D. LES CHAÎNES LOCALES

Comparativement à ses voisins européens qui affichent, pour la plupart, un paysage audiovisuel local dynamique et varié, la France fait figure de « parent pauvre » en matière de télévision de proximité : en métropole, on ne recense ainsi que huit chaînes locales hertziennes. Comme le soulignait le rapport de MM. Michel Françaix et Jacques Vistel 8 ( * ) , cette situation est avant tout liée à « l'absence de cadre économique et juridique d'ensemble ».

1. Un important retard à combler

Avec huit chaînes métropolitaines (contre 104 canaux locaux conventionnés sur les réseaux câblés) et 10 chaînes ultra-marines (sans compter les canaux de RFO), notre pays se situe loin des objectifs fixés par le plan Bredin, élaboré au début des années 80, qui prévoyait, la création de près de quatre-vingt télévisions de proximité diffusées sur le réseau hertzien.

NOM DE LA CHAÎNE

AUTORISATION D'ORIGINE

AUTORISATION ACTUELLE

ZONE DE DIFFUSION

TLT

7 décembre 1987

12 septembre 2000 (5 ans)

Toulouse

TLM

11 juillet 1988

1 er septembre 2001 (5 ans)

Lyon

Télé 102

19 juillet 1999

(5 ans)

Les Sables-d'Olonne (Vendée)

Télé Sud Vendée

18 novembre 1999

(5 ans)

Luçon (Vendée)

Clermont 1 ère

6 juin 2000

(5 ans)

Clermont-Ferrand

TV8 Mont Blanc

26 juillet 2000

(5 ans)

Départements de Savoie et de Haute-Savoie

TV7 Bordeaux

26 juillet 2000

(5 ans)

Bordeaux

Canal 32

24 juillet 2001

(5 ans)

Troyes

• Les télévisions « de ville »

Elles sont présentes dans de grandes agglomérations en diffusion hertzienne et sont reprises sur le réseau câblé lorsqu'il existe. Elles accordent une place prépondérante à l'information locale et à la vie de la cité. A l'heure actuelle, elles sont au nombre de cinq : deux chaînes « historiques » créées à la fin des années 80 : Télé Toulouse (TLT) et Télé Lyon Métropole (TLM) et trois lancées plus récemment : TV 7 Bordeaux, Clermont 1 re (Clermont-Ferrand) et Canal 32 (Troyes).

A ce jour, aucune d'entre elles n'est parvenue à équilibrer ses comptes : non seulement les pertes atteignent, voire dépassent, la moitié du chiffre d'affaires en phase de démarrage, mais, même après plusieurs années d'activité, les déficits restent importants.

• Les télévisions « de pays »

Les télévisions dites « de pays » ont vocation à couvrir un territoire à dominante rurale, plus étendu que celui des télévisions de ville. Il n'en reste plus qu'une depuis le dépôt de bilan d'AquiTV en janvier 2003 à la suite de difficultés financières : TV8 Mont-Blanc reçue en Savoie, Haute-Savoie et pays de Gex, soit un bassin de 680 000 personnes.

Si le but premier de la chaîne est la diffusion de l'information locale, elle cherche également à mettre en valeur le patrimoine et à développer des thématiques ayant un lien avec les caractéristiques géographiques et économiques de la région. TV8 Mont-Blanc offre ainsi un volume important de productions propres en matière de diffusion, composé de magazines et de documentaires tournés dans les hautes vallées savoyardes.

• Les télévisions « de proximité »

Cette catégorie comprend deux chaînes : Télé 102 à Luçon (40 000 habitants) et Télé Sud Vendée aux Sables d'Olonne (68 000 habitants).

Pour le Conseil supérieur de l'audiovisuel, ces chaînes sont des « télévisions miroirs » qui reflètent les préoccupations des habitants de la région. Télé Sud Vendée propose ainsi un vrai journal quotidien de 15 minutes et retransmet des rencontres sportives alors que Télé 102 accorde une place prépondérante aux associations sur lesquelles elle s'appuie largement pour la fourniture de ses programmes.

• Les télévisions d'outre-mer

Du fait de leur spécificité géographique et de leur format plus généraliste que leurs consoeurs de métropole (leur programmation locale n'est généralement pas majoritaire), il convient de traiter séparément les télévisions locales des départements d'outre-mer.

