

Source : Ministère de l'agriculture et de l'alimentation

Promouvoir l'enseignement agricole est un enjeu institutionnel majeur tant il permet de répondre à certains des défis de notre pays , en particulier :

- le développement d'une formation professionnelle de qualité , en phase avec l'évolution des métiers et les besoins des professions ;

- l'individualisation de l'enseignement , l'innovation pédagogique et la capacité à faire réussir tous les élèves, y compris ceux présentant des difficultés scolaires ;

- la transition vers une agriculture durable et plus efficiente dans le cadre du plan « Enseigner à produire autrement » ;

- l'animation et le développement des territoires , qui constitue l'une des cinq missions fixées par le législateur 119 ( * ) .

Votre rapporteur pour avis considère que l'enseignement agricole doit se défaire d'une certaine inertie pour entrer dans une logique d'expansion ; la négociation avec les fédérations de l'enseignement privé devra répondre à cet enjeu (cf. supra ).

L'enseignement agricole répond en effet à une réelle demande ; si certaines régions voient leur démographie refluer, dans d'autres, comme dans certains départements de l'Ouest de la France ou en Guyane et à Mayotte, qui connaissent une véritable poussée démographique, l'offre éducative de l'enseignement agricole est sous-dimensionnée .

C. UNE COMPLÉMENTARITÉ AVEC L'ÉDUCATION NATIONALE À CONSOLIDER

S'il est attaché à la spécificité de l'enseignement agricole, votre rapporteur pour avis est favorable au renforcement des mutualisations avec l'éducation nationale , et cela en vue d'améliorer l'efficience et la qualité du service rendu .

En raison de leur dispersion sur le territoire, les établissements de l'enseignement agricole auraient tout à gagner à s'appuyer sur le maillage plus resserré de l'éducation nationale .

S'il existe de nombreux exemples de coopérations à l'échelon local entre l'enseignement agricole et l'éducation nationale (cf. infra ), ces dernières relèvent souvent d'initiatives individuelles et de la bonne volonté des différents interlocuteurs . En particulier, elles sont difficiles dans les régions qui connaissent une baisse de leur démographie et où tend à s'installer une situation de concurrence.

Des exemples de coopération entre l'enseignement agricole
et l'éducation nationale au niveau déconcentré

En Bretagne, le lycée Théodore-Monod de Le Rheu (Ille-et-Vilaine) accueille une filière d'enseignement général relevant de l'éducation nationale, dont il est devenu le lycée de secteur. À terme, dix-huit classes relevant de l'éducation nationale devraient être présentes dans cet établissement.

En Nouvelle-Aquitaine, au moins un EPLEFPA périurbain permet de prendre en charge des élèves de seconde générale et technologique qui ne pouvaient pas trouver de place dans les lycées de secteur de l'éducation nationale. Deux EPLEFPA sont dirigés conjointement par un personnel de direction issu de l'éducation nationale, l'autre de l'enseignement agricole.

En Auvergne-Rhône-Alpes, certaines classes de filière S sont partagées en termes de moyens entre l'enseignement technique agricole et l'éducation Nationale.

En Occitanie, un établissement de l'éducation nationale disposant d'un BTS technico-commercial met en place une option « Agroéquipements » avec un recrutement privilégié de diplômés d'un baccalauréat professionnel agricole.

En Île-de-France, un établissement de l'enseignement agricole partage avec l'éducation nationale un cycle de filière scientifique. Les élèves et les enseignants partagent leur emploi du temps entre les deux établissements.

Dans la région Grand-Est, le recteur et le DRAAF ont été signataires d'une convention de coopération couvrant les domaines de l'orientation, de l'offre de formation, de la santé des élèves, de la mutualisation des moyens et des statistiques et enquêtes.

Source : Ministère de l'agriculture et de l'alimentation

Le champ dans lequel ces mutualisations pourraient utilement être menées ou approfondies est vaste. Sont concernés en particulier :

- l'affectation d'enseignants (dans le cas de services partagés), le remplacement et la suppléance de longue durée des enseignants des disciplines générales ;

- la formation initiale des enseignants , notamment par le développement des partenariats entre les ÉSPÉ et l'école nationale supérieure de formation de l'enseignement agricole de l'accréditation (ENSFEA) de Toulouse, désormais accréditée pour délivrer le master « Métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation » (MEEF) ;

- la formation continue des enseignants ; en effet, sur les 6 900 enseignants des lycées publics agricoles de métropole, 47 % seulement suivent au moins un stage de formation continue par an (10 points de moins que dans l'éducation nationale), et encore ce taux est gonflé par la participation des contractuels au dispositif de tutorat obligatoire pour les nouveaux recrutés ; au total, un tiers des enseignants n'a pas suivi de formation continue en trois ans 120 ( * ) ;

- l'accompagnement des élèves en situation de handicap , qui a fait l'objet d'un accord-cadre entre les deux ministères en février 2015 ;

- la complémentarité de l'offre de formation, allant jusqu'à la création d'établissements mixtes , alliant formations de l'éducation nationale et de l'enseignement agricole.

Le ministère indique qu'« une réflexion conjointe » est en cours en vue de l'élaboration d' une convention entre les ministères de l'agriculture et de l'alimentation et de l'éducation nationale prévoyant les modalités d'une coopération renforcée sur les sujets suivants 121 ( * ) : les conditions d' accueil des élèves en situation de handicap , la lutte contre le décrochage scolaire , les diplômes , l'innovation pédagogique , l'intégration de l'offre de formation de l'enseignement agricole dans l'éventail des formations proposées aux collégiens dans le cadre de leur orientation , la compatibilité des systèmes d'information , la dématérialisation de la procédure de demande de bourses de lycée par les familles. Cette convention devrait être signée d'ici la fin de l'année 2017 et déclinée par les services déconcentrés en 2018 .

Votre rapporteur pour avis estime qu'il est possible d'aller plus loin, en particulier dans le domaine des ressources humaines : des passerelles existent puisque l'enseignement agricole compte 292 agents issus de l'éducation nationale , pour leur grande majorité des professeurs agrégés et des professeurs certifiés d'éducation physique et sportive, mais également huit personnels de direction.

Le recrutement des enseignants des disciplines générales qui pourrait être mutualisé et il pourrait être remédié à l'absence de statut corps des chefs d'établissements de l'enseignement agricole par leur rattachement au corps des personnels de direction de l'éducation nationale . Cette solution offrirait à ces personnels aujourd'hui en statut d'emploi de meilleurs débouchés de carrière et des perspectives accrues en termes de mobilité.

*

* *

Compte tenu de l'ensemble de ces observations, votre rapporteur pour avis émet un avis favorable à l'adoption des crédits du programme « Enseignement technique agricole ».

*

* *

Sous réserve de l'adoption de l'amendement qu'elle a adopté, la commission émet un avis favorable à l'adoption des crédits inscrits dans la mission « Enseignement scolaire » du projet de loi de finances pour 2018.

AMENDEMENT

présenté par M. Jean-Claude CARLE, rapporteur pour avis

au nom de la commission de la culture,
de l'éducation et de la communication

_______

Article 29

État B

Modifier ainsi les crédits des programmes :

(en euros)

Programmes

Autorisations d'engagement

Crédits de paiement

+

-

+

-

Enseignement scolaire public du premier degré
Dont Titre 2

Enseignement scolaire public du second degré
Dont Titre 2

40 000 000

40 000 000

Vie de l'élève
Dont Titre 2

Enseignement privé du premier et du second degrés
Dont Titre 2

10 000 000

10 000 000

Soutien de la politique de l'éducation nationale
Dont Titre 2

50 000 000

50 000 000

Enseignement technique agricole
Dont Titre 2

TOTAL

50 000 000

50 000 000

50 000 000

50 000 000

SOLDE

0

0

OBJET

Cet amendement vise à majorer les crédits consacrés au renouvellement des manuels scolaires au collège, afin de respecter l'engagement ministériel de consacrer 300 millions d'euros à ce renouvellement dans le cadre de la réforme des programmes. En application de l'article L. 211-8 du code de l'éducation, il revient en effet à l'État de prendre en charge la fourniture des manuels scolaires au collège. L'absence de financement reviendrait à mettre cette dépense à la charge des établissements, et donc des conseils départementaux ou, dans le privé, des familles.

À cette fin, le présent amendement abonde les actions n° 1 du programme 141 « Enseignement scolaire public du second degré » et n° 9 du programme 139 « Enseignement privé du premier et second degrés », respectivement de 40 et de 10 millions d'euros en AE et en CP hors titre 2.

Ces mesures proviennent du redéploiement de crédits au sein de la mission « Enseignement scolaire », par la minoration de 50 millions d'euros en AE et en CP provenant de l'action n° 8 du programme 214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale », par le décalage des opérations d'investissement du ministère et la réduction des crédits en faveur du programme SIRHEN. Le coût total de ce programme est estimé à près de 500 millions d'euros, soit un dépassement de coût de 520 % par rapport aux projections initiales.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements présentés par le Gouvernement.

Le premier majore les crédits de titre 2 des programmes 141 « Enseignement scolaire public du second degré » et 139 « Enseignement privé du premier et du second degrés » de 2,3 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et en crédits de paiement (CP), afin de financer la création d'emplois de 144 ETP d'enseignants en section de technicien supérieur (STS).

Le second procède à la majoration des dépenses de personnel de la mission de 188 millions d'euros en AE et en CP, résultant de :

- la compensation de la hausse de la contribution sociale généralisée au 1 er janvier 2018, soit une majoration de 300 millions d'euros des crédits de titre 2 de la mission ;

- le décalage d'un an des mesures de revalorisation issues du protocole « Parcours professionnels, carrières et rémunérations » (PPCR), entraînant l'annulation de 109 millions d'euros en AE et CP de titre 2 ;

- diverses mesures d'économie se traduisant par l'annulation de 3,6 millions d'euros en AE et en CP hors titre 2 répartis sur les cinq programmes de la mission.

EXAMEN EN COMMISSION

___________

MERCREDI 22 NOVEMBRE 2017

La commission procède à l'examen des rapports pour avis sur les crédits du programme « enseignement scolaire » et sur les crédits du programme « enseignement technique agricole » de la mission « Enseignement scolaire » du projet de loi de finances pour 2018.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis des crédits de la mission « Enseignement scolaire » . - La qualité d'un budget ne se mesure pas à l'aune du montant de ses crédits. En effet, depuis vingt ans, nous voyons que l'inflation des moyens est sans effet sur la situation de l'école. À rebours de ce qui a été pratiqué lors du précédent quinquennat, les moyens doivent être mis au service de la politique éducative et non l'inverse.

C'est précisément la logique retenue par ce budget, qui prévoit néanmoins une augmentation des crédits de près d'1,5 milliard d'euros pour les cinq programmes relevant du ministère de l'éducation nationale. Il convient de préciser que la moitié environ de cette croissance est le résultat de mesures décidées par le Gouvernement précédent et de l'augmentation « mécanique » des dépenses de personnel sous l'effet du glissement vieillesse-technicité.

Le budget 2018 donne clairement la priorité à l'école primaire et à la maîtrise des fondamentaux. La traduction budgétaire de cette priorité est la forte augmentation des crédits consacrés au primaire et la création de 2 800 postes d'enseignants à la rentrée 2018, essentiellement destinés à mettre en oeuvre le dédoublement des classes de CP et de CE1 en éducation prioritaire.

Ces créations de poste sont compensées par la suppression de 2 600 postes d'enseignant stagiaire dans le second degré - dont le ministère indique qu'ils n'étaient pas pourvus - et de 200 postes de personnels administratifs. Dans sa version initiale, la mission « Enseignement scolaire » présentait ainsi un schéma d'emplois neutre, avant qu'un amendement du Gouvernement devant l'Assemblée nationale ne prévoie la création de 144 postes d'enseignants en sections de technicien supérieur (STS). Il s'agit donc de l'amorce d'un véritable rééquilibrage de la dépense d'éducation en direction du primaire, pour lequel notre pays continue à sous-investir. La baisse des effectifs d'élèves dans le premier degré devrait accentuer ce rattrapage.

Le ministre s'est fixé pour objectif « 100 % de réussite en CP » et de « garantir à chaque élève l'acquisition des savoirs fondamentaux - lire, écrire, compter, respecter autrui ». Je ne peux que me réjouir de la volonté du Gouvernement d'attaquer ainsi la difficulté scolaire à la racine : on sait en effet que tout se joue dès les premières années d'école.

Réduire à douze l'effectif des classes de CP et de CE1 en éducation prioritaire est la mesure principale de cette politique. Elle présente un coût substantiel, estimé à 11 000 postes à l'horizon 2020 ; le budget 2018 y alloue 154 millions d'euros. À la rentrée 2017, 2 500 postes ont été consacrés au dédoublement des classes de CP en REP+ ; 2018 verra le dédoublement des CP en REP et le début de cette mesure pour les CE1 de REP+. Pour accompagner les collectivités territoriales dans l'adaptation du bâti scolaire, le Gouvernement prévoit qu'une part des 615 millions d'euros de la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) créée à l'article 59 du PLF y sera consacrée.

La priorité effective au primaire se traduit également par la relance des « stages de réussite » proposés pendant les vacances scolaires aux élèves de CM2 en vue de l'entrée au collège, le rétablissement des évaluations diagnostiques en CP et à l'entrée en 6e, qui donneront aux équipes éducatives et aux services déconcentrés une meilleure connaissance des acquis des élèves, et la poursuite des efforts en vue de la scolarisation des enfants de moins de trois ans en éducation prioritaire.

L'effort sur les fondamentaux ne se limite pas au primaire. Deux mesures concernent le collège : d'une part, les aménagements apportés à la réforme du collège ; de l'autre, le dispositif « devoirs faits » qui vise à offrir aux collégiens volontaires un accompagnement après la classe pour leur permettre de faire leurs devoirs dans l'établissement. Le coût total de ce dispositif pour 2018 est estimé à 220 millions d'euros ; le ministre a d'ailleurs annoncé qu'il réfléchissait à l'étendre à l'école primaire, ce dont je me félicite.

Parmi les autres points saillants de ce budget, les aides du fonds de soutien aux activités périscolaires sont maintenues en faveur des communes ayant conservé une semaine comptant cinq matinées d'enseignement à l'école primaire ; le montant budgété pour 2018 baisse de 140 millions d'euros, à due concurrence de la proportion de communes étant revenues à une semaine de quatre jours.

Les crédits consacrés à l'accompagnement des élèves en situation de handicap connaissent une augmentation considérable de 360 millions d'euros, soit une hausse de 46 %, qui permet de financer le recrutement d'accompagnants et la poursuite de leur professionnalisation.

En revanche, les crédits en faveur du renouvellement des manuels scolaires au collège s'élèvent à 16 millions d'euros, contre 110 en 2017. Dans le cadre de la réforme des programmes, le Gouvernement s'était engagé à hauteur de 300 millions d'euros ; seuls 235 millions ont été budgétés en 2016 et 2017. Il manque donc une partie de la somme qui, si elle n'est prise en charge par l'État, le sera par les collèges sur leur budget de fonctionnement et donc, indirectement, par les conseils départementaux ; c'est pourquoi je vous proposerai un amendement visant à y allouer 50 millions d'euros supplémentaires, afin que l'État respecte ses engagements.

Je salue la priorité donnée par le ministère à la formation continue des enseignants, du premier comme du second degré ; l'objectif est que chacun bénéficie de trois jours de formation continue dans l'année scolaire 2017-2018. En particulier, sont érigés en priorité l'accompagnement des « CP à 12 », car il ne suffit pas de dédoubler les classes, il faut former à des pédagogies adaptées et différenciées, ainsi qu'un grand plan de formation en mathématiques et en sciences est destiné aux professeurs des écoles.

Une réserve toutefois : l'absence d'une stratégie pluriannuelle. En effet, si la loi de programmation des finances publiques que nous avons votée prévoit une augmentation des crédits de la mission de 800 millions d'euros en 2019 et de 600 millions en 2020, aucune ventilation par programme et en termes de créations de postes n'est communiquée. Or le système éducatif a besoin de stabilité et de prévisibilité.

Enfin, la médecine scolaire, malgré le demi-milliard d'euros dépensé, demeure le parent pauvre de l'éducation nationale et les résultats ne sont pas à la hauteur : moins de la moitié des élèves en REP bénéficient d'une visite médicale dans leur sixième année. Une réflexion d'ensemble s'impose ; un transfert de compétence aux départements pourrait être envisagé.

J'en viens désormais à la question du remplacement, sur lequel j'ai souhaité concentrer mes réflexions.

Le remplacement des enseignants absents est un sujet de première importance. Remplacer les enseignants absents ne répond pas seulement à l'exigence de continuité du service public, il s'agit d'un enjeu de confiance et d'un impératif de justice envers les élèves et leurs familles. La carence de l'État en la matière alimente la défiance et le sentiment d'injustice des usagers, d'autant que c'est dans les territoires les plus fragiles que les difficultés sont les plus prononcées, en particulier en zone rurale isolée ou en éducation prioritaire. Enfin, comme une décision récente de justice l'a rappelé, elle constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'État. Un remplacement efficace constitue une condition sine qua non pour l'avènement de l'« école de la confiance » voulue par le ministre et que nous appelons tous de nos voeux.

