INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Poursuivant sa pratique des années précédentes, votre commission des Lois vous présente un avis sur les crédits alloués aux services généraux de la justice par le projet de loi de finances pour 2005, ceux des services pénitentiaires et de la protection judiciaire de la jeunesse étant traités dans deux avis distincts respectivement présentés par nos collègues MM. Philippe Goujon et Nicolas Alfonsi.

A titre liminaire, votre rapporteur pour avis souhaite remercier son prédécesseur, notre collègue M. Christian Cointat, dont les analyses ont contribué utilement à l'information du Sénat sur la situation de la justice en France.

Pour la troisième année consécutive, la priorité est accordée à ce ministère régalien. Ses crédits augmentent de 4 % dans un contexte budgétaire pourtant tendu, tandis que ses effectifs s'étoffent (1.070 créations nettes de postes), à la différence d'autres ministères qui suppriment des emplois.

2005 se présente comme une année de transition à deux titres.

Tout d'abord, elle se situe à mi-parcours de la programmation quinquennale issue de la loi de programmation et d'orientation pour la justice du 9 septembre 2002 (LOPJ) et permet un premier bilan de la concrétisation des engagements pris par le Gouvernement. Pour la justice en général, les promesses sont honorées même si le taux d'exécution selon les agrégats qui la composent se révèle plus contrasté, en particulier pour les services judiciaires.

Elle constitue ensuite une étape préparatoire à la mise en oeuvre de la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 (LOLF). A cet égard, le ministère de la justice manifeste la volonté de faire évoluer son administration, laquelle doit passer d'une logique quantitative à une culture de la performance. Votre rapporteur pour avis se félicite des nombreuses initiatives du garde des sceaux tendant à anticiper l'entrée en vigueur de ce nouveau cadre budgétaire telles que les expérimentations menées dans plusieurs cours d'appel ou encore la publication, dès cette année, d'un avant-projet annuel de performance déjà très abouti mentionnant de nombreux objectifs et indicateurs.

Après avoir analysé les principales orientations du budget de la justice au regard des engagements inscrits dans la programmation quinquennale (I), le présent avis présentera la situation des juridictions judiciaires et administratives (II), puis les mesures engagées par le ministère de la justice pour préparer l'entrée en vigueur de la LOLF (III) avant d'évoquer les récentes adaptations du dispositif de l'aide juridictionnelle (IV).

I. LES GRANDES LIGNES D'UN BUDGET TOUJOURS PRIORITAIRE

A. UNE AUGMENTATION SENSIBLE DES CRÉDITS

Pour la troisième année consécutive, le budget de la justice augmente . Cette évolution traduit la priorité accordée par le Gouvernement à ce ministère régalien dont les crédits s'élèvent à 5,46 milliards d'euros , un montant encore jamais atteint, répartis en 5,14 milliards d'euros de dépenses ordinaires et 311,55 millions d'euros de dépenses en capital.

Cette progression de 4 % -de  210 millions d'euros- est moins marquée qu'en 2003 (+ 7,4 %) et 2004 (4,9 %) 1 ( * ) ; elle dépasse cependant celle du budget général qui croît de 1,8 %, plaçant ainsi le ministère de la justice en quatrième position des budgets les plus favorisés, après ceux de la culture et de la communication, de la recherche et des affaires étrangères respectivement en hausse de 5,9 %, 4,7 % et 4,4 % et devant celui du ministère de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales en augmentation de 2,2 %.

Il est indiscutable que la justice fait l'objet d'un traitement budgétaire particulièrement favorable dans un contexte économique tendu contraint par l'objectif de maîtrise des dépenses publiques. Toutefois, la part de ce budget dans celui de l'Etat - moins de 2 % - demeure encore trop modeste , notamment eu égard aux ressources mises à la disposition de la justice dans d'autres Etats membres de l'Union européenne par exemple en Grande-Bretagne ou en Allemagne.

Le montant des autorisations de programme -1.050 millions d'euros- se maintient à un niveau élevé , comme l'année dernière (1.049 millions d'euros). Cette évolution traduit la détermination du Gouvernement à mobiliser des moyens à la hauteur du programme d'investissement ambitieux annoncé dans la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 d'orientation et de programmation pour la justice (LOPJ).

Les crédits affectés aux trois principales actions conduites par le ministère de la justice et regroupées au sein des services généraux 2 ( * ) représentent 58,5 % de l'enveloppe allouée à la justice. Ils s'inscrivent dans cette tendance générale à la hausse, comme le montre le tableau reproduit ci-après.

ÉVOLUTION DES CRÉDITS DE PAIEMENT
(2004-2005)

En millions d'euros

 

Loi de finances initiale 2004

Crédits demandés
pour 2005

Évolution

 

Montant

% du total

Montant

% du total

2003-2004 en %

(2002-2003 en % )

Ensemble du ministère de la justice

5.251

(100 %)

5.461

(100 %)

+ 4 %
( + 4,9 % )

- Services judiciaires

2.211

42 %

2.275

42 %

+ 2,9 %
( + 4,7 % )

- Juridictions administratives

169

3 %

175

3 %

+ 3,5 %
( + 11,1 % )

- Administration générale

694

13 %

743

14 %

+ 7,1 %
(-1 %)

Hors transfert des prestations familiales
Source : ministère de la justice

Le budget de l' administration centrale enregistre la plus forte progression - plus de 7 % - (contre un recul de 1 % l'année dernière). Cette évolution favorable permettra de renforcer les effectifs (43 créations de postes), de revaloriser le statut des personnels, d'améliorer les conditions d'installation des services (déménagement de la rue Saint-Honoré vers le nouveau site Javel, location de bureaux supplémentaires destinés à accueillir l'inspection générale des services judiciaires et le haut commissariat aux comptes...) et de poursuivre les travaux de rénovation des locaux de la Commission nationale de l'informatique et des libertés.

Les juridictions administratives , poste budgétaire privilégié l'année dernière (+ 11,1 %), enregistrent une croissance de leurs crédits plus modeste (+ 3,5 %), permettant de renforcer leurs effectifs et notamment de recruter 15 assistants de justice, de moderniser le parc informatique et de rénover les locaux du Conseil d'Etat ainsi que ceux de certaines cours administratives d'appel (Bordeaux, Douai, Nantes, Paris et Orléans) et tribunaux administratifs (Besançon, Grenoble, Pau et Rouen).

En hausse de 2,9 % , les crédits alloués aux services judiciaires augmentent moins vite que l'année dernière (+ 4,7 %). Les dépenses ordinaires (2.172 millions d'euros) s'accroissent de 3,4 % en vue de financer des créations d'emplois (355 au total) et des mesures indemnitaires en faveur de plusieurs catégories de personnels, de compenser la forte croissance des dépenses au titre des frais de justice (+ 20,34 %) et de l'aide juridique (+ 23,5 %), de renforcer la sécurité des bâtiments, de favoriser l'accès au droit et d'encourager l'aide aux victimes. Les crédits affectés aux dépenses en capital, d'un montant de près de 103 millions d'euros, en diminution de 13 % par rapport à celles inscrites en loi de finances initiale pour 2004, permettront de financer l'important programme de construction et de rénovation des palais de justice.

* 1 Cette progression est calculée à périmètre constant. Elle s'établit à 3,4 % si on tient compte du changement de périmètre prévu pour 2005 du fait du transfert vers le budget des charges communes des dépenses relatives aux prestations familiales. Cette opération porte sur un montant de 31,46 millions d'euros.

* 2 L'administration centrale et les services judiciaires du ministère de la justice ainsi que les juridictions administratives.

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