B. UNE ÉCOLE EN PLEINE RÉFORME

1. L'évolution des métiers du greffe et la réforme de la scolarité

L'ENG a lancé, en janvier 2012, à la demande de la direction des services judiciaires une réforme de son organisation et de la scolarité.

Pour M. Stéphane Hardouin, directeur de l'ENG, cette réforme part d'un triple constat.

En premier lieu, les métiers du greffe ont évolué.

Les directeurs de greffe sont moins sollicités comme des spécialistes de la procédure, que comme des administrateurs et, à travers la gestion de la juridiction ou de leur service administratif, des techniciens de la performance.

Il est donc nécessaire de leur proposer une formation qui présente à la fois un caractère judiciaire marqué et une spécialisation aux problématiques d'administration et de gestion.

Le métier de greffier a lui moins évolué dans ses finalités, qui demeurent celles du contrôle et de l'authentification de la procédure, que dans ses modalités, notamment sous l'effet de l'informatisation des procédures judiciaires ou budgétaires. Le greffier est aussi souvent appelé à jouer un rôle d'encadrement d'autres fonctionnaires, greffiers comme lui ou personnels de catégorie C.

En outre, le profil de recrutement des greffiers stagiaires a changé : bien qu'il s'agisse d'un concours de catégorie B, accessible à BAC +2, les candidats reçus ont tous, généralement BAC +4 ou 5.

En second lieu, les stages ont pris une place très importante dans la formation des élèves greffiers, ce qui suppose la mise en place d'un suivi plus régulier des stagiaires.

Enfin, il a semblé nécessaire de renforcer la dimension professionnalisante de la formation, en faisant appel, en plus des 37 enseignants de l'école, à des intervenants en poste en juridiction.

La scolarité à l'ENG a par conséquent été refondue autour des principes suivants.

Les offres de formation initiale et continue ont été rapprochées, dans une logique de parcours professionnel. La formation initiale doit garantir l'adaptabilité des greffiers à tous les postes, la formation continue obligatoire, dans les cinq premières années, doit correspondre à une spécialisation dans les attributions du premier poste. Au-delà de ces cinq ans, la formation continue doit être personnalisée et offrir à l'intéressé une possibilité d'évolution dans sa carrière ou sa pratique professionnelle ;

La réforme pédagogique consacre la durée de la formation, décidée en 2004, de 18 mois, dont 6 mois de stage en pré-affectation sur le poste de sortie d'école.

Cette période de pré-affectation est très contestée par les représentants des personnels de greffe . En effet, le Conseil d'État a considéré, à l'occasion de l'examen du décret du 9 novembre 2011 fixant des modalités exceptionnelles de recrutement de greffiers des services judiciaires, que la possibilité offerte aux stagiaires greffiers d'instrumenter ne portait préjudice ni au statut ni au bon fonctionnement des juridictions. Ceux-ci peuvent donc, alors que leur formation n'est pas achevée, prendre l'ensemble des actes de procédures, sous leur responsabilité. Les organisations syndicales entendues par votre rapporteur dénoncent les pré-affectations qui s'exercent dans ces conditions comme une réduction de la durée de formation du stagiaire, affecté dans son poste de sortie, comme s'il avait terminé sa scolarité.

Le calendrier de la formation évolue :

- une période de découverte de 3 semaines, dont une en scolarité à l'ENG et deux en stage en juridiction ;

- 9 semaines de scolarité à l'école ;

- 28 semaines de stages pratiques (trois semaines en conseil de prud'hommes, trois semaines en cours d'appel, huit semaines auprès d'un tribunal d'instance et enfin quatorze semaines au sein d'un tribunal de grande instance) ;

- un approfondissement professionnel de six semaines, dont une à trois de scolarité ;

- la période de pré-affectation de 6 mois.

La scolarité s'articule autour de cinq domaines de compétence : la connaissance de l'environnement professionnel, l'éthique professionnelle, les connaissances procédurales, la maîtrise des outils informatique, l'encadrement intermédiaire.

Les orientations ainsi définies semblent tout à fait pertinentes à votre rapporteur pour avis, à l'exception de la période de stage en pré-affectation .

Celle-ci, en effet, pose question, puisque le risque existe que les juridictions, soumises à des difficultés d'effectif de leur greffe, utilisent les stagiaires pour effectuer les tâches dévolues à des greffiers titulaires, sans leur apporter un encadrement suffisant.

