EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 2 octobre 2013, sous la présidence de Mme Annie David, présidente, la commission procède à l'examen du rapport pour avis sur le projet de loi n° 851 (2012-2013), adopté par l'Assemblée nationale, pour l'accès au logement et un urbanisme rénové dont Mme Aline Archimbaud est la rapporteure pour avis.

EXAMEN DU RAPPORT POUR AVIS

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - A la suite de la conférence nationale qui s'est tenue en décembre 2012, un plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale a été adopté le 21 janvier 2013 ; il définit pour la durée du quinquennat la feuille de route du Gouvernement en matière de solidarité. Ses préconisations sont aujourd'hui largement contenues dans le projet de loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (Alur).

Certains constats nous montrent l'ampleur des enjeux auxquels le projet de loi doit répondre : en 2011, 8,7 millions de Français - 14,3 % de la population - vivaient en dessous du seuil de pauvreté, la moitié d'entre eux avec moins de 790 euros par mois. Cela touche en premier lieu les jeunes, les personnes isolées et sans emploi, mais également les familles. Selon l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale, un tiers des familles monoparentales et plus d'une famille nombreuse sur cinq vivaient en 2009 sous le seuil de pauvreté. Le mal-logement en est l'un des corollaires : 3,6 millions de Français sont aujourd'hui mal-logés et 150 000 n'ont pas de logement ou sont accueillis dans des structures d'hébergement.

Beaucoup sont hébergés par des proches ou contraints de vivre dans des habitations insalubres ou informelles. Ils sont 1,2 million à attendre un logement social. Or les efforts de construction ne sont pas encore à la hauteur des besoins et demeurent trop peu centrés sur les logements sociaux et très sociaux. L'effort substantiel réalisé au cours des dernières années pour renforcer le parc d'hébergement et en améliorer la qualité n'est pas suffisant face à une demande sans cesse croissante. Ainsi, le baromètre du 115, publié par la fédération nationale des associations d'accueil et de réinsertion sociale (Fnars) en juillet 2013, indiquait que 76 % des demandes enregistrées ce mois-là n'avaient pu aboutir. Les familles sont de plus en plus nombreuses à s'adresser au 115, tout en étant les premières victimes de l'inadaptation de l'offre d'hébergement. En l'absence de solutions plus pérennes, l'Etat consacre un budget considérable au paiement des nuits d'hôtel, hébergement qui empêche tout accompagnement social adapté et renforce les situations d'exclusion vécues par les personnes.

Face à cette situation, le Gouvernement a d'ores et déjà pris plusieurs mesures fortes. Il s'est engagé à construire 150 000 logements sociaux par an au cours des cinq années du quinquennat et à créer 15 000 places d'hébergement d'urgence supplémentaires dont 5 000 en 2013. Des projets territoriaux de sortie de l'hiver ont été élaborés par les préfets au début de l'année 2013 pour mettre un terme à la « gestion au thermomètre» des ouvertures de places, parfois suivis de diagnostics territoriaux à 360 degrés qui devraient être généralisés d'ici la fin de l'année.

Le présent projet de loi confirme ces avancées et s'articule autour de deux axes forts : anticiper les difficultés susceptibles de conduire à une mise à la rue et assurer la fluidité des parcours.

Deux mesures ne concernent pas directement l'hébergement : l'article 3 encadre l'évolution des loyers dans les zones tendues. Le logement constitue aujourd'hui le premier poste de charges des ménages français ; pour 8,4 % d'entre eux, cela représente plus de 40 % de leurs revenus. La forte augmentation des loyers au cours des dernières années renforce les risques d'impayés. Il fallait donc intervenir.

L'article 8 instaure quant à lui une garantie universelle des loyers (GUL), dont l'objectif est à la fois d'encourager les bailleurs à mettre leurs logements en location et de rétablir une égalité de traitement entre les locataires qui bénéficient de solides garanties et ceux qui n'ont pas la chance d'en disposer. En attendant son entrée en vigueur au 1 er janvier 2016, la phase de préfiguration sera l'occasion d'affiner le dispositif et d'informer les bailleurs et les locataires sur son fonctionnement.

