B. L'AUGMENTATION DES CRÉDITS EN 2018 EST CONCENTRÉE SUR LES DISPOSITIFS D'HÉBERGEMENT ET DE LOGEMENT ADAPTÉ

Les crédits du programme 177 se répartissent en trois actions d'importance très inégale et sont essentiellement affectés au financement de dispositifs d'hébergement et de logement adapté.

L'augmentation des crédits prévue par le PLF est concentrée sur l'action 12, consacrée à l'hébergement et au logement adapté, les crédits des autres actions étant en diminution.

Répartition des crédits du programme 177 en 2018

Source : Projet annuel de performance du programme 177

1. Action 11 : Prévention de l'exclusion

L'action 11, consacrée à la prévention de l'exclusion, est dotée en 2018 de 50,45 millions d'euros, soit une baisse de 11 millions d'euros par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.

Cette action finance d'une part des allocations et prestations d'aide sociale en faveur de personnes âgées et handicapées qui sont à la charge de l'État par dérogation à la compétence de droit commun des départements.

Il s'agit principalement de la prise en charge des frais de séjour en établissement et d'aides diverses versées aux personnes âgées ou handicapées pour lesquelles la domiciliation dans un département n'est pas établie. Fin 2016, l'État prenait en charge les frais d'hébergement de 1 392 personnes âgées et 410 personnes handicapées. Cette sous-action finance par ailleurs l'allocation différentielle pour personne handicapée actuellement en extinction (70 bénéficiaires fin 2016) et de l'allocation simple d'aide à domicile versée à des personnes âgées ne remplissant pas les conditions d'éligibilité à l'allocation de solidarité pour les personnes âgées (346 bénéficiaires fin 2016).

Les crédits destinés au financement des allocations et prestations d'aide sociale aux personnes âgées et handicapées sont budgétés à hauteur de 32,9 millions d'euros en 2018, soit une baisse d'environ 7 millions d'euros par rapport à la LFI 2017 liée à la diminution tendancielle du nombre de bénéficiaires.

L'action 11 finance par ailleurs des dispositifs de prévention et d'accès aux droits, orientés vers les gens du voyage. Il s'agit principalement du financement de l'allocation de logement temporaire 2 (ALT 2), versée aux gestionnaires d'aires d'accueil. Cette sous-action regroupe également les crédits destinés aux subventions versées à des associations oeuvrant dans le secteur social de proximité.

L'accueil des gens du voyage

L'obligation de création de places d'accueil destinées aux gens du voyage a été instaurée pour la première fois par la loi du 31 mai 1990 4 ( * ) et rénovée par la loi du 5 juillet 2000 5 ( * ) (première et seconde lois « Besson »). Cette obligation incombe aux communes ou aux intercommunalité, qui peuvent l'exercer par le biais d'une convention passée avec un gestionnaire. Les modalités d'application de cette obligation ont notamment été modifiées par la loi « NOTRe » du 7 août 2015 6 ( * ) et par la loi du 22 décembre 2016 relative à l'égalité et à la citoyenneté. Le Sénat a adopté le 31 octobre 2017 deux propositions de loi visant notamment à renforcer la lutte contre les installations illicites 7 ( * ) .

Une aide au logement temporaire (ALT 2) est prévue pour aider les communes à faire face à cette obligation. Alors que le montant de cette aide était forfaitaire, la loi de finances pour 2014 8 ( * ) a prévu la modulation de cette aide en fonction du taux d'occupation effective des aires d'accueil. L'ALT 2 est financé conjointement par l'Etat et par la Caisse nationale des allocations familiale (Cnaf).

Le projet annuel de performance du programme 177 mentionne une nouvelle réforme du calcul de l'ALT 2 visant à mieux valoriser le taux d'occupation qui doit entrer en vigueur le 1 er janvier 2018. Cette réforme entraînerait une baisse des dépenses de l'Etat au titre de l'ALT 2.

Le financement de cette aide est assuré à parts égales par l'État et la branche famille de la sécurité sociale.

Les crédits de cette sous-action sont budgétés pour 2018 à hauteur de 17,5 millions d'euros, dont 15,3 millions d'euros au titre de l'ALT 2 et 2,2 millions d'euros au titre des subventions aux associations. Ces crédits sont en diminution par rapport à la LFI 2017, qui prévoyait 17,3 millions d'euros au titre de l'ALT 2 et 2,7 millions d'euros au titre des subventions aux associations.

