2. La subsidiarité de l'aide juridictionnelle par rapport à l'assurance de protection juridique

L'article 5 de la loi du 19 février 2007 a posé le principe selon lequel l'aide juridictionnelle n'est pas accordée lorsque les frais couverts par cette aide sont pris en charge au titre d'un contrat d'assurance de protection juridique ou d'un système de protection équivalent.

Le décret n° 2008-1324 du 15 décembre 2008 est venu définir les conditions de prise en charge, au titre de l'aide juridictionnelle, des frais non couverts par un dispositif de protection juridique.

Ainsi, lorsque le demandeur à l'aide juridictionnelle dispose d'une assurance de protection juridique, il devra préalablement effectuer une déclaration de sinistre à son assureur afin que ce dernier indique s'il prend en charge le sinistre et, dans l'affirmative, le montant des plafonds de garantie éventuels.

L'arrêté du 27 février 2009 fixe le modèle de la décision de prise en charge ou de non-prise en charge de l'assureur de protection juridique.

Suivant les informations communiquées par l'assureur, le bureau d'aide juridictionnelle pourra rejeter la demande d'aide si l'assurance garantit l'ensemble des frais de procès ou prononcer l'admission à l'aide si l'assurance ne couvre que partiellement les frais de ce procès.

Toutefois, votre rapporteur souligne que le dispositif donnant un caractère subsidiaire à l'aide juridictionnelle en cas de détention d'un contrat d'assurance de protection juridique, est insuffisamment appliqué, car il repose sur un régime déclaratif.

Ainsi, comme l'ont expliqué les magistrats du tribunal de grande instance de Bordeaux rencontrés par votre rapporteur, les BAJ ne disposent d'aucun moyen de vérification des déclarations fournies par les justiciables. De plus, certains BAJ continuent à appliquer un régime d'admission automatique à l'aide juridictionnelle pour les procédures urgentes, quand bien même le demandeur n'est pas éligible, les justiciables et leurs avocats arguant d'un manque de temps pour donner les informations requises..

Afin d'éviter cette dérive, le barreau de Bordeaux devrait prochainement signer une convention avec le BAJ du tribunal de grande instance, afin de prévoir que les personnes convoquées pour une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité doivent être prévenues à l'avance et, en contrepartie, transmettre à leur avocat un dossier d'aide juridictionnelle complété.

La faible utilisation de la procédure de renonciation par l'avocat
à la rétribution de sa mission au titre de l'aide juridictionnelle

L'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique permet à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle de demander au juge que la partie adverse soit condamnée au paiement d'une indemnité correspondant aux frais que son client aurait exposés, s'il n'avait pas eu cette aide. S'il est fait droit à cette demande, l'indemnité allouée par le juge est alors recouvrée contre la partie condamnée aux dépens non bénéficiaires de l'aide juridictionnelle, à l'instar des dépens d'instance ou des frais irrépétibles alloués sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Peu utilisé et méconnu des acteurs du monde judiciaire, ce dispositif améliore pourtant significativement la rémunération de l'avocat , laquelle n'est plus déterminée suivant le barème de l'aide juridictionnelle, mais par le juge en tenant compte du coût réel de la mission d'assistance. Il pourrait en outre contribuer, dans un contexte de maîtrise budgétaire, à diminuer la dépense d'aide juridictionnelle sans remettre en cause les droits des bénéficiaires.

Afin d'en favoriser l'application, l'ordonnance du 8 décembre 2005 et son décret d'application du 30 juillet 2007 en ont simplifié l'économie. Désormais, l'indemnité allouée par le juge à l'avocat correspond également aux « honoraires et frais non compris dans les dépens » que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Elle peut être demandée en matière pénale. Enfin, le délai ouvert à l'avocat pour recouvrer la somme allouée et renoncer à sa rétribution au titre de l'aide juridictionnelle a été porté à douze mois.

Cette réforme n'a pas eu d'impact significatif en 2007 compte tenu de la date d'entrée en vigueur du décret d'application et de diffusion des instructions aux greffes. Par ailleurs, la diffusion du dispositif de l'article 37 nécessite des actions de formation auprès des avocats, magistrats et greffiers qui ont été engagées dans les cours d'appel en 2008.

Les formations menées en 2008 auprès d'une douzaine de cours d'appel ont révélé que le nouveau dispositif était favorablement accueilli par la profession d'avocat, mais qu'il n'était pas toujours connu d'elle, des magistrats ou des greffiers. Un travail de formation et de sensibilisation est poursuivi en 2009 dans les autres cours d'appel. Il est envisagé d'inviter par circulaire les chefs de cours à sensibiliser les magistrats de leur ressort sur ce dispositif et sur la nécessité d'allouer au titre de l'article 37 une indemnité supérieure au barème de rétribution de l'aide juridictionnelle, afin d'inciter les avocats à renoncer à la rétribution de l'Etat.

Enfin, il n'existe pas d'outil statistique permettant de comptabiliser de façon exhaustive le nombre de demandes de renonciation présentées par les avocats. Toutefois, il est possible, à partir des données collectées par les caisses de règlements pécuniaires des avocats (CARPA), de comptabiliser les cas dans lesquels les avocats renoncent au recouvrement de l'indemnité allouée par le juge et sollicitent le paiement de leur mission au titre de l'aide juridictionnelle, ainsi que les cas où l'avocat prévient la CARPA de sa renonciation à la rétribution de l'Etat.

Les statistiques relatives à l'année 2008 indiquent que les CARPA ont reçu des données relatives à 136 missions concernées par l'application de l'article 37 : 116 avis de renonciation à la rétribution au titre de l'aide juridictionnelle, l'avocat ayant recouvré la somme allouée sur le fondement de l'article 37, et 20 demandes de règlement de la rétribution de l'Etat, l'avocat n'ayant pas pu recouvrer la somme allouée par le juge sur le fondement de l'article 37.

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