II. UN DROIT À RÉPARATION PRÉSERVÉ MAIS QUI RESTE INACHEVÉ

L'article L. 1 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre (CPMIVG) établit la reconnaissance de la Nation envers les anciens combattants et les victimes de guerre, proclamée au lendemain de la Première Guerre mondiale par la loi du 31 mars 1919 15 ( * ) . Ce code, récemment modernisé 16 ( * ) , détermine le droit à réparation dont peuvent se prévaloir les anciens combattants de toutes les générations du feu, leurs ayants droit ainsi que les victimes civiles des conflits. Le programme 169 « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant » en est la traduction budgétaire.

Évolution des crédits de paiement du programme 169 entre 2017 et 2018

(en millions d'euros)

Action

LFI 2017

PLF 2018

Variation

N° 1 : Administration de la dette viagère

1 889

1 818

- 3,8 %

N° 2 : Gestion des droits liés aux PMI

143,7

136

- 5,4 %

N° 3 : Solidarité

348,1

346,4

- 0,5 %

N° 7 : Actions en faveur des rapatriés

17,3

17,57

+ 1,6 %

Total

2 398

2 318

- 3,3 %

Source : Projet annuel de performance de la mission annexé au PLF

Les actions n° 1 (administration de la dette viagère), n° 2 (gestion des droits liés aux pensions militaires d'invalidité) et n° 3 (solidarité) du programme financent les principales mesures et prestations qui concrétisent ce droit à réparation, c'est-à-dire :

- la retraite du combattant , versée aux titulaires de la carte du combattant âgés de plus de soixante-cinq ou, sous certaines conditions, soixante ans (action n° 1) ;

- les pensions militaires d'invalidité (PMI), qui indemnisent la gêne fonctionnelle résultant d'une blessure ou maladie contractée lors d'évènements de guerre, par le fait ou à l'occasion du service (action n° 1) ;

- les droits liés aux PMI , en particulier la gratuité des soins médicaux et de l'appareillage liés aux infirmités pensionnées, des réductions tarifaires dans les transports ainsi que le financement du régime de sécurité sociale des pensionnés de guerre , qui prévoit la prise en charge complète des dépenses de soins des personnes dont l'invalidité dépasse 85 % et qui ne bénéficient d'aucune autre couverture sociale (action n° 2) ;

- la majoration des rentes mutualistes auxquelles les titulaires de la carte du combattant et du titre de reconnaissance de la Nation (TRN) peuvent souscrire (action n° 3).

Ce programme finance également, depuis la loi de finances pour 2014, les prestations à destination des harkis et des rapatriés (action n° 7).

Son périmètre connaît cette année une légère modification , puisqu'il verse désormais la subvention de fonctionnement, qui représente 1,3 million d'euros , du Conseil national des communes « Compagnon de la Libération » , dont la tutelle a été confiée au ministre des armées par un décret du 13 avril 2017 17 ( * ) .

Ce programme représente 94,2 % des crédits de la mission , une proportion quasiment identique à celle de la loi de finances pour 2017. Il voit en un an ses crédits diminuer de 80 millions d'euros , soit - 3,3 % après avoir connu des baisses de 2,7 % entre 2016 et 2017, 4,8 % entre 2015 et 2016, 5,4 % entre 2014 et 2015, 2,8 % entre 2013 et 2014 et 2,6 % entre 2012 et 2013.

A. LA POURSUITE DU DÉCLIN DÉMOGRAPHIQUE ET BUDGÉTAIRE DES PRESTATIONS EN FAVEUR DES ANCIENS COMBATTANTS

L'évolution du budget du programme 169 , qui est constitué à 96,6 % de dépenses d'intervention , est conditionnée par celle des bénéficiaires des prestations et mesures diverses qu'il finance . Sur ce point, force est de constater l' accélération du déclin de la deuxième génération du feu et le vieillissement marqué de la troisième , sans que celle des Opex, qui leur a succédé, ne puisse à l'heure actuelle prétendre au bénéfice de la retraite du combattant ou encore de la majoration des rentes mutualistes.

