II. LE SGDSN, ACTEUR DE LA POLITIQUE DE SÉCURITÉ NATIONALE

De nombreux types de menaces (terrorisme, prolifération des armements et des technologies, cyber-menace, atteinte au potentiel scientifique et technique) et de risques (naturels, industriels, sanitaires et technologiques) peuvent affecter gravement le fonctionnement de la Nation, en raison des fortes interdépendances entre secteurs d'activités et entre acteurs nationaux et internationaux. Les réponses que les pouvoirs publics doivent y apporter font l'objet de la stratégie de sécurité nationale.

Sur proposition du SGDSN, le Premier ministre a signé, le 11 juin 2015, la nouvelle directive générale interministérielle relative à la planification de défense et de sécurité nationale 14 ( * ) , qui couvre l'ensemble des travaux destinés à préparer les actions à conduire en situation de crise .

Le nouveau dispositif intègre, dans une perspective plus européenne et internationale, le rôle majeur des acteurs non étatiques dans la gestion des crises, la place des armées dans la continuité des activités de la Nation, les effets de la décentralisation et des réformes de l'organisation territoriale de l'État ainsi que la mise en place d'une nouvelle organisation gouvernementale de crise. C'est dans ce cadre que se sont poursuivis les travaux de rénovation des plans gouvernementaux.

1. La rénovation des plans de protection de la « famille pirate » dont le plan VIGIPIRATE de lutte contre le terrorisme

Le plan Vigipirate rénové 15 ( * ) est entré en vigueur le 1 er décembre 2016. Il repose sur un système de niveaux 16 ( * ) plus cohérent et mieux adapté à la menace, la mise en oeuvre de nouvelles mesures renforçant l'action gouvernementale dans la lutte contre le terrorisme 17 ( * ) et le développement d'une culture globale de la sécurité 18 ( * ) .

Par ailleurs, après la validation du plan NRBC en décembre 2016, le plan Piranet en cas d'atteinte majeure à la continuité des systèmes d'information liés aux activités vitales de la Nation et PirateMer de réaction à un acte de piraterie, de brigandage ou de terrorisme en mer ont été testés au cours d'exercices majeurs, approuvés et diffusés en juillet 2017. La révision du plan MétroPirate de réaction à un acte de terrorisme dans les transports collectifs en agglomération a été engagée en 2017. Ces plans sont éprouvés et évalués au cours de grands exercices nationaux. En 2018, ce sera le cas de MetroPirate et de Piratair.

2. L'amélioration de l'organisation gouvernementale de réponse aux crises majeures : le « Contrat général interministériel »

L'État organise et met en oeuvre des capacités civiles et militaires pour faire face aux multiples risques et menaces qui peuvent affecter le pays. Le contrat général interministériel (CGI) répond à cette exigence en fixant, pour les cinq années à venir (2015-2019), les capacités critiques des ministères civils et le niveau d'engagement de ceux-ci dans la réponse aux crises majeures. Ces capacités sont fixées dans un cadre de juste suffisance et de complémentarité avec les autres acteurs de la gestion des crises que sont les armées, les collectivités territoriales et les opérateurs d'importance vitale. Il comprend une partie générale et deux volets dédiés à la sécurité des systèmes d'information et à la réponse aux menaces NRBC.

Le CGI a été diffusé en février 2015 sous forme d'une instruction générale interministérielle signée par le Premier ministre et les ministres concernés. Les travaux du CGI se sont accélérés en 2016. Dans le cadre de la montée en puissance du volet NRBC, le SGDSN a apporté un soutien financier substantiel, notamment pour l'acquisition d'équipements pour un montant de 4,4 M€ 19 ( * ) . Cet effort financier a été prolongé en 2017 et 2018 20 ( * ) à moindre hauteur.

S'agissant de la dimension internationale de la gestion des crises majeures, le SGDSN soutient le Secrétariat général des affaires européennes pour la mise en oeuvre de la stratégie de sécurité intérieure de l'UE, il poursuit, en lien avec le coordonnateur national du renseignement et de la lutte contre le terrorisme et les ministères concernés, des actions de coopération en particulier avec le Royaume-Uni, les États-Unis d'Amérique et l'Allemagne. Enfin, il a participé à des actions de coopération avec le Sénégal dans le cadre de la gestion de crise et des discussions sont en cours avec plusieurs États dans le cadre de la mise en oeuvre de la force sur les navires à passagers.

