I. UN BUDGET STABILISÉ AU NIVEAU DE CELUI DE 2014

La mission « justice » n'échappe pas à la rigueur budgétaire, même si elle fait partie des missions relativement préservées dans le cadre du projet de loi de finances.

Ses crédits de paiement augmentent de 1% par rapport au budget précédent. Une fois encore, l'essentiel de la hausse profite au programme relatif à l'administration pénitentiaire, les crédits de paiement des services judiciaires et de l'accès au droit étudiés dans le cadre du présent avis ne progressant, eux, que de 0,7 %.

Votre rapporteur note toutefois que cette augmentation par rapport à l'année en cours ne compense pas encore la baisse intervenue entre 2014 et 2015, puisque le présent budget est inférieur de 0,6 % à ce qu'il était en 2014 .

Plutôt qu'une progression des crédits de la mission, il faut donc évoquer une stabilisation de ces crédits à leur niveau de 2014.

Évolution des crédits des programmes
de la mission « justice
» examinés dans le présent avis
(en millions d'euros)

Numéro et intitulé
du programme
et de l'action

Autorisations d'engagement en M€

Crédits de paiement en M€

LFI 2014

LFI 2015

PLF 2016

2016/2015 (en %)

2016/2014 (en %)

LFI 2014

LFI 2015

PLF 2016

2016/2015 (en %)

2016/2014 (en %)

166 - Justice judiciaire

3 182

2 995

3 119

4,1%

-2%

3 110

3 065

3 087

0,7%

-0,8%

101 - Accès au droit et à la justice

368

359

366

2%

-0,4%

368

358

367

2,6%

-0,3%

310 - Conduite et pilotage de la politique de la justice

404

354

375

5,8%

-7,3%

311

315

311

-1,5%

-0,1%

335 - Conseil supérieur de la magistrature

3,8

3,62

3,48

-3,8%

-8,4%

4,2

4,34

4,44

2,5%

5,8%

Total des programmes suivis dans cet avis

3 958

3 711

3 863

4,1%

-2,4%

3 793

3 742

3 769

0,7%

-0,6%

Total des crédits de la mission « justice »

7 578

9 196

8 262

-10,1%

9%

7 806

7 894

7 973

1%

2,1%

Part des crédits du présent avis dans la mission « justice »

52,2%

40,4%

46,8%

-

-

48,6%

47,4%

47,3%

-

-

Source : PLF et projet annuel de performances pour 2016 et 2015.

A. LE PROGRAMME « JUSTICE JUDICIAIRE »

Le programme « justice judiciaire » progresse dans les mêmes proportions (0,7 %) que la moyenne des programmes suivis dans cet avis. Ses crédits de paiement (CP) augmentent ainsi de 22 millions d'euros , à 3,087 milliards dans le projet de loi de finances pour 2016, contre 3,065 milliards d'euros votés dans la loi de finances pour 2015.

L'essentiel de la hausse profite aux dépenses de personnel, puisque le Gouvernement prévoit la création de 157 emplois ainsi que la mise en oeuvre de mesures catégorielles, destinées à traduire la réforme du statut des greffiers et des greffiers en chef, à hauteur de 8,7 millions d'euros.

Les crédits d'investissement baissent quant à eux fortement, de près d'un tiers, passant de 155 millions d'euros à 118 millions d'euros. Ceci traduit le fait que, dans un contexte budgétaire contraint, le ministère de la justice ajuste la programmation des investissements immobiliers.

Évolution des crédits du programme « justice judiciaire »
(en millions d'euros)

Numéro et intitulé de l'action

Autorisations d'engagement
en M€

Crédits de paiement
en M€

LFI 2015

PLF 2016

Évolution
2016/2015

LFI 2015

PLF 2016

Évolution
2016/2015

1 - Traitement et jugement des contentieux civils

927,02

946,67

2,1%

927,02

946,67

2,1%

2 - Conduite de la politique pénale et jugement des affaires pénales

956,83

1 003,64

4,9%

956,83

1 003,64

4,9%

3 - Cassation

58,55

48,06

-17,9%

58,55

48,06

-17,9%

5 - Enregistrement des décisions judiciaires

12,15

10,63

-12,6%

12,15

10,63

-12,6%

6 - Soutien

900,82

970,26

7,7%

970,91

938,02

-3,4%

7 - Formation

110,67

112,78

1,9%

110,67

112,78

1,9%

8 - Support à l'accès au droit et à la justice

28,63

26,87

-6,2%

28,63

26,87

-6,2%

Total

2 994,67

3 118,91

4,1%

3 064,76

3 086,67

0,7%

Source : projet annuel de performances pour 2016.

Votre rapporteur pour avis constate que la plupart des juridictions civiles ou pénales voit le délai moyen de traitement des affaires dont elles sont saisies se dégrader.

Ainsi, ce délai moyen a augmenté de 0,3 mois, entre 2013 et 2014, pour les cours d'appel, de 0,2 mois, pour les tribunaux de grande en instance (TGI) sur la même période, de 1,8 mois, entre 2012 et 2014, pour les cours d'assises et de 0,2 mois, entre 2012 et 2013, pour les tribunaux correctionnels.

Ce constat est aggravé, pour les tribunaux de grande instance, par le fait que de plus en plus de juridictions dépassent de plus de 15 % ce délai moyen de traitement, ce qui traduit une grande inégalité entre les territoires : en 2014 près d'un tiers des TGI étaient dans ce cas, contre seulement 13 % en 2013.

La première cause de cette dégradation des délais de traitement est l'augmentation sensible du nombre d'affaires nouvelles portées devant ces juridictions. Ainsi, les cours d'appel ont été saisies en 2014 de 251 000 nouvelles affaires civiles, ce qui représente 6 000 affaires de plus qu'en 2013 ; les tribunaux de grande instance ont enregistré en 2014 960 000 affaires nouvelles, soit plus de 40 000 affaires supplémentaires par rapport à 2013.

À l'inverse, les juridictions qui ont connu une baisse de leur contentieux ont amélioré leurs délais de traitement. Il en va ainsi, notamment, des tribunaux d'instance qui ont enregistré, en 2014, 48 000 affaires en moins. Cette baisse était exclusivement due à la fin de la période de renouvellement des mesures de tutelles qui les avait précédemment fortement mobilisées.

Votre rapporteur s'interroge, au vu de cette évolution, sur les conséquences de la réforme de l'organisation judiciaire proposée par la garde des sceaux dans son projet de loi précité, qui porte application des mesures relatives à la justice du XXI ème siècle. En effet, plusieurs dispositions du texte prévoient de basculer sur les TGI des contentieux aujourd'hui dévolus aux tribunaux d'instance. Il en va ainsi du contentieux des tribunaux de police et de celui du dommage corporel inférieur à 10 000 euros. Dans le même temps, la juridiction de proximité devrait être supprimée au 1 er janvier 2017 et les juges de proximité reversés auprès du tribunal de grande instance en qualité d'assesseurs du tribunal correctionnel.

D'un côté, les tribunaux d'instance perdront une partie de leur contentieux, mais se trouveront investis de celui qui échoit, jusqu'à présent aux juridictions de proximité. De l'autre, les tribunaux de grande instance récupéreront ce premier contentieux, mais ils recevront le renfort des juges de proximité. L'opération sera-t-elle neutre pour chaque juridiction ? Il appartiendra au Gouvernement d'être vigilant sur ce point.

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