Le remplacement est également un sujet budgétaire, tant il mobilise des moyens importants : 3,5 milliards d'euros, soit 5 % des crédits du programme, et 50 000 emplois lui sont consacrés.

Cela procède en grande partie de la conception très exigeante du dispositif de remplacement : comme le rappelle la Cour des comptes « il vise au maintien de la continuité et de la qualité du service public d'enseignement en remplaçant un enseignant absent par un autre enseignant de la même discipline et bénéficiant du même statut » - et donc des mêmes contraintes de gestion.

Le remplacement s'organise de manière différente dans le premier et le second degré. Dans le premier, du fait de l'adéquation « un enseignant, une classe », le remplacement est assuré, dès la première demi-journée d'absence, par des remplaçants mis en réserve à cet effet et gérés au niveau du département. En revanche, dans le second degré, le remplacement est assuré de manière différente selon la durée de l'absence. S'il s'agit d'une absence supérieure ou égale à quinze jours, des titulaires sur zone de remplacement, les TZR, sont mobilisés ; ils sont rattachés à des établissements mais susceptibles d'intervenir sur une zone définie et relèvent du rectorat. Pour les absences de moindre durée, c'est à l'échelle de l'établissement que s'organise le remplacement. En théorie, il est établi dans chaque établissement un protocole pour les remplacements de courte durée « qui en fixe les objectifs et les priorités ainsi que les principes et les modalités pratiques d'organisation » ; c'est au chef d'établissement de trouver des remplaçants parmi les enseignants - en dernier recours, il peut même en désigner un d'autorité.

Or, malgré les moyens considérables qui y sont dédiés, et qui ne sont pas connus avec certitude, les chiffres du ministère n'étant ni complets ni cohérents, le remplacement demeure inefficient et, pour les absences de courte durée dans le second degré, scandaleusement insuffisant, au point que la Cour des comptes le qualifie de « défaillance institutionnelle ».

En premier lieu, le recensement des absences et de leurs causes, s'il est relativement efficace dans le premier degré, est parcellaire dans le second. Contrairement aux idées reçues, les enseignants ne sont pas plus absents que les autres fonctionnaires ou que les salariés du privé, en particulier si l'on considère qu'il s'agit d'une population jeune et féminisée, où les congés maternités sont nombreux, et que le contact avec les enfants n'est pas sans risque, surtout l'hiver.

Deux faits marquants doivent être soulignés : en premier lieu, les absences courtes tendent à augmenter depuis 2012, en grande partie du fait de la suppression de la journée de carence. Son rétablissement dans le PLF 2018 devrait permettre d'y remédier. Enfin, les absences imputables à l'institution sont nombreuses : elles expliquent plus de 6 % du besoin de remplacement dans le premier degré, soit un tiers du volume des absences non remplacées, et 20 à 40 % du besoin de remplacement de courte durée dans le secondaire. Leur réduction doit être un enjeu majeur.

S'agissant des indicateurs de performance, le ministère se flatte de taux d'efficacité, qui mesure le nombre d'heures, parmi celles à remplacer, qui le sont effectivement, et de taux de rendement, qui mesure l'utilisation du potentiel de remplacement, élevés dans le premier comme dans le second degré.

Dans le premier degré, 82,7 % des absences ont été remplacées au cours de l'année scolaire 2016-2017 ; le taux de rendement s'élève à 72 %. Ces taux varient fortement selon les académies, certaines connaissant des taux beaucoup plus faibles. Cela signifie tout de même que près d'une absence sur cinq n'est pas remplacée, ce qui n'est pas négligeable.

Dans le second, le ministère affiche un taux de remplacement supérieur à 97 %, relativement uniforme selon les académies. Mais ce taux ne prend en compte que les absences de longue durée ; aucun indicateur n'existe pour celles de courte durée. Si le ministère évalue à un tiers le taux de remplacement de ces absences, la Cour des comptes parvient à une estimation beaucoup plus faible, entre 5 et 20 % ; elle est corroborée par les données académiques portées à ma connaissance. En cause, la réticence des enseignants et l'inapplication des protocoles institués par le décret « Robien » de 2005, du fait de l'opposition des syndicats ; lorsqu'ils existent, ces protocoles n'ont souvent qu'une existence formelle.

Cette situation pourrait encore s'aggraver à court-terme, du fait de la forte tension sur les viviers enseignants des académies. Pendant les cinq dernières années, le ministère a eu beau créer des postes à tout-va, une part importante de ceux-ci n'ont pas été pourvus, en particulier dans les académies les moins attractives. Par exemple, l'académie de Versailles a aujourd'hui moins d'enseignants titulaires qu'en 2012 ! En cause : le faible rendement des concours, la déperdition d'enseignants et l'inadaptation du réseau des établissements à l'évolution démographique. Ainsi, dès la rentrée, une part importante des remplaçants sont affectés sur des postes à l'année.

Cette situation impose un recours accru aux contractuels. L'inspection générale décrit ainsi un « changement structurel d'ampleur » en la matière, car le recrutement « s'amplifie et s'installe dans la durée à tous les niveaux d'enseignement », y compris dans le primaire. Cela a entraîné une professionnalisation du recrutement et de l'accompagnement de ces personnels dans les académies les plus concernées. Le ministère s'en est inspiré pour édicter un nouveau cadre d'emploi à l'été 2016. Pour faire face à la pénurie, le vivier des contractuels pourrait être encore élargi en levant certains obstacles réglementaires ou statutaires : ainsi, il est impossible de recourir à des enseignants retraités qui ne possèdent pas de licence ou de master ou bien à des enseignants en disponibilité ; il est très complexe d'avoir recours aux assistants d'éducation, car ils ne peuvent effectuer d'heures supplémentaires. Il y a là, mes chers collègues, des barrières à lever !

Un mot sur la situation particulière de l'enseignement privé sous contrat. Le remplacement de courte durée n'y constitue pas un problème, celui-ci étant pris en charge au sein des équipes éducatives. En revanche, les établissements privés peinent à recruter des contractuels pour les suppléances de longue durée, la situation devenant même critique dans certains territoires. Si le décret d'août 2016 procède à une revalorisation des contractuels de l'enseignement public, les maîtres délégués de l'enseignement privé demeurent rémunérés sur des grilles indiciaires nettement moins favorables. Cet écart est sensiblement accru par la faculté reconnue aux recteurs de majorer la rémunération des contractuels dans les zones et les disciplines déficitaires. L'écart peut atteindre 500 ou 600 euros par mois, ce qui est considérable pour des personnes gagnant parfois moins de 1200 euros nets. Il s'agit véritablement d'une situation de concurrence déloyale, contraire à l'esprit et à la lettre de la loi Debré. Le ministre a assuré être conscient du problème et dit examiner les solutions possibles : l'alignement des rémunérations me semble un impératif d'équité et de justice envers les élèves.

Le ministère n'est pas resté inactif face au défi du remplacement. Seulement, les mesures prises ne sont pas à la hauteur du problème et le remplacement s'inscrit toujours dans ce qu'un recteur décrivait comme un système « corseté et intenable ».

Au mois de mars dernier, le ministère a édicté une circulaire à ce sujet. Cette dernière vise à réduire les absences institutionnelles en organisant les jurys et autres tâches de préférence le mercredi après-midi et en permettant, sur une base volontaire et rémunérée, l'organisation de la formation continue sur les vacances scolaires. Dans le premier degré, elle abolit la segmentation du potentiel de remplacement en fonction du lieu de la suppléance et de la nature de l'absence à remplacer - un vivier unique est constitué dans chaque département. Dans le second degré, la circulaire réactive les protocoles « Robien », atténue la distinction entre remplacement de courte et de longue durée, en permettant le recours à un titulaire sur zone de remplacement (TZR) pour des absences inférieures à quinze jours et érige au rang de priorité la lutte contre les absences perlées, à savoir des absences courtes et récurrentes, par nature difficiles à remplacer. Plus ou moins appliquées, ces dispositions sont louables mais pas de nature à améliorer durablement la situation. Pour ce faire, une réflexion plus globale sur le métier d'enseignant et les organisations réglementaires de service s'impose.

Une première conclusion : le remplacement n'est pas un problème de moyens. Imagine-t-on dépenser davantage que 3,5 milliards d'euros ? Une augmentation marginale serait sans effet sur la situation. A cadre réglementaire inchangé, il faudrait plusieurs milliards supplémentaires pour assurer le remplacement de toutes les absences. Au contraire, le remplacement révèle l'ampleur des rigidités de gestion du système éducatif et à quel point il peine à s'en affranchir. L'intérêt des élèves est perdu de vue et le décret du 20 août 2014 constitue à cet égard un rendez-vous manqué.

Le caractère hebdomadaire des obligations de service des enseignants constitue une contrainte importante dans l'élaboration des emplois du temps ; elle rend l'échange de services impossible et prévient toute modulation du temps de travail en fonction des besoins. Une part importante du potentiel de remplacement est ainsi perdue du fait de quotités de service trop faibles.

Je recommande en conséquence l'annualisation des obligations règlementaires de service des enseignants, prônée depuis plusieurs années par la Cour des comptes. Ces obligations devraient également intégrer les missions de remplacement des collègues absents et de formation continue. L'annualisation revêt de nombreux avantages : elle donnerait une souplesse aux établissements dans l'organisation du remplacement, la définition des emplois du temps et le soutien aux élèves en difficulté. Il en va de même pour la bivalence dans le second degré, c'est-à-dire de la capacité des professeurs à enseigner deux disciplines : celle-ci doit être encouragée ; elle permettrait également de faciliter le remplacement et de réduire les situations de sous-service ou de service partagé sur plusieurs établissements.

En conséquence, je formule huit recommandations :

- mieux informer la représentation nationale sur le coût et l'efficacité du remplacement, en indiquant le nombre d'heures non remplacées dans chaque programme et rendant compte fidèlement des moyens dédiés au remplacement, mesurés en euros et en emplois ;

- mieux recenser les absences dans le second degré et leurs causes ;

- agir pour réduire les absences institutionnelles, en organisant les stages de formation continue et les autres tâches institutionnelles en dehors du temps d'enseignement ;

- améliorer les conditions d'accueil, d'accompagnement et de formation des enseignants contractuels ;

- engager une démarche de réduction des obstacles statutaires et réglementaires au recrutement de remplaçants ;

- aligner la rémunération des maîtres délégués de l'enseignement privé sur celle des personnels contractuels de l'enseignement public ;

- définir, de manière explicite, un nombre annuel d'heures dû aux élèves dans chaque discipline pour préparer le diplôme devant sanctionner leur cycle d'études ;

- faire concorder les obligations réglementaires de service avec la réalité du métier d'enseignant et les besoins du système éducatif.

Au bénéfice de ces observations, je vous propose de donner un avis favorable, sous réserve de l'adoption de l'amendement que je vous présente, à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire ».

M. Antoine Karam, rapporteur pour avis des crédits du programme 143 « Enseignement technique agricole » . - Voici la première année que je vous présente le budget de l'enseignement agricole. J'en profite pour rendre un hommage respectueux à notre collègue Françoise Férat, inlassable défenseur de l'enseignement agricole, qui a eu la charge de rapporter ce budget pendant seize ans. S'il s'agit de la première fois que je m'intéresse à son budget, j'ai appris, pendant mes dix-huit années à la tête de la région Guyane, à connaître et à estimer l'enseignement agricole, composante encore trop méconnue du système éducatif.

J'en viens au budget à proprement parler : il est prévu pour l'année 2018 une augmentation de 2,5 % des crédits, comparable à celle observée pour le ministère de l'éducation nationale. Cette parité procède de la priorité accordée par le Gouvernement à l'éducation et à la formation professionnelle.

Du point de vue des effectifs, ce budget marque une consolidation après cinq années de créations de postes : aucune création d'emploi n'est prévue en 2018. Le plafond d'emplois n'augmente qu'à la mesure de l'extension en année pleine des créations d'emplois de la rentrée 2017.

Alors que la situation budgétaire impose des choix difficiles, la comparaison avec l'éducation nationale révèle une situation relativement favorable.

En effet, comme vous l'a présenté Jean-Claude Carle, le Gouvernement a fait le choix d'une priorité forte au premier degré. Elle est compensée par la stabilité des crédits dans le second degré et des suppressions d'emplois, auxquelles échappe pourtant l'enseignement agricole. Il convient également de préciser que les effectifs d'élèves de l'enseignement agricole connaissent une tendance à la baisse et que les effectifs par classe y sont singulièrement plus faibles ; autant d'arguments mobilisés par Bercy en faveur d'une diminution des crédits, qui n'ont - et je m'en réjouis - pas été entendus.

Au total, les crédits du programme 143 augmentent de 35 millions d'euros. En l'absence de créations de postes, l'augmentation de 21 millions d'euros des dépenses de personnel provient essentiellement du glissement vieillesse-technicité, c'est-à-dire de l'augmentation naturelle des dépenses compte tenu de l'avancement des agents et de l'extension en année pleine des créations de postes passées. Le report d'un an de l'application des mesures indemnitaires dans le cadre de l'accord PPCR devrait se traduire par une moindre dépense, probablement inversée par la compensation de la hausse de la CSG.

Les crédits qui ne relèvent pas des dépenses de personnel augmentent de 14 millions d'euros, soit une hausse de 2,8 %.

Cette croissance permet de financer l'amélioration de la situation financière des établissements publics. Quatre millions d'euros majorent les dotations en faveur des assistants d'éducation, permettant de rattraper le niveau de financement de l'éducation nationale, quand un autre million vient aider les établissements à assumer les charges de pensions pour les emplois gagés des centres de formation d'apprentis (CFA) et des centres de formation professionnelle et de promotion agricole (CFPPA). De plus, les fonds consacrés aux aides sociales et à l'accompagnement des élèves en situation de handicap augmentent de plus de cinq millions d'euros ; ils financent la revalorisation des bourses, la création de l'aide à la recherche du premier emploi en direction des jeunes diplômés et la professionnalisation de l'accompagnement des élèves en situation de handicap. Enfin, deux millions d'euros sont prévus en faveur de la modernisation des systèmes d'information.

J'en viens aux relations avec les établissements privés, qui accueillent plus de 60 % des élèves de l'enseignement agricole. On y distingue l'enseignement privé du temps plein - analogue à l'enseignement sous contrat « classique » - et celui du rythme approprié, dispensé par les maisons familiales rurales (MFR) qui proposent une pédagogie originale centrée sur l'alternance.

Ces établissements sont financés par des subventions de l'État versées en application et selon les modalités déterminées par la « loi Rocard » du 31 décembre 1984. Le principe retenu est celui de la parité de financement entre le public et le privé du temps plein, le privé du rythme approprié étant financé selon un calcul spécifique. Or, dans un contexte de restriction budgétaire, l'État a cherché à déroger aux dispositions de la « loi Rocard ». À la suite d'un imbroglio budgétaro-judiciaire en 2002, des accords ont été conclus avec l'enseignement privé afin d'encadrer le montant des subventions versées : les protocoles en date ont été conclus en 2013 puis reconduits pour un an en 2016. Ils expireront donc au 31 décembre de cette année.

De nouveaux protocoles doivent être conclus d'ici là ; au moins pour le privé du temps plein, les négociations semblent être au point mort. Les fédérations exigent, à défaut de l'application de la « loi Rocard » qui semble hors de portée, une revalorisation substantielle que le ministère ne semble pas prêt à accepter. En attendant le règlement de cette question, le PLF 2018 maintient les crédits au même niveau qu'en 2017. Je formule le voeu que ces négociations aboutissent : l'enseignement privé est une composante essentielle de l'enseignement agricole et mérite un traitement équitable. De plus, le plafonnement des subventions pousse au statu quo voire au déclin des effectifs d'élèves. Il tend à entraver son développement alors que certains territoires, en particulier Mayotte et la Guyane, ont besoin de l'enseignement agricole.

Mes chers collègues, que l'enseignement agricole soit une filière de réussite et d'excellence, voilà une réalité trop méconnue, y compris dans l'éducation nationale.

Je ne m'étendrai pas sur les résultats enviables de l'enseignement agricole en matière d'insertion professionnelle. Sept mois après la sortie de formation, l'écart en matière de taux d'insertion par rapport aux titulaires d'un diplôme équivalent de l'éducation nationale s'établit à 12,7 points en faveur des titulaires d'un BTS agricole, et respectivement à 18,1 et à 5,2 pour les titulaires d'un baccalauréat professionnel et d'un CAP agricoles. Les poursuites d'études dans l'enseignement supérieur sont nombreuses et en augmentation.

Cela est d'autant plus remarquable que la part de boursiers est supérieure à celle observée dans l'éducation nationale et que les élèves issus de catégories sociales moins favorisées y sont plus nombreux ; contrairement aux idées reçues, seuls 13 % des élèves sont issus d'une famille d'agriculteurs exploitants.