Le travail de révision de la circulaire du 2 janvier 2012 relative à l'organisation gouvernementale pour la gestion des crises majeures se poursuit au sein du SGDSN, notamment pour prendre en compte les enseignements tirés de la gestion de crise du cyclone IRMA qui a traversé les Petites Antilles début septembre 2017.

Le SGDSN a poursuivi, en 2017, les travaux qui ont permis d'adopter une feuille de route interministérielle autour de huit actions couvrant les questions d'organisation, de formation et de construction des outils du futur réseau interministériel de logisticiens. La cellule de coordination interministérielle en logistique (CCIL) a été créée. Cette dimension a été au coeur de la gestion de crise du cyclone IRMA début septembre 2017.

3. La consolidation d'une filière industrielle française de sécurité

Le secteur français des industries de sécurité représente un chiffre d'affaires de 30 Mds € (dont 21 pour le secteur industriel) et 300 000 emplois (dont 125 000 dans l'industrie) ; il réalise 50% de son chiffre d'affaires à l'exportation.

Le comité de la filière industrielle de sécurité (CoFIS) 21 ( * ) , dont le SGDSN assure le secrétariat, promeut la compétitivité de ce secteur. Il s'articule avec les plans la stratégie nationale de recherche et de la « Nouvelle France Industrielle » notamment son volet « confiance numérique et cybersécurité ». Deux actions importantes sont lancées à l'automne 2017 : la mise en place d'un observatoire de la filière et la rédaction d'un document de politique industrielle mentionnant les principaux objectifs de la filière industrielles des technologies de sécurité à l'horizon 2025.

Les activités du CoFIS

Le SGDSN continuera en 2018 à participer au financement des projets de sécurité et de cybersécurité auprès de l'Agence nationale de la recherche (ANR) et du fonds unique interministériel (FUI). Dans le PLF 2017, 2,2 M€ en AE et 1,9 M€ en CP étaient destinés à ces actions, dans le PLF 2018 les montants prévus sont de 1,3 M€ en AE et 1,5 M€ en CP

De même, il participera au financement de nouvelles solutions de lutte contre les menaces nucléaires, radiologiques, biologiques, chimiques et explosives. Enfin, il poursuivra son action de promotion des intérêts français dans le cadre du programme européen « Horizon 2020 ».

Source : SGDSN - Réponses au questionnaire parlementaire et PLF 2017 et 2018

La filière, à travers le CoFIS, s'est mobilisée pour proposer plusieurs projets fédérateurs au PIA2 (PIAVE). Cependant, le financement et les incitations proposés actuellement par le commissariat général à l'investissement (CGI) ne permettent pas aux industriels de s'engager dans ces travaux et les dossiers sont toujours en cours d'instruction 22 ( * ) . La filière confirme le niveau d'investissement national nécessaire dans les années à venir, formalisé par ailleurs dans son document de politique industrielle, et souhaite que la sécurité soit au bon niveau de financement et d'incitation dans le PIA3.

Vos rapporteurs partagent ces préoccupations. Dans un souci d'efficacité dans l'affectation de ces nouveaux moyens au bénéfice de la filière, vos rapporteurs considèrent que le renforcement de l'organisation interministérielle accompagnant la structuration de cette filière reste nécessaire.

4. Le renforcement des politiques de protection contre les menaces et risques majeurs
a) Les capacités liées à la protection du territoire national

Suite à un important travail interministériel conduit par le SGDSN, le Premier ministre a adopté le 14 novembre 2017 la nouvelle instruction interministérielle relative à l'engagement des armées sur le territoire national lorsqu'elles interviennent sur réquisition de l'autorité civile.

b) La sûreté des transports

Cible privilégiée de la menace terroriste, les secteurs des transports font l'objet de dispositifs nationaux destinés à renforcer la sécurité. Le SGDSN a coordonné les travaux interministériels qui ont permis la constitution d'un plan comprenant plus d'une cinquantaine d'actions qui s'articulent autour de cinq axes : connaissance de la menace, protection des réseaux et infrastructures, efficacité du contrôle des passagers, amélioration du contrôle et de l'accompagnement des opérateurs, développement des patrouilles armées dans les transports.

