B. LE RISQUE D'UNE DÉGRADATION DE LA SITUATION DES JURIDICTIONS VIS-À-VIS DE LEURS FRAIS DE JUSTICE

Après deux années, en 2012 et en 2013, pendant lesquelles d'importants efforts budgétaires ont été réalisés, pour contenir l'inflation des frais de justice et apurer les dettes contractées par les juridictions auprès de leurs prestataires ou des auxiliaires de justice, il semble que les budgets plus récents se caractérisent par une sous-dotation de l'enveloppe budgétaire correspondant à ces dépenses.

En effet, même si le rapport annuel de performance pour 2014 indique que les crédits de paiement dépensés au titre des frais de justice ont atteint 469,6 millions d'euros, c'est-à-dire un montant comparable à celui de 2013, il convient de souligner que le montant des engagements non payés en fin d'année était, quant à lui, bien supérieur à celui de 2013, puisqu'il atteignait 159,3 millions d'euros, soit plus 33 % de la dotation annuelle, contre 143 millions d'euros. Ceci signifie donc qu'avant même que l'année débute, la nouvelle dotation est amputée d'un tiers.

La prévision d'exécution pour 2015 s'élève, quant à elle, à 480 millions d'euros, ce qui représente un écart de 6,5 % par rapport à la dotation initiale de 449,8 millions d'euros.

Pour 2016, le Gouvernement prévoit de consacrer aux frais de justice une enveloppe de 463 millions d'euros. Toutefois, celle-ci inclut 5 millions d'euros correspondant aux opérations supplémentaires rendues nécessaires par le plan de lutte antiterroriste ainsi que 23,1 millions d'euros destinés à garantir le paiement, dans le cadre des frais de justice, d'une dépense nouvelle, celle des cotisations sociales des collaborateurs occasionnels du service public de la justice. À périmètre constant, l'enveloppe budgétaire est donc de 439,1 millions d'euros, ce qui est en retrait par rapport à 2015, de 10 millions d'euros.

Évolution de la dotation initiale des frais de justice
et de la consommation réelle de 2000 à 2016 (en millions d'euros)

Source : ministère de la justice et commission des lois.


NB : en 2012, les dépenses de frais postaux, qui représentaient 55 millions d'euros, ont été transférées du budget des frais de justice à celui des crédits de fonctionnement courant.

Certes, le ministère de la justice attend d'importantes économies, obtenues grâce à la plateforme nationale d'interception judiciaire et à la nouvelle réforme de la médecine légale, à hauteur, respectivement, de 25 et de 17 millions d'euros. Toutefois, l'expérience enseigne que ni l'un ni l'autre de ces deux dispositifs n'ont toujours produit, ces dernières années, les économies escomptées.

La mise en place de l'application Chorus Pro , constitue un progrès notable, puisqu'elle permet aux prestataires de la justice de transmettre par voie dématérialisée les pièces comptables justificatives en vue du paiement de leur prestation. La direction des services judiciaires est ainsi en mesure de connaître en temps réel la masse des dépenses engagées, alors qu'aujourd'hui elle se fonde, pour le pilotage budgétaire des frais de justice, sur des évaluations ex post .

En tout état de cause, votre rapporteur constate que le risque n'est pas seulement celui, avéré, d'une inflation continue des frais de justice : ceux-ci ne cessent de croître depuis 2012. Il est celui d'une sous-dotation importante de l'enveloppe budgétaire correspondante, comme on l'observe depuis 2013.

Or, cette sous-dotation a une conséquence majeure : l'augmentation des charges à payer en fin d'année, qui se traduit, concrètement, par le fait que les juridictions ne règlent que tardivement, parfois plusieurs années après, leurs dettes auprès de leurs prestataires, plaçant ces derniers dans une situation financière fragile.

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