B. UN DISPOSITIF DONT L'OPPORTUNITÉ MÉRITE D'ÊTRE RÉEXAMINÉE

Votre rapporteur pour avis relève que les peines prononcées par les tribunaux correctionnels en formation citoyenne laissent apparaître, pour le premier semestre de l'expérimentation, un taux d'emprisonnement ferme de 23,8%, quasi identique à celui des peines fermes prononcées par les tribunaux correctionnels en 2009 et 2010 sur un champ d'infractions équivalent (24,1%).

Si, au soutien de ce dispositif avait parfois pu être avancée l'idée selon laquelle les citoyens jugeraient plus sévèrement que les magistrats, les conclusions de l'expérimentation montrent qu'elle était sans fondement , ce dont votre rapporteur se félicite .

1. Un coût potentiel élevé pour l'institution judiciaire

Votre rapporteur a interrogé la Chancellerie sur le coût de la généralisation du dispositif à l'ensemble des juridictions, à partir des premiers enseignements retirés des expérimentations de Dijon et de Toulouse.

Ce coût est retracé dans le tableau suivant :

Hypothèse maximale

Hypothèse minimale

Coût magistrats (155 ETPT)

8 472 300 €

7 472 300 €

Coût greffiers (260 ETPT)

8 508 500€

8 508 500 €

Coût agents C (190 ETPT)

4 344 960€

4 344 960 €

Frais de justice

9 150 000 €

9 150 000 €

Informatique

1 000 000 €

500 000 €

Salles d'audience

20 547 000 €

20 547 000 €

Création postes de travail

16 250 000 €

13 000 000 €

Coût total

68 272 760 €

63 522 760 €

Source : ministère de la justice.

Si les coûts informatiques et immobiliers relèvent de l'investissement, les coûts en personnel et en frais de justice seront reconduits d'année en année. Pour les ETPT, ils ont même vocation à croître puisque c'est le coût d'entrée, qui a été retenu comme base.

S'y ajouteront les frais d'entretien des surfaces immobilières supplémentaires.

On peut donc anticiper un budget annuel pérenne compris entre 35,2 et 37,6 millions d'euros.

2. Un bénéfice relatif pour les citoyens et les magistrats

Les citoyens assesseurs que votre rapporteur pour avis a pu rencontrer lors de son déplacement à la cour d'appel de Dijon, ont tous exprimé leur satisfaction d'avoir pu participer à l'exercice de la justice et qualifié l'expérience de particulièrement enrichissante.

M. Frédéric Pillot, président du tribunal de grande instance de Châlon-sur-Saône, a souligné l'intérêt pour les magistrats de pouvoir prendre, à l'occasion des audiences de citoyens assesseurs, le temps de juger, dont ils sont souvent privés dans les audiences correctionnelles ordinaires. Mais il s'est demandé, dans le même temps, si l'institution judiciaire avait bien les moyens d'agir ainsi.

Le bénéfice retiré par ceux, peu nombreux, qui, tirés au sort, ont pu participer au sein de ces formations à l'exercice de la justice, est indéniable.

Toutefois, votre rapporteur pour avis observe que ce dispositif représente une charge importante pour les tribunaux, les magistrats et leurs greffes, déjà confrontés à de nombreuses difficultés.

Elle constate que l'allongement et l'encombrement des audiences dégradent les délais de la juridiction et retarde la perspective pour le justiciable de voir un juge se prononcer sur son affaire.

Votre rapporteur pour avis s'interroge par conséquent sur le bénéfice qu'en retirent l'institution judiciaire et la société toute entière et sur la possibilité d'organiser différemment la participation des citoyens au fonctionnement de la justice .

La décision de la garde de sceaux de ne pas étendre le champ de l'expérimentation paraît sage, car l'expérience ne semble pas concluante .

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