B. UN EFFORT DE L'ETAT EN FAVEUR DE LA LUTTE CONTRE L'HABITAT INDIGNE ET ÉNERGIVORE

1. Le retour de l'État dans le financement de l'Anah

Comme chaque année, votre commission examine attentivement les moyens financiers consacrés à l'Anah. Outre la volatilité de sa recette principale, le produit de la vente aux enchères des quotas carbone, les différentes recettes de l'Anah demeurent instables ce que regrette votre rapporteur.


• L'essentiel des ressources de l'Anah proviennent comme les années précédentes du produit de la vente aux enchères des quotas carbone . Dans son budget initial pour 2017, l'Anah avait retenu une recette de 322,88 millions d'euros sur la base d'un prix moyen de 6€/tonne. Or l'estimation s'est révélée trop optimiste et la projection a dû être réévaluée en cours d'année, le cours moyen constaté atteignant 4,99 €/tonne. Les cours étant plus favorables depuis septembre, l'Anah envisage de retenir une prévision de recette de 336,7 millions d'euros pour 2018.


• La contribution des fournisseurs d'énergie est la deuxième ressource la plus importante pour l'agence. Cette recette est liée aux résultats de l'activité sur le programme « Habiter Mieux ». 41,4 millions d'euros sont attendus pour cette recette en 2017, soit un montant nettement moindre que celui attendu (65 millions), le programme « Habiter Mieux » n'ayant concerné que 40 000 logements en 2016. Pour 2018, l'agence table sur une recette de 58,1 millions d'euros.


• Parmi les ressources complémentaires, votre rapporteur constate qu'il est prévu de reconduire la contribution de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie pour un montant de 20 millions d'euros. Une disposition en ce sens a été adoptée dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2018.

S'agissant de la contribution d'Action Logement , votre rapporteur note qu'elle résulte d'un avenant à la convention entre l'État et Action Logement et qu'elle a permis le versement d'une contribution de 200 millions pour les années 2016 et 2017, dont 50 millions en 2017. Action Logement a indiqué à plusieurs reprises être réticent à financer une telle politique du logement. Néanmoins des négociations seraient en cours pour déterminer les modalités de la participation d'Action Logement aux politiques publiques de rénovation énergétique.

En 2017, le fonds de transition pour la rénovation énergétique a versé 50 millions d'euros à l'Anah à titre exceptionnel. Aucun versement similaire n'est prévu pour 2018.

Pour les projets de travaux financés par l'Anah dans le cadre du programme « Habiter Mieux », une aide de solidarité écologique était distribuée dans le cadre du Fonds d'aide à la rénovation thermique des logements privés (FART) . En 2018, le FART ne financera que des dossiers qui auront été engagés avant le 31 décembre 2017. 30 millions d'euros seraient inscrits au budget de l'agence pour 2018 au titre du redéploiement d'un reliquat de crédits non consommés en 2017 sur le FART.

En raison de ces différents éléments et pour garantir à l'Anah des ressources lui permettant de poursuivre son activité à un rythme plus soutenu, le gouvernement a décidé de conforter les ressources de l'Anah en contribuant à hauteur de 110 millions en 2018. Cette contribution a vocation à être reconduite chaque année, ce dont se félicite votre rapporteur.

ÉVOLUTION DES RESSOURCES DE L'ANAH

2014

2015

2016

Projection de réalisation

2017

Projection

Exercice 2018

Produit de la taxe sur les logements vacants

21 000 000 €

61 000 000 €

21 000 000 €

21 000 000 €

21 000 000 €

Contribution des fournisseurs d'énergie

47 852 250 €

41 715 570 €

55 721 470 €

41 400 000 €

58 100 000 €

Produits issus
de la mise aux enchères des quotas carbone

215 345 125 €

312 116 110 €

234 683 755 €

322 881 000 €

336 700 000 €

Contribution de la caisse nationale de solidarité pour l'autonomie

20 000 000 €

-

40 000 000 €

20 000 000 €

Contribution Action logement

50 000 000 €

150 000 000 €

50 000 000 €

-

Contribution Fonds de financement de la transition énergétique

20 000 000 €

50 000 000 €

-

Contribution de l'État (programme 135)

110 000 000 €

Autre financement

241 300 €

-

30 000 000 €

Autres produits

6 489 606 €

8 646 007 €

2 444 735 €

3 854 500 €

3 800 000 €

Total

290 686 981 €

513 477 687 €

464 091 261 €

572 735 500 €

579 600 000 €

Source : réponses au questionnaire budgétaire et Anah.


