2. Des incidences budgétaires insuffisamment évaluées

Lorsque la commission d'enquête sénatoriale sur la délinquance des mineurs avait préconisé, en juin 2002, le recentrage de la PJJ sur la prise en charge des seuls mineurs délinquants, elle avait considéré que, « selon les règles fondatrices de la décentralisation, ce transfert de compétences [devrait] s'accompagner des transferts de moyens correspondants » 26 ( * ) .

L'article 27 de la loi du 5 mars 2007 portant réforme de la protection de l'enfance a créé un fonds national de financement de la protection de l'enfance au sein de la caisse nationale des allocations familiales, destiné à compenser les charges résultant pour les départements de l'extension de leur compétence en matière de protection sociale et d'aide sociale à l'enfance 27 ( * ) . Ce fonds a été créé par un décret n°2010-497 du 17 mai 2010, à l'issue d'un long contentieux opposant l'Etat et l'Assemblée des départements de France (ADF).

Dans son rapport précité consacré à la protection de l'enfance, la Cour des comptes a quant à elle adopté un regard critique sur le volet financier de la disparition de l'intervention de la PJJ au civil : « pour compenser ce retrait, les juges des enfants seront conduits à confier à l'aide sociale à l'enfance (ASE) ou au secteur associatif un nombre croissant de mesures : le département deviendra l'unique financeur des prises en charge, l'Etat conservant le financement des mesures d'investigations judiciaires. La charge financière qui en découle, variable selon les départements, n'a pas été évaluée [...]. Si l'on ne peut que prendre acte d'une orientation confirmée dans les lois de finances, ses modalités, qui n'ont pas respecté le principe d'expérimentation prévu par la loi du 13 août 2004, restent critiquables » 28 ( * ) .

Saisi par le Conseil d'État d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par le département des Côtes d'Armor, le Conseil constitutionnel a estimé, dans une décision n°2010-109 QPC du 25 mars 2011, que si l'article 27 de la loi du 5 mars 2007 - qui crée le Fonds national de financement de la protection de l'enfance précité - modifiait bien les conditions d'exercice des missions des services de protection maternelle et infantile et d'aide sociale à l'enfance exercées par les départements depuis les lois du 22 juillet 1983 et du 6 janvier 1986, il n'avait pour autant procédé ni à un transfert aux départements d'une compétence relevant de l'État ni à une création ou à une extension de compétences . Par suite, le Conseil constitutionnel a considéré que ces dispositions n'avaient méconnu ni l'autonomie financière, ni la libre administration de ces collectivités territoriales.


* 26 « Délinquance des mineurs : la République en quête de respect », Jean-Pierre Schosteck, président, Jean-Claude Carle, rapporteur, rapport n°340 (2001-2002), déposé le 26 juin 2002, page 186. http://www.senat.fr/notice-rapport/2001/r01-340-1-notice.html

* 27 Le champ de cette loi du 5 mars 2007 est beaucoup plus large que la seule question de la mise en oeuvre des mesures judiciaires de protection. Il concerne notamment la création des observatoires départementaux de la protection de l'enfance et des cellules de recueil, de traitement et d'évaluation d'informations.

* 28 Rapport précité, pages 49-50.

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