2. Une réduction des délais de jugement devant les autres juridictions civiles plus ou moins prononcée


Un fonctionnement des tribunaux de grande instance en voie d'amélioration

A périmètre constant (c'est-à-dire si on ne prend en compte que les affaires jugées au fond stricto sensu 87 ( * ) ), les tribunaux de grande instance - avec 9,1 mois - enregistrent une quasi-stabilité de la durée moyenne de jugement par rapport à 2003 (9,5 mois), marquant ainsi une rupture avec la tendance observée depuis plusieurs années 88 ( * ) . Cette évolution favorable résulte d'une bonne conjonction entre un volume d'affaires nouvelles enregistrées pour être jugées au fond en voie de stabilisation (595.848 affaires en 2004 contre 595.430 en 2003, soit + 0,1 %) et le nombre d'affaires jugées au fond qui progresse légèrement (573.412 affaires en 2004 contre 568.074 en 2003, soit + 0,9 %).

Les résultats établis sur la base du nouveau périmètre diffèrent dans la mesure où s'ajoutent les procédures en référés et les nouvelles procédures intégrées dans les affaires au fond.

Ainsi, en 2004, le nombre d'affaires nouvelles portées devant les TGI s'est élevé à 937.530 dont 813.451 affaires au fond et 124.079 référés. Le nombre d'affaires terminées se situe à un niveau inférieur (901.093), d'où une augmentation du stock d'affaires en cours (+ 36.000 dossiers). La durée moyenne de traitement toutes affaires confondues s'établit ainsi à 7 mois en 2004 . Ce délai moyen masque cependant d'importantes disparités puisque 25 % des affaires ont été jugées dans un délai inférieur à deux mois, 50 % dans un délai de moins de 4,6 mois et 25 % dans un délai supérieur à 10,5 mois.


Une évolution encourageante de la situation des cours d'appel

Les cours d'appel bénéficient d'une situation plus favorable.

Deux tiers des cours d'appel ont en effet réussi à réduire significativement leur délai moyen de jugement (-4,2 mois pour la cour d'appel de Chambéry, -2,8 mois pour la cour d'appel de Dijon, -2 mois pour les cours d'appel de Versailles et de Bastia). En effet, la durée moyenne de traitement (15,3 mois en 2004 contre 16,1 mois en 2003) poursuit la tendance à la baisse observée l'année dernière et, ce en dépit d'un contexte de forte pression des affaires nouvelles.

En effet, en 2004, le nombre d'affaires portées devant les cours d'appel a cru de 5,5 % (210.250 affaires contre 199.290 en 2003). Cette évolution apparaît comme le corollaire de la croissance des flux enregistrés par les juridictions du premier degré. On observe notamment une forte croissance des appels formés à l'encontre des jugements rendus par les conseils de prud'hommes et -dans une moindre mesure- par les tribunaux de grande instance.

Les efforts des magistrats pour traiter un nombre de dossiers croissant (215.887 affaires terminées en 2004) ont permis de compenser l'augmentation du volume d'affaires nouvelles. Ainsi, cette configuration favorable a permis une réduction du stock d'affaires en cours d'environ 5.600 dossiers, soit une diminution de 10 % du stock global estimé (au 1 er janvier 2005) à 244.000 affaires.

La résorption des stocks s'observe dans plus de la moitié des cours d'appel.

Ces progrès ont pu être obtenus grâce à l'engagement des cours d'appel dans une démarche de contractualisation avec le ministère de la justice . En effet, la LOPJ a systématisé le recours aux contrats d'objectifs, qui déterminent pour une durée de trois ans renouvelable des objectifs précis -quantitatifs et qualitatifs-, révisables chaque année et allouent, en contrepartie, pour la durée du contrat, des moyens humains et matériels supplémentaires. Aux termes de l'engagement, les emplois créés pourront être supprimés et les moyens de fonctionnement réduits. En 2005, 35 postes de greffiers ont été localisés à cette fin.

Actuellement, plusieurs contrats d'objectifs dont le bilan est très satisfaisant sont en cours d'exécution . On observe d'ailleurs que les cours d'appel dont les stocks d'affaires s'aggravent (Riom, Metz et Nancy) n'ont pas conclu de contrats d'objectifs.

Les premiers contrats ont été signés en décembre 2002 par deux cours d'appel . Il s'agit de :

- la cour d'appel d'Aix-en-Provence qui poursuit l'objectif de résorber les stocks enregistrés dans les chambres civiles, commerciales et sociales en échange d'un renforcement de ses moyens humains (15 magistrats et 12 greffiers) et matériels (+ 561.500 euros, soit 175.000 euros par an). MM. Jean-Pierre Atthenont, premier président de cette cour, et Jean-Paul Lacroix-Andrivet, président de chambre chargé du suivi du contrat d'objectifs, ont indiqué à votre rapporteur pour avis que ces ressources nouvelles avaient permis de créer des chambres dédiées au « déstockage » notamment en matière sociale, familiale, d'instruction et de construction. Ils ont cependant relevé que les nombreuses vacances de postes liées aux mutations des fonctionnaires des greffes n'avaient pas permis à la cour d'appel de fonctionner avec la totalité des moyens qui lui avaient été alloués à l'origine.

L'expérience menée a produit des résultats tangibles . Le nombre d'affaires réglées s'est accru de 3,4 % et dans le même temps le stock d'affaires en instance a baissé de 12,4 %. Un renouvellement du contrat qui arrive à échéance au 31 décembre prochain est d'ailleurs souhaité par les chefs de cette cour ;

- la cour d'appel de Douai qui s'est fixé un objectif analogue à celui de la cour d'appel d'Aix-en-Provence et a bénéficié d'effectifs supplémentaires (12 magistrats et 12 greffiers) et d'une dotation majorée à hauteur 478.200 euros. Là encore, les effets positifs de cette démarche ont été perceptibles dès 2004 : les stocks d'affaires ont chuté de 15 %, ce qui a permis d'améliorer la durée moyenne de traitement de près de 2 mois.