Compte tenu du décalage horaire, les chaînes de télévision métropolitaines ne sont pas diffusées et, aux côtés des chaînes publiques de RFO 9 ( * ) , coexistent des télévisions cryptées reprenant les programmes de Canal Plus 10 ( * ) et des télévisions locales privées en clair, reprenant ou non les programmes de TF1 et de M6.

La Martinique (Antilles Télévision (ATV)), la Guyane (Antenne Créole Guyane (ACG)) et la Réunion (Antenne Réunion) n'ont chacune qu'un seul service en clair. La Guadeloupe fait figure d'exception avec trois opérateurs : Canal 10, La Une, et Eclair TV.

Dans les territoires d'outre-mer, en dehors des canaux de RFO et des chaînes cryptées du groupe Canal Plus 11 ( * ) , la seule chaîne locale existante à ce jour, est Tahiti Nui TV, dont l'opérateur est l'Office des Postes et Télécommunications de Polynésie française.

Contrairement aux chaînes de la métropole, les télévisions des départements et territoires d'outre-mer sont autorisées, depuis 1992, à diffuser de la publicité pour le secteur de la distribution. Cependant, du fait de l'étroitesse des marchés publicitaires locaux et de l'absence d'implication des collectivités locales, elles ne disposent que de faibles ressources ; leur situation financière est d'autant plus périlleuse que les coûts de liaison par satellite et de diffusion hertzienne sont en général élevés.

2. Le « plan de relance des télévisions locales »

Afin que ce type de services ne soit pas « condamné à végéter durablement », pour reprendre l'expression utilisée par M. Michel Boyon 12 ( * ) , diverses initiatives ont été prises pour relancer les chaînes locales hertziennes.

Les premières ont été prises par le Conseil supérieur de l'audiovisuel dans le cadre de son pouvoir d'attribution des autorisations d'usage de la ressource radioélectrique.

Les autres font partie du « plan de relance » présenté par le ministre de la culture et de la communication le 26 mai 2003, que le présent projet de loi vise à compléter.

• Une politique volontariste d'attribution des fréquences

A l'heure actuelle, seule une diffusion en hertzien analogique est en mesure de permettre aux télévisions locales de recueillir l'audience la plus large. Elle leur permet de trouver leur place dans le paysage audiovisuel français par la fidélisation de certains bassins de population, avant de conquérir la télévision numérique terrestre pour laquelle le déploiement des émetteurs et l'initialisation des foyers prendront nécessairement plusieurs années.

C'est pourquoi le Conseil supérieur de l'audiovisuel a décidé de lancer des appels ponctuels aux candidatures en mode analogique lorsqu'une ou des fréquences supplémentaires disponibles seraient identifiées.

En 2003, le Conseil a ainsi attribué deux nouvelles fréquences hertziennes terrestres analogiques : la première à Nantes (15 juillet) partagée entre la société TV Nantes Atlantique et l'association Télé Nantes et la seconde sur la plaine du Forez (25 novembre 2003) attribuée à l'association ab7 Télévision.

Le 18 mars 2003, le Conseil a indiqué que huit nouvelles zones pouvaient faire l'objet d'un appel à candidatures couvrant les agglomérations d'Angers, Le Mans, Lille, Marseille, Montpellier, Nîmes, Orléans et Tours.

Lors de sa séance plénière du 30 septembre, le Conseil a décidé de lancer ces appels en trois tranches :

- la première, concerne Montpellier, Nîmes et Marseille ;

- la deuxième et la troisième concernent chacune trois autres villes.

S'agissant de l'outre-mer, dans le cadre d'un appel à candidatures lancé par le Conseil supérieur de l'audiovisuel le 26 février 2003 pour l'édition d'une chaîne locale en Guadeloupe, les quatre dossiers présentés ont été déclarés recevables. Ils émanent des sociétés Canal 10, TCI Guadeloupe, Basse-Terre Télévision et Radio Magick International. Un appel à candidatures a également été lancé en avril 2003 en vue de l'autorisation de chaînes locales privées dans la zone de Fort-de-France (Martinique).

