Question de Mme EUSTACHE-BRINIO Jacqueline (Val-d'Oise - Les Républicains) publiée le 09/12/2021

Question posée en séance publique le 08/12/2021

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Monsieur le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, le 15 octobre dernier, nous rendions hommage à Samuel Paty, courageux professeur assassiné il y a un an, victime de l'islamisme.

La veille de cet hommage, le 14 octobre, Jean-Christophe Peton, professeur dans le Jura, a osé s'exprimer, en réponse à un message laconique de son proviseur sur l'application Pronote annonçant la minute de silence en hommage à Samuel Paty.

M. Peton remettait en cause le soutien de l'éducation nationale au professeur assassiné. Le 22 octobre, il a été convoqué et suspendu de ses fonctions à titre conservatoire pour une durée de quatre mois. Il a bénéficié d'une vaste mobilisation de ses collègues, des syndicats, dans les médias et sur les réseaux sociaux. Les témoignages de soutien ont afflué derrière le hashtag #TousSuspendus. Grâce à cette mobilisation, l'enseignant a été réintégré dans ses fonctions le 3 décembre, sans explications de la part de sa hiérarchie.

Monsieur le ministre, de plus en plus de professeurs s'interrogent sur leur avenir et leur liberté d'enseigner ; de plus en plus de professeurs se sentent abandonnés. Comment comptez-vous rassurer les enseignants et leur apporter un soutien sans faille dans ce contexte extrêmement compliqué ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)


Réponse du Ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports publiée le 09/12/2021

Réponse apportée en séance publique le 08/12/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

M. Jean-Michel Blanquer, ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports. Madame la sénatrice, l'exemple que vous évoquez me permet d'aborder la question des conditions de travail des professeurs.

Je ne m'exprimerai pas sur le cas particulier que vous avez évoqué, car un dossier doit toujours être examiné spécifiquement.

M. Jacques Grosperrin. Tout à fait !

M. Jean-Michel Blanquer, ministre. Je tiens en revanche à insister sur le fait que personne – je dis bien : personne ! – ne peut dire que l'éducation nationale n'a pas rendu hommage à Samuel Paty. Bien sûr, nous sommes en démocratie et chacun peut dire ce qu'il veut, mais je ne laisserai personne affirmer qu'une telle assertion correspond à la vérité.

La vérité, c'est que Samuel Paty est aujourd'hui une référence pour l'éducation nationale. Nous lui avons rendu hommage comme il nous revenait de le faire. Par ailleurs, nous soutenons bien entendu tous les professeurs de France.

Je pourrais vous parler longuement des différents aspects de cette question, mais j'évoquerai plus particulièrement le sujet de la sécurité.

Je rappelle que nous avons mis en œuvre ce que nous appelons désormais le « carré régalien ». Dans chaque rectorat, nous avons mis en place des équipes chargées de soutenir les professeurs sur quatre sujets distincts : les valeurs de la République et la laïcité, la lutte contre la radicalisation, la lutte contre les violences et la lutte contre le harcèlement.

Mon message est donc un message de soutien, et rien d'autre. Indépendamment du cas particulier dont vous parlez, madame la sénatrice, ce soutien est, je le redis, clair et net. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

Il est dans notre intérêt collectif, représentation nationale et Gouvernement, de tenir le même langage sur ce sujet et de ne pas prêter à autrui des idées qu'il n'a pas.

Ce message de soutien qu'il convient d'adresser à tous les professeurs de France provient, je le crois, de l'ensemble des travées de cet hémicycle, comme de tous les bancs de l'Assemblée nationale et du Gouvernement. Nous avons mis en œuvre des mesures concrètes pour soutenir les professeurs, que ce soit sur le plan financier ou régalien, en matière de bien-être au travail et de sécurité.

Il reste évidemment du chemin à parcourir, mais mon message ne varie pas : la société entière doit respecter les professeurs – je m'adresse ainsi aux familles – ; l'État respecte les professeurs ; je soutiens les professeurs. Vous ne me prendrez jamais en défaut sur un tel sujet. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Eustache-Brinio, pour la réplique.

Mme Jacqueline Eustache-Brinio. Je suis désolée, monsieur le ministre, mais vous ne m'avez vraiment pas convaincue !

Alors que ce sont la peur, la lâcheté et le manque de courage qui ont conduit à la mort de Samuel Paty, ce professeur qui défendait la liberté d'expression, force est de constater que, dans votre ministère, on continue à ne pas nommer les choses.

En un an, monsieur le ministre, rien n'a changé.

Dans quelques semaines, comme vos collègues, vous devrez présenter votre bilan aux Français. Or, malheureusement, cette merveilleuse institution qu'est l'éducation nationale n'aura jamais autant été remise en cause depuis cinq ans, du fait de votre absence de conviction pour défendre la laïcité et lutter contre les revendications communautaristes dans les établissements !

Aujourd'hui, Didier Lemaire, professeur à Trappes, et Fatiha Boudjahlat, professeur à Toulouse, n'enseignent plus. Et combien d'autres hommes et femmes convaincus encore ? Ce sont les piliers d'une institution tellement malade qu'ils la défendent aujourd'hui du dehors. Le « pas de vague » et le « en même temps » auront fragilisé l'école de Jules Ferry comme jamais ! (Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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