Question de M. BOCQUET Éric (Nord - CRCE) publiée le 23/09/2021

M. Éric Bocquet attire l'attention de M. le Premier ministre sur la question majeure de l'abolition universelle de la peine de mort.
Il y a quarante ans, en France, à la suite des justes arguments avancés par le garde des sceaux d'alors, une grande majorité de parlementaires, par-delà leurs sensibilités, a adopté courageusement et en conscience l'abolition de la peine de mort. Le texte est promulgué le 9 octobre 1981 et publié au Journal officiel le jour d'après. Il met ainsi fin à la « justice qui tue » pour reprendre les mots du ministre de l'époque et ce, après deux siècles de débats. Les premiers débats sur la question de l'abolition eurent en effet lieu en 1791. En 1848, devant l'Assemblée constituante, Victor Hugo résuma la peine capitale en ces termes : « Partout où la peine de mort est prodiguée, la barbarie domine ; partout où la peine de mort est rare, la civilisation règne. »
Pour autant, à l'échelle mondiale, et malgré son abolition dernièrement au Tchad et au Colorado, le combat contre la peine de mort est toujours d'actualité. Malheureusement aujourd'hui, la peine capitale est encore active dans 55 pays, soit un tiers des pays du monde !
Selon Amnesty international, 483 personnes ont été exécutées en 2020 et 28 567 personnes au moins se trouvaient sous le coup d'une condamnation à mort (environ 80 % de ces personnes sont détenues dans 9 pays). Ces chiffres font froid dans le dos. D'autres glacent le sang comme ces trois personnes qui ont été exécutées en Iran pour des crimes commis alors qu'elles avaient moins de 18 ans. Il peut être évoqué encore le fait qu'en Egypte le nombre d'exécutions signalées ait plus que triplé.
Ainsi le combat pour l'abolition universelle de la peine de mort est plus que jamais d'actualité et la liste des pays recourant à la peine capitale reste bien trop longue.
C'est pourquoi il lui demande si le gouvernement français entend s'engager avec force, par la voie diplomatique ou toutes autres actions, pour l'abolition universelle de la peine de mort.

- page 5404

Transmise au Ministère de l'Europe et des affaires étrangères


Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 03/02/2022

L'engagement de la France en faveur de l'abolition universelle de la peine de mort pour tous les crimes est constant. La peine capitale, outre qu'elle n'a aucun caractère dissuasif et rend toute erreur judiciaire irréversible, cible souvent de manière disproportionnée les femmes, les personnes pauvres et économiquement fragiles, les personnes LGBTQI+ et les personnes appartenant à des minorités. Forte de ses convictions, la France mène son combat pour l'abolition universelle dans les enceintes internationales, notamment aux Nations unies, au Conseil des droits de l'Homme, au sein du Conseil de l'Europe et de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). L'engagement de la France en faveur des résolutions sur la peine de mort, présentées tous les deux ans devant l'Assemblée générale des Nations unies, se traduit par un soutien important à ces textes, dont le dernier a été adopté en décembre 2020 avec un nombre historique de 123 voix. Au Conseil des droits de l'Homme, la France fait partie du groupe restreint de co-rédacteurs des résolutions sur la peine de mort et porte, dans ce cadre, une position ambitieuse. Une résolution centrée sur la thématique de la transparence dans l'application de la peine de mort a été adoptée le 8 octobre 2021 dans le cadre de la 48e session du Conseil à Genève (A/HRC/RES/48/9). Par ailleurs, la France participe activement aux travaux des coalitions internationales d'États engagées sur cette thématique, comme la Commission internationale contre la peine de mort, qui a célébré ses dix ans d'existence en octobre 2020. La France entretient un dialogue régulier et exigeant avec les États qui n'ont pas encore aboli la peine de mort pour les sensibiliser et faire valoir sa position. Elle encourage systématiquement tous les États qui ne l'auraient pas encore fait à signer et à ratifier le deuxième Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits civils et politiques visant à l'abolir. Parce que ce combat est aussi une question de plaidoyer, la France accompagne les initiatives de la société civile et des défenseurs des droits qui agissent dans des conditions difficiles et sont exposés à des violences, des menaces et des intimidations.   Ces initiatives ont permis des résultats. La France se félicite de la tendance mondiale, observée depuis plusieurs années, qui confirme l'abandon progressif de la peine capitale dans le monde. Ainsi, en vingt ans, plus de cinquante États sont devenus abolitionnistes en droit. Cependant, nos efforts doivent se poursuivre, puisque des condamnations à mort et des exécutions sont toujours recensées dans le monde, souvent dans des conditions très opaques. Le 9 octobre 2021, à l'occasion de la commémoration du 40e anniversaire de l'abolition de la peine de mort en France, le Président de la République a annoncé l'organisation, dans le cadre de la présidence française du Conseil de l'Union européenne au premier semestre 2022, d'une rencontre avec les sociétés civiles des États appliquant encore la peine de mort, afin de poursuivre nos efforts de sensibilisation en faveur de l'abolition. Par ailleurs, la France, avec ses partenaires de l'Union européenne, poursuivra son engagement au sein de l'Assemblée générale des Nations unies pour que la question de la transparence dans l'application de la peine de mort soit prise en compte dans ses travaux. La France est déterminée à poursuivre son combat résolu pour l'abolition universelle de la peine de mort. Aux côtés de ses partenaires, elle poursuivra son soutien aux organisations de la société civile et restera mobilisée dans les enceintes internationales.

- page 611

Page mise à jour le