Crédits de l'action 11

PLF 2018

Évolution
par rapport
à la LFI 2017

Action 11 - Prévention de l'exclusion

50,4

- 16%

Dépenses d'allocations et d'aide sociale
en faveur des personnes âgées et handicapées

32,9

- 18%

Actions de prévention
et d'accès aux droits

17,5

- 13%

2. Action 12 : Hébergement et logement adapté

L'action 12 représente plus de 95 % des crédits du programme 177. Elle finance les dispositifs de veille sociale, les structures et dispositifs d'hébergement ainsi que les dispositifs de logement adapté.

Elle est créditée de 1,89 milliard d'euros, en progression de 225 millions d'euros en valeur et 13,5 % en volume par rapport à la LFI pour 2017.

Crédits de l'action 12 en 2018

(en millions d'euros)

a) La veille sociale

Les crédits destinés à la veille sociale assurent notamment le financement des services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO), des équipes mobiles dont les Samu sociaux et des structures d'accueil de jour.

Les services intégrés d'accueil et d'orientation

La loi Alur du 24 mars 2014 9 ( * ) a prévu la mise en place dans chaque département d'un service intégré d'accueil et d'orientation (SIAO) unique, chargé notamment de gérer la plateforme téléphonique 115 et de recenser l'ensemble des places d'hébergement et de logement adapté disponibles (art. L. 345-2 du CASF).

La mise en place d'un SIAO unique dans chaque département a parfois suscité des résistances lorsque différents acteurs existaient et se partageaient les missions confiées aux SIAO, soit selon une logique de zonage infra-départemental soit selon une logique de séparation entre l'urgence et l'insertion. Selon les informations communiquées à votre rapporteur par la direction générale de la cohésion sociale (DGCS), à la fin du mois d'avril 2017, 4 départements rencontraient encore des difficultés de mise en oeuvre d'un SIAO unique. C'est notamment le cas du département des Deux-Sèvres, où le SIAO « urgence » est rattaché à l'hôpital de Niort alors que le SIAO « insertion » était initialement géré par une association (« Un toit en Gâtine ») qui, faute de moyens suffisants, n'est pas parvenue à mettre en oeuvre une coordination efficace entre les différents acteurs associatifs et les centres communaux d'action sociale notamment. C'est également le cas à Paris, où le SIAO « urgence » est géré par le Samu social alors que le SIAO « insertion » est géré par un groupement de coopération sociale et médico-sociale (GCSMS).

Il a été indiqué à votre rapporteur que le projet de loi relatif au logement qui doit être soumis au Parlement au premier semestre 2018 pourrait contenir une disposition permettant la mise en place de SIAO interdépartementaux.

Par ailleurs, le développement d'un outil informatique (SI-SIAO) se poursuit. Selon les informations communiquées par la DGCS à votre rapporteur, 50 départements utilisent d'ores et déjà le volet « insertion » de ce logiciel, et 6 départements le volet « 115 », une « phase de déploiement en masse » étant en cours.

Les crédits de la veille sociale sont budgétés à hauteur de 126,5 millions d'euros en 2018, soit une progression de 4 % par rapport à la LFI 2017.

Le 115 de Paris face à la gestion de la pénurie

A Paris, le numéro d'appel d'urgence 115 est opéré, comme le SIAO urgence, par le Samu social. À l'occasion d'une visite dans ses locaux, votre rapporteur a pu mesurer à la fois le dévouement de ses personnels et le manque de solutions d'hébergement qui conduit les répondants du 115 à gérer la pénurie.

Quelques chiffres illustrent cette situation préoccupante.

En 2016, le 115 de Paris a reçu 1 756 096 appels, soit une moyenne de 4 800 appels par jour, et n'a pu répondre qu'à 473 346 d'entre eux (1 300 par jour).

En octobre 2017, le taux quotidien de réponse positive était de 62 % pour les hommes isolés, de 23 % pour les femmes isolées et de 6 % pour les familles.

b) L'hébergement

Les crédits destinés au financement des structures et dispositifs d'hébergement représentent les trois quarts des crédits de l'action 12. Ils financent d'une part les dispositifs d'urgence, composés des centres d'hébergement d'urgence (CHU), des nuitées d'hôtel mobilisées pour loger temporairement des personnes sans-abri faute de place dans les CHU ainsi que des places temporaires ouvertes pour faire face notamment aux vagues de grand froid et d'autre part les centres d'hébergement de réinsertion sociale (CHRS).

Ces crédits sont en progression constante sur la période récente et ont permis la création de plus de 50 000 places depuis 2010. Cette augmentation résulte notamment des créations de places en CHU (+ 95 %) et surtout de l'augmentation du nombre de nuitées d'hôtel mobilisées pour faire face à l'urgence (+ 206 %), le nombre de places en CHRS ne progressant que de 10 %.