Quant aux articles sur lesquels notre commission doit se prononcer, l'article 10 rend systématique, à compter du 1 er janvier 2015, la saisine par les bailleurs des commissions départementales de prévention des expulsions locatives (Ccapex) avant celle du juge. L'Assemblée nationale a apporté plusieurs améliorations substantielles à cet article, notamment le principe du maintien des aides personnelles au logement pour les locataires de bonne foi en situation d'impayés, qui permettra de limiter le risque de spirale de l'endettement, préjudiciable au propriétaire comme au locataire.

L'article 11 précise les conditions d'adoption et de suivi des chartes départementales pour la prévention des expulsions créées par la loi du 29 juillet 1998 et renforce le rôle des Ccapex, qui restent consultatives, mais mieux articulées avec le préfet, le bailleur, les organismes payeurs des aides au logement ou le fonds de solidarité pour le logement.

L'article 12 consacre le rôle et les missions des services intégrés d'accueil et d'orientation (SIAO) qui n'avaient jusqu'à présent qu'un fondement réglementaire. Placées sous la responsabilité du préfet, ces structures sont chargées, dans chaque département, de réguler l'offre d'hébergement, de coordonner les acteurs, d'assurer la continuité des prises en charge et d'analyser l'évolution des besoins. L'article 12 précise l'ensemble de ces missions : les SIAO pourront conclure des conventions, que ce soit avec les organismes gérant les structures d'hébergements, les bailleurs sociaux, les collectivités territoriales ou les agences régionales de santé (ARS). Je vous proposerai de compléter cette liste en intégrant les services pénitentiaires d'insertion et de probation, qui jouent un rôle essentiel pour la réinsertion sociale des anciens détenus. Avec l'article 12, les SIAO deviennent les véritables pilotes du dispositif d'accueil, d'hébergement et d'insertion vers le logement. La direction générale de la cohésion sociale nous a indiqué que des moyens supplémentaires substantiels leur seraient alloués dans le projet de loi de finances pour 2014, notamment pour assurer le déploiement d'un système d'information partagé, indispensable à l'analyse de l'évolution des besoins et de l'offre d'hébergement.

L'article 13 étend la compétence du comité régional de l'habitat au domaine de l'hébergement.

L'article 14 crée le plan départemental d'action pour le logement et l'hébergement des personnes défavorisées (PDALHPD), qui résulte de la fusion du plan départemental d'accueil, d'hébergement et d'insertion (PDAHI) et du plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées (PDALPD) dans lesquels ils doivent être inclus depuis 2009. Ce document unique, élaboré sous la responsabilité partagée du préfet et du président du conseil général, garantira une meilleure articulation entre les politiques d'hébergement et du logement.

L'article 16 ter, introduit à l'Assemblée nationale, donne aux départements la possibilité de déléguer le paiement des dépenses et le recouvrement des recettes relatives à l'hébergement des publics pris en charge par l'aide sociale à l'enfance. Le cabinet de la ministre m'a assurée que cela permettra de faciliter le travail quotidien des structures chargées d'intervenir auprès de ces publics sans remettre en cause la qualité du soutien apporté.

L'article 17 renforce la participation des personnes à la définition, au suivi et à l'évaluation du dispositif d'accueil, d'hébergement et d'insertion. Des conseils de la vie sociale ou d'autres formes de participation seront ainsi créés dans des structures qui ne rentrent pas dans le champ de la loi du 2 janvier 2002 qui a posé les bases de la participation des usagers pris en charge dans les établissements et services médico-sociaux. C'est une avancée forte.

L'article 18 encadre mieux le dispositif de bail glissant qui permet à un organisme d'intermédiation locative de devenir locataire d'un logement pour le sous-louer temporairement à un ménage dont il assure en parallèle l'accompagnement social. Il étend cette possibilité aux ménages reconnus prioritaires au titre du droit au logement opposable (Dalo). Je m'interroge sur l'opportunité d'une telle mesure qui me semble contraire à l'esprit de la loi du 5 mars 2007 : une personne reconnue prioritaire est, par principe, en mesure d'accéder immédiatement à un logement et de s'y maintenir. Pourquoi créer à travers la sous-location une nouvelle forme de mise à l'épreuve stigmatisante ? Je vous proposerai donc un amendement qui le limite aux personnes reconnues prioritaires au titre du droit à l'hébergement opposable (Daho).