La transformation d'une armée de conscription en une armée de métier ainsi que l'évolution des formes d'engagement de l'armée française hors du territoire national ont entrainé une profonde mutation du profil des anciens combattants . La mobilisation de classes d'âge entières d'appelés au cours de conflits de grande ampleur n'est plus d'actualité depuis la guerre d'Algérie, qui s'est achevée il y a 55 ans. Plus de soixante-dix ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale et vingt-cinq ans après celle de la guerre froide, aucune menace extérieure n'est venue remettre en cause l'intégrité territoriale de notre pays .

En conséquence, la quatrième génération du feu ne vient pas, par son effectif limité , compenser le déclin démographique que subissent les anciens combattants des conflits du vingtième siècle.

Ce recul est logiquement plus marqué pour la Seconde Guerre mondiale , dont les participants ont désormais plus de 90 ans . Ainsi, le nombre d'invalides titulaires d'une PMI au titre de ce conflit a reculé de 15 % entre 2015 (18 373) et 2016 (15 648). Par rapport à 2012, la baisse s'élève à 46 % . De même, le nombre de retraites du combattant versées au titre de ce conflit et de la guerre d'Indochine a diminué de 7,3 % entre ces deux années, passant de 92 661 à 85 875 .

La guerre d'Algérie et les combats de Tunisie et du Maroc ont mobilisé près de 1,75 million d'hommes entre 1954 et 1962, dont 1,3 million d'appelés . Âgés d' au moins 75 ans aujourd'hui, les anciens combattants de cette troisième génération du feu ont presque tous reçu la carte du combattant , en raison de leur présence pendant au moins quatre mois sur ce théâtre d'opération. De ce fait, ils perçoivent la retraite du combattant , et représentent la très grande majorité de ses bénéficiaires : 83 % des 1 058 947 titulaires de cette prestation ont servi en Algérie, proportion qui est restée presque identique entre 2015 (82 %) et 2016.

Cette population d'âge croissant poursuit logiquement sa diminution. Après avoir reculé de 2,6 % entre 2013 et 2014 et de 3,3 % entre 2014 et 2015, son niveau au 31 décembre 2016 était inférieur de 3,7 % à celui qu'elle connaissait un an auparavant. Durant cette période, le bénéfice de la carte du combattant a pourtant été étendu à tous les anciens combattants ayant servi en Algérie avant le 2 juillet 1962, date de l'indépendance du pays et de la fin de la guerre, même si une partie de leurs quatre mois de séjour sur place avait eu lieu après cette date (carte « à cheval », cf. infra ).

Évolution des effectifs des bénéficiaires du programme 169

Prestation

2016

2017 1

2018 1

Variation 2018/2017
(en %)

Pensions militaires d'invalidité

230 285

219 229

208 703

- 4,8

Retraite du combattant

1 058 947

1 008 047

955 208

- 5,2

Soins médicaux gratuits

56 620

54 621

52 692

- 3,5

Remboursement des prestations
de sécurité sociale

7 729

6 750

5 658

- 16,2

Rente mutualiste

362 770

353 031

343 028

- 2,8

Total

1 716 351 2

1 641 678 2

1 568 469 2

- 4,5

1 Effectifs prévisionnels.

2 Des personnes peuvent être comptées plusieurs fois car bénéficiant de plusieurs de ces prestations et allocations.

Source : Commission des affaires sociales à partir du projet annuel de performance de la mission annexé au PLF

Comme en 2017, le taux de diminution des crédits du programme 169 reste en 2018 inférieur à celui des bénéficiaires de ses principales prestations . Les marges budgétaires ainsi dégagées auraient pu être mises à profit pour corriger les dernières inégalités tirées de l'application du droit à réparation (cf. infra ). Votre rapporteur pour avis regrette que l'opportunité offerte en ce sens n'ait pas été saisie.


* 15 Loi du 31 mars 1919 modifiant la législation des pensions des armées de terre et de mer en ce qui concerne les décès survenus, les blessures reçues et les maladies contractées ou aggravées en service ; JO 2 avril 1919.

* 16 Ordonnance n° 2015-1781 du 28 décembre 2015 relative à la partie législative du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre.

* 17 Décret n° 2017-538 du 13 avril 2017 relatif au Conseil national des communes « Compagnon de la Libération ».

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