B. BILAN D'ÉTAPE POUR EXPERTISE FRANCE

1. Une croissance régulière du chiffre d'affaires

Expertise France a été créée le 1 er janvier 2015 par le regroupement de six opérateurs d'expertise préexistants : France expertise internationale (auparavant GIP France coopération internationale), et les groupements d'intérêt économique GIP Esther, GIP Inter, GIP SPSI, ADECRI et Adetef. Contrairement à l'AFD qui est davantage un organisme de financement, Expertise France est un opérateur de mise en oeuvre de la coopération internationale française.

Expertise France a été créé pour remédier à un éparpillement de l'expertise technique , chaque ministère ayant auparavant son service ou son organisme rattaché chargé de faire bénéficier les pays en développement de son savoir-faire. La création d'EF avait ainsi d'abord pour objectif de mettre fin à cette organisation quelque peu « artisanale » afin de doter l'expertise française d'une crédibilité et d'une « force de frappe » qu'elle n'avait pas. Il s'agissait également d'équilibrer l'AFD, pôle financier, par un second pôle en charge de l'expertise, dans l'esprit du modèle allemand où la KFW et la GIZ, respectivement banque de développement et organisme de coopération, se complètent et additionnent leurs forces.

D'un point de vue financier, Expertise France a devrait atteindre en 2017 un chiffre d'affaires de plus de 150 millions d'euros, ce qui représente une croissance de 35 % par rapport aux opérateurs fusionnés en 2014 . Grâce à cette progression rapide, l'agence devrait atteindre l'équilibre en 2020, au moment où la subvention annuelle de transformation versée par l'Etat s'annulera. Cette montée en puissance a été menée à bien grâce à des contrats pluriannuels obtenus sur financements multilatéraux, pour 62 % du chiffre d'affaires, et pour partie sur la commande publique française, dont le transfert de la gestion des experts techniques internationaux (ETI). Ainsi, le montant des commandes publiques s'est élevé à 9,9 millions d'euros en 2016, en baisse de 7 % par rapport à 2015 du fait notamment de la diminution des crédits d'intervention en provenance des programmes 110 et 209.

2. Une coopération avec l'AFD encore en devenir

L'AFD a signé une convention avec Expertise France (EF), le principal opérateur français d'expertise internationale, issu de la fusion en 2014 des opérateurs préexistants. La convention signée en 2015 entre les deux organismes prévoit que l'AFD confie à l'Expertise France un volume de 25 millions d'euros de projets dans le domaine de la gouvernance , qui constitue un des « coeurs de métier » d'EF. Cet objectif est très loin d'être atteint aujourd'hui , EF recevant bien davantage de financements européens et étrangers (par exemple de la KfW).

Vos rapporteurs estiment tout à fait essentiel que les deux opérateurs de référence de l'aide publique au développement française travaillent davantage ensemble . Non seulement une telle coopération apparaît comme « naturelle » dans le domaine du continuum gouvernance-sécurité-justice où Expertise France joue déjà un rôle important, mais elle permettrait également de mieux projeter le savoir-faire des administrations et des entreprises françaises à l'étranger, voire des pratiques et des normes qui permettent ensuite aux PME françaises de travailler dans un environnement favorable.

Un rapprochement opérationnel plus poussé entre les deux organismes pourrait être envisagé à cette fin, de manière à ce qu'Expertise France apparaissent davantage comme un partenaire naturel pour les projets initiés par l'AFD. Il pourrait s'agit d'inclure plus systématiquement dans les projets de l'AFD une « brique » d'expertise portée par EF, financée grâce à la progression annoncée des crédits en dons de l'agence.

3. Achever le regroupement des opérateurs français d'Expertise ?

Lors de l'examen en juin 2016 du projet de contrat d'objectifs et de moyens d'Expertise France, votre commission s'était interrogée sur la poursuite et l'achèvement de la réforme qui a vu le regroupement de six opérateurs d'expertise.

En effet, bien que la loi du 27 juillet 2010 ait prévu le regroupement de l'ensemble des opérateurs d'expertise technique internationale à partir de 2016, plusieurs d'entre eux, dont certains d'une taille significative, continuent à exister parallèlement à Expertise France.

Or, votre commission avait estimé qu'il n'existait pas d'objection de principe à l'achèvement de cette réforme , la nouvelle agence ayant vocation à promouvoir l'expertise française dans l'ensemble des domaines. En outre, si la forte hausse du chiffre d'affaires d'Expertise France est de nature à augmenter sa visibilité et à enclencher un cercle vertueux de croissance, cet organisme reste soumis à une forte concurrence de la part de ses homologues britannique, allemand, canadien ou encore chinois. Il reste donc nécessaire de rassembler toutes les forces de l'expertise française pour améliorer sa position dans la concurrence internationale.

À l'issue d'un contrôle des comptes de Civipol 13 ( * ) , le plus important des opérateurs d'expertise après EF, La Cour des comptes a d'ailleurs estimé en juin 2017 qu'il était nécessaire de lancer « une nouvelle étape sous la forme d'un rapprochement de Civipol et d'Expertise France, au sein d'un groupe à constituer sous l'égide de cette dernière ». La Cour recommande également de « renforcer la coopération et le rapprochement avec les autres opérateurs du dispositif français de coopération technique internationale, en élaborant une stratégie commune dans le domaine de la sécurité intérieure, de la sécurité civile et de la gouvernance ».

Le rapprochement d'Expertise France et de Civipol pose certaines difficultés pratiques liées au statut de SA de cette dernière, ainsi qu'à l'opération de croissance externe par laquelle elle a récemment absorbé un opérateur belge de taille équivalente à la sienne. Il apparaît donc nécessaire de lancer une réflexion sur les modalités techniques de ce rapprochement, ainsi que du rattachement des autres opérateurs d'expertise à EF.


* 13 CIVIPOL est l'opérateur du ministère de l'intérieur chargé de la coopération technique internationale. Civipol est détenu à 40,03% par l'Etat, lequel en contrôle indirectement la majorité.

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