IV. LES CRÉDITS FINANÇANT LA RECHERCHE ET L'INNOVATION AU-DELÀ DE LA MIRES

A. LA MISE EN oeUVRE DU PIA 3 DOIT S'ACCOMPAGNER D'UNE ÉVALUATION DES DISPOSITIFS EN FAVEUR DE LA VALORISATION DE LA RECHERCHE PUBLIQUE ET DE LA RECHERCHE PARTENARIALE

1. Intégrés au grand plan d'investissement, les premiers crédits du PIA 3 seront décaissés en 2018

Le Grand Plan d'Investissement (GPI) de 57 milliards d'euros a été proposé dans le rapport remis au Premier ministre par Jean Pisani-Ferry en septembre dernier. Concernant le secteur de la recherche et de l'innovation, une réponse au questionnaire budgétaire se contente de préciser que, d'une part, 30 millions d'euros seront affectés à l'appel à projet « Make our planet great again » destiné aux chercheurs non-résidents désirant développer en France et en collaboration avec des partenaires français des projets de recherche de haut niveau pour faire face aux changements climatiques et planétaires ; d'autre part, 2,4 milliards d'euros sur cinq ans viendront financer des programmes et des équipements de recherche. Elle rappelle également que le GPI consacrera 3,6 milliards d'euros sur cinq ans au renforcement de l'innovation de rupture et à l'accélération du transfert de technologies de la recherche publique vers les entreprises.

En attendant une formalisation plus précise de ses contours, il a été décidé, comme en témoigne la présence d'une mission dédiée au PIA dans ce projet de budget, de poursuivre la mise en oeuvre du PIA 3 et de l'intégrer au GPI. Pour rappel, le PIA 3 prend la suite des programmes de 2010 (doté de 35 milliards d'euros en AE et CP) et de 2014 (doté de 12 milliards d'euros en AE et CP).

En conséquence, le « bleu » de la mission « Investissements d'avenir » présente la prévision d'ouverture de 10 milliards d'euros de crédits de paiement pour les années à venir (voir tableau ci-dessous). La totalité des autorisations d'engagement avait été ouverte en loi de finances initiale pour 2017.

Néanmoins, l'articulation précise entre PIA et GPI reste floue . D'une part, le Parlement ne dispose d'aucune information précise sur l'architecture institutionnelle de pilotage à venir. D'autre part et surtout, une réponse au questionnaire budgétaire nous apprend néanmoins que l'intégration du PIA 3 au grand plan d'investissement « devrait prochainement conduire à une évolution des actions composant le PIA 3 ». Enfin, les explications fournies à la représentation nationale pour étayer les diverses actions du PIA 3 restent assez vagues, et de nombreux contrats de mise en oeuvre des actions par les opérateurs n'ont toujours pas été signés 40 ( * ) .

Le PIA 3, qui regroupe des financements recoupant les crédits de la MIRES et de la mission « Économie » du budget général, poursuit la logique de financement sur projet avec un pilotage particulier, sous l'égide du Premier ministre et du Commissaire général à l'investissement .

Répartition prévisionnelle des crédits du PIA 3

Mission « Investissements d'avenir » (en millions d'euros)

AE 2017

CP 2018

CP 2019

CP 2020

CP

2021 et au-delà

Programme 421 « Soutiens des progrès de l'enseignement supérieur et de la recherche »

2 900

142,5

212,5

355

2 190

Programme 422 « Valorisation de la recherche »

3 000

227

433

655

1 685

Programme 423 « Accélération de la modernisation des entreprises »

4 100

710

404

870

2 116

TOTAL

10 000

1 079,5

1 049,5

1 880

5 991

Source : mission « investissements d'avenir » annexée au projet de loi de finances initiale pour 2018

S'agissant de la recherche stricto sensu, le programme 421 entend ainsi confier à l'ANR la tâche de financer les programmes prioritaires de recherche (action n° 2, dotée de 20 millions d'euros en 2018, qui traiteront d'abord de l'initiative « Make Our Planet Great Again » et de l'intelligence artificielle) et des équipements structurants de recherche (action n° 3, qui n'est cependant dotée d'aucun crédit de paiement pour 2018). Les autres actions du programme 421 semblent plus relever de la structuration des universités (actions n° 4, 5 et 6) ou de la formation à l'université (actions n os 1 et 7).

Quant à la valorisation de la recherche, le programme 422 contient plusieurs actions confortant des dispositifs engagés dans le cadre des précédents PIA , comme les sociétés d'accélération du transfert de technologies (actions n°1, 4 et 5), les instituts hospitalo-universitaires (action n° 4, dotée de 10 millions d'euros en 2018) ou le fonds French Tech accélération (action n°1, dotée de 10 millions d'euros en 2018). L'action n° 2, qui serait dotée de 100 millions d'euros de crédits de paiement dès 2018, relève, en revanche, d'une nouvelle logique : elle entend créer un fonds national post-maturation , censé combler une défaillance de marché sur la phase de post-maturation ou de pré-amorcage des projets issus de la recherche publique française et qui ont bénéficié d'une maturation au sein des sociétés d'accélération du transfert de technologies (SATT), des instituts de recherche technologique (IRT) ou des instituts pour la transition énergétique (ITE). L'action n° 3, intitulée « démonstrateurs et territoires d'innovation de grande ambition » vise, quant à elle, selon une réponse au questionnaire budgétaire, à « faire se rencontrer innovations et lieux de mise en oeuvre, suivant une gouvernance et des règles adaptées aux projets conduits, en s'inscrivant dans la nécessité de contribuer, par le déploiement à grande échelle de solutions et technologies innovantes, au renouvellement de modèles de développement de territoires et à la transition écologique ». Cette action n'est donc, à ce stade, pas clairement définie. Elle est dotée de 70 millions d'euros de crédits de paiement dès 2018. Enfin, au-delà du financement des SATT, l'action n° 5 vise également le « soutien à des projets ambitieux portés par les équipes de recherche publique et privée, avec comme critère premier leur potentiel de valorisation économique ». Elle est dotée de 37 millions d'euros de crédits de paiement en 2018.