Les ressources du programme pour 2018 demeurent peu stables et peu prévisibles. Dans son rapport sur les aides à la rénovation énergétique des logements privés, l'Inspection générale des finances (IGF) et le CGEDD relevait que cette incertitude avait pu « contribuer à des phénomènes de stop-and-go par le passé liés au manque de visibilité, et parfois à un problème d'adéquation de la dépense consentie ». Pour les inspections précitées, les financements complémentaires de la CNSA ou Action Logement par exemple, ne peuvent constituer une solution pérenne.

Illustration des phénomènes de stop-and-go s'agissant du programme Habiter Mieux

À titre d'illustration, la mission signale que :

? La volonté d'accélérer le rythme des rénovations en 2013-2014 (lancement du PREH, élargissement des conditions d'éligibilité, hausse de la prime Fart) a d'abord conduit à une augmentation significative du nombre de dossiers déposés (de 13 175 en 2012 à 56 639 en 2014, soit une multiplication par 3,5) ;

? mais des signaux contradictoires se sont ensuite succédé en termes d'objectifs de rénovations (hausse de 43 000 à 50 000 logements en cours d'année 2014, puis baisse à 45 000 logements en programmation initiale pour 2015, enfin nouvelle hausse à 50 000 logements en cours d'année 2015) avant de donner lieu à des actions correctives en termes de moyens à compter de 2015 (recalibrage de la prime Fart : diminution puis passage d'un montant forfaitaire à un montant proportionnel aux travaux et sous plafond) ;

? Parallèlement, le nombre de dossiers déposés en 2015 a fortement baissé (38 092, soit une baisse de 36 % en un an), tendance qui s'est prolongée dans une moindre mesure en 2016 (34 895, soit une nouvelle baisse de 8 %) ;

? Ces ajustements et recalibrages, au-delà de la perturbation d'activité engendrée, ont pu contribuer à une certaine démobilisation.

Source : extrait du rapport de l'IGF et du CGEDD sur les aides à la rénovation énergétique des logements privés - avril 2017.

Votre rapporteur ne peut que partager avec les inspections précitées la nécessité de réexaminer les ressources affectées à l'agence. Elle propose ainsi une augmentation des recettes issues de la taxe sur les logements vacants actuellement plafonnées à 21 millions d'euros pour 2018. Une telle recette a en effet le mérite d'éviter toute tentation d'annulation de crédits en cours d'exécution budgétaire.

2. Des objectifs pour le programme « Habiter Mieux » plus réalistes

En 2016, les objectifs du programme « Habiter Mieux » ont été renforcés à la demande du gouvernement afin de les porter de 50 000 logements par an à 70 000 logements. En conséquence, le conseil d'administration avait augmenté le budget de l'Anah pour le porter de 530 millions d'euros à 700 millions d'euros.

Toutefois, cet objectif de 70 000 logements n'a pas été atteint ; seuls 40 726 logements ont été rénovés dans le cadre du programme « Habiter Mieux », soit 18 % de moins que l'objectif prévu. Pour 2017, 60 000 logements devraient être rénovés.

Évolution des objectifs de l'Anah depuis 2011

Bénéficiaires

Objectifs

Propriétaires occupants

Propriétaires bailleurs

Syndicat de copropriété

TOTAL

2010

22

-

-

22

2011

30 000

6 669

-

-

6 669

2012

30 000

12 738

-

-

12 738

2013

30000

27 530

2 150

1 555

31 235

2014

43 000

44 055

3 579

2 197

49 831

2015

50 000

43 710

3 791

2 205

49 706

2016

70 000

34 149

4 469

2 108

40 726

prévisions 2017

100 000

48 000

12 000

60 000

Source : Commission des affaires économiques d'après le rapport de l'IGF et du CGEDD sur les aides à la rénovation énergétique des logements privés d'avril 2017 et réponse au questionnaire budgétaire.

L'objectif est fixé à 75 000 logements en 2018 afin de mettre en oeuvre l'objectif du Président de la République de diviser par deux le nombre de « passoires thermiques » d'ici 2022.

Par ailleurs, l'agence reconnaît que son action « s'inscrit dans des démarches parfois complexes et longues, sources d'insatisfaction de la part des demandeurs d'aide ». L'Anah a ainsi annoncé vouloir simplifier et dématérialiser ses procédures d'octroi de subventions. Néanmoins, cette dématérialisation ne doit pas venir décourager les démarches des bénéficiaires, notamment lorsqu'il s'agit de personnes n'ayant pas d'accès à Internet. En matière de simplification, l'Anah envisage d'accorder des aides, sans exiger à diagnostic préalable, pour des travaux standardisés pour lesquels l'agence connaît l'impact en matière de réduction de la consommation énergétique.

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