L'article 19 renforce en cette matière les pouvoirs du préfet qui orientera les demandeurs reconnus prioritaires vers le SIAO. Si aucune solution n'est proposée dans les temps ou si un organisme refuse de prendre en charge la personne, le préfet pourra procéder d'office à l'attribution d'une place ou d'un logement adapté. Je vous présenterai un amendement prévoyant que l'hébergement proposé présente un caractère de stabilité. Il s'agit ni plus ni moins d'inscrire dans la loi la jurisprudence du Conseil d'Etat en matière d'hébergement.

L'article 20 permet aux commissions de médiation de requalifier un recours Daho en recours Dalo. Jusqu'à présent, seule l'option inverse leur était offerte.

Enfin, l'article 21 porte sur la domiciliation des personnes sans domicile stable. Celle-ci n'est pas un droit en soi, mais la condition de l'exercice de certains droits limitativement définis par le code de l'action sociale et des familles tels que l'affiliation à la sécurité sociale ou l'inscription sur les listes électorales. Les personnes sans domicile doivent se faire enregistrer auprès d'un centre communal d'action sociale (CCAS) ou d'un organisme agréé par le département. Depuis la loi Dalo, une procédure unique s'applique à tous, mais les étrangers non communautaires en situation irrégulière n'y ont en principe pas droit, sauf s'ils souhaitent bénéficier de l'aide médicale d'Etat, s'ils demandent l'asile ou, sous certaines conditions, s'ils peuvent prétendre à l'aide juridictionnelle. L'article 21 aligne ces trois procédures dérogatoires sur celle de droit commun. Je veux pourtant aller plus loin : la domiciliation devient possible pour l'exercice des droits civils, sauf pour les étrangers non communautaires en situation irrégulière. Pourtant, rien ne leur interdit, s'ils ont une adresse, de se marier en France ou d'y ouvrir un compte en banque. Il faut remédier à cette inégalité.

Ce texte n'est pas la grande loi de programmation en matière d'hébergement et de logement accompagné que certains pourraient souhaiter. Il se borne, et c'est déjà beaucoup, à poser les bases d'une meilleure articulation entre les politiques de l'hébergement et du logement et d'une coordination renforcée entre les nombreux acteurs qui interviennent dans ce domaine. L'ensemble des personnes que j'ai pu auditionner ont salué ces avancées.

Il conviendra bien évidemment d'être attentif aux moyens qui seront mis en oeuvre. Mais il s'agit là d'un autre débat, celui du projet de loi de finances que nous examinerons dans les prochaines semaines. Comme vous le savez, le Gouvernement a débloqué il y a maintenant quinze jours 107 millions d'euros afin d'abonder les crédits consacrés cette année à l'hébergement d'urgence, ce qui montre bien les tensions sur ce secteur sous-financé.

Deux éléments me semblent essentiels. D'une part, l'accompagnement social. Sans lui, comment prévenir les ruptures de parcours qui conduisent aux expulsions? Comment envisager une sortie durable de l'hébergement vers le logement ? Il est à ce titre essentiel que les professionnels se sentent encouragés dans leurs actions, qu'ils aient les moyens de mieux se coordonner pour proposer, sur la base d'évaluations sociales partagées, des solutions d'accompagnement individualisées pleinement adaptées aux besoins des personnes.

D'autre part, le développement de solutions innovantes de logement adapté. Afin d'éviter la rue ou le bidonville à ceux pour qui l'accès à un logement autonome est un horizon lointain, il est essentiel de développer les dispositifs existants, comme les logements foyers ou les maisons relais, et de réfléchir sans cesse à de nouveaux modes de prise en charge. Un appel à projets a été lancé en avril dernier pour expérimenter des solutions innovantes auprès de quatre publics : les femmes victimes de violences, les personnes souffrant de troubles psychiques, les jeunes en errance et les personnes sortant de prison. Cette initiative prometteuse doit en amener d'autres qui ne requerront pas nécessairement un accompagnement financier démesuré de la part de la puissance publique si elles s'appuient sur le secteur de l'économie sociale et solidaire. Afin d'alimenter la réflexion sur ce sujet, je vous proposerai de demander au Gouvernement un rapport qui nous permettra de disposer à la fois d'une évaluation des expériences déjà menées et de pistes pour en développer de nouvelles à l'avenir. Ce texte n'en demeure pas moins une étape importante pour faire du logement la porte d'entrée vers une intégration sociale réussie et non pas un facteur d'exclusion et de creusement des inégalités.

