Question de M. KANNER Patrick (Nord - SER) publiée le 11/11/2021

M. Patrick Kanner attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur la prise en charge de médicaments contre la migraine.
Le 13 janvier 2021, il a attiré son attention sur ce sujet sans avoir reçu aucune réponse à ce jour.

La migraine n'est pas un simple mal de tête. Chez le patient, elle peut être source de retentissements anxieux, elle altère sévèrement sa qualité de vie et nuit gravement à son évolution professionnelle.
La migraine est la maladie neurologique chronique la plus fréquente dans le monde et la première cause de handicap chez les adultes de moins de 50 ans. Au-delà de ce handicap individuel, la migraine est responsable de coûts indirects majeurs secondaires dus à une consommation de soins souvent inadaptée et à une nette réduction de la productivité professionnelle.
Plusieurs laboratoires ont mis au point des médicaments dont les résultats sont spectaculaires. Il s'agit des anticorps monoclonaux anti-CGRP erenumab (laboratoire Novartis), fremanezumab (laboratoire TEVA) et galcanezumab (laboratoire Lilly). Chacun bénéficie d'une autorisation de mise sur le marché européen. Des patients ont été testés avec succès dans différents centres hospitalo-universitaires (CHU) et notamment au CHU de Lille jusqu'à la fin de l'été 2020.
L'efficacité de cette classe médicamenteuse n'est pas contestée mais le Gouvernement a fait le choix en décembre 2020 de ne pas rembourser ceux-ci, contrairement à nos voisins européens, du Danemark à la Slovaquie en passant par l'Italie, l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne ou le Luxembourg.
Alors que cette classe médicamenteuse est réservée à une minorité de patients migraineux en échec avec les médicaments classiques, il souhaite savoir pourquoi le Gouvernement refuse obstinément de les prendre en charge.

- page 6279


Réponse du Ministère auprès du ministre des solidarités et de la santé - Autonomie publiée le 01/12/2021

Réponse apportée en séance publique le 30/11/2021

M. le président. La parole est à M. Patrick Kanner, auteur de la question n° 1918, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Patrick Kanner. Madame la ministre, la migraine n'est pas un simple mal de tête. Chez le patient, elle peut être source de retentissements anxieux. Elle altère sévèrement sa qualité de vie et nuit gravement à son évolution professionnelle.

La migraine est la maladie neurologique chronique la plus fréquente dans le monde et la première cause de handicap chez les adultes de moins de 50 ans.

Au-delà de ce handicap individuel, la migraine sévère est responsable de coûts indirects dus à une consommation de soins souvent inadaptée et à une nette réduction de la productivité professionnelle. Bêtabloquants, triptans, antidépresseurs, acupuncture ne sont plus suffisamment efficaces pour a minima 1 million de nos concitoyens. Cela entraîne entre 20 millions et 30 millions d'arrêts de travail journaliers.

Plusieurs laboratoires ont mis en place des médicaments dont les résultats sont tout à fait spectaculaires. Il s'agit des anticorps monoclonaux anti-CGRP, qui bloquent la protéine responsable de la douleur. Cela ouvre une nouvelle ère du traitement de la migraine.

Ces médicaments bénéficient d'une autorisation de mise sur le marché européen. Des patients ont été testés avec succès dans différents CHU, notamment celui de Lille jusqu'à la fin de l'été dernier.

L'efficacité de cette classe médicamenteuse n'est pas contestée, mais le Gouvernement a fait le choix en décembre 2020 de ne pas les rembourser, contrairement à nos voisins européens, du Danemark à la Slovaquie en passant par l'Italie, l'Allemagne, la Belgique, l'Espagne ou le Luxembourg – pas moins de 23 pays sont désormais « en règle », pour ainsi dire, avec ce nouvel avantage dont peuvent bénéficier leurs ressortissants.

Ce traitement coûte 500 euros le premier mois, puis 245 euros pour chaque injection mensuelle.

Alors que cette classe de médicaments est réservée à une minorité de patients en échec thérapeutique – essentiellement des femmes, d'ailleurs –, pourquoi, madame la ministre, le Gouvernement refuse-t-il obstinément de les prendre en charge, créant ainsi une médecine à deux vitesses ?

Où est l'exception française en la matière ? Je tiens enfin à vous rappeler que je vous ai adressé une question écrite sur ce sujet le 21 janvier dernier ; je n'ai pas reçu de réponse.

Mme Catherine Deroche. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie. Monsieur le sénateur Patrick Kanner, je vais déjà répondre à cette question orale !

Je vous entends et je souscris à vos propos. La migraine est une maladie invalidante, qui peut se traduire par un handicap et une dégradation marquée de la qualité de vie, notamment pour les patients souffrant de migraine sévère.

Toutefois, pour répondre à votre question, permettez-moi de rappeler la procédure de droit commun permettant le remboursement d'un médicament pour une indication donnée.

Comme vous le savez, lorsqu'un médicament dispose d'une autorisation de mise sur le marché (AMM) dans l'indication considérée, l'exploitant doit déposer une demande d'inscription sur les listes de remboursement. La commission spécialisée de la Haute Autorité de santé (HAS) rend un avis favorable à son inscription, puis les négociations tarifaires engagées entre le Comité économique des produits de santé (CEPS) et l'entreprise doivent aboutir.

La commission de la transparence de la Haute Autorité de santé rend ses avis sur la base de comparateurs cliniquement pertinents de ces nouvelles spécialités. Ils permettent une prise en charge de l'ensemble des stades de la pathologie avec des traitements de première et de seconde intention, comme le Lopressor ou l'Avlocardyl, mais également des traitements de recours, tels que le Nocertone, ainsi que d'autres solutions non médicamenteuses.

Pour ce qui concerne l'Ajovy, l'Aimovig et l'Emgality, la commission de la transparence a octroyé une « amélioration de service médical rendu » (ASMR) de niveau V : cela signifie que les anti-CGRP ne présentent aucune amélioration du service médical rendu eu égard aux thérapeutiques existantes.

Or une telle spécialité ne peut être inscrite au remboursement que si elle génère une économie dans les coûts de traitement. Malgré plusieurs propositions, les discussions n'ont pu aboutir en raison des prétentions tarifaires très élevées des industriels compte tenu des dépenses actuellement engagées pour le traitement de la migraine. C'est pourquoi ces trois antimigraineux anti-CGRP n'ont pu être inscrits sur les listes des médicaments remboursables.

Les laboratoires pourront prétendre à un remboursement par la solidarité nationale s'ils présentent des résultats tangibles permettant une revalorisation de l'amélioration du service médical rendu, ou s'ils revoient leurs prétentions tarifaires.

- page 11344

Page mise à jour le