Question de Mme JACQUES Micheline (Saint-Barthélemy - Les Républicains) publiée le 25/11/2021

Question posée en séance publique le 24/11/2021

M. le président. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour le groupe Les Républicains. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

Mme Micheline Jacques. Monsieur le ministre, la situation de la Guadeloupe nous oblige.

Nous réprouvons avec force toute forme de violence et affirmons que ce sont non pas les jeunes ou la jeunesse qui cassent, mais bien des délinquants.

Nous exprimons notre fraternité à la population qui pâtit des blocages et des violences.

Cette crise a des racines profondes que nous devons tous regarder en face. L'obligation vaccinale n'est qu'un révélateur et le sentiment de déconsidération partagé dans l'ensemble des outre-mer a été exacerbé par la centralisation des politiques publiques ces derniers mois. En effet, centraliser compte double outre-mer, car la distance accentue l'éloignement de la décision.

Certes, les règles sanitaires doivent être les mêmes pour l'ensemble de la République, mais l'instance de dialogue annoncée par le Premier ministre est une première solution de souplesse pour gérer l'urgence.

Oui, monsieur le ministre, la crise est permanente. Au fond, c'est la relation avec l'État qui se joue et la capacité des politiques publiques en général à répondre aux difficultés structurelles qui se sont empilées. Ainsi, 25 % des jeunes sont au chômage, un tiers de la population vit sous le seuil de pauvreté. À cela s'ajoute l'indignité du manque d'eau potable.

La majorité sénatoriale est attentive à la crise et regarde au-delà, comme elle l'a fait en 2009 en créant une mission commune d'information. Il faut en sortir par le haut, car on ne développe pas par à-coups.

Le Sénat a fait des propositions solides en matière de différenciation outre-mer pour favoriser l'efficacité des politiques publiques et une relation mieux articulée entre les collectivités et l'État.

Le Gouvernement est-il prêt à s'engager dans la voie d'un nouveau pacte de confiance avec les outre-mer français ? (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)


Réponse du Ministère des outre-mer publiée le 25/11/2021

Réponse apportée en séance publique le 24/11/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre des outre-mer.

M. Sébastien Lecornu, ministre des outre-mer. Madame la sénatrice, votre question s'inscrit dans le sillage de la réplique du sénateur Lurel. Elle incite à un effort de définition : il y a la différenciation, la décentralisation et la déconcentration. Dans la gestion de la crise sanitaire, nous avons fait cet effort – d'ailleurs, le Sénat l'a évalué. Et pour cause ! En fonction des saisons, du climat, de la circulation du virus, la situation n'était pas la même sur tous les territoires. En ce moment même, deux collectivités sont encore en état d'urgence sanitaire, quand d'autres ne le sont pas. La différenciation est aussi passée par la stratégie de vaccination. À Mayotte, typiquement, nous avons démarré celle-ci sur des publics plus jeunes, au vu de la pyramide des âges particulière à cette île.

Sur votre propre territoire, madame la sénatrice, les îles du Nord, sur lequel vous êtes très engagée, vous avez permis de procéder à cette différenciation. Saint-Barthélemy fut d'ailleurs le premier territoire pour lequel nous avons levé la condition de motif d'ordre impérieux, parce que le taux de vaccination y est particulièrement élevé.

Mais vous posez une question redoutablement importante, puisqu'elle renvoie au modèle républicain des territoires d'outre-mer concernés. Un de vos collègues parlait, au début de cette séance, de rupture républicaine. Comment donc une loi de la République, qui a vocation à protéger nos concitoyens, pourrait-elle s'appliquer moins dans un département d'outre-mer ? La vraie question est celle de l'autonomie. Quand certains élus locaux, notamment régionaux, en Guadeloupe, disent qu'il faut que les Guadeloupéens puissent décider pour la Guadeloupe, ils sortent du modèle d'un département, ou d'une région, d'outre-mer. Pour un républicain – et nous le sommes – cette conception ne correspond pas à la situation d'un département dans la République, mais au statut des collectivités du Pacifique, par exemple.

Je sais que le Sénat a commencé à travailler sur ce sujet. Je m'en suis d'ailleurs entretenu avec l'actuel et le précédent président de la commission des lois de votre assemblée. Il s'agit d'une question essentielle : quel modèle voulons-nous pour nos départements et régions d'outre-mer ? La Réunion y a répondu il y a de nombreuses années. En Guadeloupe, il n'y a pas de consensus : le sénateur Lurel lui-même vient de s'exprimer avec force en disant que la loi de la République doit s'appliquer parce que c'est un département et une région d'outre-mer. Sur cette vraie question, il faudra également examiner le statut particulier des îles du Nord, dont celle que vous représentez, madame la sénatrice.

M. le président. La parole est à Mme Micheline Jacques, pour la réplique.

Mme Micheline Jacques. Monsieur le ministre, les collectivités territoriales connaissent leur territoire, et prendre en compte leur point de vue permet d'ajuster les décisions dans l'intérêt des populations locales. Cela vaut pour les départements comme pour les collectivités d'outre-mer. Saint-Barthélemy réclame, sur le fondement des réalités locales, une nouvelle organisation de la prévoyance sociale. Il y a urgence à prendre des décisions pour ramener la sérénité, mais j'insiste sur la nécessité d'une vision à long terme. Le Sénat y est très attaché. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.)

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