En théorie, dans le contexte français de faible pénétration du câble, la diffusion hertzienne terrestre numérique apparaît comme un support particulièrement adapté à l'essor des télévisions locales. En effet, en atténuant fortement le problème de la pénurie de fréquences, elle offre l'opportunité d'élargir le paysage audiovisuel à de nouveaux acteurs.

Le CSA a décidé d'affecter à la télévision numérique locale trois canaux par zone couverte 13 ( * ) et dispose désormais des moyens juridiques de lancer les appels à candidatures, le décret fixant le régime des chaînes locales diffusées par voie hertzienne terrestre en mode numérique ayant été publié le 4 novembre dernier 14 ( * ) .

• L'ouverture aux chaînes locales de la publicité pour le secteur de la distribution

Dans leur rapport sur les télévisions locales publié en novembre 1998, MM. Françaix et Vistel estimaient le besoin de nouvelles recettes, pour une vingtaine de chaînes locales, à 61 millions d'euros. Dans l'hypothèse du lancement rapide d'un nombre suffisant d'appels à candidatures pour de grandes agglomérations, la collecte par syndication de publicité extra-locale pourra apporter une partie de cette somme. Mais il est souhaitable que l'essentiel du financement des télévisions de proximité soit assis sur une base purement locale.

C'est pourquoi le Gouvernement a souhaité leur ouvrir un accès aux ressources publicitaires des quatre secteurs d'activité interdits de publicité télévisée en vertu de l'article 8 du décret n° 92-280 du 27 mars 1992 : la distribution, la presse écrite, l'édition littéraire et le cinéma 15 ( * ) .

Ce qu'il est désormais convenu d'appeler l'ouverture des secteurs dits interdits devait toutefois se faire progressivement et de manière ciblée pour éviter les déséquilibres préjudiciables au pluralisme et à la concurrence. Il convenait en effet de maîtriser cette ouverture pour ne pas déstabiliser la presse quotidienne et les radios.

Cette solution était d'ailleurs la seule réellement intéressante pour les télévisions de proximité. En effet, si l'ouverture avait été généralisée immédiatement à l'ensemble des supports, les chaînes nationales en auraient capté très certainement la quasi-totalité, ce qui réduisait à néant les avantages escomptés pour les chaînes locales.

A l'issue de la concertation menée avec les secteurs économiques concernés, le Gouvernement a, par le décret n° 2003-960 du 7 octobre 2003, modifié le décret du 27 mars 1992 dans le sens suivant :

- ouverture totale du secteur de la presse à compter du 1 er janvier 2004 ;

- ouverture du secteur de l'édition à compter du 1 er janvier 2004 aux chaînes exclusivement distribuées par câble ou diffusées par satellite ;

- maintien de l'exclusion du secteur du cinéma, qui reste justifiée par l'exigence de la diversité culturelle ;

- ouverture du secteur de la distribution, hors opérations commerciales de promotion 16 ( * ) :

* à compter du 1 er janvier 2004 pour les chaînes analogiques locales, les chaînes distribuées par câble ou diffusées par satellite, les chaînes nationales et locales de la télévision numérique terrestre 17 ( * ) ;

* à compter du 1 er janvier 2007 pour les chaînes analogiques nationales hertziennes.

• Des obligations de contribution à la production allégées

La loi n° 2000-719 du 1 er août 2000 a modifié la loi du 30 septembre 1986 sur la liberté de communication, notamment ses articles 27 et 71 relatifs à la contribution des éditeurs de services au développement de la production cinématographique et audiovisuelle, ainsi qu'aux conditions d'acquisition des droits par les chaînes de télévision. Le législateur a en effet souhaité améliorer le financement de la production, renforcer l'indépendance de celle-ci et favoriser une meilleure circulation des oeuvres cinématographiques et audiovisuelles. Les décrets d'application adoptés en 2001 et 2002 ont modulé les obligations de contribution à la production en fonction des supports utilisés 18 ( * ) .

En ce qui concerne les chaînes locales, la spécificité de leurs missions et de leur format, ajoutée à leurs difficultés financières structurelles, justifie que les contraintes réglementaires revêtant un caractère purement économique soient allégées par rapport aux chaînes nationales.