M. Jean-Pierre Godefroy . - L'appel à projets visant entre autres publics les femmes victimes de violences intègre-t-il les femmes cherchant à sortir de la prostitution ?

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Ce n'est pas précisé. Les projets sont en train d'être examinés. J'espère qu'il y en aura qui concernent ce public ; rien ne s'y oppose en tout cas.

M. René-Paul Savary . - Ce projet de loi est une modification de la politique en faveur de l'hébergement et du logement. Jusqu'à présent, le logement était considéré comme un droit pour tous et l'hébergement comme une solution transitoire, de manière notamment à éviter les nuitées en hôtel qui sont une solution mauvaise et très coûteuse. Le logement devait être la solution de première intention. Ce que vous proposez est un constat d'échec, puisque vous mettez l'accent sur l'hébergement. Les SIAO fonctionnent très bien. Ce projet de loi les reconnaît, leur accorde plus de moyens, c'est positif. Ils deviennent pilotes, mais il faut bien que la politique impulsée soit celle de l'Etat.

L'article 13 ajoute un échelon régional qui me semble malvenu concernant les questions d'hébergement qui peuvent être très différentes d'un département à l'autre. Dans ma région, les problèmes de la Haute-Marne ou des Ardennes n'ont rien à voir en ce domaine avec ceux que rencontre la Marne. L'hébergement est une compétence sociale qui doit être traitée au niveau départemental. Y mêler le niveau régional, ce n'est pas simplifier, c'est tout mélanger.

M. Gérard Longuet . - Puis-je avoir votre sentiment sur cette réalité française : nous sommes un pays où le logement est rare et cher, sans baisse des prix en période de crise, et tout cela malgré une dépense publique considérable. Sans vouloir mettre en cause un gouvernement ou un autre, quelle est votre interprétation de cette fatalité ?

Mme Catherine Deroche . - L'article 16 ter prévoit la possibilité de déléguer le paiement des dépenses et le recouvrement des recettes relatives à l'hébergement des publics pris en charge par l'aide sociale à l'enfance. A qui ?

Mme Michelle Meunier . - J'apprécie que ce projet de loi mette l'accent sur la prévention et l'anticipation, afin que l'accompagnement d'une personne ne soit pas mis à mal faute d'hébergement ou de logement, ou à cause d'un hébergement inapproprié tel que l'hôtel. L'accompagnement est en effet aussi important que l'hébergement. En revanche, je ne comprends pas l'article 21 sur la domiciliation. Il me semblait que les CCAS n'étaient plus chargées de la domiciliation des étrangers en situation irrégulière. Cet article revient-il en arrière ? Il s'agit souvent de situations dramatiques difficiles à traiter pour les CCAS.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - La domiciliation concerne tous les acteurs. Seules 17 % des démarches sont prises en charge par les CCAS ; le reste est fait dans des associations. La procédure ne change pas mais est élargie.

Monsieur Savary, ce projet de loi ne remet pas en cause la loi Dalo, au contraire. L'objectif final reste bien évidemment le logement. Mais il faut voir la réalité en face telle que nous avons pu la percevoir collectivement en audition : le 30 juin 2012, 27 534 ménages reconnus prioritaires attendaient un relogement depuis au moins six mois !

M. Claude Jeannerot . - Ces chiffres globaux ne veulent pas dire grand-chose tant les disparités sont grandes entre les territoires.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - La loi « Dalo » est excellente ; encore faut-il l'appliquer, ce qui nécessite d'éviter les ruptures. L'hôtel est une très mauvaise et très coûteuse solution et elle favorise ces ruptures. Il faut créer un parcours qui aille de la rue, du bidonville voire de la voiture au logement durable. C'est la raison d'être des articles de ce projet de loi sur le Daho. Quant aux SIAO, ils sont bien placés sous l'autorité du préfet. Si nous avons l'impression que cela ne fonctionne pas, nous pouvons nous retourner vers lui, ce qui est rassurant.

M. René-Paul Savary . - Vous nous dites pourtant que les SIAO pilotent les dispositifs. Les associations font un travail remarquable... mais le pilote doit rester le préfet.