Pourtant, la baisse des effectifs observée depuis 2008 se poursuit : à la rentrée 2017, les effectifs diminuent de 1,7 %. La décroissance est observée dans l'ensemble des niveaux d'enseignement, elle est particulièrement marquée au collège et en BTS et CPGE. Les effectifs s'élèvent, toutes familles confondues à moins de 162 000 élèves, soit une baisse de 5 % en dix ans. Ce phénomène est d'autant plus étonnant qu'il va à rebours des évolutions démographiques : l'éducation nationale constate en effet une hausse des effectifs en lycée général et technologique et dans l'enseignement supérieur court. Une partie non négligeable de ce phénomène peut être attribuée à la dévalorisation de l'enseignement agricole dans les représentations ainsi qu'à la réticence de l'éducation nationale à y orienter.

Que faire ? Si le ministère n'est pas inactif dans la promotion de l'enseignement agricole, ses actions sont trop dirigées vers le monde agricole : pour se rendre sur leurs sites Internet, encore faut-il savoir qu'ils existent ; tout le monde ne se rend pas non plus au salon de l'agriculture ou à celui du machinisme agricole.

Il me semble nécessaire de lancer une grande campagne de promotion, associant l'éducation nationale, visant à mettre en avant les réussites de l'enseignement agricole et la diversité des formations et des métiers auxquels il prépare. D'autres modalités pourraient être envisagées : je propose par exemple l'organisation de stages de découverte, qui pourraient être proposés pendant les vacances scolaires à des jeunes de collège dans des établissements de l'enseignement agricole. Cela permettrait de faire découvrir leurs spécificités, comme l'internat ou les exploitations, et les formations proposées.

Le développement de l'enseignement agricole est un enjeu majeur. Comme je vous le disais, il y a un réel besoin dans certains territoires. Alors que le Gouvernement réfléchit à la réforme de la formation professionnelle ou que la résorption de la difficulté scolaire est érigée en priorité, nous avons besoin de l'exemple de l'enseignement agricole, qui est riche en enseignements.

Enfin, j'appelle de mes voeux un renforcement de la coopération avec l'éducation nationale et des mutualisations : il faut s'extraire des clivages qui sont d'un autre âge et qui mènent à une vraie perte d'efficacité. Il s'agit surtout d'améliorer l'efficience et la qualité du service rendu aux élèves. Derrière la bonne volonté des discours officiels, la coopération est en réalité très diverse et très dépendante de la bonne volonté des interlocuteurs au niveau local. Elle pourrait être utilement approfondie en matière de formation initiale et continue des enseignants, d'affectation de ses derniers, de remplacement, d'accompagnement des élèves en situation de handicap et d'élaboration de la carte des formations. Une réflexion est en cours pour élaborer une convention entre les deux ministères, en vue d'une coopération renforcée sur un grand nombre de sujets. Cette convention devrait être signée d'ici la fin de l'année 2017 et déclinée par les services déconcentrés en 2018. Espérons qu'elle se traduise par des actions concrètes, qui bénéficieront en premier lieu aux élèves.

Compte tenu de l'ensemble de ces observations, je vous propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits affectés à l'enseignement agricole au sein de la mission « Enseignement scolaire ».

M. Jacques-Bernard Magner . - Je tiens à féliciter et à remercier les deux rapporteurs de leur communication claire sur ces budgets soumis à notre vote. Notre collègue Antoine Karam nous a indiqué qu'aucun poste n'était créé dans l'enseignement agricole cette année. Lors des cinq dernières années, celui-ci a bénéficié d'un traitement très favorable, notamment en termes de postes. Il y a là un coup d'arrêt à l'amélioration de l'enseignement agricole.

Pour ce qui concerne l'enseignement scolaire, nous déplorons l'arrêt des recrutements. Une hausse de 3 milliards d'euros était inscrite au projet de loi de finances pour 2017. Cette année, l'augmentation n'est que de 1,3 milliard d'euros, conséquence des choix réalisés lors de la législature précédente. Nous observons également, tout en le déplorant que le nombre de postes mis au concours baisse pour la première fois depuis 2012. Cet effort de recrutement réalisé depuis la loi de refondation semblait avoir entraîné un regain d'intérêt développé chez les étudiants pour les métiers de l'éducation.

Nous avons donc un regret sérieux sur ce budget, en particulier sur la réduction des emplois dans le second degré. Nous demandons toujours plus aux enseignants, aussi bien dans le cadre de la réforme du baccalauréat que dans celle de l'orientation des futurs étudiants. Il est d'ailleurs précisé, dans le rapport rédigé par Guy Dominique Kennel sur l'orientation au nom de la mission d'information de notre commission, la nécessité qu'il y ait dans le cursus une orientation vers l'entrée en université. Cette conclusion est reprise par le gouvernement.

L'arrêt des créations de postes suscitent un certain nombre de craintes.

Le coût d'arrêt au dispositif « plus de maîtres, plus de classes » fait apparaître un transfert de moyens depuis ce dispositif, qui donne pourtant satisfaction, vers le dédoublement des classes de CP et de CE1 en éducation prioritaire. Cela va de pair avec l'assèchement du potentiel de remplacement que Jean-Claude Carle a décrit.

À la différence des rapporteurs favorables à ces budgets, nous sommes déçus de constater que c'est un budget habile mais fait d'expédients. Des astuces budgétaires apparaissent, qui ne pourront s'appliquer qu'une seule fois. Nous nous dirigerons ensuite vers une diminution du nombre d'emplois et de ce fait, des ambitions de l'éducation nationale.

Le groupe socialiste et républicain s'abstiendra.

M. Pierre Ouzoulias . - Dans le cadre des auditions sur ce rapport, j'ai été très surpris des discours des fonctionnaires que nous avons reçus. Je citerai celui d'un recteur qui nous a indiqué ne pas avoir les moyens de réaliser la rentrée scolaire, du fait d'un déficit structurel en postes et en candidatures à ces postes, y compris avec tous les expédients présentés par notre rapporteur. C'est un point récurrent sur lequel le ministère de l'éducation nationale semble être sans prise. Ceci essentiellement du fait que les jeunes préfèrent, d'année en année, se diriger vers d'autres carrières que celle de l'enseignement, le métier d'enseignant ayant été dévalorisé, non pas seulement financièrement mais aussi moralement. C'est un drame et je ne pense pas que c'est en précarisant de nouveau ce métier que nous obtiendrons des solutions.

Aujourd'hui, tout le système est tiré vers le bas. Il nous faut donner un signal politique très fort sur la mandature pour essayer de résorber le décalage que la France est en train d'enregistrer par rapport aux autres pays européens dans le domaine de la connaissance et de la transmission des savoirs. Il n'y a rien de tout cela dans les mesures annoncées. Je note également les importantes difficultés qui apparaissent dans le recrutement.

Concernant l'enseignement agricole, lors de son discours en séance publique, le ministre de l'écologie a précisé que le métier d'agriculteur devait changer, en particulier du fait du réchauffement climatique. Ces changements doivent être préparés en amont, à l'école. Or, ce budget présente une diminution de l'enseignement agricole. Dans le cadre des auditions sur ce budget, nous avons reçu le responsable d'un lycée agricole qui souhaitait mettre en place des filières novatrices sur les circuits courts, notamment sur le bio. Bien que pouvant être aidé par les régions, il n'a pu créer ces filières, pour lesquelles les élèves existaient, n'ayant pas de poste affecté. Il y a là un gisement d'emplois considérables. La modification de notre système agricole permettrait de renforcer l'enseignement agricole en accueillant de nouveaux élèves, lesquels, comme l'a précisé Antoine Karam, réussissent mieux dans ce type d'enseignement.

Enfin, les personnels de direction de l'enseignement agricole nous ont fait part de leur réel souci quant à l'absence de statut de corps, qui restreint leurs possibilités de mobilité et d'évolution de carrière.

Nous émettrons un avis défavorable à l'adoption des crédits de ces deux budgets. Nous pensons qu'ils ne sont pas à la hauteur des enjeux que notre pays affrontera demain.

Mme Françoise Laborde . - Je remercie nos deux collègues pour leurs rapports riches et intéressants. S'agissant tout d'abord de l'annualisation du temps de travail des enseignants, thème cher à Jean-Claude Carle, je crois que nous ne pourrons avancer que s'il y a revalorisation. Il n'est pas possible de demander toujours plus à des enseignants sans leur donner plus. Pour ce qui est des remplacements, il est exact qu'il y a un abaissement du niveau qualitatif, on ne s'improvise pas enseignant.

Nous apprécions tout particulièrement le recentrage sur l'école primaire. Il est vrai que lors du quinquennat précédent, les créations de postes concernaient l'ensemble des programmes. Cette année, les budgets n'étant pas extensibles, les choix ont vraisemblablement été différents.

Pour ce qui est de l'enseignement agricole, nous comprenons que l'enseignement privé est incontournable, même si je regrette qu'il n'en soit de même pour l'enseignement public. L'idée d'une action de promotion associant le ministère de l'éducation nationale et le ministère de l'agriculture nous paraît très intéressante, car il y a trop souvent concurrence et non pas accompagnement. Enfin, nous pouvons reconnaitre une grande qualité à l'enseignement agricole, lié à son fonctionnement différent.

Sur ces crédits, nous nous abstiendrons dans l'attente d'examiner l'ensemble des fascicules budgétaires au sein de notre groupe.

Mme Annick Billon . - Je remercie nos rapporteurs de l'exposé très clair de leurs budgets. Pour ce qui est de l'enseignement scolaire, nous notons également une rupture et nous suivrons donc son avis favorable. Deux chiffres m'ont plus particulièrement marquée dans ce rapport. 20 % d'élèves quittent le primaire sans avoir une parfaite connaissance de l'écriture ou de la lecture. Par ailleurs, le coût moyen d'un lycéen français est de 38 % supérieur au coût moyen d'un lycéen dans un pays de l'OCDE. Il nous paraît indispensable de mettre en oeuvre des outils pour faire disparaître cette différence.

Ce budget prend en compte le nécessaire rééquilibrage entre primaire et secondaire. Pour ce qui est du quantitatif, la création de 2 800 postes sur le programme 140 est bienvenu. La baisse du nombre d'élèves prévue dans les années qui viennent devrait permettre un rééquilibrage normal. Nous nous félicitons des nouveaux moyens mis en oeuvre pour les élèves les plus fragiles et les plus en difficulté, avec le dédoublement des classes. Pour ce qui est du second degré, nous n'avons pas de remarques, la réforme devant être présentée ultérieurement. Enfin, Le groupe UC soutient l'amendement déposé par notre rapporteur.

En conséquence, et contrairement aux années précédentes, le groupe UC donnera un avis favorable. Ce n'est pas un blanc-seing, mais la satisfaction de voir les priorités présentées.

Nous émettrons également un avis favorable à l'adoption des crédits de l'enseignement agricole. Le rapport très approfondi de notre collègue Antoine Karam propose de vraies pistes. Le budget pourrait donner encore davantage de moyens à l'enseignement agricole. Le Gouvernement s'est donné des priorités et nous les respectons. Les MFR et autres organismes territoriaux, réalisent un travail d'accompagnement des élèves considérable et très personnalisé. Ainsi les MFR en Vendée fonctionnent particulièrement bien.

Enfin, le pourcentage des étudiants dans l'enseignement agricole, dont la famille est issue du milieu agricole, s'élève à 13 %. Un rapport rédigé dans le cadre de la délégation des droits aux femmes sur les femmes agricultrices relevait qu'un certain nombre de celles-ci, comme d'hommes, s'orientaient dans ces professions agricoles sans être issus du monde agricole. Il est nécessaire que toute la filière d'enseignement, à la fois au niveau du collège et du lycée, soit informée des voies qui leur sont proposées.

M. André Gattolin . - Je salue la qualité du travail de nos rapporteurs. Je souhaiterais souligner quelques points qui montrent la volonté de vision d'ensemble dans ces réformes. Ainsi le développement de l'investissement réalisé dans l'enseignement en faveur des enfants en situation de handicap : +46 %, soit 346 millions d'euros. Ces chiffres sont essentiels au vu de la pénurie qui a longtemps régné en la matière. Des écoles primaires ont refusé, par manque de place, des enfants en situation de handicap. Des solutions alternatives, pas toujours satisfaisantes, ont dû être trouvées.

Je voudrais également revenir sur un aspect de l'intervention de mon collègue Jean-Bernard Magner, qui estime qu'en l'absence de créations massives de postes, les budgets ne progressent pas. Je rappelle que les deux budgets dégagent environ 2,5 % de moyens supplémentaires. Ce n'est donc pas une stagnation. Par ailleurs, j'ai trouvé intéressantes les huit recommandations sur les remplacements proposées par Jean-Claude Carle. J'en ajouterai une neuvième, qui serait une réelle évolution qualitative du remplacement. Il serait intéressant de connaître l'impact d'un remplacement de longue durée sur les résultats scolaires des classes concernées. Le bon remplacement n'est pas réalisé par du personnel ayant des diplômes et ayant déjà enseigné. L'on apprend en enseignant. Certaines personnes ayant une expérience de la relation avec les enfants sont parfois tout aussi qualifiées que du personnel disposant de diplômes.

Notre avis sera donc favorable.

Je ne conteste pas le bienfondé de l'amendement de Jean-Claude Carle. Mais j'aimerais obtenir des précisions quant à l'origine des 50 millions d'euros qu'il entend consacrer au financement de l'acquisition des manuels scolaires.

Mme Colette Mélot . - Nous ne pouvons que nous réjouir des mesures prises : la priorité donnée à l'enseignement primaire, les décisions importantes concernant les élèves en difficulté et plus particulièrement les populations fragiles de REP et REP+. Il serait souhaitable de poursuivre cet effort au niveau des écoles maternelles. J'ai longtemps été défavorable à la scolarisation des enfants de deux ans. Mais, au vu de la population que nous devons accueillir, surtout en REP où beaucoup d'enfants ne parlent pas français chez eux, il apparaît important de les scolariser dès cet âge.

En outre, j'approuve pleinement les propos de notre rapporteur sur les difficultés qui persistent, en matière de remplacement.

Pour ce qui est de l'enseignement agricole, beaucoup de points ont été soulevés : les conditions d'accueil des élèves dégradées, des refus d'intégration d'élèves, des financements non assurés pour certaines options. Un manque d'anticipation apparaît avec l'arrivée de la nouvelle génération née après les années 2000. Enfin, une amélioration sur l'orientation s'impose. Je remercie le rapporteur d'en avoir analysé toutes les causes et les conséquences.

Au nom de mon groupe, je donnerai donc un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission et nous voterons l'amendement car nous nous devons d'être favorables à l'acquisition des manuels scolaires.

M. Jean-Pierre Leleux . - Ce budget marque une inflexion sérieuse par rapport à ce que nous avons connu par le passé. Je souhaite féliciter notre rapporteur Jean-Claude Carle pour ce rapport et préciser que notre groupe soutiendra sa proposition de donner un avis favorable à l'adoption des crédits. Pour ce qui est de l'enseignement agricole, il ne correspond pas totalement, comme le précédent, à ce que nous attendions. Mais des signes très positifs sont proposés pour les années à venir. Nous donnerons donc également un avis favorable à ce rapport.

Mme Maryvonne Blondin . - Un récent rapport de l'Académie de médecine affirme que la médecine scolaire est sinistrée. Cela rejoint les déclarations du Défenseur des droits.

Lors de l'audition du ministre que nous avons interrogé sur ce sujet, il a rappelé les priorités de son action sur le parcours de la santé. Des améliorations ont été apportées, en coopération avec les services de protection maternelle et infantile (PMI) et avec la médecine du travail. Mais ces deux secteurs sont également en pénurie.

Lors du quinquennat précédent, les missions des médecins scolaires ont été clarifiées et leurs rémunérations revalorisées ; cela n'était malheureusement pas suffisant.

L'école reflète ce qui se passe dans le monde du travail. Il est nécessaire que nous prenions conscience que le harcèlement, actuellement présent dans notre société, existe également dans l'école ainsi que chez les tout petits. Un nouveau corps vient d'être mis en place fin 2016, celui des psychologues de l'éducation nationale. Le climat qui règne dans nos écoles contribue à cet état de fait. L'ABCD de l'égalité, qui a été si contesté, visait à y remédier, accompagné d'un plan d'action pour l'éducation à l'égalité filles/garçons. Encore faudrait-il les mettre en oeuvre. Il est essentiel de lever les résistances qui persistent dans ce domaine.

M. Didier Guillaume . - Nous nous abstiendrons sur l'ensemble de la mission. Mais je souhaiterais préciser que sur l'enseignement agricole, si nous votions par division, nous donnerions un avis favorable à ce budget qui est excellent. Depuis quelques années, il est en augmentation constante. Le précédent quinquennat l'a fortement revalorisé. C'est une vraie réussite en termes d'insertion. Je précise que 80 % des jeunes qui s'installent ne sont pas issus du monde agricole.

Je réaffirme que l'enseignement agricole doit rester au sein du ministère de l'agriculture et en aucun cas être fondu dans le ministère de l'éducation nationale. C'est un débat récurrent mais, dans ces conditions, l'enseignement agricole perdrait sa spécificité et vraisemblablement son budget. Nous souhaitons réaffirmer que l'enseignement agricole, public ou privé, est un joyau à préserver.

