Question de M. BOCQUET Éric (Nord - CRCE) publiée le 18/11/2021

Question posée en séance publique le 17/11/2021

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

M. Éric Bocquet. Ma question s'adresse à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Un homme est emprisonné depuis bientôt trois ans dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, à Londres. Son nom est Julian Assange.

Ce journaliste australien de 50 ans est poursuivi par la justice américaine. Son crime : avoir publié 700 000 documents diplomatiques et militaires, qui ont dévoilé au monde entier les activités d'espionnage de Washington, mais aussi les crimes de guerre commis par les États-Unis sur des terrains d'opération tels que l'Irak, ou à Guantanamo.

Nous apprenions également par ce biais, en 2015, la mise sur écoute téléphonique de trois présidents de la République française : Jacques Chirac, Nicolas Sarkozy et François Hollande.

Ces faits sont évidemment d'une gravité extrême.

Monsieur le ministre, ma question est double : quelle est la position du gouvernement français sur cette affaire ? Quelles initiatives diplomatiques êtes-vous prêt à prendre pour soutenir ce lanceur d'alerte ? (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE, ainsi que sur des travées des groupes SER et GEST. – Mmes Nassimah Dindar et Nathalie Goulet, MM. Alain Houpert et Sébastien Meurant applaudissent également.)


Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 18/11/2021

Réponse apportée en séance publique le 17/11/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

M. Jean-Yves Le Drian, ministre de l'Europe et des affaires étrangères. Monsieur le sénateur Éric Bocquet, je connais bien la situation de M. Assange et je souhaite apporter à votre question quelques éléments de réponse.

Tout d'abord, comme vous le savez, ce sujet n'est pas nouveau et les autorités françaises ont déjà eu l'occasion de se prononcer par le passé ; elles avaient alors jugé qu'il n'y avait pas lieu d'apporter une réponse favorable à son accueil en France, en raison d'éléments liés à la situation juridique et à la situation de fait de l'intéressé.

Par ailleurs, celui-ci est tout à fait libre de déposer une demande d'asile en France, ce qu'il n'a pas fait, à l'heure actuelle. Il existe pour cela des procédures, qui relèvent de l'Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides). Si M. Assange le désire, il peut le faire ; il reviendrait alors aux juridictions compétentes de prendre une décision.

Enfin, l'intéressé est sous juridiction britannique. Nous considérons aujourd'hui que le Royaume-Uni est un État de droit et nous faisons confiance à sa justice. J'ajoute – vous ne l'avez pas dit – que les autorités judiciaires britanniques ont refusé son extradition vers les États-Unis, contrairement à ce que ceux-ci souhaitaient, en janvier de cette année. C'est donc très récent.

S'agissant des questions relatives à la transparence et aux lanceurs d'alerte, je vous rappelle que la France a mis en place un dispositif parmi les plus avancés du monde pour protéger les lanceurs d'alerte, en particulier par la loi de décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique.

Comme vous le savez, un autre texte de loi est en discussion aujourd'hui même – comme par hasard ! – à l'Assemblée nationale, sur le renforcement de la sécurisation des lanceurs d'alerte. (MM. François Patriat et Alain Richard applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Éric Bocquet, pour la réplique.

M. Éric Bocquet. Merci, monsieur le ministre. Hier, à l'Assemblée nationale, trente-huit députés de toutes sensibilités ont reçu au Parlement M. John Shipton, qui n'est autre que le père de Julian Assange.

Les actions se multiplient dans le monde pour réclamer la libération de ce lanceur d'alerte.

Notre pays, garant des valeurs universelles de liberté et de démocratie, s'honorerait d'accorder à Julian Assange l'asile politique, afin que celui-ci échappe à toute extradition vers les États-Unis et évite ainsi une peine de 175 années de prison.

La France peut lui proposer l'asile constitutionnel, au titre de l'alinéa 4 du préambule de la Constitution de 1946, qui précise : « Tout homme persécuté en raison de son action en faveur de la liberté a droit d'asile sur les territoires de la République. » (Applaudissements sur les travées du groupe CRCE. – Mme Marie-Arlette Carlotti et M. Patrice Joly applaudissent également.)

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