Mme Annie David, présidente . - Mais ils seront placés sous l'autorité du préfet.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Le mot « piloter » est de moi. Il est peut-être inapproprié et ne figure pas dans le projet de loi.

Pour le pilotage régional du dispositif d'hébergement, l'objectif est de donner de la souplesse en cas de blocage dans un département. En Seine-Saint-Denis, tout est bloqué, alors que des solutions existent sans doute au niveau régional. C'est une possibilité et en aucun cas une obligation. La région n'est pas en concurrence avec le département.

M. Jean-Pierre Godefroy . - Je comprends bien que l'on raisonne ainsi en Ile-de-France. Mais en Basse-Normandie, un cas problématique à Cherbourg ne peut trouver sa solution à Alençon, à 230 kilomètres de là.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Le texte distingue bien l'Ile-de-France des autres régions.

Mme Annie David, présidente . - Les SIAO d'Ile-de-France en bénéficieront, mais les autres n'en auront pas même l'idée. En Rhône-Alpes, c'est la même chose ; on ne va pas héberger un habitant de Lyon en Haute-Savoie. Faut-il pour autant préciser et discriminer dans la loi ?

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - La coordination régionale des Siao sera plus structurée en Ile-de-France qu'ailleurs.

M. René-Paul Savary . - Raison de plus pour supprimer l'article 13 qui complique tout. Ce n'est pas le comité qui vous aidera à trouver des hébergements.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Il a un rôle consultatif.

M. René-Paul Savary . - Raison de plus ! Cela occasionnera des déplacements superflus...

M. Claude Jeannerot . - Je comprends les remarques de M. Savary, mais une telle rédaction permet d'affirmer la nécessité d'un continuum.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Vous me demandez, Monsieur Longuet, pourquoi le logement est rare et cher. Sans vouloir polémiquer, force est de constater  que pendant longtemps, la politique du logement a été insuffisante. D'autres articles du projet de loi, sur lesquels nous ne sommes pas saisis, tiennent à d'autres aspects et font preuve d'une logique globale en faveur de la construction de logements publics et privés. Il est ainsi nécessaire de lutter contre les pratiques spéculatives, mais aussi d'avoir une politique d'aménagement du territoire et d'encourager la construction de tous les types de logements : privés de toutes les gammes, sociaux et très sociaux, en rééquilibrant les rapports entre locataires et propriétaires

M. Gérard Longuet . - Dans quel sens ?

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Dans le sens de la justice. L'article 16 ter, enfin, dont je m'étais moi-même inquiétée, présentera surtout une utilité pour le Samu social de Paris.

Mme Natacha Bouchart . - Il ne faut pas oublier l'équilibre entre les communes centres et les autres. Certaines d'entre elles ont les moyens de construire des logements sociaux et ne le font pas. Baisser les seuils démographiques permettrait de mieux répartir les besoins du Dalo. Dans l'agglomération de Calais, s'il y a trente-huit ménages prioritaires au titre du Dalo, c'est la ville de Calais qui doit y répondre. Concernant l'hébergement, certains SIAO fonctionnent bien ; le nôtre non : lorsque nous voulons trouver de la place pour des migrants en appelant le 115, il n'y en a jamais...

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Je vous rejoins sur votre premier point. C'était l'objet de la loi votée il y a quelques mois. Toutes les communes doivent jouer le jeu. Or certaines ont 40 % de logements sociaux, tandis que d'autres, qui devraient en avoir 25 %, n'en ont que 5 % à 6 %.

Comme Mme Meunier, je considère que plus les difficultés sont prises en amont, plus il est possible d'éviter bien des souffrances et des dépenses. Mais cela suppose des moyens et des dispositifs d'alerte.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Article 10

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - L'article 10 prévoit notamment que les bailleurs - personnes physiques et SCI familiales - devront signaler aux commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives (Ccapex), les commandements de payer adressés à leurs locataires en situation d'impayés. Pour éviter l'encombrement des Ccapex, ce signalement ne sera obligatoire qu'au-delà d'un certain montant de dette, mais ce montant ne permet pas à lui seul d'apprécier les difficultés du locataire.

