2. Le Conseil supérieur de la magistrature réduit à une simple action au sein du programme justice judiciaire

La place accordée au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) dans la nomenclature budgétaire n'est toujours pas satisfaisante . En effet, les crédits alloués au CSM sont, comme l'année dernière, retracés dans l'action 04 du programme justice judiciaire.

Le gouvernement a justifié son choix par une double raison : il considère que l'activité du CSM n'est pas « détachable » de l'activité judiciaire et que le caractère limité de l'enveloppe allouée au CSM ne permet pas de constituer un programme autonome coûteux en termes de moyens supplémentaires, tant en personnel qu'en crédits de fonctionnement.

Crédits alloués au CSM
(loi de finances 2006 - projet de loi 2007)

(en millions d'euros)

LFI
2006

Projet de loi de finances 2007

Evolution 2006/2007

Dépenses de personnel

1,8
(85 %)

0,8
(65 %)

- 55 %

Dépenses de fonctionnement

0,3
(15 %)

0,4
(35 %)

+ 33 %

Total

2,1
(100 %)

1,2
(100 %)

- 43 %

Source : Projet de loi de finances pour 2007 - annexe Justice - page 37.

La dotation budgétaire allouée au CSM par le projet de budget pour 2007 -1,2 million d'euros- marque une nette diminution (- 43 %). Cette évolution résulte principalement de la forte décrue des crédits de rémunération, compte tenu de la diminution prévue -de 8 à 2- du nombre d'emplois équivalents temps plein (ETPT) de magistrats.

En effet en 2006, le nombre d'ETPT de magistrats inscrits en loi de finances initiale avait été largement calculé, afin de couvrir l'éventualité -théorique- selon laquelle les futurs magistrats élus membres du CSM demanderaient à être détachés et donc rémunérés en totalité par ce dernier 11 ( * ) . Les élections ont eu lieu en juin dernier et, comme lors du précédent renouvellement, aucun magistrat désigné membre du CSM n'a in fine demandé à être détaché de ses fonctions juridictionnelles, ce qui a allégé fortement les besoins en crédits de rémunération. Votre rapporteur pour avis se réjouit de ce que le présent projet de loi de finances initiale, dans un souci de sincérité budgétaire, prenne acte de cette évolution.

Les principaux postes budgétaires du CSM sont les dépenses de personnel (rémunération des fonctionnaires 12 ( * ) qui y sont affectés et indemnisation des membres du CSM) et les crédits de fonctionnement destinés à couvrir les dépenses induites par son activité (fournitures de bureau, affranchissement, télécommunications, frais de déplacements, frais de réception) et les dépenses informatiques.

Votre commission regrette que le Gouvernement n'ait pas été sensible aux arguments qu'elle avait avancés l'année dernière en faveur d'un rattachement budgétaire du CSM lui conférant une plus grande autonomie . L'inscription des moyens de cette instance au sein d'une simple action du programme justice judiciaire de la mission Justice ne traduit pas de manière satisfaisante la place singulière qu'elle occupe dans nos institutions. La création d'un programme spécifique, éventuellement intégré à la mission Pouvoirs publics aurait été préférable.

Comme l'a rappelé le CSM dans son dernier rapport d'activité 13 ( * ) : «... de par son statut constitutionnel, le Conseil devrait bénéficier d'une autonomie de gestion et de fonctionnement par rapport au ministère de la justice, son activité étant directement liée aux finalités -au sens de la LOLF- de l'action du Président de la République . »

En outre, votre commission considère qu'une éventuelle réforme législative du CSM destinée à accroître son indépendance à l'égard des magistrats judiciaires ne saurait intervenir sans que le Gouvernement ne prévoie un rattachement budgétaire plus respectueux de son autonomie.

De plus, comme le souligne le CSM dans son dernier rapport d'activité, « une raison supplémentaire du rattachement du Conseil supérieur de la magistrature à [la] mission [pouvoirs publics] peut être tirée de l'exigence de transparence imposée à la gestion budgétaire des administrations publiques ; en effet, dans la mesure où certains des moyens matériels qui sont affectés au Conseil sont gérés dans le cadre d'autres budgets, relevant du programme justice judiciaire ou, singulièrement, de la présidence de la République , le regroupement de l'ensemble de ces moyens au sein d'un programme identifié au sein de la mission adéquate est, en tout état de cause, de nature à répondre à ces exigences comme à la logique de la LOLF . »

Enfin, le régime particulier applicable aux dotations rattachées à la mission Pouvoirs publics 14 ( * ) serait de nature à assurer au CSM un traitement budgétaire plus favorable qu'actuellement .

Même si leurs attributions ne sont pas strictement identiques à celles du CSM français, la comparaison avec les budgets alloués aux CSM d'autres Etats de l'Union européenne révèle la modestie des moyens mis à sa disposition.

Les CSM des autres Etats membres de l'Union européenne

Statut du secrétariat

Montant du budget
(en millions d'euros)

Modalités de discussion avec le Parlement

Belgique

[non précisé]

5,7

le conseil lui-même

Danemark

nommé par le « board of governors »

7,2

le conseil lui-même

Espagne

nommé par l'assemblée générale du conseil

57,7

le ministère de la justice mais préparé par le conseil

Italie

choisi par le conseil

35

le ministère de la justice

Pays-Bas

choisi par le conseil

13

le ministère de la justice

Suède

nommé par le gouvernement

11,5

[non précisé]

Source : Rapport d'activité du Conseil supérieur de la magistrature pour 2004-2005, page 183.

Comme l'a indiqué le CSM dans son dernier rapport d'activité, ses crédits de fonctionnement sont notoirement insuffisants . En effet, ses membres n'ont pas de moyens d'assistance ni de secrétariat. Par ailleurs, l'étroitesse des locaux ne permet pas à tous ses membres de disposer d'un bureau 15 ( * ) . Dès lors, le CSM considère que sa situation budgétaire « l'empêche de disposer des moyens permanents d'information, d'études et de communication nécessaires à la bonne exécution de ses missions ». Cette instance évalue à 500.000  euros supplémentaires la hauteur de ses besoins.

* 11 Article 2 du décret n° 95-735 du 10 mai 1995.

* 12 Cet organe bénéficie de 2 ETPT de magistrats détachés auprès du CSM pour assurer son secrétariat administratif et de 13 ETPT de fonctionnaires de catégories A, B et C.

* 13 Rapport d'activité pour 2004-2005, pages 5 à 12.

* 14 Voir sur ce point le I - C - 3. Les dotations constituent des unités budgétaires dérogatoires, présentées par nature et non par objectif de dépenses. Elles sont exclues des modalités de gestion applicables aux programmes (transferts, virements, gels).

* 15 Le CSM est logé depuis plus de 50 ans Quai Branly dans des locaux appartenant à la présidence de la République.

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