C'est pourquoi le décret n° 2003-1056 du 4 novembre 2003 prévoit, pour les chaînes numériques dont le bassin d'audience est inférieur à 10 millions d'habitants, l'exonération de toute obligation de contribution à la production audiovisuelle et cinématographique 19 ( * ) , ainsi qu'un régime plus souple que celui en vigueur pour les chaînes nationales en matière de durée des écrans publicitaires.

• Une taxe sur la publicité diffusée par voie de radiodiffusion sonore et de télévision réduite

Définie à l'article 302 bis KD du code général des impôts, cette taxe fiscale est assise sur le montant des recettes publicitaires des régies des radios et télévisions. Son produit alimente le Fonds de soutien à l'expression radiophonique.

Pour la publicité télévisée, le montant de la taxe s'élève à 991 euros pour une recette trimestrielle inférieure à 457 000 euros et jusqu'à 1,42 million d'euros pour une recette supérieure à 137,2 millions d'euros. Ce sont, par conséquent, au minimum 3 964 euros annuels (4 x 991 euros) qui sont réclamés au titre de cette taxe à toute télévision locale dès que celle-ci réalise un chiffre d'affaires publicitaire, aussi faible soit-il.

Les régies des radios disposent, elles, d'un plancher en dessous duquel elles sont exonérées de taxe (moins de 46 000 euros de recettes publicitaires trimestrielles), plancher qui permet à la grande majorité des radios locales et associatives d'être exonérées.

Les acteurs de la télévision locale dénonçaient cette taxe et revendiquaient la fixation d'un palier en dessous duquel ils en seraient exonérés, à l'image du premier palier pour les radios. Le rapport de M. Michel Boyon 20 ( * ) proposait à cet égard que « la contribution au fonds de soutien à l'expression radiophonique [ne soit pas] perçue sur les télévisions locales nouvellement créées, pendant une certaine période ».

A l'occasion de la mise en conformité avec la réglementation communautaire, une modification de la taxe visant notamment à exonérer les régies publicitaires des télévisions réalisant moins de 457 000 euros de recettes trimestrielles, a été intégrée dans la loi n° 2003-709 du 1 er août 2003 relative au mécénat, aux associations et aux fondations.

3. Les dispositions du projet de loi

Conformément aux objectifs fixés par le « plan de relance des télévisions locales » annoncé le 26 mai 2003 par M. Jean-Jacques Aillagon alors ministre de la culture et de la communication, le projet de loi vient conforter les initiatives prises par l'autorité de régulation et le pouvoir réglementaire, en allégeant les contraintes entravant le développement de ces services essentiels au débat démocratique et au renforcement du lien social.

• Clarifier et assouplir les règles d'intervention des collectivités territoriales

Dans son rapport, M. Michel Boyon soulignait qu'aucune raison ne permet de justifier que les collectivités locales se voient interdire en matière de télévision hertzienne ce qu'elles sont autorisées et même incitées à faire dans le domaine du câble : « On peut (...) envisager que, sous le contrôle des chambres régionales des comptes, les collectivités locales soient autorisées à contribuer, d'une part aux investissements nécessaires au lancement puis au développement d'une chaîne et, d'autre part au financement de certaines productions ou de certaines émissions, identifiées comme telles et visant à fournir au public local des services d'intérêt général . »

Dans cette perspective, le projet de loi propose de clarifier le cadre juridique des interventions des collectivités territoriales en matière de télévisions locales hertziennes :

- en insérant dans le code général des collectivités territoriales un article autorisant les collectivités territoriales et leurs groupements à éditer un service de télévision par voie hertzienne ou un canal local du câble ;

- en modifiant la loi la loi du 30 septembre 1986 afin de prévoir explicitement la possibilité pour les sociétés d'économie mixte locales de répondre aux appels à candidatures lancés par le Conseil supérieur de l'audiovisuel pour des fréquences en mode analogique et numérique.

• L'assouplissement des règles « anti-concentration »

Certaines dispositions du dispositif anti-concentration constituent un frein important à l'essor des chaînes locales. En outre, la télévision numérique de terre, qui permettra de multiplier le nombre de chaînes, rend obsolètes certaines restrictions liées à la protection du pluralisme jusqu'alors justifiées dans le cadre d'un paysage audiovisuel hertzien limité à six chaînes nationales et quelques chaînes locales.

Le projet de loi propose d'apporter certains assouplissements à la législation en vigueur afin de concilier les objectifs de développement des télévisions locales et la sauvegarde du pluralisme.