Évolution du nombre de places dans les différents types d'hébergement

CHU

Hôtel

CHRS

Total

2010

18 593

13 948

39 525

72 066

2011

19 766

16 235

39 346

75 347

2012

22 091

20 727

39 142

81 960

2013

28 692

25 496

39 145

93 333

2014

30 537

32 300

40 690

103 527

2015

31 846

37 962

42 176

111 984

2016

36 217

42 646

43 370

122 233

Progression 2010-2016

+95 %

+206 %

+10 %

+10 %

Source : Projet annuel de performance du programme 177, réponses aux questionaires budgétaires et calculs du rapporteur

En 2018, les crédits dédiés à l'hébergement s'élèveraient à 1,45 milliard d'euros, soit une progression de 15 % par rapport à la LFI pour 2017 et de 13 % par rapport aux crédits consommés en 2016.

Les crédits destinés à l'urgence progressent de 208,8 millions d'euros par rapport à la LFI 2017 pour atteindre 826,6 millions d'euros (+ 34 %).

Les crédits consacrés au financement CHRS connaissent une diminution de 4 % pour s'établir à 627,2 millions d'euros. Aux termes de l'étude d'impact, cette diminution résulterait notamment de la politique de convergence tarifaire engagée depuis plusieurs années. Cette baisse pose la question de la poursuite de la politique de mise sous statut CHRS de places auparavant financées par subvention (4 425 places entre 2014 et 2016).

La démarche de convergence tarifaire des CHRS

Depuis 2014, une étude nationale des coûts (ENC) est menée de manière annuelle auprès des structures d'hébergement et d'insertion.

L'ENC a permis de mettre en lumière une forte disparité entre les coûts des places, en fonction notamment du statut juridique et de la taille de la structure, du type d'hébergement (regroupé ou diffus), de la typologie des publics accueillis, des prestations servies ou encore de la localisation géographique. L'article 52 bis du PLF, issu d'un amendement du Gouvernement adopté par l'Assemblée nationale, prévoit de rendre obligatoire la réponse à cette enquête. Cette ENC doit permettre à compter de 2018 de fixer des tarifs plafonds opposables à l'ensemble des CHRS.

Votre rapporteur est favorable à cette démarche de convergence des coûts. Il note toutefois que rendre obligatoire la réponse à l'ENC (le taux de réponse était de 70 % en 2017) suppose de renforcer le dialogue avec les structures qui ne perçoivent pas nécessairement l'intérêt de cette démarche. Par ailleurs, la fixation de tarifs plafonds fait craindre à un certain nombre d'acteurs associatifs gérant des CHRS que cette démarche de convergence tarifaire conduise à un nivellement par le bas des prestations et de l'accompagnement offert aux personnes accueillies.

Enfin, le Gouvernement a annoncé son souhait de faire basculer progressivement l'ensemble des structures fonctionnant actuellement sous le régime de la subvention vers le régime de l'autorisation et du contrat pluriannuel d'objectifs et de moyens (Cpom).

c) Le logement adapté

L'action 12 finance enfin différentes formes de logement adapté. En 2018, 313,9 millions d'euros doivent être consacrés au logement adapté, soit près de 31 millions d'euros de plus qu'en 2017 (+ 11 %).

Cette augmentation résulte notamment de la forte progression des crédits destinés au financement des maisons relais et pensions de famille et à l'intermédiation locative.

Les crédits destinés aux résidences sociales et à l'aide à la gestion locative sociale sont stables, tandis que les aides aux organismes qui logent temporairement des personnes défavorisées (ALT 1) baissent de 9 %.

Crédits du logement adapté et évolution par rapport à la LFI 2017

(en millions d'euros)

Source : Projet annuel de performance du programme 177

Cette programmation traduit les objectifs fixés dans le cadre du plan « logement d'abord » qui doit permettre en cinq ans la création de 10 000 nouvelles places en maisons relais/pension de famille et de 40 000 places en intermédiation locative. Votre rapporteur note à cet égard que si l'augmentation du nombre de places en pensions de famille notamment est une bonne chose, il conviendrait de s'interroger sur les prix de journée de ces structures, qui n'ont pas été revalorisés depuis 2006.