Mon amendement n° 1 propose donc de croiser ce critère avec celui du nombre de termes impayés, car même si les sommes en jeu sont faibles, la quantité d'impayés peut être un bon signal d'alerte.

M. René-Paul Savary . - Nous ne participerons pas au vote sur tous ces amendements.

L'amendement n° 1 est adopté.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Mon amendement n° 2 tire les conséquences de celui que nous venons d'adopter.

L'amendement n° 2 est adopté.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Afin que les familles en passe d'être expulsées puissent faire valoir leurs droits, l'amendement n° 3 précise que la notification de la décision de justice prononçant l'expulsion devra indiquer les modalités de saisine et l'adresse de la commission de médiation.

L'amendement n° 3 est adopté.

Article 12

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Je propose dans l'amendement n° 4 d'ajouter à la liste prévue à l'article 12 les services pénitentiaires d'insertion et de probation (Spip) afin que les SIAO puissent passer des conventions avec ces structures. Les sorties sèches de prison favorisent en effet la récidive.

M. Claude Jeannerot . - Cet ajout me semble utile, mais n'aurions-nous pas intérêt à proposer une formulation plus large pour éviter une longue liste d'organismes avec lesquels les SIAO peuvent conclure des conventions ?

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - L'article 12 propose une liste, d'où mon amendement visant à y adjoindre les Spip, mais rien n'interdit de présenter un amendement plus global.

L'amendement n° 4 est adopté.

Article 14

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - L'amendement n° 5 apporte une clarification rédactionnelle.

L'amendement n° 5 est adopté.

Article 18

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - L'article 18 prévoit que les personnes reconnues prioritaires au titre du Dalo puissent bénéficier de baux glissants. Mais les associations que nous avons reçues estiment que ce serait montrer une sorte de défiance à l'égard de ces personnes et que ces baux glissants les mettraient dans l'incertitude. En revanche, il convient d'ouvrir le bail glissant aux personnes reconnues prioritaires au titre du Daho pour qui il s'agit d'une réelle avancée, d'où mon amendement n° 6.

L'amendement n° 6 est adopté.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - L'amendement n° 7 fait débat. La loi rappelle que le principe de mixité sociale doit être respecté par le préfet. Or, les alinéas 6 et 7 visent à limiter les possibilités de relogement des personnes bénéficiant du Dalo dans les zones urbaines sensibles (ZUS), ce qui signifie implicitement qu'elles créent des difficultés. Je trouve qu'une telle rédaction est très stigmatisante, d'où mon amendement n° 7 pour supprimer ces deux alinéas.

M. Claude Jeannerot . - L'alinéa 7, qui a été ajouté à l'Assemblée nationale, dit : « Le représentant de l'Etat dans le département tient compte dans des conditions fixées par décret de la situation des ZUS pour la définition de ce périmètre », le but étant que l'objectif de mixité sociale soit bien pris en compte. Ceci dit, je comprends cet amendement mais notre groupe s'abstiendra pour que le débat ait lieu en séance publique.

Mme Natacha Bouchart . - Dans les ZUS, de nombreuses associations accompagnent les personnes en difficulté. Si les bénéficiaires du Dalo se retrouvent dans des quartiers où il n'y a pas de centres communaux d'action sociale (CCAS) ni de lieux d'accueil, ils ne pourront pas être encadrés et redeviendront des cas sociaux. Je suis donc défavorable au texte qui nous vient de l'Assemblée nationale.

M. Claude Jeannerot . - Mais cet alinéa 7 laisse le représentant de l'Etat juge de la situation. Il n'interdit en rien le relogement en ZUS. Cette ouverture me semble intéressante.

M. Gérard Longuet . - Exactement !

Mme Annie David, présidente . - Le préfet n'a aucune obligation, mais préciser qu'il faut tenir compte des ZUS, c'est dire implicitement que ces zones regroupent déjà des personnes en difficulté. Pourquoi le préciser dans la loi alors que le préfet tiendra compte de la situation ?

M. Claude Jeannerot . - J'ai le sentiment que vous faites une lecture restrictive de cet alinéa : l'appréciation du préfet sera la plus large possible et il tiendra compte de chaque situation. Il nous semble donc difficile de faire disparaître dès maintenant cet alinéa.