Il propose de lever l'interdiction de posséder plus de 50 % du capital d'une chaîne locale. En effet, cet alinéa, qui visait principalement à assurer un pluralisme interne à chaque chaîne, n'empêche pas la présence d'un actionnaire dominant. En revanche, il rend parfois difficile la constitution d'un tour de table, les entreprises régionales ayant le souhait et les moyens d'investir dans la télévision n'étant pas forcément très nombreuses.

Il envisage aussi d'assouplir les dispositions interdisant la détention simultanée d'une chaîne nationale hertzienne et d'une chaîne locale hertzienne. Afin d'inciter les opérateurs nationaux à investir dans la télévision numérique de terre, il prévoit ainsi que les chaînes locales de la TNT ne soient pas concernées par les dispositifs anti-cumul.

Enfin, afin de mettre en cohérence les différents seuils applicables aux télévisions locales, il propose de modifier les cinquième et sixième alinéas de l'article 41, qui limitent à six millions le nombre de téléspectateurs desservis par un même opérateur dans le cas d'un cumul d'autorisations locales.

En résumé, le projet de loi propose :

- la levée de l'interdiction de posséder plus de 50 % du capital d'une chaîne locale  hertzienne ;

- l'assouplissement de la règle interdisant de cumuler une autorisation hertzienne nationale et une autorisation hertzienne analogique locale : l'interdiction ne concernerait plus que les services nationaux dont l'audience moyenne est supérieure à 2,5 % ;

- la levée totale de l'interdiction de cumuler une autorisation hertzienne nationale et une autorisation hertzienne numérique locale ;

- le relèvement de six à douze millions de téléspectateurs du plafond de cumul de plusieurs autorisations locales par un même opérateur.

4. La position de l'Assemblée nationale

L'Assemblée nationale a souhaité accentuer l'allégement du régime fiscal pesant sur les chaînes locales et redéfinir le régime anti-concentration qui leur est applicable.

• Un allègement de la fiscalité accentué

L'Assemblée nationale a assoupli le régime fiscal des télévisions locales par deux biais différents.

Elle a d'abord supprimé la tranche de la taxe sur les messages publicitaires pesant sur les messages dont le prix est inférieur à 150 euros.

Définie à l'article 302 bis KA du Code général des impôts, cette taxe dont le montant s'échelonne de 1,5 euro à 34,3 euros, est assise sur le prix de chaque passage d'un message publicitaire. Chaque spot étant au minimum taxé à 1,5 euro, les télévisions locales sont placées devant des niveaux de taxation élevés puisque leur chiffre d'affaires publicitaire, ramené au spot, est souvent inférieur à 15 euros.

A cet égard, le rapport de M. Michel Boyon 21 ( * ) soulignait que : « Proportionnellement, la taxe pèse ainsi beaucoup plus lourdement sur les télévisions locales, qui pratiquent des tarifs très faibles, que sur les grandes chaînes nationales. Une taxation proportionnelle ou une exonération en dessous de certains montants serait donc envisageable ».

L'Assemblée nationale a également souhaité, contre l'avis du Gouvernement, faire bénéficier du taux réduit de TVA (5,5 %) les rémunérations versées par les collectivités territoriales et leurs groupements pour la mise en oeuvre d'un contrat d'objectifs et de moyens correspondant à l'édition d'un service de télévision locale.

• Des règles anti-concentration redéfinies

L'Assemblée nationale a d'abord décidé, sur proposition du ministre de la culture et de la communication, d'encadrer les conditions dans lesquelles les éditeurs de services nationaux de télévision diffusés par voie hertzienne peuvent participer au lancement ou au développement de chaînes de télévision locales.

Elle a ainsi souhaité limiter à 33 % la part du capital ou des droits de vote des services locaux que les chaînes nationales hertziennes dont l'audience dépasse 2,5 % de l'audience totale des services de télévision sont autorisées à détenir.

La nouvelle rédaction de l'article 39 de la loi du 30 septembre 1986 permet ainsi d'inciter les opérateurs privés à investir dans l'édition de chaînes locales numériques, qui se sont vu réserver trois canaux sur la télévision numérique terrestre, sans pour autant donner aux opérateurs historiques la possibilité de dominer ce nouveau marché.