M. Stéphane Piednoir . - Sur l'enseignement agricole, un principe de réalité apparaît sur le nombre d'élèves par classe, sensiblement inférieur à celui constaté dans l'éducation nationale. Cela me semble pertinent et logique de proposer un maintien des postes, à l'heure où des suppressions de postes se profilent. Sur la revalorisation de la filière, j'entends bien les liens qui doivent se créer entre l'éducation nationale et l'enseignement agricole. Les enseignants du secondaire en collège dirigent très peu vers l'enseignement agricole, à l'exception des élèves en situation d'échec.

Sur la revalorisation des enseignants, j'ai apprécié qu'il soit précisé dans les rapports que les enseignements doivent se reconcentrer sur les fondamentaux. Ils ont été trop dilués dans des options facultatives ou des activités de découverte. Les filières n'en n'ont pas été renforcées.

Pour ce qui est de la question des obligations de service, l'annualisation est un grand débat. Mais nous ne pouvons que constater que les enseignants ont déjà fait un effort lors du passage aux 35 heures, leur temps en classe n'ayant pas diminué.

Enfin, sur les remplacements, un vivier existe : ce sont les candidats qui ont échoué lors des concours d'entrée et qui souhaitent apprendre à enseigner, afin de se représenter au concours l'année suivante.

Mme Samia Ghali . - 200 000 enfants sont en situation de décrochage scolaire. Il ne s'agit pas d'enfant en échec scolaire, que l'on peut retrouver dans le système éducatif. L'enfant en décrochage scolaire ne se rendra plus jamais à l'école. Il restera dans la rue, livré à lui-même. Il y a là un travail qui aurait dû être pris en compte : comment accompagner ces jeunes en décrochage scolaire pour les ramener vers un système scolaire ou d'apprentissage ?

Mme Laure Darcos . - Je souhaite revenir sur l'inquiétude, soulevée auprès du ministre, sur le recrutement des professeurs, qui est lié à l'absentéisme de longue durée. Dans le département de l'Essonne, j'ai reçu de très fortes alertes sur des bacs professionnels, très pointus et spécialisés, qui ne trouvent pas de professeurs. Je peux citer le cas de l'absence d'un professeur devant fournir huit heures de cours par semaine, pour une matière dont le coefficient est de 12 au baccalauréat ; à la Toussaint, les élèves étaient toujours sans professeur.

Le ministre a répondu en partie la semaine dernière mais je constate qu'il y a là une vraie difficulté. La solution ne peut pas être apportée par Pôle Emploi. Il me paraît évident qu'il nous faudra alerter de nouveau le ministre sur ce manque de professeurs dans de nombreuses matières.

M. Antoine Karam, rapporteur pour avis . - Je comprends l'inquiétude de certains de nos collègues quant à l'arrêt des créations de postes. À ce propos, il faut sortir d'une logique quantitative, centrée sur les emplois ; dans l'enseignement agricole, beaucoup ont été créés et il faut apprécier l'évolution proposée à la lumière de la baisse des effectifs d'élèves.

D'autres collègues ont souligné avec raison la publicité insuffisante faite en faveur des formations de l'enseignement agricole ; c'est pourquoi j'insiste sur la promotion de cet enseignement méconnu. En ce qui concerne les relations avec l'éducation nationale, il faut un véritable saut qualitatif dans le sens d'une plus grande complémentarité.

Il y a de l'avenir pour l'enseignement agricole, qui permet une insertion professionnelle satisfaisante. Son développement est une question de volonté politique.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis . - J'ai coutume de dire que l'on ne juge pas un budget au montant de ses crédits ou des emplois qu'il crée. Comme l'ont observé justement plusieurs de nos collèges, la marque de ce budget est une inflexion réelle en faveur de l'enseignement primaire, qui demeure sous-doté par rapport au second degré.

Il convient de s'interroger sur la diversité des filières et des options proposées dans le secondaire, qui expliquent une grande partie de cet écart, et une rationalisation à mener. La réforme du baccalauréat et donc du lycée devrait en offrir le cadre.

M. Ouzoulias met en garde contre une précarisation du métier d'enseignant. Ce n'est pas ce que je propose, au contraire. La révision des obligations de service doit s'inscrire dans une démarche globale d'attractivité du métier, dont la revalorisation des salaires est un levier, en particulier pour les professeurs des écoles. L'annualisation, même partielle, de ces obligations de service doit être une contrepartie des revalorisations consenties.

Je partage les conclusions de l'Académie de médecine sur l'état et l'avenir de la médecine scolaire. La situation est très grave et s'explique en grande partie par l'insuffisante attractivité de la profession de médecin scolaire du fait de salaires largement insuffisants. Les mesures consenties par le précédent gouvernement n'ont pas eu d'effet sur l'érosion du nombre de ces médecins : entre 2009 et 2017, il s'est réduit de 14 %. À court-terme, il faut innover, par exemple en passant des conventions avec les médecins généralistes.

S'agissant du décrochage scolaire, j'estime qu'une vision transversale des politiques de l'éducation, de la famille et de la ville est nécessaire.

En conclusion, en ce qui concerne le remplacement, vous voyez bien qu'il révèle les rigidités du système éducatif, dont ce dernier ne parvient pas à s'affranchir. Le système fonctionne ainsi par défaillances successives, au détriment des élèves.

Mon amendement a pour objet de faire en sorte que l'État ne se décharge pas de facto du renouvellement des manuels scolaires de collège sur les départements. À cette fin, 50 millions d'euros supplémentaires sont alloués aux établissements publics et privés ; ils sont pris sur le programme 214 « Soutien de la politique de l'éducation nationale » et plus précisément sur les dépenses informatiques, en particulier celles du programme SIRHEN, dont le coût total est estimé à près de 500 millions d'euros, cinq fois le montant initialement prévu.

M. Jacques-Bernard Magner . - Cet amendement n'impliquera-t-il pas la prise en charge des manuels scolaires de l'école élémentaire et du lycée par l'État ? Si l'État ne finance pas les manuels scolaires, qui le fera ? Les familles ?

M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis . - Le code de l'éducation met à la charge de l'État les manuels scolaires au collège, pas à l'école élémentaire - ce qui constitue une anomalie. Nous ne faisons que respecter la loi.

Si l'État ne verse pas les dotations nécessaires, les établissements publics prendront sur les dotations versées par les conseils départementaux, ce qui revient à le mettre à leur charge. Dans le privé, les familles paieront.

M. David Assouline . - J'ai l'impression, en entendant vos explications, que cet amendement est d'abord en faveur de l'enseignement privé - dans le public, cette dépense sera toujours à la charge d'une collectivité, fût-elle l'État ou le département.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis . - Mais non !

M. Laurent Lafon . - Ce dispositif n'est pas spécifique au privé, il concerne avant tout les départements pour les collèges publics ; la vraie question est qu'il s'agit là d'un transfert de compétence non assumé.

Mme Laure Darcos . - Le précédent ministre, Mme Vallaud-Belkacem, avait insisté pour que le changement des programmes s'applique immédiatement à l'ensemble des niveaux d'enseignement au collège, ce qui était quasi impossible. La condition sine qua non était un investissement important de l'État dans l'acquisition des manuels.

En tant que conseillère départementale, je siège au conseil d'administration de collèges. Je constate que nombre d'enseignants et de parents d'élèves ne sont pas conscients que la photocopie de manuel scolaire est une forme de piratage. Bien sûr, les droits ne sont pas versés au centre français d'exploitation du droit de copie (CFC) et les auteurs sont lésés. C'est aussi un problème de droit d'auteur, qui dépasse la seule question du financement.

M. Jacques Grosperrin . - De nombreux élèves n'ont pas les manuels correspondant aux nouveaux programmes, notamment dans les disciplines scientifiques. L'amendement de notre collègue envoie un signal fort au Gouvernement : l'État ne doit pas se défausser de la fourniture des manuels scolaires, y compris dans un contexte budgétaire contraint.

M. Jacques-Bernard Magner . - Du débat jaillit la lumière ou, dans le cas présent, l'obscurité. Nous serons prudents à ce sujet car nous ne souhaitons pas que l'amendement entraîne la prise en charge, par l'État, des manuels scolaires de la scolarité obligatoire, primaire compris. Nous ne prendrons pas part au vote.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis . - C'est la loi qui impose à l'État de payer les manuels scolaires du collège ! Le ministère s'était engagé à verser 300 millions d'euros, dont 235 ont été budgétés en 2016 et 2017. Pour 2018, le budget prévoit 16 millions ; je propose donc de majorer cette somme de 50 millions d'euros.

Cela ne signifie pas que je me satisfais de l'état du droit sur cette question, qui est, comme le ministre lui-même l'a souligné, peu compréhensible. Il faudra également réfléchir à la forme et aux contenus qu'il convient de donner aux manuels scolaires à l'ère du numérique et ainsi revoir la politique d'acquisition.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Nous avions en effet interpellé Mme Vallaud-Belkacem sur son choix de renouveler l'ensemble des programmes dans des délais très brefs.

La commission adopte l'amendement.

La commission émet ensuite un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Enseignement scolaire » du projet de loi de finances 2018, sous réserve de l'adoption par le Sénat de l'amendement qu'elle a adopté.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Auditions de M. Jean-Claude CARLE ,
Rapporteur pour avis sur les crédits
de la mission « Enseignement scolaire »

Secrétariat général à l'enseignement catholique (SGEC) : MM. Yann Diraison, adjoint au secrétaire général , et Pierre Marsollier, délégué général aux relations politiques

Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (PEEP) : M. Laurent Zameczkowski, administrateur

Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE) : Mme Alizée Ostrowski, chargée de mission

SNUipp-FSU : Mmes Nelly Rizzo et Luce Desseaux, secrétaires nationales

Sgen-CFDT : Mme Catherine Nave-Bekhti, secrétaire générale et membre titulaire du CTMEN ; MM. Vincent Bernaud, secrétaire national et membre du CSE et Adrien Ettwiller, secrétaire national et membre suppléant du CTMEN

Cabinet du ministre : MM. Raphaël Muller, directeur de cabinet adjoint , David Knecht, conseiller budgétaire , Guillaume Gaubert, directeur des affaires financières , Édouard Geffray, directeur général des ressources humaines , et Mme Marie Dutertre, conseillère parlementaire

M. Patrick Allal , inspecteur général de l'administration de l'éducation nationale et de la recherche (IGAENR), chef de mission, coordonnateur pour l'enseignement scolaire

Cour des comptes : Mme Sophie Moati, présidente de la 3e chambre , MM. André Barbé et Gérard Guibert, conseillers maîtres

M. Daniel Filâtre, recteur de l'académie de Versailles

Contribution écrite

Syndicat national des personnels de direction de l'éducation nationale (SNPDEN-UNSA)

Auditions de M. Antoine KARAM ,
Rapporteur pour avis sur les crédits
de la mission « Enseignement technique agricole »

Union nationale des maisons familiales rurales d'éducation et d'orientation (UNMFREO) : MM. Dominique Ravon, vice-président , et Roland Grimault, directeur

Conseil national de l'enseignement agricole privé (CNEAP) : M. Philippe Poussin, secrétaire général , Mme Isabelle de Broglie, chargée de mission auprès du comité de direction

Union nationale rurale d'éducation et de promotion (UNREP) : M. Hervé Bizard, directeur

Ministère agriculture, Direction générale de l'enseignement et de la recherche (DGER) : M. Laurent Crusson, adjoint au directeur général, chef du service de l'enseignement technique , et Mme Valérie Meigneux, coordinatrice d'administration générale - cheffe du pôle

SNETAP-FSU : MM. Jean-Marie Le Boiteux, secrétaire général , et Serge Pagnier, secrétaire général adjoint

SEA-UNSA Education: M. Stephen Bonnessoeur, directeur d'établissement , M. Nicolas Martel, et Mme Gwendoline Prosper, secrétaires nationaux

ANNEXE

Compte rendu de l'audition de M. Jean-Michel BLANQUER,
ministre de l'éducation nationale

_______

MERCREDI 15 NOVEMBRE 2017

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Nous accueillons Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, sur le projet de loi de finances (PLF) pour 2018. Nos rapporteurs seront particulièrement attentifs à vos propos : Jean-Claude Carle, pour l'enseignement scolaire, Antoine Karam, pour l'enseignement agricole et Jacques-Bernard Magner, pour la jeunesse et la vie associative, tous trois membres de notre commission, ainsi que Gérard Longuet, rapporteur spécial de la mission Enseignement scolaire pour la commission des finances.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale . - Je suis très heureux de ce moment d'échange sur des questions budgétaires qui articulent les moyens aux finalités de l'école. Ce budget traduit la priorité accordée à l'éducation par le Président de la République et le Gouvernement, et soutient le projet d'école de la confiance, où l'on se fait confiance et qui inspire confiance à la société, grâce à sa stratégie de transmission des savoirs et des valeurs à tous les élèves de France. Elle doit lutter contre les inégalités, en tirant tout le monde vers le haut par l'excellence et la personnalisation des parcours.

Pour la première fois, le budget de l'éducation nationale dépasse le seuil des 50 milliards d'euros, pour s'établir à 50,1 milliards d'euros - hors cotisations aux pensions de l'État, qui feraient dépasser le seuil des 70 milliards d'euros -, soit une augmentation d'1,3 milliard d'euros par rapport à 2017. C'est une augmentation raisonnée et raisonnable qui permet la transformation profonde du système éducatif demandée par les Français.

Notre priorité est d'abord l'école primaire et elle se traduit dans les évolutions budgétaires. L'objectif « lire, écrire, compter, respecter autrui » est essentiel. Rien de solide ni de durable ne pourra se faire sans maîtriser ces savoirs fondamentaux ; nous y serons très vigilants. Nous attaquerons les difficultés scolaires à la racine pour lutter contre le poids des déterminismes. C'est le sens de notre mesure phare, pointe avancée de notre lutte contre les inégalités par la qualité pédagogique, le dédoublement des classes de cours préparatoire (CP) et de cours élémentaire (CE1) : les 2 500 classes de CP ont été dédoublées cette année dans les réseaux d'éducation prioritaire renforcés (REP+). Hier encore, on me confirmait dans l'académie de Reims toute la satisfaction qui ressortait de cette mesure. À la rentrée 2018, 6 000 classes seront concernées avec le dédoublement des CP en REP en sus des REP+ et des CE1 en REP+. En 2019, les classes de CE1 de REP seront dédoublées. Nous nous donnons les moyens de cette ambition en programmant 3 900 postes supplémentaires dans le premier degré à la rentrée 2017. Nous prônons plus de volontarisme pour l'éducation prioritaire et donnons plus à ceux qui ont besoin de plus : nous préparons une prime pour les enseignants des réseaux d'éducation prioritaire renforcés, pour plus d'attractivité, une plus grande stabilisation et mixité des équipes, et une plus grande efficacité de l'éducation prioritaire. La première des fragilités sociales est la fragilité devant la langue : c'est un impératif pédagogique et éducatif.

Nous accompagnons les élèves dans leur réussite au collège, grâce à la mesure des « devoirs faits », déployée progressivement dans les 7 100 collèges de France. N'hésitez pas à nous faire remonter les manques - le dispositif vient d'être mis en place. En 2018, il sera doté d'une enveloppe globale de 220 millions d'euros, pour un soutien scolaire gratuit pour tous les élèves qui le désirent. Il compensera les fragilités sociales et scolaires dans toutes les familles, toutes catégories sociales confondues. Cette mesure très importante aura des conséquences directes et indirectes dans notre manière de concevoir le temps scolaire.

Autre dimension, les stages de réussite pendant les vacances scolaires, gratuits, verront leurs moyens passer de 15 à 35 millions d'euros l'année prochaine.

La fragilité sociale est également traitée, avec la revalorisation de 25 % des bourses de collège, soit 43 millions d'euros supplémentaires en 2018. Ces bourses valorisent le mérite tout en luttant contre les inégalités.

La fragilité peut aussi être liée au handicap. Nous avons maintenu le nombre de contrats aidés pour l'accueil des élèves en situation de handicap. Nous avons créé 8 000 postes pour la rentrée 2017. À la rentrée 2018, 11 200 contrats aidés seront transformés en accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH). Nous sommes cohérents avec notre politique sur les contrats aidés : nous substituons à ces contrats aidés des emplois plus pérennes. Au-delà de ces transformations, 4 500 AESH supplémentaires seront directement recrutés. En outre, 100 postes supplémentaires de professeurs des écoles seront mis à disposition des 100 nouvelles unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS). Ces efforts budgétaires importants permettent de lutter contre les inégalités et compenser les fragilités, tout en recherchant partout l'efficacité.

Le budget de l'enseignement scolaire s'accompagne aussi du programme « Jeunesse et vie associative », qui revêt une importance toute particulière actuellement. Il articule les priorités de l'école, de l'éducation populaire et du service civique. Avec le Président de la République et le Premier ministre, nous avons souhaité la plus grande synergie entre ces dimensions. C'est le sens de toute éducation : accompagner vers plus d'autonomie, vers plus de mobilité, aider à faire des choix dans sa vie, et que les jeunes aient les moyens de faire ces choix. Le présent budget consacre 25 millions d'euros à cet accompagnement vers l'autonomie, par l'information, la mobilité internationale et l'accès de tous à des loisirs de qualité.

