C. UNE RÉFORME DONT LE FINANCEMENT N'EST PLUS ASSURÉ

Votre rapporteur constate que la réforme proposée par le Gouvernement n'est pas équilibrée financièrement. En effet, non seulement l'amendement adopté augmente les dépenses, mais il supprime l'une des recettes prévues, qui devait apporter 10 millions d'euros en 2017.

La question de financements complémentaires, susceptibles de garantir un financement pérenne de l'aide juridictionnelle, continue donc de se poser.

La voie d'une participation financière des avocats est ainsi abandonnée. L'argument le plus solide contre une telle participation est qu'une profession ne doit pas être taxée pour financer la prestation qu'elle accomplit. Votre rapporteur souligne toutefois que cet argument est toutefois fragilisé par le fait que moins de la moitié des avocats (41 %) accomplit effectivement des prestations d'AJ et que seulement 16 % accomplissent 84 % de l'ensemble des missions.

Faut-il en revanche mettre à contribution les autres professions du droit ?

Le Gouvernement semble s'être orienté dans cette direction lorsqu'il a proposé la mise en place, dans le cadre de la loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques 15 ( * ) , d'un fonds interprofessionnel d'accès au droit et à la justice, financé par une taxe acquittée par les officiers publics ou ministériels sur certains actes. Cette taxe a toutefois été censurée par le Conseil constitutionnel 16 ( * ) . Pour autant, le fonds continue d'exister et le Gouvernement devrait proposer prochainement un nouveau dispositif financier pour l'alimenter. Ce dispositif pourrait avoir pour le Gouvernement vocation à assurer, de manière pérenne, le financement d'une partie de l'aide juridictionnelle.

Cette contribution des autres professions du droit au financement de l'aide juridictionnelle pose cependant inévitablement la question de la participation des avocats, qui ne pratiquent pas l'aide juridictionnelle, à ce même financement. Pour l'heure, seuls les avocats qui sont rémunérés par la voie d'un tarif proportionnel, c'est-à-dire ceux qui réalisent des ventes judiciaires et des adjudications d'immeubles, seraient concernés.

Une autre piste est celle d'une taxe perçue sur certains actes juridiques. Le Gouvernement s'est engagé à étudier cette piste, proposée par le CNB et reprise par nos collègues Jacques Mézard et Sophie Joissains. Il s'agirait de faire payer les clients des professionnels du droit. La question est actuellement débattue entre les professions qui s'interrogent sur l'assiette à retenir : les avocats sont moins concernés que les notaires par les actes soumis à droit d'enregistrement. Faut-il retenir un périmètre plus étendu, comme celui des actes rédigés ou contresignés par un professionnel du droit ?

Enfin, la dernière piste est le retour à la contribution pour l'aide juridique, de 35 euros, versée par le justiciable qui saisit le juge. Cette taxe, supprimée par la garde des sceaux dès le budget pour 2013, présentait toutefois le mérite d'assurer un financement pérenne de l'aide juridictionnelle. Elle jouait aussi le rôle d'un ticket modérateur, même s'il aurait été peut-être nécessaire d'ajuster cet effet modérateur.


* 15 Article 50 de la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques .

* 16 CC, n° 2015-715 DC du 5 août 2015, cons. 48 à 52.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page