Un nouveau rapport d'étape a été transmis au Premier ministre en juillet 2017 pour optimiser la coordination et le pilotage politique des enjeux de sûreté des transports terrestres à l'instar des dispositifs existants pour le transport aérien et le domaine maritime.

Dans le domaine de la sûreté aérienne et aéroportuaire , plusieurs programmes interministériels d'envergure sont menés pour prendre en compte les nouvelles formes de menaces (engins explosifs improvisés, missiles sol-air portables drones ...). Les aéroports français en zone de sureté à accès réglementé (ZSAR) bénéficient d'un niveau de protection satisfaisant, cependant les attaques terroristes récentes (Bruxelles, Istanbul) ont révélés les vulnérabilités des zones publiques qui font aujourd'hui l'objet d'un programme prioritaire de renforcements de la sécurité. Enfin, pour prendre en compte les risques de radicalisation rapide, un dispositif de criblage régulier des titulaires d'habilitation autorisant l'accès en ZSAR est mis en oeuvre depuis 2017 en attente du déploiement à la fin du premier semestre 2018 d'un système automatisé.

Dans le domaine de la sûreté maritime et portuaire , le SGDSN procède à la révision de la doctrine nationale de sûreté. Il pilote en liaison avec le secrétariat général de la mer les échanges avec les États côtiers de destination des navires à passagers sous pavillon français. Avec la Grande-Bretagne, un arrangement administratif sur le déploiement de militaires à bord a été conclu en décembre 2016 auquel devrait se substituer en 2018 un accord intergouvernemental franco-britannique relatif à la sureté maritime et portuaire en Manche et en mer du Nord.

c) La consolidation des dispositifs interministériels de prévention et de protection

Le SGDSN poursuit le renforcement de la politique de sécurité des activités d'importance vitale (SAIV) par la révision des directives nationales de sécurité (DNS). Elle vise à élargir leur conception à une approche « tous risques », incluant la planification de la continuité des activités face à un large éventail de risques, et à renforcer la sécurité des systèmes d'information, en étroite collaboration avec ANSSI.

Sur la base du mandat reçu du Premier ministre 23 ( * ) et du bilan complet transmis le 3 mai 2016, le SGDSN conduit des travaux interministériels visant à renforcer la sécurité des sites classés « SEVESO ». 80 sites classés 24 ( * ) ont été identifiés comme susceptibles d'être désignés PIV (points d'importance vitale) en plus des 60 existants et font l'objet de procédures de désignations. Une offre de solutions de sécurité est proposée aux exploitants en concertation avec les fédérations industrielles concernées et le financement d'un projet de suivi et de traçabilité des personnes intervenant sur un site sensible devrait être engagé dans le cadre du programme d'investissement d'avenir.

S'agissant plus spécifiquement de la protection physique des installations nucléaires, le SGDSN a poursuivi la mise en oeuvre des conclusions des travaux interministériels menés en 2014 et 2015 25 ( * ) .

d) Le renforcement de la résilience et de la continuité des activités essentielles de la Nation

Le SGDSN, pilote de la démarche nationale de résilience, a mené et soutenu en 2017 de nombreux projets, essentiellement autour des axes « information et sensibilisation des parties prenantes à la stratégie de sécurité nationale » et « continuité des activités essentielles de la Nation ».

L'effort accru de sensibilisation à la menace terroriste fait partie des actions menées 26 ( * ) .

Sur la base du retour d'expérience de l'épisode de crues en Ile-de-France en juin 2016 et de l'exercice « Crue de Seine 2016 », le SGDSN a révisé le plan de continuité du travail gouvernemental en cas de crue majeure à Paris et lancé l'élaboration d'un plan d'action pour le renforcement de la logistique ministérielle en cas de crise, incluant une réflexion sur les capacités d'évacuation massive de population.