Dans ce tissu associatif, facteur clé de réussite de cette politique, les associations du secteur « jeunesse et éducation populaire » seront financées à hauteur de 52 millions d'euros dont 31 millions d'euros via le Fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire (Fonjep) qui soutient plus de 5 000 emplois et 21 millions d'euros destinés aux associations agréées aux échelons national et local.

Nous souhaitons développer l'engagement dans la vie collective, au coeur de la société de confiance à laquelle l'école doit contribuer. L'appui transversal au développement de la vie associative connaîtra une hausse de 60 % en 2018, passant de 10 à 16 millions d'euros. Le soutien au bénévolat, pilier du monde associatif, sera renforcé par la mise en oeuvre du nouveau compte d'engagement citoyen (CEC) qui valorise l'engagement au service de l'intérêt général de chacun de nos concitoyens.

Nous répondrons de façon spécifique aux besoins de toutes les associations, quelle que soit leur taille. Les dispositions de l'article 43 de ce PLF prévoient la suppression du crédit d'impôt sur les taxes sur les salaires (CITS) et du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) à partir de 2019, au bénéfice d'une réduction des cotisations patronales, ce qui engendrera pour les associations qui emploient du personnel une économie de 1,4 milliard d'euros chaque année à partir de 2019. Ce soutien considérable profitera aux grandes comme aux moyennes associations. Pour les petites associations, l'Assemblée nationale a adopté à l'unanimité mon amendement relevant de 25 millions d'euros les crédits du programme 163 « Jeunesse et vie associative » afin de compenser la diminution de crédits ouverts au bénéfice du tissu associatif après la suppression de la réserve parlementaire. Ces 25 millions d'euros de crédits supplémentaires abonderont le Fonds de développement de la vie associative (FDVA), et un groupe de travail - rassemblant entre autres des parlementaires - définira leurs modalités d'attribution.

Nous voulons accroître l'engagement de la jeunesse, dans la lignée de l'engagement du Président de la République de créer un service national. Ce dernier n'est pas prévu pour l'année prochaine et donc non inclus dans ce budget, mais fait l'objet d'un travail important entre le ministère de l'éducation nationale et celui de la défense. Le service civique est un dispositif plébiscité par les jeunes. Neuf anciens volontaires sur dix se déclarent satisfaits de leur expérience. En 2017, environ 130 000 volontaires en ont bénéficié. Notre objectif en 2018 est de parvenir à 150 000 volontaires. C'est pourquoi les crédits augmentent de 63 millions d'euros pour atteindre 448 millions d'euros. Par ailleurs, 10 000 volontaires viendront en appui des professeurs, des assistants d'éducation et des associations dans le dispositif « devoirs faits ».

Ce budget de l'enseignement scolaire, de la jeunesse et de la vie associative est élaboré pour construire l'avenir. C'est un enjeu aussi d'unité nationale, pour transmettre les connaissances et les valeurs à nos enfants. Dans un monde en mutation qui a besoin de repères, il donne à nos jeunes des racines et des ailes.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - La semaine dernière, notre commission a largement débattu des emplois aidés et de la réserve parlementaire que vous avez cités. De nombreuses associations et écoles bénéficiaient souvent des deux dispositifs en même temps.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis des crédits de la mission « Enseignement scolaire » . - Je vous remercie de cette présentation. Ce budget de plus de 70 milliards d'euros place l'éducation nationale au premier rang du budget de la nation. C'est le meilleur investissement que la nation puisse consentir, pour peu que le retour sur investissement soit à la hauteur des efforts consentis. Même si le budget de l'éducation nationale a doublé dans les 30 dernières années, 30 % des jeunes entrant au collège ne maitrisent pas les fondamentaux, 140 000 sortent sans diplôme ni qualification. Sur ces 140 000, la moitié avait connu des difficultés dans le premier cycle d'apprentissage, en particulier en CP. Tout se joue durant le primaire, et surtout durant ce premier cycle défini par la « loi Jospin ».

Votre budget rompt avec un passé récent ou même un peu plus ancien : vous faites un effort important sur l'école primaire, avec la création de 2 800 postes. Vous vous attaquez à la racine du mal, aux vraies raisons de l'échec : le déterminisme social. Un fils d'ouvrier a dix-sept fois moins de chances de préparer une grande école qu'un fils d'enseignant ou de cadre supérieur et quatre fois plus de risque d'échec... Donnons plus à ceux qui en ont le plus besoin. Je souhaite que le dédoublement des classes en REP s'applique le plus vite possible au CE1 et que les enseignants puissent être formés à des pédagogies différenciées. De même, souhaitons que le dispositif « devoirs faits » s'applique le plus rapidement possible en primaire.

Il nous manque cependant un élément : quelles sont vos orientations pluriannuelles, tant budgétaires que de recrutement, pour les deux à trois prochaines années ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Merci pour vos remarques positives. Nous avons besoin d'une vision pluriannuelle. À l'échelle du quinquennat, nous vous présenterons les grandes lignes tant qualitatives que quantitatives. Avec le ministre de l'économie, nous avons travaillé à une augmentation raisonnée du budget pour les prochaines années. La croissance de notre budget n'est pas une fin en soi, ni même sa réduction, car il existe encore des besoins, et nous devons prendre en compte des aspects tendanciels comme le glissement vieillesse-technicité (GVT). Des besoins sont déjà identifiés pour l'école primaire afin de réussir vite et bien les dédoublements et d'autres opérations.

Les augmentations d'effectifs correspondront au dédoublement des classes, soit 779 millions d'euros d'augmentation budgétaire en 2019 et environ 573 millions d'euros en 2020. Cette augmentation continue et raisonnable correspond à une programmation globale.

L'important, c'est que cette croissance budgétaire rassure sur les aspects quantitatifs, afin que le débat se focalise sur le qualitatif. Nous voulons rattraper le retard français sur les moyens attribués au premier degré pour rejoindre, à la fin du quinquennat, la moyenne des pays de l'OCDE. Cela suppose des choix politiques et éducatifs pour lutter pour l'égalité et assurer l'excellence pour tous.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis . - Vous avez permis aux collectivités locales de décider quels rythmes scolaires elles souhaitaient. Les aides de l'État seront pérennisées pour l'année à venir, mais qu'en sera-t-il pour les deux à trois prochaines années ?

Pouvez-vous nous en dire plus sur votre plan du mercredi ? Vous avez touché à la semaine, à la journée mais pas au calendrier global de l'année scolaire, le plus difficile à établir, en raison des lobbies . Une expérimentation en la matière est-elle envisageable, par exemple dans une académie ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Nous appliquons ce que nous avons dit : le fonds de soutien accompagne les communes ayant choisi de rester à la semaine de quatre jours et demi. Nous le maintenons, avec un forfait de 90 euros par élève, sur une base pluriannuelle. Je l'ai affirmé dès la fin du mois de juin. Le Gouvernement n'incite pas à revenir à la semaine de quatre jours. Notre objectif est d'aider toutes les communes afin qu'elles puissent mettre en oeuvre un accompagnement périscolaire de qualité. Dépassons ce vain débat entre semaine de quatre jours ou semaine de quatre jours et demi. Plus de 40 % des communes sont revenues à la semaine de quatre jours et elles n'ignorent ni leur intérêt, ni celui des enfants. Nous devons aussi respecter la décision de celles ayant maintenu une semaine de quatre jours et demi. Gardons les principes de liberté et de responsabilité : chaque communauté éducative doit librement disposer du temps scolaire.

Nous voulons que les activités du mercredi, actuellement très hétérogènes, puissent être de qualité, afin de réduire les inégalités. Certains font des activités inutiles, d'autres des activités valables ; 100 % des élèves doivent bénéficier d'activités intéressantes. Tel est l'objet du « plan du mercredi », auquel nous travaillons avec le ministre des sports et celui de la culture pour mettre en synergie des propositions d'activités culturelles, sportives et naturelles pour le mercredi mais également pour d'autres moments. Nous serons prêts dans quelques semaines.

Vous avez raison, nous avons besoin d'une approche systémique sur les rythmes scolaires. Ce sont des sujets profonds, structurants et structurels pour la société française. Je ne dois pas décider d'en haut de sujets aussi importants. Nous entamons un travail avec la représentation nationale, en lien avec le Conseil économique, social et environnemental (CESE), pour que dans quelques mois « le temps et l'espace de l'enfant et de l'adolescent au XXI e siècle » soit l'expression cohérente de toutes ces dimensions - journée, semaine, année - mais aussi des contenus, du rapport aux écrans, du sommeil, du bâti scolaire... Ces sujets relèvent tantôt de l'État, tantôt des collectivités locales. Nous inscrirons ce travail dans la logique de la Conférence nationale des territoires pour une vision partagée entre les collectivités territoriales et l'État. Les vacances ne seront pas un objet de discussion avec les collectivités locales, mais nous aurons une vision plus claire en 2020-2021. Quelle que soit la décision, nous n'obtiendrons jamais l'unanimité, mais un consensus raisonnable.

M. Jean-Claude Carle, rapporteur pour avis . - La formation initiale et continue des enseignants est essentielle. Vous proposez de leur garantir trois jours de formation continue. Comment cela se traduira-t-il sur le plan budgétaire ?

Le problème des remplacements, récurrent, n'est pas d'ordre financier puisque les moyens affectés ne sont pas totalement épuisés. Comme le décrivait un recteur, le système est « corseté » ; comment améliorer la situation ? On fait actuellement appel à des contractuels, car les enseignants stagiaires sont affectés à des postes sur lesquels il n'y a pas de titulaires. C'est un sujet d'inquiétude pour les parents d'élèves. La solution, proposée par la Cour des comptes, ne serait-elle pas l'annualisation de l'obligation de service des enseignants, voire la bivalence dans le second degré ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - La formation des professeurs est un sujet clef dans tout système scolaire. Dans ce domaine, des progrès peuvent être accomplis au cours des prochaines années. Avec Frédérique Vidal, ministre de l'enseignement supérieur de la recherche et de l'innovation, nous souhaitons faire évoluer le système de formation initiale, qui doit reposer sur deux piliers : une articulation plus forte avec la meilleure recherche internationale en matière pédagogique ; une plus grande intervention des praticiens de terrain. Aussi faut-il que les intervenants en ESPE continuent à faire classe devant des élèves, de façon à pouvoir transmettre leur pratique concrète.

L'augmentation de 20 millions d'euros des crédits consacrés à la formation nous permettra d'améliorer la situation.

Nous avons lancé, au titre des investissements d'avenir, un appel à projet pour les ESPE du futur. Les établissements retenus bénéficieront d'une dotation pour accompagner leurs projets de modernisation et d'évolution. Notre ambition est de bâtir une formation initiale exemplaire à l'échelle internationale. Nous avons besoin de cette « locomotive » d'amélioration permanente, car la qualité de la formation initiale des enseignants est aujourd'hui très hétérogène.

Nous développerons le pré-recrutement. Les 50 000 assistants d'éducation doivent contribuer à la réalisation de cet objectif, qui peut faire consensus. Nous susciterons ainsi davantage de vocations en amont, en les diversifiant. C'est aussi une réponse aux problèmes de remplacement.

Nous agirons avec volontarisme en matière de formation continue, à laquelle sont consacrés 95 millions d'euros de crédits en 2018. Priorité est donnée au premier degré et à la pédagogie permettant l'acquisition des savoirs fondamentaux, en particulier dans les classes dédoublées, à l'enseignement des valeurs de la République, à la formation en mathématiques, à la lutte contre le décrochage, aux usages du numérique.

J'en viens aux remplacements. Ceux de courte durée, surtout, posent problème. Leur gestion sera réformée dès la rentrée prochaine. J'ai commencé à alerter les recteurs sur la nécessité d'une plus grande réactivité. En milieu rural, il est encore plus difficile de trouver des remplaçants. L'enjeu est autant qualitatif que quantitatif. En 2017, 1 300 emplois supplémentaires ont été créés pour assurer les remplacements dans le premier degré. Le pré-recrutement est également une solution. Il ne faut pas, en revanche, abaisser le niveau des concours, car les logiques de court terme sont contreproductives.

Attentifs au bien-être au travail des professeurs, nous orienterons la politique de gestion des ressources humaines de façon à lutter contre l'absentéisme.

M. Antoine Karam, rapporteur pour avis des crédits du programme 143 « Enseignement technique agricole » . - Le projet de loi de finances prévoit une augmentation des crédits de l'enseignement agricole de près de 35 millions d'euros. Cette hausse de 2,5 % témoigne de l'ambition du Gouvernement pour ce secteur clef et pour ces 165 000 élèves et étudiants.

On observe en 2017 une baisse des effectifs de l'enseignement agricole, à rebours de l'évolution démographique dans le second degré. Certains acteurs du secteur l'expliquent par la réticence de l'éducation nationale à orienter les élèves vers ces formations qui constituent pourtant une alternative intéressante : c'est le deuxième réseau éducatif du pays, et ses résultats sont très bons en termes d'insertion professionnelle. Comment valoriser et faire connaître ces formations ?

Les représentants de l'enseignement agricole nous ont confié ne pas être associés aux concertations sur la formation professionnelle et sur l'évolution du baccalauréat. Comptez-vous y remédier ?

La subvention aux établissements privés est strictement encadrée par une série d'accords. Nombre d'établissements y voient une forme de contingentement de l'offre de formation et des effectifs, qui entraverait leur développement jusque dans les outre-mer. Or, dans ces territoires, l'agriculture est un enjeu prépondérant pour développer les exportations et tendre vers l'autosuffisance. Quelle est votre opinion sur ces doléances ?

La suppression des contrats aidés affecte l'organisation des établissements scolaires, et notamment la fonction de surveillance, fondamentale en REP et REP+ - je pense au cas de la Guyane. Quelles sont les solutions ? Faut-il des contrats plus adaptés, voire même de véritables contrats d'assistants d'éducation ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Je suis admiratif de l'enseignement agricole : il est inspirant et fonctionne bien. Il faut dépasser les fausses oppositions ! Ces établissements ne relèvent pas de mes compétences. Il est toutefois normal qu'existent des passerelles et des convergences entre mon ministère et celui de l'agriculture en ce domaine.

Vous avez évoqué la réticence, observée notamment à la fin de la troisième, à orienter vers ces établissements. Celle-ci ne s'inscrit certainement pas dans une politique officielle et je ferai en sorte d'y mettre fin. Comme l'apprentissage, l'enseignement agricole doit être en bonne place dans le choix des élèves. Je suis prêt à m'engager en ce sens et à soutenir les passerelles entre toutes les formations, toutes ces voies ayant une égale dignité.

Les responsables de l'enseignement agricole ont bien été associés aux premières concertations sur la réforme du baccalauréat, qui viennent de débuter.

Le développement de cet enseignement, qu'il soit privé ou public, n'est nullement entravé. Les augmentations budgétaires dont il bénéficie sont comparables à celles prévues pour l'éducation nationale.

La diminution du nombre de contrats aidés correspond à un choix politique assumé, qui se base sur des données connues. Ainsi, dans le secteur public, seuls 20 % de ces contrats débouchaient sur une insertion professionnelle. Ils ne disparaissent pas pour autant puisque des priorités ont été affichées, notamment pour l'outre-mer ; les dotations spécifiques de la Guyane ont ainsi été augmentées.

Nous allons aussi lancer une véritable politique du travail dont bénéficieront les outre-mer, comme l'a annoncé le Président de la République lors de son récent déplacement dans votre territoire.

L'éducation nationale prendra sa part dans cette évolution générale puisque les emplois d'accompagnants d'élèves en situation de handicap (AESH) remplaceront progressivement les contrats aidés existants.

M. Jacques-Bernard Magner, rapporteur pour avis des crédits du programme jeunesse et vie associative. - Le secteur associatif est gravement touché par la suppression des contrats aidés, dont le nombre est passé de 487 000 en 2012 à 461 000 en 2016. Comment comptez-vous compenser cette perte de moyens, au moment où le Président de la République appelle de ses voeux une implication plus forte du monde associatif dans les politiques publiques ?

Par ailleurs, 40 % du montant de la réserve parlementaire, soit 60 millions d'euros, étaient consacrés aux associations. Celle-ci ayant été supprimée, l'Assemblée nationale a obtenu que 25 millions d'euros soient réservés à ce secteur. Quels seront les critères retenus pour distribuer ces crédits, et par quel intermédiaire ?

Vous avez réaffirmé votre intérêt pour le service civique. L'objectif de 350 000 missions, défendu sous la précédente législature, sera-t-il repris par le Gouvernement ? À cet égard, je ne crois pas que le service civique soit le meilleur moyen de mettre en oeuvre le dispositif « Devoirs faits ».

Devrons-nous débattre à nouveau de cette fausse bonne idée qu'est le service national universel, lequel coûterait entre 2 et 15 milliards d'euros ? Peut-on se permettre cette dépense ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - C'est un fait, le secteur associatif est affecté par la fin des contrats aidés. Nous sommes dans une période de transition « courageuse » qui suscite, certes, des inquiétudes, mais un système plus efficace va succéder à ce dispositif qui, selon la Cour des comptes, ne fonctionnait pas.