M. Gérard Longuet . - Comme M. Jeannerot, j'estime que les préfets doivent tenir compte des situations locales, pour éviter qu'ils ne fassent preuve de systématisme.

Mme Annie David, présidente . - Vous méfiez-vous des préfets ?

M. Gérard Longuet . - Appartenant au corps préfectoral, je serais bien mal venu de me méfier d'eux. Mais pour un préfet, plus c'est simple, moins c'est compliqué !

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Je ne suis pas d'accord quand j'entends dire qu'on ne peut pas loger les personnes bénéficiant du Dalo ailleurs que dans les ZUS : c'est le contraire qui doit être fait. Mais je n'ai pas réussi à rédiger un amendement qui inciterait les communes sans ZUS à accepter des bénéficiaires du Dalo. Il faut faire vivre la mixité sociale, sans stigmatiser les ZUS ni les Dalo.

M. Claude Jeannerot . - C'était bien l'objectif recherché par les députés qui ont déposé et voté cet amendement.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Nous ne sommes pas parvenus à une rédaction qui permette de faire vivre la mixité sociale partout, mais peut-être en trouverons-nous une d'ici la semaine prochaine.

Mme Annie David, présidente . - Nous allons en rester là pour l'instant et nous reprendrons ce débat en séance publique.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Le rapporteur au fond travaillant sur la question, je vais retirer mon amendement.

L'amendement n° 7 est retiré.

Article 19

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - L'amendement n° 8 concerne le droit à l'hébergement. Le Conseil d'Etat a estimé, dans une décision du 22 avril 2013, que la place d'hébergement proposée par le préfet au demandeur reconnu prioritaire par la commission de médiation au titre du Daho « doit présenter un caractère de stabilité ». Les préfets ne doivent donc pas proposer des hébergements pour quelques nuits.

Mme Catherine Génisson . - Je voterai cet amendement, mais je doute du résultat concret : s'il n'y a pas d'autre solution, le préfet ne pourra que proposer quelques nuitées d'hôtel.

Mme Catherine Deroche . - Nous sommes d'accord sur le principe, mais sur le terrain, il sera bien difficile à faire respecter.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Nous devons nous donner les moyens d'offrir des places de logement durable. La situation actuelle n'est plus tenable.

L'amendement n° 8 est adopté.

Article additionnel après l'article 20 bis (nouveau)

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Plusieurs associations ont attiré notre attention sur l'article L. 345-2-2 du code de l'action sociale et des familles qui consacre le principe de l'accueil inconditionnel des personnes sans abri en situation de détresse médicale, psychique et sociale dans les dispositifs d'hébergement d'urgence. Or, cette définition pourrait laisser penser qu'il faudrait cumuler les trois détresses pour bénéficier d'un hébergement d'urgence. L'amendement n° 9 propose donc de ne retenir que la détresse sociale, afin que le texte soit moins ambigu.

Mme Annie David, présidente . - Je crains que votre rédaction ne supprime les cas de détresses psychiques et médicales. Pourquoi ne pas remplacer le « et » par un « ou » ?

Mme Catherine Génisson . - Je voulais faire la même proposition.

M. Gérard Longuet . - Il s'agirait de conditions alternatives et non plus cumulatives.

Mme Annie David, présidente . - Et qui peuvent d'ailleurs se cumuler.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Je rectifie donc mon amendement en ce sens.

L'amendement n° 9 rectifié est adopté.

Article additionnel après l'article 20 bis (nouveau)

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Mon amendement n° 10 demande un rapport au Gouvernement pour faire le point sur les dispositifs de logement adapté et pour proposer d'éventuelles modifications législatives. Il est difficile de faire plus, à cause de l'article 40...

M. Gérard Longuet . - A force de rédiger des rapports, on finira peut-être par savoir pourquoi les mécanismes actuels fonctionnent mal.

L'amendement n° 10 est adopté.

Article 21

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - Mon amendement n° 11 réaffirme le rôle du préfet qui doit garantir l'accès à la domiciliation des personnes sans domicile stable.

M. Gérard Longuet . - Faut-il dire l'Etat ou le représentant de l'Etat ? Dans le premier cas, c'est l'Etat dans sa majesté alors que dans le second cas, c'est le préfet qui est visé et qui pourrait être attaqué.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - J'ai repris ici l'expression consacrée.