Le programme 423 comporte également des actions en matière de recherche et d'innovation, qui prolongent des dispositifs déjà existants. Ainsi, l'action n° 1 (« soutien à l'innovation collaborative ») vise à soutenir chaque année une vingtaine de projets de R&D des pôles de compétitivité 41 ( * ) , en accordant une aide moyenne de 10 M€, sous forme de subventions et avances remboursables. Elle est dotée de 30 millions d'euros de crédits de paiement en 2018. L'action n° 5 vise à ouvrir aux entreprises un nouveau concours d'innovation , après ceux effectués depuis 2013 dans le cadre des précédents PIA, avec pour objectif de sélectionner, chaque année, 150 entreprises à très fort potentiel de croissance réparties sur un petit nombre de thèmes stratégiques. Elle est dotée de 50 millions d'euros de crédits de paiement  en 2018. D'autres actions visent le financement de l'innovation provenant des entreprises (actions n° 6, 8 et 9), le soutien de filières industrielles (actions n° 2 et 3), l'internationalisation des entreprises (action n° 7), ou encore, la formation professionnelle (action n° 4).

2. Mettre en cohérence les dispositifs favorisant la valorisation de la recherche publique et la recherche partenariale financés par les PIA

Comme le rappelait le rapport de la Commission nationale d'évaluation des politiques d'innovation de janvier 2016 relatif aux politiques d'innovation en France, entre 2000 et 2015, le nombre de dispositifs nationaux de soutien à l'innovation a plus que doublé, passant de 30 à 62 . Parmi ces nouveaux dispositifs, de nombreuses structures ont été créées ou accompagnées dans le cadre des PIA , qu'elles visent à accroître les retombées économiques de la recherche publique ou à soutenir la recherche partenariale.

S'agissant de la valorisation de la recherche publique, 14 SATT ont été créées dans le cadre du PIA en vue de favoriser le transfert de la recherche universitaire. Votre rapporteur constate que ces SATT ont été créées sans véritable cohérence au niveau national, générant d'importantes disparités entre ces structures. Six consortia de valorisation thématique (CVT) ont également été mis en place dans le cadre du PIA au sein des alliances thématiques, afin d'identifier, avec les SATT et les organismes de recherche, les grands enjeux en matière de valorisation dans leur domaine.

Quant à la recherche partenariale, 34 structures préexistantes ont été labellisées Instituts Carnot en 2006 afin de favoriser le transfert de technologies de la recherche publique vers l'entreprise ainsi que la recherche partenariale. 68 pôles de compétitivité ont été créés à partir de 2004 en vue de bénéficier des effets d'agglomération résultant de la localisation en un même lieu d'organismes de formation, de recherche et d'entreprises. Huit IRT et neuf ITE ont été créés dans le cadre du PIA en vue de renforcer les pôles de compétitivité.

Votre rapporteur considère que la création de ces outils était nécessaire pour répondre aux manques de la valorisation de la recherche publique et aux relations insuffisantes entre la recherche publique et l'entreprise.

Néanmoins, une évaluation de ces dispositifs apparaît aujourd'hui nécessaire en vue de donner une cohérence à l'ensemble, d'assurer une meilleure coordination entre eux et de confirmer la valeur ajoutée de chacun .

Le 19 octobre dernier, la ministre de l'enseignement supérieur, de l'innovation et de la recherche a mis en place, avec le ministre de l'économie, une mission sur les aides à l'innovation , notamment dans l'objectif de simplifier et de rationaliser les dispositifs existant en France, comme cela ressort de ses propos tenus devant la commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat le 7 novembre dernier. Votre rapporteur se réjouit de cette initiative . Un bilan objectif apparaît en effet nécessaire, afin d'éviter le risque de saupoudrage et de rationaliser ces dispositifs.

À ce titre, il conviendra que le projet de fonds pour l'innovation de rupture , dont les contours sont aujourd'hui particulièrement flous, soit bien articulé avec l'ensemble des dispositifs de financement qui existent déjà .


* 40 Comme le « bleu » budgétaire nous l'apprend, sur les 21 actions du PIA 3, 11 n'ont encore fait l'objet d'aucune convention ou décision de mise en oeuvre, et deux actions attendent encore la publication de la totalité des conventions de mise en oeuvre requises. Par exemple, l'action n°3 du programme 421, relative aux équipements structurants de recherche n'est dotée d'aucun crédit de paiement pour cette année, tant les projets à soutenir n'apparaissent pas encore identifiés.

* 41 La décision n°2017-PSPC-06 du Premier ministre en date du 2 mars 2017 a affecté les crédits de l'action à l'action « Projets de recherche et développement structurants des pôles de compétitivité » (PSPC) des PIA 1 et 2, qui poursuit les mêmes objectifs et qui est encadrée par la convention du 13 octobre 2010 modifiée entre l'État et l'EPIC Bpifrance.

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