La création, à l'occasion de la réforme de la scolarité, d'une direction des stages chargée d'accompagner chaque élève dans ses stages de découverte, de perfectionnement ou de pré-affectation vise, justement, à conjurer ce risque en permettant un contrôle des conditions d'accueil et d'encadrement du stagiaire au sein de la juridiction.

Si cette initiative va dans le bon sens, elle ne peut, à elle seule, répondre aux difficultés soulignées.

En réponse à votre rapporteur pour avis, lors de son audition par votre commission des lois, Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, a indiqué s'interroger sur cette période de pré-affectation, tout en constatant que ce stage assurait une arrivée plus rapide des greffiers dans les juridictions

Votre rapporteur juge nécessaire de réfléchir à une modification du stage de pré-affectation, soit pour en raccourcir la durée, par exemple à trois mois, soit pour supprimer la faculté pour les stagiaires d'instrumenter seuls .

2. L'enjeu de la formation continue

L'école nationale des greffes assure principalement la formation continue nationale des greffiers en chef (qui représentent 31,5 % du nombre de participants) et des greffiers (47,4 %)

La formation continue régionale s'adresse plus particulièrement aux personnels de catégorie C dont 13,7 % seulement sont accueillis dans des actions de formation organisées par l'école. En 2011, les secrétaires administratifs représentaient 3,6 % du nombre de fonctionnaires formés, et les magistrats, 2,6 %.

Compte tenu du plan de charge en formation initiale, les efforts fournis en 2010 pour mettre en place une réelle complémentarité entre l'échelon national et l'échelon régional n'ont pu être poursuivis.

En 2011, l'école s'est attachée à intensifier le partenariat avec l'école nationale de la magistrature et à s'ouvrir sur l'inter-directionnel, à mettre l'accent sur les formations d'adaptation à l'emploi à destination des greffiers en chef et des greffiers nommés sur des postes à profil et à donner aux greffiers en chef les outils nécessaires pour s'inscrire dans une démarche de performance.

Une évaluation des formations est organisée depuis 2009. En 2011, 29 actions de formation ont été concernées. Le taux de réponse des agents s'élève à 73,3% et celui des supérieurs hiérarchiques est de 72,7 %. Le taux de satisfaction globale exprimé par les agents en formation s'élève à 95,3% (92,2% en 2010 et 81,8 % en 2009).

Le nombre de sessions de formation, comme celui des participants est variable d'une année sur l'autre et dépend notamment de la charge que représente la formation initiale.

Ainsi, la perspective de la restructuration des bâtiments de l'ENG conjuguée avec l'augmentation du plan de charge en formation initiale a entraîné une forte baisse du nombre d'actions de formation continue réalisées en 2008, corrigée en 2009, mais à nouveau observée en 2010 et 2011, années au cours desquelles l'ENG a dû assurer la formation des recrutements massifs de greffiers.

Année

2001

2002

2003

2004

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Nombre total de sessions ou stages individuels

150

171

159

220

238

224

243

179

206

149

171

Nombre total de participants

1839

1637

2571

3139

2905

2568

2308

1901

2936

1736

1877


• Les regroupements fonctionnels :

Ayant pour vocation d'instaurer un dialogue entre la direction des services judiciaires et des greffiers en chef exerçant des fonctions de haute responsabilité, les regroupements fonctionnels permettent aux participants de se tenir informés de toutes les réformes législatives, administratives et organisationnelles, de se doter de repères théoriques et méthodologiques utiles à l'exercice de leurs fonctions, de confronter leurs expériences et d'échanger sur leurs pratiques professionnelles.

Au cours de l'année 2011, la sous-direction des ressources humaines des greffes et l'école nationale des greffes ont organisé six regroupements à destination :

- des responsables de la gestion de la formation ;

- des directeurs délégués à l'administration régionale judiciaire et responsables de la gestion budgétaire ;

- des directeurs de greffe de cours d'appel ;

- des directeurs de greffe hors hiérarchie en tribunaux d'instance et conseils des prud'hommes ;

- des directeurs de greffe hors hiérarchie en tribunaux de grande instance ;

- des responsables de la gestion informatique en leur qualité de formateurs sur l'application Cassiopée

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Au bénéfice de l'ensemble de ces observations, la commission a donné un avis favorable à l'adoption des crédits consacrés à la justice judiciaire.

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