B. UN PARQUET DES MINEURS QUI CONTINUE À MONTER EN PUISSANCE

1. Le rôle sans cesse accru du parquet des mineurs

Les infractions des mineurs traitées par la justice ne représentent pas l'ensemble des faits constatés par la police et la gendarmerie nationales. Sur environ 200 000 faits constatés en 2012, 170 800 affaires ont été traitées par les parquets. Sur ce total, 33 300 n'étaient pas poursuivables, soit parce que l'infraction était insuffisamment caractérisée ou que le mineur avait été mis hors de cause, soit parce qu'un motif juridique s'opposait à toute poursuite. Ce nombre, en hausse continue jusqu'en 2009, semble à présent se stabiliser.

Votre rapporteur avait déjà relevé l'importance croissante du parquet des mineurs dans le traitement de la délinquance juvénile . Cette tendance s'est encore accentuée en 2012. Ainsi, si le taux de réponse pénale s'est stabilisé au niveau élevé de 93,5 % (avec la quasi-disparition des classements pour inopportunité des poursuites), le recours aux procédures alternatives aux poursuites et à la composition pénale a continué à augmenter, pour atteindre plus de 60 % des affaires poursuivables alors qu'il n'était que de 41,4 % en 2004 .

Cette part des procédures alternatives est nettement plus élevée pour les affaires de mineurs que pour l'ensemble des affaires traitées par les parquets (39,7 %), tandis que la part des poursuites est plus faible pour les affaires mettant en cause des mineurs (32,8 %) que pour l'ensemble des affaires traitées par les parquets (43,8 %).

Rappelons que ce rôle croissant du parquet a été encouragé depuis 2002 par le législateur, qui lui a ouvert deux possibilités de saisir directement la juridiction pour mineurs sans instruction préalable par le juge des enfants :

- la procédure de présentation immédiate a été créée par la loi d'orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002, sur le modèle de la procédure de comparution immédiate applicable aux majeurs. Cette procédure permet au procureur de la République de traduire directement un mineur devant le tribunal pour enfants, lorsque des investigations sur les faits ne sont pas nécessaires et que des investigations sur la personnalité du mineur ont été accomplies au cours des douze mois précédents. Alors que la circulaire d'application du 7 novembre 2002 prévoyait que cette procédure pourrait s'appliquer « avec discernement » à des primo-délinquants, le législateur a souhaité dans la loi du 10 août 2011 sur la participation des citoyens au fonctionnement de la justice pénale et le jugement des mineurs, à l'initiative du Sénat, qu'il ne puisse être recouru à cette procédure que lorsque le mineur fait l'objet ou a déjà fait l'objet d'une ou plusieurs procédures judiciaires ;

- la possibilité de recourir à la procédure de convocation par officier de police judiciaire (COPJ) a été ouverte au parquet par la loi du 10 août 2011 précitée, dans les mêmes conditions que celles prévues pour la procédure de présentation immédiate. Elle permet au parquet de faire comparaître le mineur devant la juridiction pour mineurs dans un délai de dix jours à deux mois.

2. Une activité des juridictions pour mineurs toujours en baisse

En 2012, 68 100 mineurs délinquants ont été poursuivis devant la juridiction pour enfants . Un total de 49 000 affaires ayant été transmises par les parquets, on peut estimer que chaque affaire a concerné en moyenne 1,4 mineur.

Le nombre de mineurs délinquants dont la juridiction pour enfants a été saisie en 2012 est inférieur de 5 % à celui de 2011, la baisse étant continue depuis 2006 (85 335).

Les procédures rapides continuent à être les plus utilisées par les parquets pour transmettre les dossiers aux juges des enfants, au détriment du mode de transmission classique par requête pénale simple. Les convocations par officier de police judiciaire (COPJ, cf. ci-dessus) et les requêtes pénales avec défèrement (le mineur est conduit devant le juge des enfants à l'issue de la garde à vue) ont représenté 69 % des saisines en 2012 ; le nombre de COPJ s'établit ainsi à 40 800 et les requêtes pénales avec défèrement à 6 400 mineurs pour la même année. En outre, 1600 mineurs ont été poursuivis par comparution à délai rapproché et 850 par saisine directe du tribunal pour enfants selon la procédure de présentation immédiate (cf. ci-dessus).

Les requêtes pénales ordinaires des parquets, qui laissent au juge des enfants le choix de la date de convocation du mineur, constituent 24 % des modes de saisine. Les renvois devant le juge des enfants après une instruction sont en baisse avec 2 300 mineurs.

En 2012, les juges des enfants ont prononcé près de 37 000 mesures pré-sentencielles à l'encontre de mineurs délinquants . Environ un cinquième de ces mesures sont des investigations spécialisées (principalement des enquêtes sociales et des investigations et orientations éducatives) et 60 % sont des mesures éducatives provisoires (liberté surveillée préjudicielle, réparation et placement). Le contrôle judiciaire et la détention provisoire représentent respectivement 17 % et 4 %.

Par ailleurs, les juges des enfants et les tribunaux pour enfants ont prononcé 7 245 décisions écartant la poursuite ou la responsabilité du mineur (ordonnances de non-lieu, jugements de relaxe ou jugements prononçant la nullité de la procédure).

Pour les mineurs déclarés coupables, le nombre de mesures et sanctions prononcées s'élève à près de 60 000, soit une baisse de 8,2 % par rapport à l'année précédente . Ces mesures sont tout d'abord des admonestations, des remises à parents et des dispenses de peine (23 000 décisions soit 38 %), puis des mesures strictement éducatives, c'est-à-dire près de 10 000 mesures de liberté surveillée, de protection judiciaire, de placement et de réparation auxquelles s'ajoutent 2 500 sanctions éducatives (soit 20% de l'ensemble).

Les peines non spécifiques aux mineurs (24 700 décisions soit 41,4 % de l'ensemble) se répartissent comme suit : 13,4 % pour l'emprisonnement avec sursis simple, 7,4 % pour l'emprisonnement avec sursis avec mise à l'épreuve, 6,4 % pour l'emprisonnement ferme. Les amendes représentent 6,1 % des sanctions prononcées et les peines alternatives (TIG, stage de citoyenneté, etc.) 8,3 %.

En matière de condamnations inscrites au casier judiciaire , les statistiques disponibles sont celles de 2011 en raison des délais de signification, d'appel et de transmission par les juridictions au Casier judiciaire.

Ainsi, 71 % des crimes sanctionnés pour les mineurs sont des viols et près de 60 % des délits sont des atteintes aux biens (vol, recel, destruction, escroquerie) et un peu moins d'un quart (22 %) des atteintes aux personnes (violences, atteintes sexuelles, menaces, injures). Les autres condamnations sanctionnent essentiellement des infractions à la législation sur les stupéfiants ainsi que des outrages et rébellion.

Pour l'ensemble de ces infractions, les mineurs ont été condamnés à des peines d'emprisonnement (34,2 %) dont plus d'un quart avec une partie ferme, à des mesures éducatives (48 %). Les autres peines sont des amendes, des peines de substitution et des sanctions éducatives, enfin 3,6 % des mineurs ont été dispensés de peine.

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