Dans un an et demi, 1,4 milliard d'euros sera réinjecté dans le secteur associatif, ce qui créera une plus forte capacité d'embauche. C'est un nouveau palier pour la vie associative. Certains grands acteurs de l'éducation populaire bénéficieront aussi de sommes conséquentes au titre de l'éducation nationale et du plan « mercredi ». Lorsque nous mettrons à plat dans quelques mois les pertes et les gains, il apparaîtra que la situation du monde associatif est plus saine et plus claire. Il pourra ainsi renouer des liens avec les pouvoirs publics, notamment les collectivités locales, autour d'objectifs partagés d'intérêt général.

Vous l'avez dit, la réserve parlementaire a été remplacée par une dotation de 25 millions d'euros, sur mon initiative et celle de parlementaires. La représentation nationale sera associée à la distribution de ces crédits et à la définition de son périmètre. Les petites associations seront soutenues en premier lieu. Les préfets seront chargés de cette distribution à une échelle que nous voulons départementale, afin d'être au plus près du terrain et des demandes des associations, en concertation avec les élus. Il est possible que le rôle de l'État évolue pour ce qui concerne la jeunesse et la vie associative : moins d'énergie sera consacrée aux aspects bureaucratiques et davantage à l'aide concrète. C'est un tout cohérent, qui répond à une attente profonde des personnels.

Pour ce qui concerne le service civique, notre objectif n'est pas aussi ambitieux que celui que vous avez cité : nous préférons une croissance raisonnable, qualitative et pilotée.

Nous rencontrons des difficultés pour recruter des volontaires du service civique dans le cadre de l'opération « Devoirs faits ». Ils sont aujourd'hui 7 000 ; nous en voulons 10 000. L'esprit de ce dispositif est tout à fait conforme à celui du service civique. En l'occurrence, ces volontaires ne se substituent à personne, ils s'ajoutent. Ils ne sont pas non plus en situation de responsabilité puisque la supervision est assurée par des professeurs. Nous souhaitons aussi que les associations continuent à jouer leur rôle de soutien scolaire, à condition qu'elles soient de qualité.

L'opération « Devoirs faits » est l'occasion d'une clarification et d'une mise en cohérence. Par ailleurs, nous mettons le pied à l'étrier à des jeunes dont certains deviendront peut-être professeurs : ils testent ainsi leur vocation.

Je ne souhaite pas que nous ayons aujourd'hui un débat sur le service national universel, car la question n'est pas à l'ordre du jour. Cet engagement présidentiel, qui a vocation à être mis en oeuvre, favorisera l'engagement de la jeunesse dans la vie civique.

M. Gérard Longuet, rapporteur spécial de la mission « Enseignement scolaire » . - Vous avez cité, monsieur le ministre, le chiffre de 3 900 emplois supplémentaires pour l'école primaire ; nous en étions restés, pour notre part, à celui de 2 800.

Par ailleurs, l'augmentation des crédits de paiement et des autorisations d'engagement s'élève à 1,5 milliard d'euros. Quel pourcentage de ce montant relève des décisions antérieures et quel autre de vos propres initiatives ? Je pense, en particulier, à l'aboutissement du programme de création de 55 000 emplois et au protocole de modernisation des parcours professionnels, des carrières et des rémunérations (PPCR).

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Je salue votre sagacité : le chiffre de 2 800 emplois correspond aux équivalents temps plein (ETP) et celui de 3 900 englobe les stagiaires des ÉSPÉ.

La question de la distinction entre l'énergie cinétique des précédents budgets et l'énergie nouvelle du présent projet de loi de finances est très technique. Je vous répondrai par écrit. Certaines mesures sont maintenues, d'autres arrêtées. Il y a aussi des « coups partis » correspondant à des engagements que le Gouvernement souhaite tenir.

Mme Colette Mélot . - Je vous remercie, monsieur le ministre, pour votre présentation. J'apprécie votre volonté de lutter contre les inégalités et de favoriser l'excellence. Vous avez annoncé dès votre prise de fonctions un projet clair pour une école primaire efficace. Les résultats sont déjà au rendez-vous et j'ai pu constater que les communautés éducatives de mon département, la Seine-et-Marne, étaient très satisfaites.

Ma première question porte sur le dédoublement des classes en REP et REP+ en 2018 et 2019. Comment les collectivités locales, qui préparent actuellement leur budget, sont-elles associées à ce projet ? S'il a été possible dans de nombreux cas de trouver le double de locaux, prévoir le budget de fonctionnement y afférent n'est pas simple. Je suppose que le message passera par l'intermédiaire des inspecteurs de l'éducation nationale, mais il doit être émis rapidement. Par ailleurs, la mise en oeuvre du dédoublement pourra poser des difficultés financières à certaines communes.

Deuxième point : les remplacements. La population de la Seine-et-Marne augmente de 13 000 habitants par an. Or nous n'avons plus de remplaçants dans les établissements, la situation devient inquiétante, le métier d'enseignant subit une vraie désaffection.

Troisième sujet, l'orientation. Des mesures ont-elles été prises ? Vos déclarations sur l'apprentissage vont dans le bon sens. Il serait bon que l'orientation intervienne le plus tôt possible et ne se décide plus par défaut en fin de collège.

Mme Mireille Jouve . - Vous voulez interdire l'usage du téléphone portable dans les écoles et les collèges, car son omniprésence a des conséquences néfastes sur le comportement, la concentration. Mais pratiquement, comment faire ?

Vous envisagez de créer une cellule laïcité au sein du ministère, pour aider les enseignants confrontés à des dérives religieuses. Il existe déjà des référents au sein des académies : quels seront les apports du nouveau dispositif ?

Mme Annick Billon . - Votre budget et les moyens humains progressent, c'est une bonne nouvelle. Des mesures rapides ont déjà été prises, dédoublement des classes, aide aux devoirs, primes aux enseignants qui s'engagent en REP. Mais, dans ces zones, on a besoin de professeurs animés par une forte vocation et doués de qualités particulières pour faire face aux difficultés scolaires et sociales des élèves, bref des professeurs qui ne recherchent pas seulement une prime. Envisagez-vous autre chose que cet élément quantitatif et non qualitatif ?

Les mesures relatives à l'aide aux devoirs sont satisfaisantes mais les compétences seront-elles là ? Qui, parmi ceux qui effectuent un service civique, entrera dans ces programmes ? Il n'est pas donné à tout le monde d'être pédagogue... Comment cette intervention sera-t-elle perçue par les enseignants, qui ont habituellement leur secteur réservé ? Dans le passé, leur métier était valorisé, il l'a peu été ces dernières décennies, comment le revaloriser pour susciter des vocations ? Enseigner ne fait plus rêver la jeunesse. Pour que la jeunesse s'envole, il faut savoir la faire rêver !

M. Pierre Ouzoulias . - Monsieur le ministre, vous rejoignez notre sensibilité politique, vous venez sur nos bases idéologiques, je m'en réjouis... Moins il y a d'élèves par classe, plus ils réussissent. Vous corrigez les inégalités d'accès à l'éduction, c'est bien. Vous encouragez les enseignants, les « hussards noirs de la République », qui s'investissent dans les quartiers défavorisés. Sur ces trois points, vous faites ce que nous réclamons depuis vingt ans. Mais le diable est dans les détails : sur le terrain, le dédoublement des classes - votre mesure emblématique - se fait par redéploiement, aux dépens du dispositif « plus de maîtres que de classes » et des moyens du remplacement. Déshabiller Pierre pour habiller Paul ne fait pas une politique. Néanmoins, nous partageons, monsieur le ministre, les mêmes « attendus ».

Un mot de la crise des vocations : en France, le nombre de docteurs stagne, voire recule. La désaffection à l'égard des métiers de la connaissance, de la recherche, de l'enseignement est patente. Pour compenser le retard accusé par rapport à la moyenne des pays de l'OCDE, nous avons besoin d'un plan très ambitieux, bien au-delà des moyens que vous avez évoqués. Attention, nous sommes en train de perdre une génération ! Il faut réorganiser la transmission des savoirs.

M. André Gattolin . - Entendez-vous rétablir les prix d'excellence ? Pour notre part, si nous devions attribuer un prix d'excellence à un ministre, quelles que soient les grandes qualités de vos collègues du Gouvernement, c'est à vous que nous le décernerions. Vous revenez à un bon sens qui paraissait perdu. Je suis enseignant à l'université, j'ai constaté avec regret que des principes de base ne s'imposaient plus...

La réforme du baccalauréat conduira à plus de cohérence avec la réalité de l'évaluation des élèves aujourd'hui. Nous y réaliserons également des économies budgétaires - c'est une aberration qu'un élève de terminale coûte plus cher qu'un étudiant de première, deuxième voire troisième année d'université.

Les associations de parents demandent la suppression du livret d'observation des élèves de terminale, qui ne sont jamais transmis aux familles pour éviter de compliquer les relations entre elles et les enseignants. Les professeurs y consignent des appréciations qui parfois contredisent les notes elles-mêmes, or celles-ci sont prises en compte pour l'admission dans le supérieur. Enfin, il y a là un problème de transparence vis-à-vis des parents, mais aussi des jeunes qui sont presque majeurs. Qu'envisagez-vous ?

M. Jacques Grosperrin . - Je salue, monsieur le ministre, votre clairvoyance et votre ambition pour l'école.

Les chefs d'établissement se posent néanmoins des questions, ils ont des choix à faire entre dédoublement des classes, enseignement des langues vivantes, cogestion des enseignants, mobilisation des enseignants sur le programme « Devoirs faits », etc. Les collectivités ne seront-elles pas obligées de mettre la main à la poche ? On parle de 16 millions d'euros pour financer les manuels scolaires...

Les contractuels du public sont moins bien traités que ceux du privé, la différence de traitement atteint 100 euros. La loi Debré établit un principe de parité : un alignement est-il prévu ?

Enfin, je veux dénoncer l'archaïsme de la gestion - il faudrait plutôt parler, du reste, de cogestion avec les syndicats - des affectations et des mutations. Pourrait-on réfléchir à une meilleure façon de les organiser ?

M. Jacques-Bernard Magner . - Je ne pourrai quant à moi vous délivrer un tel satisfecit. Depuis la refondation de l'école en 2013, beaucoup a été fait, avec un état d'esprit qui, maintenant, a changé. Les recrutements se tassent, le nombre de postes ouverts aux concours diminue. Pendant trois ou quatre années, grâce aux ESPE, l'attractivité du métier d'enseignant avait été restaurée. À présent, votre réforme de l'entrée à l'université exige un gros travail supplémentaire pour les professeurs des lycées, ils auront un rôle important dans l'orientation. Le tirage au sort pour l'entrée dans le supérieur disparaît, tant mieux, mais est-ce le moment de réduire la voilure ?

Le dispositif « plus de maîtres que de classes » donnait satisfaction : vous avez affirmé en audition que vous n'aviez pas l'intention de le vider au profit des classes de douze en CP, voire ensuite en CE1, dans les REP, mais la réalité est différente...

Une question enfin : la remise en cause de la réforme du collège dès la rentrée 2017 vous donne-t-elle satisfaction ?

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Pouvez-vous nous dire quelques mots, monsieur le ministre, du plan d'urgence outre-mer, à Saint-Barthélemy et Saint-Martin ?

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Dans 85 % des cas, les communes ont su dès la rentrée 2017 organiser le dédoublement des classes en CP et CE1, et je salue la bonne volonté des maires, ils ont incarné la France et servi l'intérêt général. Quant aux 15 % restants, s'ils ne l'ont pas fait, c'est qu'ils n'ont pas pu. La rentrée 2018 se prépare dans le même climat excellent. Parfois des difficultés apparaissent, qui peuvent paraître indépassables. En ville, les problèmes sont différents et se posent surtout en euros, en mètres carrés... Mais le dialogue est fructueux avec les communes, les inspecteurs d'académie sont mobilisés et je parle aussi avec les préfets, je leur demande d'aider les collectivités, car celles-ci font des efforts. On peut critiquer les classes modulaires, le préfabriqué a mauvaise presse, pourtant il peut être de bien meilleure qualité qu'un bâtiment ancien. Ce peut donc être une occasion d'amélioration. Les collectivités sont mobilisées, elles seront aidées, notamment par des moyens de l'ANRU, comme l'a indiqué le Président de la République. Le ministre de la cohésion des territoires est lui aussi attentif à la question, quant à moi je suis attentif et optimiste !

Le remplacement est un sujet structurel. Oui, on constate une crise des vocations, et, dans certains territoires qui présentent des difficultés spécifiques, qui entraîne l'absentéisme. En Seine-Saint-Denis, on m'a rapporté un cas où s'étaient succédé dix-sept professeurs dans une année : preuve qu'il y a un problème non pas de remplacement - aligner seize remplaçants est à l'honneur de la République - mais d'absentéisme. Pourquoi seize enseignants ont-ils jeté l'éponge durant l'année ? Il faut étudier cette question avec lucidité. Nos premières réponses sont modestes, car de court terme. D'autres, plus efficaces, se déploieront sur le moyen terme. À court terme, nous demandons aux recteurs une attention très soutenue pour porter remède à chaque situation qui l'exige. Et nous définissons une stratégie d'ensemble des ressources humaines du ministère afin de créer de bonnes conditions d'exercice de la profession.

L'orientation est un vaste sujet. Les réformes en cours sont cohérentes entre elles. Réforme de l'accès à l'enseignement supérieur, d'APB, de l'orientation au lycée : les premières mesures entrent en application, désignation d'un second professeur principal dans les classes de terminale, implication du conseil de classe dans le conseil aux élèves - c'est une évolution importante, qui en entraînera d'autres, sur la présence de professionnels autour des élèves pour leur orientation... Réforme du baccalauréat, celui-ci devant se concevoir comme un levier de réussite vers le supérieur - la concertation vient de commencer. Réforme de la voie professionnelle : la concertation a été lancée la semaine dernière, pour améliorer l'enseignement professionnel, le rendre plus fort, plus moderne, adapté aux enjeux de la révolution numérique, de la transition écologique, de l'entrepreneuriat, du savoir-faire français. Si nous avons en outre une logique de passerelles, l'ensemble sera cohérent. Enfin, le ministère du travail et le mien travaillent ensemble pour valoriser l'apprentissage, dépasser l'ancienne querelle entre l'apprentissage et l'enseignement professionnel. Nous voulons revitaliser les deux ! Ces quatre anneaux de réformes seront indissociables de la politique d'orientation, avec un impact sur le lycée et le collège.

L'interdiction du téléphone portable est déjà en vigueur dans certains collèges : ce n'est donc pas un voeu pieux. C'est faisable, si l'on est pragmatique. Un groupe de travail associe des chefs d'établissement pour recenser et diffuser les bonnes pratiques afin que l'interdiction soit réellement applicable. On peut presque parler de transformation anthropologique des élèves : la concentration s'affaiblit, les cours de récréation ont perdu leur joyeuse animation parce que chacun est rivé à son téléphone, le manque d'exercice physique et l'obésité se généralisent ; il faut maintenant lutter contre les addictions et contre la pornographie. Depuis que j'ai annoncé le projet d'interdiction, je constate une appétence toute nouvelle pour l'usage pédagogique des portables... Nous mènerons cela en finesse.

Quand je mentionne la cellule laïcité, on m'oppose les référents laïcité et on se demande si je ne fais pas une fausse annonce. Mais je suis parfaitement capable de reconnaître la qualité de ce qui a été fait auparavant ! Je veux prolonger cette action. Au-delà de l'observation et du conseil, l'unité interviendra en appui aux équipes pédagogiques confrontées à des atteintes à la laïcité. À l'échelle nationale sera élaborée une doctrine nationale, puisqu'il faut bien prendre en compte la casuistique juridique... Il y aura une déclinaison dans chaque rectorat, pour que des équipes interviennent dans les établissements. Je veux instaurer une sorte de subsidiarité. Il faut une cohésion d'équipe lorsqu'un enseignant fait appel au chef d'établissement, par exemple lorsque les cours de science sont perturbés par des affirmations farfelues. L'institution de l'éducation nationale incarne la République, la science, le savoir. On a besoin d'équipes soudées, qui dialoguent avec les familles. Ensuite, si l'établissement se sent seul, c'est l'académie qui vient en soutien. Et si l'académie se sent seule, c'est le ministre qui viendra en soutien. Sur ce sujet, on ne doit pas du tout sentir la République reculer ; on doit, au contraire, sentir qu'elle est une, indivisible, laïque. C'est absolument fondamental ! Je veux cibler ici le sentiment de solitude de certains professeurs face à certains types de phénomènes. Rien ne peut être relativisé en la matière. Nous travaillons à la mise en place de mesures concrètes, le tout dans un état d'esprit que j'ai d'ores et déjà demandé aux recteurs de diffuser largement.

Madame Billon, je suis d'accord avec vous sur les primes : ce n'est certainement pas l'alpha et l'oméga d'une politique. Elles n'existent pas encore, mais il existe une marge de discussion autour des conditions de leur mise en oeuvre, puisque, comme sur l'ensemble des sujets budgétaires, les moyens doivent être articulés à des objectifs.

Quelles en sont les finalités en éducation prioritaire ? La qualité de la vie professionnelle de ceux qui y travaillent, la stabilité et la mixité des équipes, qui passent par notre capacité à attirer toutes les compétences et toutes les générations. Tous les moyens supplémentaires que nous déploierons seront au service de ce triple objectif, avec des modulations possibles en fonction de nos priorités. Je suis totalement d'accord avec vous, l'argent n'est pas le plus important, même s'il fait évidemment partie des moyens d'incitation.