L'Assemblée nationale a aussi, sur proposition du ministre de la culture et de la communication, décidé d'abaisser à 10 millions d'habitants le seuil de population à partir duquel un service de télévision diffusé par voie hertzienne est considéré comme un service national au regard des règles anti-concentration.

De ce fait, l'opérateur d'une chaîne couvrant l'Ile-de-France 22 ( * ) se verrait appliquer non plus le dispositif anti-concentration applicable aux chaînes locales mais bien celui, plus contraignant, applicable aux chaînes nationales constitué notamment de :

- la règle des 49 % (applicable seulement aux chaînes dont l'audience est supérieure à 2,5 % de l'audience totale des services de télévision aux termes de l'article 39 de la loi du 30 septembre 1986) ;

- l'interdiction de cumuler une autorisation nationale et une autorisation locale en mode analogique (article 41 modifié par le présent projet de loi) ;

- le plafond des sept autorisations en mode numérique (article 41 modifié par le présent projet de loi)

Cette disposition présente un inconvénient et deux avantages.

Elle a pour inconvénient d'introduire un nouvel élément de complexité dans un dispositif dont la compréhension paraît de plus en plus ardue pour les non-spécialistes.

Elle permet toutefois d'harmoniser ce seuil avec celui prévu pour le déclenchement des obligations de contribution à la production audiovisuelle et cinématographique et d'éviter qu'un opérateur déjà dominant au niveau national ne détienne la totalité du capital d'une télévision locale couvrant plus de 18 % de la population nationale.

* 8 Les télévisions locales, rapport établi par MM. Michel Francaix et Jacques Vistel, remis à Mme Catherine Trautmann, ministre de la culture et de la communication, 10 novembre 1982.

* 9 Dans chaque département d'outre-mer, RFO dispose de deux canaux : l'un baptisé Tempo RFO, l'autre Télé- suivi du nom du département.

* 10 Canal Antilles, Canal Réunion, Canal Guyane.

* 11 Canal Polynésie et Canal Calédonie.

* 12 Ibidem.

* 13 Dans certaines régions (notamment en Ile-de-France où est prévu un 7 e multiplexe), ce chiffre pourra être supérieur.

* 14 Ce décret exonère ces chaînes d'obligation de contribution à la production audiovisuelle et cinématographique lorsqu'elles sont diffusées sur une zone comprenant moins de .../... 10 millions d'habitants, comme c'est le cas pour les chaînes analogiques. Par ailleurs, il aligne la durée maximale de publicité sur ces chaînes sur celle des chaînes du câble et du satellite.

* 15 En 2001, les médias ont perçu plus de 1,4 milliard d'euros de recettes nettes des annonceurs des secteurs interdits. La distribution représentait à elle seule 71 % du total.

* 16 Le décret définit une opération commerciale de promotion comme « toute offre de produits ou de prestation de services faite aux consommateurs ou toute organisation d'événement qui présente un caractère occasionnel ou saisonnier, résultant notamment de la durée de l'offre, des prix et conditions de vente annoncés, de l'importance du stock mis en vente, de la nature, de l'origine ou des qualités particulières des produits ou services ou des produits ou prestations accessoires offerts ».

* 17 A l'exception des chaînes nationales diffusées également en mode analogique hertzien.

* 18 Décret n° 2001-609 du 9 juillet 2001 (hertzien analogique en clair) ; décret n° 2001-1332 du 28 décembre 2001 (hertzien analogique crypté) ; décret n° 2001-1333 du 28 décembre 2001 (numérique terrestre) ; décret n° 2002-140 du 4 février 2002 (câble et satellite).

* 19 Les chaînes analogiques locales dont le bassin d'audience est inférieur à dix millions d'habitants sont déjà exonérées.

* 20 « La télévision numérique terrestre » - Rapport complémentaire établi à l'intention du Premier ministre - février 2003 (p. 23).

* 21 Direction du développement des médias : quelles perspectives de développement pour les télévisions locales ? mai 2003.

* 22 D'après le recensement INSEE de 1999, l'Ile-de-France, région la plus peuplée de France, compte 10,952 millions d'habitants. La région Rhône-Alpes, arrive loin derrière avec 5,646 millions d'habitants.

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