INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Rattachée au ministère de l'intérieur au début de 2009 en raison de la prédominance de ses missions de sécurité intérieure et de la nécessité, en période de forte contrainte budgétaire, de développer les mutualisations avec la police nationale, la gendarmerie nationale constitue toujours une force essentiellement militaire dans son organisation et par le statut de ses personnels. Elle continue également à remplir certaines missions spécifiquement militaires.

Ce caractère militaire lui permet d'offrir une disponibilité et une continuité dans l'exercice de ses missions qui en font un atout essentiel pour la protection des citoyens et la lutte contre toutes les formes de délinquance ; il justifie par ailleurs que votre commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées continue à en suivre l'évolution et à s'assurer qu'elle puisse répondre pleinement aux enjeux actuels et futurs en matière de lutte contre le terrorisme, de maintien de la sécurité dans les Outre-mer ou encore de soutien aux armées en opérations extérieures.

En 2018, le budget de la gendarmerie nationale évoluera peu par rapport à celui prévu par la loi de finances initiale pour 2017 : environ 8,9 milliards d'euros en autorisation d'engagement et 8,7 milliards d'euros en crédits de paiement, soit une hausse d'environ 0,56%, avec une masse salariale dont la progression est contenue (environ +0,5%). Après les efforts soutenus d'équipement et de recrutement de personnels consentis les années précédentes dans le contexte du renforcement de la lutte anti-terroriste, le programme « Gendarmerie nationale », tout comme le programme « Police nationale », retrouve donc une évolution comparable à celle des autres missions du budget de l'Etat.

Cependant, compte tenu de la persistance de la menace terroriste à un niveau toujours aussi élevé et de la « demande de sécurité » élevée (lutte contre les violences physiques, les cambriolages, les dégradations, etc.), un « plan de renforcement des forces de sécurité intérieure » a été annoncé par le président de la République et devrait être mis en oeuvre durant le quinquennat. Ce plan prévoit la création de 10 000 emplois nouveaux au sein des forces de police et de gendarmerie sur cette période, dont 2 500 emplois pour la gendarmerie nationale, soit 500 emplois au titre de l'année 2018. Vos rapporteurs pour avis saluent cette progression des effectifs, qui permettra de soutenir l'activité des forces au niveau très élevé actuel.

A l'issue de leurs travaux, vos rapporteurs ont cependant souhaité mettre en avant et analyser certains « points de vigilance ».

Tout d'abord, chacun sait que, pendant plusieurs années, les forces de sécurité intérieure en général et la gendarmerie nationale en particulier ont du faire « plus et mieux » avec moins de moyens en raison des contraintes fortes pesant sur le budget de l'Etat. Si les nécessités incontournables de la lutte anti-terroriste ont conduit à renforcer les effectifs et à prévoir des plans d'équipement ciblés, les moyens de fonctionnement courant sont restés limités et les investissements d'avenir, en particulier en matière de véhicules et d'immobilier, se sont révélés en deçà du niveau requis pour en assurer le renouvellement et la modernisation. Il convient donc de s'assurer que les crédits prévus pour 2018 permettent, sinon de rattraper le retard, du moins de stabiliser les moyens de fonctionnement et d'investissement de la gendarmerie nationale.

En outre, à compter de 2016, l'application de la directive européenne « temps de travail » 1 ( * ) en ce qui concerne les 11 heures de repos quotidien a conduit à une perte d'activité équivalant à environ 6 000 ETP. Il convient de garder ce chiffre à l'esprit pour évaluer l'impact réel du renforcement d'effectifs annoncé pour les prochaines années (2 500 emplois). L'application de la directive résultant d'une instruction provisoire, il s'agit d'évaluer les options pour l'avenir.