Ce nouvel état d'esprit de l'éducation prioritaire sera l'élément le plus attractif. Nous avons aujourd'hui de jeunes professeurs qui sont très heureux d'aller enseigner en éducation prioritaire et qui sont très bons dans ce rôle. Il ne faut pas avoir une vision simpliste de ce sujet, mais il est essentiel que les professeurs travaillent avec plaisir. Tant mieux si, par ailleurs, ils sont récompensés pour cela. On sait que certaines idées sont bonnes, comme l'affectation d'un groupe de professeurs à un projet éducatif commun.

Les professeurs sont en première ligne du dispositif « devoirs faits ». Ils sont en quelque sorte chefs d'équipe. En aucun cas les autres intervenants ne doivent être considérés comme des concurrents, mais plutôt comme des coopérants à la mission exercée d'abord par le professeur. Vous avez dit que le métier n'était plus valorisé aujourd'hui et m'avez demandé de faire rêver la jeunesse.

Ce point fondamental rejoint la question de M. Ouzoulias sur la crise de la vocation enseignante. Je répondrai en commençant pas une remarque pessimiste : le phénomène est mondial, ce qui doit nous faire relativiser les débats sur l'efficacité de la politique qui a été menée sous tel ou tel quinquennat. Il se décline partout selon les mêmes caractéristiques, avec une diminution des vocations par exemple dans les matières scientifiques, en particulier les mathématiques. Nous devons mettre en oeuvre une stratégie extrêmement volontariste pour compenser ce phénomène assez structurel.

Je poursuivrai par les remarques optimistes, qui sont heureusement plus nombreuses. Au moment où l'on évoque la transformation profonde, voire la disparition d'un certain nombre de métiers du fait des révolutions technologiques, je suis profondément convaincu que le métier de professeur va se développer, se transformer en raison de ces bouleversements, mais qu'il restera fondamentalement le même dans ses grands principes et qu'il sera encore plus utile au sein de la société de demain.

Ce rôle de professeur dans la société de demain, nous devons tous le valoriser dans nos discours publics. Il est évidemment de mon devoir de m'exprimer très positivement sur la fonction professorale. En plusieurs occasions, lorsque des éléments négatifs ont été prononcés contre les professeurs, je me considère comme le défenseur de principe de cette fonction essentielle. Nos discours et nos attitudes sont extrêmement importants pour cette valorisation. D'où mon appel à l'ensemble de la société française de toujours respecter les professeurs.

À l'avenir, cette vocation professorale pourra être stimulée. Elle le sera en diversifiant les sources de recrutement. De plus en plus de jeunes étudiants brillants cherchent un sens à leur futur métier. Le métier de professeur peut répondre à ce besoin, grâce à la diversification des parcours, des perspectives de carrière au sein de l'éducation nationale. Cela contribuera à la lutte contre la crise des vocations.

Le dialogue et l'information entre parents et professeurs vont continuer à évoluer, après la progression enregistrée ces dernières années grâce aux environnements numériques de travail. Pour la classe de terminale, les « Fiches avenir » permettront aux élèves d'émettre des voeux.

Monsieur Grosperrin, il est effectivement difficile dans certains collèges de mobiliser les enseignants pour l'opération « devoirs faits ». Il faut au moins réussir à mobiliser un petit groupe de professeurs. Nous oeuvrons en ce sens.

La question très importante des manuels scolaires a suscité de très nombreux commentaires. Je n'ai jamais évoqué la suppression de la subvention de l'État. Je me suis juste permis de m'interroger sur la rationalité du financement des manuels des collèges par l'État, quand on sait que ce n'est pas le cas pour l'école primaire et le lycée. On peut vivre avec des anomalies, mais la question mérite d'être posée. L'an prochain, le budget sera de 16 millions d'euros, supérieur à ce qu'il était voilà trois ans. Durant les deux dernières années, les nouveaux programmes justifiaient une subvention exceptionnelle. On revient donc à la normale. J'ai commencé à avoir des discussions avec les éditeurs, qui doivent se poursuivre entre ceux-ci, l'éducation nationale et l'ensemble de la société française. L'objectif est que chaque élève dispose d'un manuel dans le premier degré et qu'il puisse aussi bénéficier du numérique, absolument indispensable. Les moyens sont peut-être insuffisants, mais ils ont le mérite d'exister.

Il existe effectivement un différentiel entre la situation des contractuels de l'enseignement privé et ceux de l'enseignement public. Ce phénomène s'est d'ailleurs accentué ces derniers temps et nous devons le regarder en face. Comme je l'ai indiqué récemment à un député, nous examinons les solutions envisageables à long terme.

La gestion des ressources humaines a vocation à évoluer comme vous le souhaitez, monsieur Ouzoulias. Réjouissons-nous de pouvoir manifester une unité nationale sur ces sujets. Sur les taux d'encadrement, notre approche doit être fine, à la mesure des moyens dont nous disposons et des études réalisées en la matière. Ce travail peut être très efficace dans les petites classes. Il devrait donc avoir une incidence sur les réflexions futures.

Le dispositif « plus de maîtres que de classes » ne va pas disparaître : je ne renie donc nullement mes propos. Il atteint environ 70 % cette année et n'avons pas vocation à le faire baisser à la rentrée prochaine. En l'espèce, c'est le pragmatisme qui nous inspire. J'attends les évaluations du dispositif pour envisager de nouvelles actions. Sachez que je n'ai cherché en aucun cas à opposer deux dispositifs ; j'encourage le dédoublement, car des études ont démontré son efficacité.

Concernant Saint-Martin et Saint-Barthélemy, où je me suis rendu à deux reprises, notre plan de court terme a fonctionné : tous les élèves de Saint-Martin sont aujourd'hui scolarisés. Notre plan d'urgence de reconstruction est lui aussi pragmatique et vise certaines recompositions.

Mme Catherine Morin-Desailly, président e. - Merci de cet exposé, monsieur le ministre. Ceux de nos collègues qui le souhaitent vont vous interroger, mais compte tenu du temps imparti, peut-être pourriez-vous approfondir certains sujets par écrit.

Mme Marie-Thérèse Bruguière . - Merci de ces informations, monsieur le ministre. Je souhaite vous interroger sur un serpent de mer, souvent évoqué en commission et aujourd'hui d'actualité dans le cadre du présent PLF et à l'orée de la future loi sur la formation : en septembre, le Gouvernement a annoncé qu'une loi serait présentée au Parlement, en 2018, pour réformer l'apprentissage, la formation et l'assurance-chômage. Ces trois sujets pourtant très différents se rejoignent sur la cohérence et la complémentarité.

Aujourd'hui, en France, deux contrats d'apprentissage ont le même objet mais ne présentent pas les mêmes avantages. D'un côté, le contrat d'apprentissage permet de former les jeunes de 16 à 26 ans et fonctionne très bien. De l'autre, le contrat de professionnalisation est rejeté par les employeurs, car le temps qu'ils consacrent à la formation est une perte de productivité et les oblige à payer des charges ; ce contrat est inefficace et pénalise les entreprises et les actifs de plus de 26 ans, qui ne peuvent accéder à une formation de qualité. Il faut garantir un apprentissage multi-générationnel accessible à tous.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Tout cela concerne des réformes à venir. Merci de vous en tenir aux questions budgétaires, chère collègue.

Mme Marie-Thérèse Bruguière . - La semaine dernière, devant la commission des finances de l'Assemblée nationale, vous avez annoncé une baisse substantielle de l'aide de l'État aux départements pour l'acquisition de manuels scolaires.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - La question a déjà été posée et la réponse développée.

M. Olivier Paccaud . - Un budget, ce sont des chiffres, mais c'est aussi une philosophie. De nombreuses mesures sont très positives et pleines de bon sens. Je souhaiterais plus particulièrement vous interroger sur la problématique de la prime. Certes, comme l'a dit Mme Billon, une prime n'est peut-être pas le meilleur moyen d'évaluer une vocation. Mais vous allez accorder des primes pour fidéliser des enseignants dans des secteurs où ils bénéficient déjà de meilleures conditions de travail qu'ailleurs. Il y a trois jours, j'étais dans une école à Morangles, dans le sud de l'Oise, qui compte 450 habitants et deux classes à quadruples niveaux. Les niveaux multiples sont d'ailleurs très fréquents en zones rurales. Or ces enseignants n'ont pas de prime, alors que la charge de travail est plus importante. Cela ne mériterait-il pas une réflexion en vue d'une redistribution de cette nouvelle prime ?

Mme Maryvonne Blondin . - Monsieur le ministre, c'est vous qui gérez le plus d'employés en France et en Europe. Vous évoquez le bien-être à l'école et la bienveillance, des notions auxquelles nous adhérons pleinement. Néanmoins la manière d'y parvenir est un peu difficile, notamment pour la médecine scolaire de prévention, aussi bien pour les enseignants que pour les enfants. Depuis 2013 et l'intégration du parcours continu de santé dans la refondation de l'école, la situation n'a pas beaucoup évolué. Les enseignants ne bénéficient pas d'un suivi de santé. Quelles actions comptez-vous mettre en place ? Comment développer l'attractivité de ces médecins, en lien avec les autres collectivités ?

Mme Sonia de la Provôté . - Merci de tous vos éclaircissements, monsieur le ministre. Je souhaiterais vous interroger sur la scolarisation des enfants de moins de trois ans et l'accompagnement à la parentalité. Ces dernières années, plusieurs études ont montré que la scolarisation précoce était importante pour beaucoup enfants en termes de socialisation et de qualité d'apprentissage linguistique. En outre, un accompagnement particulier est parfois nécessaire pour des parents qui ont parfois un vécu douloureux de l'école - c'est un euphémisme.

Avez-vous prévu des actions particulières en faveur du renforcement de l'accompagnement à la parentalité et de la sécurisation des enfants de moins de trois ans ? Je pense à des classes passerelles, à des réseaux école-parents ou des réseaux parentalité, tous ces sujets controversés qui méritent notre attention.

Mme Laure Darcos . - Je souhaite évoquer la question des enfants atteints de handicap. Monsieur le ministre, vous avez parlé de la transformation massive des personnels embauchés sous contrats aidés en accompagnants des élèves en situation de handicap (AESH) et des recrutements à venir. Or il existe une différence entre les deux statuts, puisqu'un diplôme dans le domaine de l'aide à la personne est demandé aux AESH. Cela ne va-t-il pas accentuer les problèmes de recrutement comme cela s'est produit encore cette année, notamment dans le département de l'Essonne ? Cela est également dû au traitement tardif des dossiers en maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

Enfin, si la règle commune devait s'appliquer, ce qui conduirait à ne pas attribuer de postes d'enseignant en unités localisées pour l'inclusion scolaire (ULIS) pour compter les 12 élèves dans l'effectif global de l'école, le seuil de création d'une classe supplémentaire ne serait peut-être pas atteint partout. Pouvez-vous nous rassurer sur ce point, monsieur le ministre, dans la mesure où certaines écoles pourraient subir une dégradation de l'encadrement des élèves ?

Mme Nicole Duranton . - Monsieur le ministre, concernant le plan « mercredi », vous avez annoncé la mise en place, en lien avec les ministères des sports et de la culture, d'activités culturelles et sportives de qualité pour nos enfants. Vous avez notamment déclaré que l'État souhaitait venir « en appui » des collectivités locales, ce qui veut souvent dire « à la charge » de celles-ci. Pouvez-vous nous garantir que ce nouveau plan n'alourdira pas la charge financière de nos collectivités territoriales ? Avez-vous l'intention d'engager une véritable réflexion nationale sur l'amélioration de la rémunération des enseignants ?

M. Jean-Raymond Hugonet . - « Lire, écrire, compter, respecter autrui, » voilà une feuille de route très rassurante, monsieur le Ministre. Vous auriez pu ajouter « chanter », conformément à l'excellente initiative que vous avez prise à la rentrée, voire « jouer de la musique » comme Calogero. Néanmoins, pour que cela soit possible, il faut des intervenants musiciens dans les communes, qui devront être payés par les collectivités. Les professeurs ne sont pas formés à cela. Que prévoyez-vous en la matière dans le PLF pour 2018 ?

Mme Céline Boulay-Espéronnier . - Monsieur le ministre, quels moyens humains et financiers pouvez-vous mettre en place pour augmenter les moyens de lutte contre les différentes formes de harcèlement en milieu scolaire et notamment son corollaire tragique et grandissant, le cyber-harcèlement. Les équipes mobiles de sécurité (les EMS) présentes sur l'ensemble du territoire, les équipes mobiles académiques (EMAS) pour Paris se composent d'équipes réduites de 10 à 15 personnes : leur mission va de la sécurisation aux abords des établissements scolaires et la lutte contre le harcèlement, mais tous n'ont pas les moyens de mettre en place un programme sur la prévention. Certaines écoles, notamment à Paris, se partagent parfois un psychologue scolaire pour plusieurs milliers d'élèves. Comment, dans ces conditions, pouvons-nous espérer une lutte efficace contre le harcèlement ?

Si des associations spécialisées et de grande qualité interviennent dans les établissements scolaires, et si vous avez vous-même souligné l'importance du partenariat constant entre les associations et l'État, celles-ci ne peuvent se substituer à la responsabilité de l'État dans ce domaine. Il faudrait prévoir une ligne budgétaire précise pour la lutte contre le harcèlement, notamment la formation des enseignants.

M. Guy-Dominique Kennel . - La dernière fois, j'ai posé ma question sur l'apprentissage en dernier et M. le ministre n'a pas eu le temps d'y répondre. J'attends toujours la réponse écrite que l'on m'avait promise. Aujourd'hui, j'ai bien compris que l'anneau « apprentissage » n'était pas encore exploré et que vous ne pouviez pas me donner de réponse. Sur l'orientation, les quatre anneaux ne sont pas non plus encore explorés. Ma question n'est plus qu'une coquille vide...

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente. - Nous aurons des séances de travail sur ces sujets auxquelles sera convié le ministre. Vous serez le premier orateur à intervenir, monsieur Kennel.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Lors des mois à venir, une forte concertation aura lieu sur des sujets qui peuvent s'articuler entre eux. Nos échanges serviront de préalable à cette démarche.

Sur les primes, prenons garde à ne pas opposer la ville et la campagne. Nous allons mener une politique très volontariste pour lutter contre les difficultés urbaines, mais aussi pour avancer sur les problématiques rurales qui appellent des réponses différentes. Je suis très motivé sur ce dernier point. Notre système de primes devrait-il concerner aussi les professeurs en milieu rural ?

M. Olivier Paccaud . - Les doubles, triples et quadruples niveaux sont fréquents en milieu rural.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Cela nécessite beaucoup de professionnalisme et peut se révéler très enthousiasmant pour le professeur et les élèves. Les écoles rurales ne sont pas vouées à disparaître, car ce qui est parfois perçu comme un problème est en réalité une opportunité, pour peu que l'on donne aux professeurs les outils pédagogiques dont ils ont besoin.

J'en viens au bien- être à l'école et au suivi de la santé. Madame Blondin, je vous remercie d'avoir évoqué autant la santé des enseignants que celle des élèves, car nous devons inclure les professeurs dans la stratégie nationale de la santé portée par la ministre de la santé en faveur de l'ensemble des personnels de la fonction publique. Nous ferons converger les stratégies de la santé, de l'éducation nationale et des collectivités locales. La ministre et moi-même nous sommes fixés un premier objectif : l'effectivité de la visite médicale à six ans, notamment pour dépister d'éventuels troubles auditifs et oculaires.

Je profite de cette occasion pour répondre à un petit malentendu médiatique. J'ai répondu au Parisien qu'il y avait une inflation des demandes d'orthophonistes. Je n'ai pas dit qu'il fallait moins d'orthophonistes en classe. Mais ils doivent y être pour de bonnes raisons. Or on constate parfois une inflation des demandes d'orthophonistes, alors que le sujet doit être traité pédagogiquement. C'est tout ce que j'ai voulu dire, mais mes propos ont été transformés. Vive les orthophonistes et les psychologues ! On a besoin d'eux, mais pour des cas bien particuliers. Je dresse un simple constat, étayé par la littérature très fournie sur ces points. Oui, nous devons largement améliorer la situation et nous le ferons en lien avec les collectivités.

Madame de la Provôté, je suis également préoccupé par la scolarisation des enfants de moins de trois ans, qui doit être abordée de façon pragmatique, car elle est bénéfique pour certains et pas pour d'autres. Malheureusement, parfois, les élèves qui en auraient le plus besoin n'en bénéficient pas, de même que certains élèves de plus de trois ans ne sont pas scolarisés aujourd'hui. Budgétairement, nous avons toujours soutenu la scolarisation des enfants de moins de trois ans, mais l'enjeu est de cibler les besoins.

Vous avez évoqué l'accompagnement à la parentalité, qui fait également partie de cette politique globale familiale à mener avec la ministre de la santé, avec une attention à porter à la politique du langage dans les premiers âges.