L'augmentation de l'enveloppe destinée aux « autres actions » doit par ailleurs permettre le financement d'une expérimentation consistant en la mise en place de plateformes départementales de coordination des acteurs locaux pour la mise en oeuvre du plan « logement d'abord ». Cette enveloppe couvre également des actions spécifiques d'accompagnement et d'aide à l'installation en faveur de certains publics réfugiés. Il convient toutefois de garder à l'esprit qu'une partie des crédits destinés au logement adapté sont régulièrement réaffectés en cours d'exercice pour financer les dispositifs d'urgence. En 2016, la différence entre les crédits exécutés et la programmation initiale était ainsi de 6,5 millions d'euros, soit 3 % des crédits votés en LFI.

Les différents dispositifs de logement accompagné

Les différentes formes de logement adapté sont destinées aux « personnes dont la situation ne permet pas encore de recouvrer l'autonomie nécessaire pour occuper un logement ordinaire mais nécessite néanmoins une solution alternative à l'hébergement » 10 ( * ) .

Les maisons-relais et les pensions de famille sont des structures de taille réduite comportant un vingtaine de logements privatifs ainsi que des espaces collectifs. Les crédits finançant ces structures couvrent les frais de fonctionnement et rémunèrent un hôte ou un couple d'hôtes présent de manière quotidienne, à hauteur de 16 euros par jour et par place.

L' intermédiation locative est un dispositif visant à aider les associations ou organismes de logement social prenant à bail des logements du parc privé pour les sous-louer à un tarif social à des ménages défavorisés. Les crédits correspondant couvrent le différentiel entre un loyer social et le prix du marché, les charges de fonctionnement des opérateurs ainsi que l'accompagnement social des bénéficiaires.

L' aide à la gestion locative sociale est une aide de l'État aux gestionnaires de résidences sociales, issues notamment de la transformation de foyers de jeunes travailleurs (FJT) et de foyers de travaileurs migrants (FTM).

L' ALT 1 est une aide versée aux organismes logeant à titre temporaire des personnes défavorisées. Cette aide est forfaitaire et dépend de la taille du logement et de sa localisation. La LFI pour 2017 a prévu le transfert vers le budget de l'État de la part du financement de l'ALT 1 qui était jusqu'alors à la charge de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf).

Nombre de places existantes dans les différentes formes de logement adapté au 31 décembre 2016

Maisons relais/pensions de famille

15 446

Résidences sociales

184 685 11 ( * )

Intermédiation locative

28 656

ALT 1

45 216

Total

274 003

Crédits de l'action 12

PLF 2018

Évolution par rapport à la LFI 2017

Action 12 - Hébergement et logement adapté

1 894,2

13,5 %

Veille sociale

126,5

3,9 %

Hébergement

1 453,8

15,0 %

dont hébergement d'urgence

826,6

33,8 %

dont CHRS

627,2

- 3,0 %

Logement adapté

313,9

10,9 %

3. Action 14 : Conduite et animation des politiques de l'hébergement et de l'inclusion sociale

L'action 14, qui bénéficie d'un peu plus de 9 millions d'euros de crédits en 2018, correspond à la conduite et à l'animation des politiques de l'hébergement et de l'inclusion sociale. Ces crédits correspondent notamment aux crédits dédiés aux actions d'ingénierie (3 millions d'euros), au financement des associations têtes de réseaux (5,5 millions d'euros) et au soutien financier aux fédérations locales des centres sociaux (0,4 million d'euros).

Les crédits de l'action 14 sont en diminution d'un peu plus de 1 million d'euros par rapport à la LFI 2017 (- 12,3 %), en raison notamment de la réduction du financement des associations têtes de réseaux (1,1 million d'euros), qui correspond à une orientation générale du présent PLF.


* 4 Loi n° 90-449 du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement.

* 5 Loi n° 2000-614 du 5 juillet 2000 relative à l'accueil et à l'habitat des gens du voyage.

* 6 Loi n°2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 7 Proposition de loi tendant à soutenir les collectivités territoriales et leurs groupements dans leur mission d'accueil des gens du voyage de M. Jean-Claude Carle et plusieurs de ses collègues, texte n° 557 (2016-2017) et proposition de loi visant à renforcer et rendre plus effectives les sanctions en cas d'installations illégales en réunion sur un terrain public ou privé, déposée par M. Loïc Hervé et plusieurs de ses collègues, texte n° 680, (2016-2017).

* 8 Loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014, art. 138.

* 9 Loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové, art. 30.

* 10 Projet annuel de performance du programme 177.

* 11 Au 31 décembre 2016, on comptait 97 213 places en résidences sociales, auxquelles il convient d'ajouter les 87 472 places en FJT et FTM qui ont vocation à moyen terme à être transformés en résidences sociales.

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