Question de M. DEVINAZ Gilbert-Luc (Rhône - SER) publiée le 16/12/2021

Question posée en séance publique le 15/12/2021

M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

M. Gilbert-Luc Devinaz. Le 3 novembre 1896, Jean Jaurès interpellait le Gouvernement sur le rôle de la France et de l'Europe à propos des massacres en Arménie. Il dénonçait une Europe hypocrite, qui faisait passer la raison diplomatique et économique avant la sauvegarde des peuples, de la justice et du droit.

Monsieur le ministre, il serait impensable aujourd'hui que reste dans l'Histoire un camouflet infligé aux démocraties occidentales et aux valeurs séculaires qu'elles ont toujours eu à cœur de défendre par un État aidé par des groupes terroristes.

La situation est trop complexe pour la réduire à une guerre de civilisation ou de religion. C'est bien davantage un conflit ethnique et territorial.

Le bloc turco-azéri menace l'existence même de l'Arménie. Le pays a besoin d'aide matérielle pour garantir la sécurité de ses frontières.

Les atrocités de la guerre – exterminations, décapitations – laissent la place à une violence quotidienne au sein des populations civiles arméniennes, confirmée par le défenseur des droits d'Arménie.

Les autorités de ces deux Républiques, rencontrées sur place ou au Sénat, demandent que la France prenne toute sa place dans le groupe de Minsk, afin d'aboutir à l'établissement d'une paix durable. Les coprésidents se sont réunis en novembre, et les discussions doivent maintenant aboutir à des actes.

Hier, l'Arménie a déclaré vouloir nommer un émissaire pour la normalisation de ses relations avec la Turquie.

Ma question est simple, monsieur le ministre. Un cessez-le-feu a été signé il y a un an sous l'égide de la Russie, sans les représentants du groupe de Minsk. Au-delà des déclarations, que fait votre gouvernement pour obtenir la libération des prisonniers et apporter un soutien matériel aux populations ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)


Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 16/12/2021

Réponse apportée en séance publique le 15/12/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Devinaz, vous avez raison de rappeler que la situation sécuritaire demeure très tendue en Arménie et dans le Sud-Caucase de manière générale.

Le cessez-le-feu qui avait été signé au mois de novembre l'an dernier est régulièrement violé. Il y a encore eu trois morts la semaine dernière. Il est donc urgent de progresser sur les différents volets du conflit : les prisonniers, les disparus, le déminage, la préservation du patrimoine et la délimitation des frontières.

Il faut essayer de trouver le chemin d'une confiance entre les deux acteurs. Nous y travaillons.

J'ai réuni il y a quelques jours à Paris mes collègues Mirzoyan et Baïramov, dans le cadre du groupe de Minsk, pour essayer d'avancer sur les différents sujets que j'ai évoqués. C'est ainsi que l'on retrouvera un esprit de confiance. Parallèlement, aujourd'hui même se tient à Bruxelles le partenariat oriental des chefs d'État et de gouvernement, lors duquel le Président de la République doit s'entretenir avec ses interlocuteurs arménien et azerbaïdjanais.

Nous devons continuer à jouer notre rôle dans le groupe de Minsk, avec les États-Unis et la Russie. C'est précisément ce que nous faisons, y compris ici lorsque nous avons réuni les ministres à Paris.

Nous avons aussi avec l'Arménie, en raison de notre histoire, une culture commune et une solidarité particulière, qui s'est manifestée la semaine dernière lorsque le ministre délégué Jean-Baptiste Lemoyne a signé, à ma demande, une feuille de route avec les autorités arméniennes pour renforcer notre coopération dans le domaine de la santé, de la connectivité et de l'énergie, avec le soutien de l'Agence française de développement.

Ainsi, la France continuera à jouer ce double rôle de responsabilité au sein du groupe de Minsk, et donc d'équilibre, et de solidarité concrète avec le peuple arménien.

M. le président. La parole est à M. Gilbert-Luc Devinaz, pour la réplique.

M. Gilbert-Luc Devinaz. Je vous remercie de votre réponse, monsieur le ministre. J'attire néanmoins votre attention sur le fait que l'Arménie et le Haut-Karabagh sont des démocraties qui continuent d'être mises à mal par des régimes autoritaires.

Il y a des périodes dans l'histoire où il faut choisir son camp. L'an dernier, notre assemblée, en votant à l'unanimité moins une voix la demande de la reconnaissance de la République d'Artsakh, a choisi le sien, celui de la démocratie. (Applaudissements sur les travées du groupe SER, ainsi que sur des travées des groupes CRCE et Les Républicains.)

- page 11865

Page mise à jour le