Question de M. MENONVILLE Franck (Meuse - Les Indépendants) publiée le 28/10/2021

Question posée en séance publique le 27/10/2021

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur les travées du groupe UC.)

M. Franck Menonville. Ma question, qui s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, porte sur la stratégie Farm to Fork.

Déclinaison du Pacte vert européen, cette stratégie vise à porter à 25 % la part de l'agriculture biologique, à l'horizon de 2030, à réduire de moitié les usages des produits phytosanitaires et, surtout, à diminuer de 10 % les surfaces cultivées sur notre continent. De nombreuses études, dont celle du Centre commun de recherche de la Commission européenne, mettent en avant les effets potentiellement négatifs de cette stratégie.

La Commission a malheureusement maintenu sa ligne directrice initiale, sans mener d'étude d'impact sérieuse. On estime les pertes de production entre 15 % et 20 %, ce qui aura des conséquences sur le revenu des agriculteurs.

De plus, l'Europe devrait faire face à une situation de dépendance alimentaire. D'exportateurs, nous pourrions devenir importateurs net.

Toujours selon la même étude, l'impact sur la lutte contre le changement climatique serait très faible. C'est un comble, car il s'agit là, bien évidemment, de l'objectif recherché !

Monsieur le ministre, ces propositions font fi de la situation géopolitique et sont à contre-courant des ambitions que nous portons pour l'agriculture européenne. Ce renoncement stratégique reviendrait à sacrifier soixante ans de politique agricole commune. Les conditions fixées ignorent les besoins actuels d'autonomie et les risques de pénurie que la crise sanitaire a pourtant mis en exergue.

Ne faisons pas à notre agriculture ce que nous avons fait à certains pans de notre industrie !

Mme Sophie Primas. Très bien !

M. Franck Menonville. L'agriculture doit poursuivre sa transition progressive, sans brutalité, en mobilisant la recherche et l'innovation.

Monsieur le ministre, vous aurez dans quelques semaines la lourde responsabilité de présider le conseil des ministres de l'agriculture de l'Union européenne. Quelle ligne défendrez-vous pour garantir durablement la souveraineté alimentaire de l'Europe ? (Applaudissements sur les travées des groupes INDEP, UC et Les Républicains.)


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 28/10/2021

Réponse apportée en séance publique le 27/10/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur, je veux tout d'abord vous dire que, dans ma vision de la politique, il n'y a pas de renoncement. Il y a toujours une volonté d'action (« C'est beau ! » sur les travées du groupe SER.), même quand la situation est difficile, comme vous l'avez très bien exprimé.

L'étude à laquelle vous faites référence, menée par le bureau d'études de la Commission européenne, doit provoquer un réveil des consciences chez toutes celles et tous ceux qui considèrent que l'on ne fait jamais assez pour la transition agroécologique.

La nouvelle politique agricole commune va tellement loin que, comme vous l'avez dit, monsieur le sénateur, la production diminuera de 13 % au niveau européen, tandis que les importations augmenteront de 20 % et que les deux tiers des émissions de CO2 que l'on réduira en Europe seront réimportées. Où est le sens d'une telle politique quand elle va aussi loin ? (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Bruno Sido applaudit également.)

Il faut aussi que le réveil des consciences porte sur la finalité de notre agriculture, dont certains oublient la mission d'abord nourricière. Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, l'Europe a un rôle nourricier qu'elle doit assumer tant pour notre souveraineté que vis-à-vis du reste du monde ! Cela est d'autant plus vrai que, sous l'effet du changement climatique, les zones où la production agricole ne sera plus possible risquent de se multiplier. L'Europe doit assumer ce rôle nourricier. Il y va d'un certain nombre d'équilibres à l'international.

Avec mes collègues, notamment Clément Beaune, je vais me battre au niveau européen pour que l'étude d'impact soit réalisée, car les parlementaires européens l'ont votée. Nous nous battrons aussi pour que l'on instaure enfin des clauses miroir dans la réciprocité des échanges, car sans elles nous ne pourrons pas continuer d'avancer aussi rapidement que nos concitoyens le demandent.

La ligne que nous défendrons est extrêmement claire : il n'y aura pas de renoncement, mais il y aura une volonté de poursuivre dans la voie que j'ai tracée. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC. – M. Bruno Sido applaudit également.)

M. Emmanuel Capus. Très bien !

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