Enfin, la gendarmerie nationale a dû contracter une « dette loyers » d'environ 100 millions d'euros en 2016 et 2017 du fait de la mise en réserve des crédits et de la sanctuarisation des équipements prévus par les plans de lutte anti-terroristes. La nécessité d'honorer une telle dette constituant déjà un handicap considérable au moment de commencer l'exercice 2018, votre commission approuve la décision, annoncée à l'Assemblée nationale par M. Gérard Collomb, ministre de l'Intérieur, de mettre en oeuvre un plan pluriannuel d'apurement destiné à permettre l'étalement de cette dette sur plusieurs années .

I. DES CRÉDITS EN PROGRESSION MODÉRÉE

Au sein de la mission « Sécurités » (20,7 Mds € en AE, soit +4,3% par rapport à 2017, et 19,8 Mds€ en CP, soit +1,4%, ou +2% hors CAS pensions), l'enveloppe des crédits consacrés à la gendarmerie nationale augmente très légèrement en 2018.

Les autorisations d'engagement (AE) du programme 152 (Gendarmerie nationale) passent ainsi de 8,8 Mds € en 2017 à 8,9 Mds € en 2018 (soit une hausse de +1,1%) et les crédits de paiement (CP) de 8,61 Mds € en 2015 à 8,66 Mds € en 2016 (soit une hausse de +0,56%).

A. LES PRINCIPALES ÉVOLUTIONS PAR RAPPORT AUX CRÉDITS VOTÉS EN 2017

Le Président de la République a décidé de renforcer à hauteur de 10 000 postes les forces de sécurité intérieures sur la durée de son quinquennat, soit 1 400 emplois pour la police nationale et 500 emplois pour la gendarmerie nationale en 2018 (soit 1 900 postes prévus, contre 2 286 postes au sein du PLF 2017).

Au sein du projet de loi de finances pour 2018, la Mission « sécurités », qui comprend les programmes « police nationale », « gendarmerie nationale », « sécurité et éducation routières » et « sécurité civile », est dotée de crédits en hausse, les crédits de paiement de la Mission passant de 13 088 millions d'euros à 13 303 millions euros hors CAS pensions, soit une hausse de 1,98% par rapport à la loi de finances pour 2017 .

Au sein de cette Mission, la gendarmerie nationale est dotée, dans le projet de loi de finances pour 2018, d'un montant de 8 913 millions d'euros en autorisations d'engagement contre 8 814 millions d'euros de crédits ouverts par la LFI 2017, soit une augmentation de 101 millions d'euros, +1,1% par rapport à 2017 . Les crédits de paiement s'élèveront quant à eux à 8 658 millions d'euros, contre 8 609 millions d'euros en 2016, en hausse de 49 millions d'euros (+0,56%) .

Les crédits de titre 2 pour rémunérations et charges sociales, qui représentent comme en 2017 environ 85% des crédits du programme, se montent en 2018 à 7 306 millions d'euros (AE=CP), soit une hausse de 35 millions d'euros environ par rapport à 2015 (+0,49%), très modérée par rapport à la hausse de 4,2% intervenue en 2017 en raison des recrutements plus importants . Hors CAS pensions, les crédits passent de 3 941 à 3 970 millions d'euros, soit une hausse contenue de 29 millions d'euros (+0,72%).

Les dépenses hors titre 2 (fonctionnement, investissement et intervention) s'élèveront à 1 352 millions d'euros en crédits de paiement contre 1 337 millions d'euros en 2017, soit une progression de 15 millions d'euros ou 1,1%.

En revanche, au sein de ce « hors titre II », les crédits de fonctionnement s'élèvent pour 2018 à 1 140 millions d'euros en CP (1 420 en AE), contre 1 191 millions d'euros en 2017 (1 363 en AE), soit une diminution de 51 M€ (-4,3%) .

Les crédits d'investissement sont en augmentation en CP : 205,3 millions d'euros contre 139,3 millions d'euros en 2017 (et 177 millions d'euros en AE contre 175 millions d'euros en 2017), soit une progression de 66 millions d'euros (+47%).