L'efficacité de ces deux dispositifs se mesure à la part significative prise par ces deux cours d'appel dans la réduction des affaires en stock . Ces juridictions ont en effet contribué pour les deux tiers à la diminution des stocks d'affaires. Ces avancées pourraient néanmoins être plus modestes l'année prochaine. En effet, les magistrats de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ont indiqué à votre rapporteur pour avis que l'augmentation générale du nombre d'affaires nouvelles risquait de rendre à terme plus difficiles à atteindre les objectifs fixés.

Le 5 janvier 2005, de nouvelles cours d'appel ont signé des contrats d'objectifs. Ainsi, celle de Pau s'est engagée à améliorer le traitement des affaires familiales et de mineurs moyennant l'affectation de deux magistrats et de deux fonctionnaires supplémentaires et une majoration de sa dotation de près de 27.000 euros. Celle de Bordeaux a choisi de concentrer ses priorités sur le contentieux des affaires familiales et a obtenu de nouveaux postes de magistrats (2) et de fonctionnaires (3) ainsi qu'une majoration de ses crédits de 33.240 euros. La cour d'appel de Versailles a décidé d'agir sur la réduction des affaires en instance de jugement devant les cours d'assises situées dans son ressort en échange d'effectifs plus étoffés (+ 9 magistrats et + 6 fonctionnaires) et une enveloppe supplémentaire de 54.000 euros.

Le ministère de la justice n'a pu encore établir un bilan précis de l'exécution des nouveaux contrats.

Une troisième génération de contrats devrait être signée avant la fin de l'année. Pourraient être concernées les cours d'appel de Chambéry, Montpellier, Reims, Riom, Saint-Denis de La Réunion et Nouméa. Au cours de l'année 2006, les demandes présentées par les cours d'appel de Toulouse, d'Angers, de Nîmes et de Basse-Terre devraient être examinées.

La contractualisation tend donc à devenir un mode courant de relations entre l'administration centrale et les cours d'appel . Compte tenu des améliorations qu'elle produit, elle mérite d'être encouragée et élargie à toutes les juridictions judiciaires .

Quelques initiatives ponctuelles méritent à cet égard d'être signalées. Comme l'ont indiqué les magistrats de la cour d'appel d'Aix-en-Provence à votre rapporteur pour avis, des contrats régionaux ont été conclus avec certains tribunaux de grande instance (Grasse, Nice, Toulon) du ressort pour résoudre des difficultés ponctuelles, par exemple traiter des dossiers très anciens, ayant donné lieu à une information judiciaire. Ils ont expliqué que ces juridictions avaient bénéficié du concours de magistrats placés et de greffiers placés 89 ( * ) . Le nombre global de magistrats placés (319 au 30 avril 2005) a fortement augmenté ces dernières années, ce qui a permis aux chefs de cours de gérer les effectifs au plus près des charges de travail des juridictions situées dans leur ressort.


• Un délai de jugement moyen devant la Cour de cassation qui diminue légèrement

En 2004, la Cour de cassation a connu une légère amélioration de son délai de jugement moyen (22 mois et 12 jours contre 24 mois en 2003) 90 ( * ) . De même, le stock d'affaires en instance décroît (29.808 contre 31.636 en 2003). Cette tendance favorable a pu être obtenue grâce à l'augmentation de la productivité des magistrats, qui ont jugé un nombre croissant d'affaires (23.539 décisions rendues). Cette perspective favorable pourrait néanmoins être fragilisée si l'augmentation du volume d'affaires soumises à la Cour de cassation constatée en 2004 (+1,5 %) se confirmait l'année prochaine.

La procédure de filtrage instituée par la loi organique n° 2001-539 relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature 91 ( * ) a permis d'évacuer rapidement les pourvois manifestement infondés (ne reposant sur aucun moyen de droit ou irrecevables). Les chambres civiles de la Cour de cassation ont rendu 5.924 décisions de non admission, qui ont représenté plus d'un tiers des décisions rendues en matière civile. Les trois premières années d'application de ce dispositif font apparaître que ce dispositif a contribué à l'amélioration significative du fonctionnement de cette cour.

* 87 Qui n'intègrent pas certaines procédures nouvelles  telles que les procédures de vente et d'expropriation, l'activité du juge des libertés et de la détention en matière de rétention administrative des étrangers, les ordonnances sur requêtes ou encore les demandes formulées par les victimes auprès des commissions d'indemnisation des victimes d'infractions (15.000 demandes en 2004).

* 88 Ce délai moyen de jugement n'avait cessé de croître depuis 2000 (8,9 mois en 2000, 9,1 mois en 2001, 9,4 mois en 2002 et 9,5 mois en 2003).

* 89 Ces magistrats sont rattachés administrativement aux services administratifs régionaux et sont affectés provisoirement dans les juridictions du ressort de la cour d'appel en fonction des besoins (vacances de poste, engorgement ponctuel, congé de magistrat titulaire). Voir notamment l'article 7 de la loi n° 95-64 du 19 janvier 1995.

* 90 Qui se décompte en nombre de jours s'écoulant entre l'enregistrement du dossier par la Cour de cassation et la date de l'arrêt clôturant l'affaire.

* 91 Voir l'article L. 131-6 du code de l'organisation judiciaire.

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