En 2017, trois exercices ont été organisés sur les questions de contre-terrorisme maritime, de sécurité des transports et de danger NRBC.

e) L'amélioration de la protection de l'information et la consolidation de la protection générale des dispositifs de sécurité.

Une révision de l'instruction générale interministérielle n° 1300 du 30 novembre 2011 sur la protection du secret de la défense nationale est en cours pour mieux intégrer la dématérialisation des données dans la réglementation relative aux informations classifiées et mettre en adéquation le droit et les pratiques avec ceux de nos principaux partenaires étrangers. Le projet en cours de validation, pourrait entrer en vigueur courant 2018.

Votre commission avait souhaité qu'un effort de formation continue soit engagé en direction des administrations et des entreprises des secteurs sensibles. La formation et la sensibilisation à la protection du secret ont fait l'objet d'une réflexion approfondie pour améliorer le dispositif global. Un renforcement des actions d'information est explicitement demandé aux acteurs de la protection du secret dans le projet de texte. Le SGDSN développe des outils d'accompagnement et un partenariat avec un institut de formation est à l'étude.

Vos rapporteurs saluent cet effort. Ils proposent également qu'une formation initiale soit donnée dans les écoles d'ingénieurs et dans les écoles de formation des futurs cadres des entreprises (écoles de commerce et de gestion) et des administrations (ENA, IRA...).

Par ailleurs, les négociations en vue de la signature d'accords généraux de sécurité (AGS) se poursuivent. A ce jour 39 accords ont été conclus.


* 14 http://circulaire.legifrance.gouv.fr/pdf/2015/06/cir_39748.pdf Cette directive, qui remplace celle de 2001, abroge également plusieurs documents anciens devenus inutiles ou obsolètes.

* 15 http://www.sgdsn.gouv.fr/uploads/2017/01/plan-vigipirate-gp-bd.pdf

* 16 Le dispositif comprend désormais trois niveaux : vigilance qui correspond à la posture permanente de sécurité et à la mise en oeuvre des 100 mesures du socle, toujours actives, « sécurité renforcée- risque attentat » des mesures additionnelles (au nombre de 216) peuvent être activées, « urgence attentat » déclenché en cas de menace imminente ou suite à un attentat, il est limité à la durée d'activation de la cellule de crise et comporte des mesures exceptionnelles de protection à leur plus haute niveau d'intensité.

* 17 Mise en alerte de capacités de lutte contre la menace NRBC, planification et organisation des contrôles aux frontières, mise en oeuvre de mesures de police administrative

* 18 Publication de guides de bonnes pratiques : http://www.sgdsn.gouv.fr/publications/

* 19 Ces crédits ont été alloués au ministère de l'intérieur pour l'acquisition de tenues de protection au profit de la police et de la gendarmerie, de lots pour les points de regroupement des victimes et d'unités mobiles de décontamination pour la sécurité civile.

* 20 Au profit des ministères des solidarités et de la santé d'une part, de l'intérieur, d'autre part.

* 21 installé par le Premier ministre le 23 octobre 2013

* 22 On peut noter deux démonstrateurs d'envergure relatifs à la ville sécurisée, et l'identité numérique qui ont fédéré des grands groupes et des PME. Ces projets ont été labellisé par le COFIS.

* 23 à la suite des événements survenus en 2015 à Saint-Quentin-Fallavier et à Berre-l'Etang

* 24 Parmi les quelque 1 200 sites classés « SEVESO ».

* 25 Avis de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat n° 142 Tome IX (2016-2017) par MM., Bockel et Masseret, p. 26

* 26 Cette politique a pour ambition de conseiller les responsables de sites accueillant du public et la population afin d'accroître leur niveau de vigilance et de les impliquer dans l'acquisition de bonnes réactions. Cet effort s'est traduit par l'élaboration et la large diffusion d'un document d'ensemble. Des fiches pratiques accompagnent dorénavant les postures Vigipirate à l'attention des opérateurs, des collectivités territoriales, voire du grand public.

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