L'amendement n° 11 est adopté.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - L'article 21 aligne la procédure de domiciliation des personnes étrangères en situation irrégulière et qui ne sont pas originaires de l'Union européenne sur celle du droit commun lorsque ces personnes demandent à bénéficier de l'aide médicale d'Etat, du droit d'asile ou de l'aide juridictionnelle. Il élargit en même temps les cas d'ouverture du droit à domiciliation à l'exercice des droits civils, sauf pour les étrangers en situation irrégulière non communautaires. Ce faisant, il crée une inégalité entre les étrangers en situation irrégulière qui bénéficient d'un logement et qui peuvent ainsi se marier, ouvrir un compte en banque, exercer l'ensemble des droits attachés à leur personne qui nécessitent de déclarer une adresse, et ceux qui n'ont pas de domicile fixe et ne peuvent donc pas exercer ce type de droits. Toutes les associations - qui règlent, d'après l'étude d'impact du projet de loi, 83 % des problèmes de domiciliation contre 17 % pour les CCAS - nous ont demandé de déposer cet amendement n° 12 pour remédier à cette situation.

Mme Natacha Bouchart . - Nous reviendrons sur cette question en séance publique, d'autant que Calais connaît une situation tout à fait particulière.

Mme Catherine Génisson . - C'est vrai, et ce problème déborde même Calais pour toucher tout le département. L'expression « exercice des droits civils » a-t-elle une signification juridique ?

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - L'objectif est avant tout de permettre à ces personnes de se marier. Cette expression a bien une signification juridique.

M. Gérard Longuet . - La situation n'est pas comparable entre des étrangers en situation irrégulière mais qui ont un logement, un compte en banque et qui montrent leur volonté de s'intégrer, et ceux qui sont simplement de passage, comme ceux qui veulent rejoindre leurs proches en Grande-Bretagne. Faut-il que ces étrangers soient traités de la même façon ? Je ne sais et c'est pourquoi je m'abstiendrai sur cet amendement en attendant que nous en débattions en séance publique.

Lorsque je suis entré à l'Assemblée nationale, le premier débat auquel j'ai assisté concernait les étrangers en situation irrégulière qui étaient depuis dix ans dans notre pays et que nous avions décidé à l'époque de naturaliser.

Mme Annie David, présidente . - Les migrants en transit ne demanderont pas la domiciliation. En revanche, ceux qui sont dans notre pays depuis quelques années doivent pouvoir bénéficier d'une domiciliation pour scolariser leurs enfants et se marier.

Mme Aline Archimbaud, rapporteure pour avis . - L'ouverture d'un compte en banque permet l'intégration.

L'amendement n° 12 est adopté.

EXAMEN DES AMENDEMENTS

Auteur

Objet

Sort de l'amendement

Article 10

Mme ARCHIMBAUD
rapporteur

1

Signalement des commandements de payer aux Ccapex

Adopté

Mme ARCHIMBAUD
rapporteur

2

Signalement des commandements de payer aux Ccapex

Adopté

Mme ARCHIMBAUD
rapporteur

3

Notification des décisions de justice prononçant les expulsions

Adopté

Article 12

Mme ARCHIMBAUD
rapporteur

4

Conventions conclues par les SIAO

Adopté

Article 14

Mme ARCHIMBAUD
rapporteur

5

Amendement rédactionnel

Adopté

Article 18

Mme ARCHIMBAUD
rapporteur

6

Conditions d'accès au bail glissant

Adopté

Article 19

Mme ARCHIMBAUD
rapporteur

7

Relogement des prioritaires Daho dans les ZUS

Retiré

Mme ARCHIMBAUD
rapporteur

8

Hébergement des prioritaires Daho

Adopté

Article additionnel après l'article 20 bis (nouveau)

Mme ARCHIMBAUD
rapporteur

9

Définition du principe d'accueil inconditionnel pour l'hébergement d'urgence

Adopté

Mme ARCHIMBAUD
rapporteur

10

Demande de rapport sur le logement adapté

Adopté

Article 21

Mme ARCHIMBAUD
rapporteur

11

Rôle du préfet dans la procédure de domiciliation

Adopté

Mme ARCHIMBAUD
rapporteur

12

Conditions d'exercice du droit à domiciliation

Adopté

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