Madame Darcos, la question des difficultés de recrutement liées à l'évolution des contrats aidés vers les AESH est très pertinente, mais il suffira de justifier d'une expérience comme auxiliaire de vie scolaire (AVS) pour postuler. De façon générale, nous devons viser la professionnalisation des intervenants et leur formation, la plus large possible, au même titre que celle des professeurs.

S'agissant des ULIS, nous sommes tout à fait capables de maintenir de telles unités avec moins de 12 élèves. Nous en compterons 100 de plus l'an prochain et n'en supprimerons aucune, sauf cas très particuliers.

Madame Duranton, le futur plan « mercredi » étant en préparation, nous tiendrons compte de votre préoccupation concernant le risque d'une charge financière plus importante pour les collectivités locales. Le but est plutôt de les soulager. Toute notre action jusqu'à présent a été en ce sens.

Nous travaillons en collaboration avec l'Association des maires de France (AMF) pour assurer le lien avec la Caisse nationale d'allocations familiales de façon à ce que les démarches soient simplifiées pour les activités périscolaires. Nous souhaitons que les moyens de l'État affectés au plan « mercredi », en plus du soutien des communes, ne se traduisent par le désengagement de quiconque. J'ai bien conscience que les collectivités ne souhaitent pas assumer de charges supplémentaires en la matière. Nous visons une synergie.

La rémunération des enseignants est un sujet totalement légitime, surtout si l'on établit une comparaison avec l'étranger. Les enseignants de l'école primaire sont les plus concernés par le rattrapage qui devra avoir lieu quand nous en aurons les moyens budgétaires. Honnêtement, la situation actuelle empêche certaines actions : les augmentations de salaire dans l'éducation nationale sont difficiles à assumer avec un million de personnels ! Nous devons travailler à une vision pluriannuelle du sujet, mais aussi à ouvrir des perspectives de carrière et mieux gérer nos ressources humaines.

Monsieur Hugonet, avec la ministre de la culture, j'ai voulu que la musique soit l'une de nos grandes priorités. De multiples témoignages ont prouvé l'effet important de ce dispositif pour la place de la culture à l'école. C'était l'amorce d'un plan de déploiement de la musique, mais aussi d'autres pratiques culturelles telles que le théâtre et la lecture. Cela suppose l'intervention de musiciens et l'augmentation du nombre de professeurs d'éducation musicale.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - De belles expérimentations ont cours en France, monsieur le ministre. L'objectif visé par le ministère de la culture de créer une chorale par école, en lien avec les conservatoires dont les budgets seront de nouveau augmentés, implique une vraie réflexion avec les collectivités territoriales. En effet, il ne s'agit pas de décréter une chorale pour qu'elle prenne forme ; cela suppose du professionnalisme et une connexion à des pôles-ressources, conservatoires ou écoles de musique.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre . - Encore un sujet sur lequel nous travaillons de concert.

Enfin, madame Boulay-Espéronnier, le harcèlement est un sujet à prendre très au sérieux, je l'ai dit lors de la Journée de lutte contre le harcèlement. Nous allons vraiment travailler toute l'année sur cette question. L'épouse du Président de la République va d'ailleurs s'impliquer personnellement pour marquer les esprits. Je souscris à l'intérêt de s'inspirer des bonnes pratiques à Paris pour aller de l'avant.

Ce sujet implique la sensibilisation et la formation des acteurs adultes de tous les établissements pour qu'ils aient le réflexe de combattre à la racine le phénomène chaque fois qu'il est visible. Nous avons des objectifs qualitatifs pour inverser la tendance, afin que le droit soit du côté du plus faible, la force du côté du droit, et que les principes de la République s'appliquent en l'espèce. Chaque classe est une petite république ; si l'on n'est pas combatif sur ces phénomènes à l'école, il ne faut pas s'étonner de les voir perdurer au sein de la société. Je me fixe à moi-même des objectifs de réussite en la matière.

Mme Catherine Morin-Desailly, présidente . - Merci de ces éclaircissements, monsieur le ministre. Nous avons encore de longs échanges en perspective.


* 1 Cour des comptes, Gérer les enseignants autrement, une réforme qui reste à faire, rapport public thématique , octobre 2017.

* 2 IGAENR, Suivi trimestriel des académies - Synthèse des notes des correspondants académiques , rapport n° 2014-41, juin 2014.

* 3 Cité in Avis n° 144 (2016-2017) de M. Jean-Claude Carle et Mme Françoise Férat, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 24 novembre 2016.

* 4 OCDE, Regards sur l'éducation 2017 - fiche pays : France , octobre 2017.

* 5 Idem.

* 6 En 2015, on comptait un enseignant pour 19 élèves en France, quand la moyenne de l'OCDE s'établissait à un enseignant pour 15,4 élèves.

* 7 Réponse au questionnaire budgétaire.

* 8 MEN, Dossier de presse de la rentrée scolaire 2017-2018, septembre 2017.

* 9 Comité de suivi de la refondation de l'école, rapport annuel au Parlement, 13 novembre 2015.

* 10 MM. Jean-Claude Carle, Thierry Foucaud, Mme Mireille Jouve et M. Gérard Longuet, Rythmes scolaires : faire et défaire, en finir avec l'instabilité , rapport d'information n° 577 (2016-2017), fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication et de la commission des finances, déposé le 7 juin 2017.

* 11 Indicateur 2.2, PAP 2018.

* 12 Selon le ministère, dans 86 % des cas, les locaux ont permis un dédoublement des classes de CP. Dans les 14 % restant, ce dispositif s'est traduit par la co-intervention de deux enseignants dans la même salle de classe.

* 13 IGAENR, Synthèse des notes des correspondants académiques , rapport n° 2017-030, mai 2017.

* 14 Idem.

* 15 Guy-Dominique Kennel, Une orientation réussie pour tous les élèves , rapport d'information n° 737 (2015-2016), fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 29 juin 2016.

* 16 Cour des comptes, La formation continue des enseignants , référé, avril 2015.

* 17 Cour des comptes, Gérer les enseignants autrement, une réforme qui reste à faire , rapport public thématique, octobre 2017.

* 18 Audition du 14 novembre 2017.

* 19 Réponse au questionnaire budgétaire.

* 20 Académie nationale de médecine, La Santé scolaire en France , octobre 2017.

* 21 Décret n° 2017-1108 du 27 juin 2017 relatif aux dérogations à l'organisation de la semaine scolaire dans les écoles maternelles et élémentaires publiques.

* 22 Projet de loi de finances rectificative pour 2017, n° 384, déposé le 15 novembre 2017.

* 23 Rythmes scolaires : faire et défaire, en finir avec l'instabilité , rapport d'information n° 577 (2016-2017), op. cit.

* 24 Ces crédits avaient été transférés dans le PLF 2017 depuis le programme 214 pour des raisons d'affichage politique.

* 25 Conseil d'État, 27 janvier 1988, Giraud , n° 64076. Voir également les décisions : TA Versailles, 3 novembre 2003, M. K. c/recteur de l'académie de Versailles , n° 0104490 ; TA Clermont-Ferrand, 14 juin 2006, M. Charasse , n° 0500025 ; voir dernièrement TA Cergy-Pontoise, 21 juillet 2017, M. et Mme Bollérot , n° 1508790.

* 26 Audition du 14 novembre 2017.

* 27 Cour des comptes, Gérer les enseignants autrement, une réforme qui reste à faire , op. cit.

* 28 Cour des comptes, Le remplacement des enseignants absents , référé, 23 décembre 2016.

* 29 Article 3-2 du décret n° 2008-775 du 30 juillet 2008 relatif aux obligations de service et aux missions des personnels enseignants du premier degré ; Note de service n° 2014-135 du 10 septembre 2014 relative au dispositif de récupération des heures d'enseignement en dépassement des obligations de service hebdomadaires.

* 30 Cour des comptes, ibid.

* 31 Loi n° 51-515 du 8 mai 1951 relative à la situation du personnel remplaçant de l'enseignement du premier degré.

* 32 Décret n° 99-823 du 17 septembre 1999 relatif à l'exercice des fonctions de remplacement dans les établissements d'enseignement du second degré.

* 33 MEN - DEPP, Les enseignants remplaçants du second degré public , note d'information n° 12.26, décembre 2012.

* 34 IGEN et IGAENR, L'entrée dans la carrière des nouveaux enseignants , rapport n° 2017-062, juillet 2017.

* 35 L'article 6 quater de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État prévoit que « les remplacements de fonctionnaires (...) , dans la mesure où ils correspondent à un besoin prévisible et constant, doivent être assurés en faisant appel à d'autres fonctionnaires. »

* 36 IGEN et IGAENR, Les personnels enseignants contractuels , n° 2017-067, juillet 2017.

* 37 Décret n° 2005-1035 du 26 août 2005 relatif au remplacement de courte durée des personnels enseignants dans les établissements d'enseignement du second degré.

* 38 Note de service n° 2010-140 du 20 septembre 2010 relative à l'amélioration du dispositif de remplacement des personnels enseignants dans les établissements d'enseignement du second degré public.

* 39 Cour des comptes, op. cit.

* 40 PAP 2018.

* 41 PAP 2018.

* 42 Le potentiel net de remplacement et de suppléance comprend les personnels réellement disponibles pour effectuer, dès que nécessaire, un remplacement ou une suppléance ; à l'inverse du potentiel brut qui correspond à l'ensemble des personnels affectés en remplacement, y compris les indisponibles (prêts à l'université, missions académiques, congés maladie des TZR, etc.).

* 43 Cette perte provient de quotités trop faibles de service (867 ETP), des surnombres disciplinaires (576 ETP), des absences des TZR (710 ETP) ainsi que des personnels indisponibles car inaptes à l'enseignement, en attente d'un reclassement ou chargés d'une mission particulière autre que l'enseignement (518 ETP).

* 44 PAP 2018.

* 45 PAP 2018.

* 46 Cour des comptes, op. cit.

* 47 Idem .

* 48 IGAENR, Synthèse des notes des correspondants académiques de l'IGAENR , rapport n° 2017-030, mai 2017.

* 49 Cour des comptes, Gérer les enseignants autrement, une réforme qui reste à faire , op. cit.

* 50 Rapport sur l'état de la fonction publique et les rémunérations, PLF 2018. Ces proportions d'agents ne s'additionnent pas, un agent peut en effet avoir eu recours à deux types de congé différents la même année.

* 51 MEN - DEPP, Les congés de maladie ordinaire des enseignants du secteur public , note d'information n° 2015-07, février 2015.

* 52 IGAENR, Le remplacement des enseignants absents , rapport n° 2011-056, juillet 2011.

* 53 IGAENR, rapport n° 2017-030, op. cit.

* 54 IGAENR, Synthèse des notes des correspondants académiques de l'IGAENR , rapport n° 2016-098, décembre 2016.

* 55 IGAENR, rapport n° 2017-030, op. cit.

* 56 MEN - Audition du 26 octobre 2017.

* 57 MEN - Audition du 26 octobre 2017.

* 58 Cour des comptes, Gérer les enseignants autrement, une réforme qui reste à faire , op. cit.

* 59 PAP 2018.

* 60 Circulaire n° 2017-050 du 15 mars 2017 relative à l'amélioration du dispositif de remplacement.

* 61 Décret n° 2014-942 du 20 août 2014 portant modification du décret n° 2008-775 du 30 juillet 2008 relatif aux obligations de service des personnels enseignants du premier degré.

* 62 Décret n° 2014-940 du 20 août 2014 relatif aux obligations de service et aux missions des personnels enseignants exerçant dans un établissement public d'enseignement du second degré

* 63 Cour des comptes, Gérer les enseignants autrement, une réforme qui reste à faire , op. cit.

* 64 Circulaire n° 2015-057 du 29 avril 2015 relative aux missions et obligations réglementaires de service des enseignants des établissements publics d'enseignement du second degré.

* 65 IGAENR, Synthèse des notes des correspondants académiques de l'IGAENR , rapport n° 2016-098, décembre 2016.

* 66 Circulaire n° 2017-050, précitée, et décret n° 2017-856 du 9 mai 2017 relatif à l'exercice des fonctions de remplacement des enseignants du premier degré.

* 67 Réponse au questionnaire budgétaire.

* 68 Cour des comptes, Gérer les enseignants autrement, une réforme qui reste à faire , op. cit.

* 69 Cour des comptes, Le remplacement des enseignants absents , op. cit.

* 70 IGAENR, rapport n° 2016-098, op. cit.

* 71 Idem .

* 72 Cour des comptes, Gérer les enseignants autrement, une réforme qui reste à faire , op. cit.

* 73 IGAENR, Le remplacement des enseignants absents , op. cit.

* 74 Ce principe, déjà affirmé par la circulaire de 2010, avait connu une application très limitée.

* 75 Cour des comptes, référé, op. cit.

* 76 IGAENR, Le remplacement des enseignants absents , op. cit.

* 77 IGAENR, Synthèse des notes des correspondants académiques de l'IGAENR , rapport n° 2017-030, mai 2017.

* 78 Idem .

* 79 Dans le premier degré, l'IGAENR rapporte que « le sentiment général qui se dégage [...] est celui d'une dégradation progressive ».

* 80 IGAENR, rapport n° 2016-098, op cit.

* 81 Idem .

* 82 IGAENR, Préparation de la rentrée scolaire 2017-2018, Mise en oeuvre des mesures annoncées par le ministre , rapport n° 2017-060, juillet 2017.

* 83 Audition du 14 novembre 2017.

* 84 IGAENR, rapport n° 2016-098, op. cit.

* 85 Audition du 14 novembre 2017.

* 86 Audition du 14 novembre 2017.

* 87 IGEN et IGAENR, L'accueil, la gestion et la formation des personnels contractuels , rapport n° 2014-016, avril 2014.

* 88 Idem .

* 89 Décret n° 2016-1171 du 29 août 2016 relatif aux agents contractuels recrutés pour exercer des fonctions d'enseignement, d'éducation et d'orientation dans les écoles, les établissements publics d'enseignement du second degré ou les services relevant du ministre chargé de l'éducation nationale.

* 90 IGAENR, rapport n° 2016-098, op. cit.

* 91 Cour des comptes, référé, ibid.

* 92 IGEN et IGAENR, Les personnels enseignants contractuels , rapport n° 2017-067, juillet 2017.

* 93 Audition du 25 octobre 2017.

* 94 IGEN et IGAENR, Les personnels contractuels , op. cit.

* 95 Réponse au questionnaire de votre rapporteur pour avis.

* 96 Audition du 25 octobre 2017.

* 97 IGAENR, Le remplacement des enseignants absents , rapport n° 2011-056, juin 2011.

* 98 Idem.

* 99 L'IGAENR soulignait que « ce chiffre, toutefois, est à prendre avec la plus grande précaution dans la mesure où il n'existe pas [...] de statistiques véritablement fiables sur le suivi des absences ».

* 100 Audition du 25 octobre 2017.

* 101 À plus forte raison lorsque les crédits de l'action n° 11 du programme 139 font l'objet d'une sous-consommation chronique.

* 102 Article L. 521-1 du code de l'éducation.

* 103 IGAENR, Le remplacement des enseignants absents , op. cit.

* 104 Décret n° 2014-940 du 20 août 2014 relatif aux obligations de service et aux missions des personnels enseignants exerçant dans un établissement public d'enseignement du second degré.

* 105 Cour des comptes, Le suivi individualisé des élèves : une ambition à concilier avec l'organisation du système éducatif , rapport public thématique, février 2015.

* 106 Cour des comptes, Gérer les enseignants autrement, une réforme qui reste à faire , op. cit.

* 107 M. Gérard Longuet, Les heures supplémentaires dans le second degré : un enjeu budgétaire et de gestion des ressources humaines , rapport d'information n° 194 (2016-2017), fait au nom de la commission des finances du Sénat, déposé le 7 décembre 2016.

* 108 Cour des comptes, Gérer les enseignants autrement, une réforme qui reste à faire , op. cit.

* 109 Idem .

* 110 M. Gérard Longuet, Les heures supplémentaires dans le second degré : un enjeu budgétaire et de gestion des ressources humaines , op. cit.

* 111 Réponse au questionnaire budgétaire.

* 112 Loi n° 84-1285 du 31 décembre 1984 portant réforme des relations entre l'État et les établissements d'enseignement agricole privés.

* 113 Avis n° 144 (2016-2017) sur les crédits de la mission Enseignement scolaire de Jean-Claude Carle et Françoise Férat, fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 24 novembre 2016.

* 114 Avis n° 144 (2016-2017) sur les crédits de la mission Enseignement scolaire de Jean-Claude Carle et Françoise Férat, op. cit.

* 115 Direction de l'évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP) du ministère de l'éducation nationale, Le niveau de formation et de diplôme : déterminant dans l'insertion des lycéens professionnels, note d'information n° 12 de juin 2017.

* 116 Avis n° 144 (2016-2017) précité.

* 117 agriculture.gouv.fr/thématique-générale/enseignement-et-formation

* 118 educagri.fr

* 119 Article L. 811-1 du code rural et de la pêche maritime.

* 120 Ministère de l'agriculture et de l'alimentation/CGAAER, La formation continue des enseignants de l'enseignement agricole public , rapport n° 16107, 25 août 2017.

* 121 Réponse au questionnaire budgétaire.

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