2. Une volonté affirmée de rechercher des instruments de mesure de la performance pertinents

Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie a invité tous les ministères à définir des objectifs et des indicateurs associés aux programmes dans la perspective d'une évaluation des nouveaux modes de gestion des crédits. Ceux-ci se révèlent indispensables puisque l'engagement sur des résultats est au coeur de la réforme. L'article 51 de la LOLF prévoit que la réalisation des objectifs au sein de chaque programme doit être retracée dans un projet annuel de performance (PAP), publié en annexe du projet de loi de finances.

Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie dans son rapport sur la préparation de la mise en oeuvre de la LOLF publié en juin 2004 a souligné la nécessité que ces indicateurs soient compréhensibles, directement imputables aux activités du programme et prennent en compte trois dimensions de la performance : l'efficacité socio-économique , à savoir les bénéfices attendus de l'action de l'Etat par le citoyen d'une part, la qualité de service qui traduit la qualité du service rendu à l'usager d'autre part, et enfin l'efficience qui exprime le rapport coût - avantage. Il a indiqué qu'il convenait « dans l'idéal de ne pas excéder cinq objectifs par programme, assortis d'un ou deux indicateurs par objectif . »

Soucieux de préparer activement l'entrée en vigueur de ce nouveau cadre budgétaire, le ministère de la justice a élaboré une maquette de projet annuel de performance dès cette année.

Le programme « justice administrative » comprend trois objectifs relatifs à la réduction des délais de jugement, au maintien de la qualité des décisions juridictionnelles et à l'amélioration de l'efficience des juridictions. Treize indicateurs de performance figurent sous ces objectifs.

Le programme « justice judiciaire » regroupe six objectifs visant à rendre des décisions de qualité dans des délais raisonnables en matière civile (n° 1) et en matière pénale (n° 2), à amplifier et diversifier la réponse pénale (n° 3), à améliorer l'exécution des décisions pénales (n° 4), à maîtriser la croissance des frais de justice (n° 5) et à garantir un enregistrement rapide des décisions judiciaires. Dix-huit indicateurs de performance sont prévus.

La définition de ces objectifs pose un véritable défi à un ministère qui éprouve des difficultés à mesurer rapidement l'activité des juridictions. D'ailleurs, le PAP indique que de nombreuses données appelées à alimenter les indicateurs seront seulement disponibles en 2008. Conscient de cette difficulté, le garde des sceaux a indiqué lors de son audition devant votre commission qu'un baromètre trimestriel récapitulant l'activité des tribunaux sous la forme de statistiques synthétiques un mois après la fin du trimestre avait été mis en place et publié en novembre dernier.

Le Syndicat de la magistrature, l'Union syndicale des magistrats et les syndicats des personnels des greffes entendus par votre rapporteur pour avis ont regretté de ne pas avoir été consultés à l'occasion de la définition des indicateurs, jugeant paradoxal de vouloir mobiliser les personnels sans les associer à la mise en oeuvre des modalités de l'évaluation.

En outre, le Syndicat de la magistrature a souligné la nécessité d'affiner certains indicateurs, expliquant par exemple que le taux de requête en interprétation, en rectification d'erreurs matérielles et en omission de statuer (indicateur n °4 de l'objectif n° 1) ne donnait pas une indication pertinente de la qualité des jugements rendus compte tenu du fait qu'une partie de ces requêtes étaient adressées à des fins purement dilatoires par la partie perdante. Il a jugé plus pertinent de retenir le taux de requêtes ayant abouti effectivement à une rectification d'erreur matérielle. Cette observation paraît intéressante et mérite d'être prise en compte. Il paraît souhaitable que le ministère de la justice soumette les indicateurs arrêtés dans le PAP aux acteurs qui sont les plus proches des réalités de terrain.

Certains indicateurs sont à construire ou semblent perfectibles. Mais, la démarche du ministère de la justice, en avance sur de nombreux autres ministères qui n'ont pu soumettre au Parlement une maquette de PAP aussi précise et complète, mérite d'être soulignée. Cette initiative va dans le sens d'une plus grande transparence toujours utile pour l'information du Parlement.

Le programme « accès au droit et à la justice » regroupe sept objectifs relatifs à l'amélioration du délai de traitement des admissions à l'aide juridictionnelle, à la maîtrise des coûts de gestion d'un dossier d'aide juridictionnelle, au développement d'une réponse de qualité aux besoins d'information juridique des citoyens dans les maisons de justice et du droit, au développement d'une réponse de qualité aux besoins d'information juridique des citoyens dans les conseils départementaux de l'accès au droit, à la rapidité des décisions rendues en matière d'indemnisation des victimes d'infractions, au développement de l'efficacité des dispositifs permettant la défense et l'indemnisation des victimes, et au développement de l'assistance des victimes par le réseau spécialisé d'associations d'aide aux victimes. Neuf indicateurs sont déclinés.

Une réflexion pourrait être engagée pour mesurer l'action des associations d'aide aux victimes eu égard au montant des subventions qui leur sont allouées. En effet, l'indicateur mentionné dans le PAP, purement quantitatif (évolution du nombre de victimes accueillies et suivies par les associations d'aide aux victimes et nombre de dossiers suivis par ces associations) paraît insuffisant.

Le programme « soutien de la politique de la justice et organismes rattachés » comporte six objectifs : prendre rapidement les textes d'application nécessaires pour l'adaptation du droit à l'évolution de la société, réduire les délais entre la vacance d'un poste ou son ouverture dans le cadre d'un recrutement par la direction de programme, assurer une gestion efficiente des personnels, optimiser la gestion des projets immobiliers, optimiser la gestion logistique des services centraux, optimiser la gestion des grands projets informatiques. Huit indicateurs figurent dans ce programme.

Le taux de publication des décrets d'application des lois (indicateur n° 1 de l'objectif n° 1) ne reflète qu'imparfaitement la capacité du ministère de la justice à appréhender la nécessaire adaptation du droit aux exigences des citoyens en matière civile, pénale ou commerciale. Telle est la raison pour laquelle votre rapporteur pour avis souhaite attirer l'attention du garde des sceaux sur la nécessité de prévoir un indicateur mesurant le taux de transposition des directives communautaires.

Le retard patent de la France en ce domaine rend impératif que chaque ministère, tout particulièrement celui de la justice, se mobilise pour mettre notre droit interne en conformité avec le droit communautaire. Cet objectif a d'ailleurs été jugé prioritaire par le Gouvernement ainsi que ce dernier l'a affirmé dans une communication en conseil des ministres le 15 septembre 2004.

L'année 2005 qui se présente comme une année de transition préfigurant l'entrée en vigueur de la LOLF inquiète légitimement de nombreux acteurs de l'institution judiciaire. Mais même si des difficultés inhérentes à toute innovation apparaissent, les mentalités ont d'ores et déjà évolué dans le sens d'une plus grande responsabilisation et d'une culture de résultats, démontrant ainsi la capacité du ministère de la justice à s'adapter rapidement à un cadre nouveau.

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