Comme les années précédentes, le budget de la gendarmerie est donc essentiellement un budget de personnel dont les dépenses de titre II sont dynamiques tandis que les dépenses de fonctionnement stagnent et les dépenses d'investissement progressent afin de poursuivre la rénovation du parc immobilier .

Par ailleurs, les principales caractéristiques du budget de la gendarmerie nationale sont, en 2018, les suivantes :

En ce qui concerne les crédits de titre 2 :

Hors mesures de périmètre et de transfert, le projet de loi de finances pour 2018 prévoit un schéma d'emplois positif (+459 équivalents temps-plein, ETP), comprenant :

+500 ETP, dans le cadre du plan annoncé par le Président de la République de création de 2 500 emplois entre 2018 et 2022 ;

-33 ETP au titre des suppressions d'emplois en administration centrale ;

-8 ETP au titre d'une contribution pour le programme « Administration territoriale ».

Pour y parvenir, la gendarmerie nationale recrutera 12 154 personnels, dont 146 officiers par recrutement externe, 3 999 sous-officiers, 7 097 volontaires et 912 civils. Outre les 459 créations nettes de postes, ces recrutements compenseront les départs du programme, estimés à 11 695 personnels.

Les principaux autres éléments salariaux sont les suivants :

- 98,7 M€ pour la réserve opérationnelle (Garde nationale), soit +36,7 M€ par rapport à la LFI 2017 ;

- 7 M€ pour les dépenses relatives aux opérations extérieures (OPEX), comme en 2017 ;

- 62,98 M€ pour les indemnités journalières d'absence temporaire (IJAT), comprenant la compensation de l'assujettissement aux prélèvements sociaux (sur la base des taux en vigueur en 2017) ;

- 15 M€ pour les primes de résultats exceptionnels, comme en 2017 ;

- un glissement vieillesse-technicité (GVT) indiciaire positif de 48,54 M€ (1,67%) et un GVT négatif de -84,19 M€, soit un GVT solde de -35,64 M€ ;

- les mesures d'économie : -4,38 M€ pour l'instauration d'un jour de carence pour maladie en 2018 et -1,13 M€ pour les substitutions d'emplois de personnels militaires par des emplois de personnels civils.

En ce qui concerne le « hors titre 2 » :

Le fonctionnement des unités bénéficie de la reconduction pure et simple de la dotation 2017 correspondante.

En ce qui concerne les moyens mobiles, est prévu comme en 2017 l'achat de 3 000 véhicules de toutes catégories afin de stopper le vieillissement du parc de 31 500 véhicules et de maintenir une moyenne d'âge de 8 ans pour les 4 roues.

Le plan NEOGEND continuera en 2018 à être déployé sur l'ensemble du territoire national (cf. encadré) grâce à une dotation de 13,2 millions d'euros. Le reste des crédits permet seulement de financer les besoins prioritaires des systèmes d'information et de communication (ordinateurs, moyens radio, applications métier et maintien en condition opérationnelle) afin de préserver les moyens capacitaires ; en revanche ces crédits ne permettent pas de financer de nouveaux investissements dans ce domaine.

LE PROJET NEOGEND

Ce programme vise à doter chaque gendarme sur le terrain d'un équipement numérique, de type tablette ou smartphone, afin de mieux répondre aux sollicitations du public en tous points du territoire. Lancé en septembre 2014, il a d'abord été testé dans le département du Nord. Cette expérimentation a ensuite été étendue à la région Bourgogne.

Le déploiement national des équipements à usage collectif est achevé et celui des tablettes et des smartphones à usage individuel a commencé en 2017.

Le coût de ce projet est évalué à 75,7 millions d'euros sur la période 2015-2019, dont 13,2 millions d'euros inscrits au présent PLF. Ces crédits permettront la location des matériels (le choix de la location permet de lisser la dépense sur la durée du marché et de revaloriser le stock des matériels en fin d'exercice).


* 1 Directive européenne 2003/88/CE relative au temps de travail.

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