Question de M. CANÉVET Michel (Finistère - UC) publiée le 15/07/2021

M. Michel Canévet interroge M. le ministre de l'intérieur concernant l'application du code électoral en matière de communication lors des campagnes électorales et notamment l'interprétation à donner à l'article 51 de ce même code.
Cet article pose les principes en matière de communication par voie d'affiche durant les campagnes électorales avec un affichage organisé par la municipalité sur des panneaux strictement similaires en taille. Parallèlement, il stipule notamment que « tout affichage relatif à l'élection, même par affiches timbrées, est interdit en dehors de cet emplacement ou sur l'emplacement réservé aux autres candidats, ainsi qu'en dehors des panneaux d'affichage d'expression libre lorsqu'il en existe ».
Ce texte reste d'actualité en ce qu'il permet de réglementer, voire de sanctionner les phénomènes d'« affichage sauvage ».

Pour autant, de nouveaux modes de support de communication, fixes ou mobiles, sont de plus en plus utilisés, souvent en toute bonne foi par les candidats, du simple flyer aux kakémonos en passant par des véhicules, motorisés ou non, arborant des affiches électorales... Certains candidats vont même jusqu'à utiliser des camionnettes, voire des bus avec leur photo ou leur slogan comme permanence électorale mobile, comme cela s'est d'ailleurs pratiqué pour les dernières campagnes départementales et régionales.

Aucune mention n'étant expressément faite dans le code électoral quant à l'utilisation de ces supports de communication, autres que les affiches, l'on pourrait donc penser que cette pratique est autorisée et légale. Il est d'ailleurs à noter que la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCCFP) accepte le remboursement de ces dépenses dès lors qu'elles correspondent au « critère électoral d'une dépense ».

Or, lors des dernières élections municipales, plusieurs candidats ayant utilisé ces moyens de propagande ont fait l'objet de recours pendant ou après la campagne électorale.
Des préfets ont, après mise en demeure, obtenu de candidats qu'ils cessent l'utilisation de ces moyens de communication alors que la campagne était en cours.

Le 18 juin 2021, l'ancien maire de Quimper a été condamné par le tribunal correctionnel de Brest à 3 000 euros d'amende dont 2 000 avec sursis, pour « affichage électoral hors de l'emplacement réservé au candidat ». Il lui était reproché d'avoir « procédé à un affichage électoral en dehors de l'emplacement réservé aux candidats, en l'espèce durant la période de la campagne électorale des municipales, avoir loué un véhicule utilitaire, avoir sérigraphié à l'effigie de son affiche électorale officielle et avoir circulé et stationné ce véhicule sur l'ensemble de la circonscription de Quimper ».

Ne considérer l'utilisation de moyens de communication que sur la base d'une stricte application de l'article 51 du code électoral revient à interdire toute autre forme de communication, à l'exception des affiches sur les panneaux officiels et d'expression libre. Seraient dès lors interdits, et possiblement condamnables pénalement, tous supports de communication autre que les affiches. De plus, la décision rendue par le tribunal correctionnel de Brest pourrait faire jurisprudence et amener la commission nationale de contrôle des comptes de campagnes et du financement public à ne plus rembourser à l'avenir que les frais de type affiche, tous les frais liés aux autres supports de communication étant rejetés.

Il lui demande donc son sentiment quant à l'interprétation à donner à cet article 51 du code électoral et si une évolution de ce texte est envisageable.

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Réponse du Ministère de l'intérieur publiée le 18/11/2021

En matière d'affichage électoral, le troisième alinéa de l'article L. 51 du code électoral dispose que « Pendant les six mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, tout affichage relatif à l'élection, même par affiches timbrées, est interdit en dehors de cet emplacement ou sur l'emplacement réservé aux autres candidats, ainsi qu'en dehors des panneaux d'affichage d'expression libre lorsqu'il en existe. ». A ce titre, le code électoral prévoit une sanction d'une amende de 9 000 euros à l'encontre du candidat qui contreviendrait aux dispositions précitées (dernier alinéa de l'art. L. 90). En outre, les moyens d'action octroyés au maire et au préfet afin de faire cesser les situations d'« affichage sauvage » ont été précisés par le décret n° 2020-1397 du 17 novembre 2020, lequel a créé un article R. 28-1 au sein du code électoral. Ce dernier détaille les modalités de mise en œuvre de la procédure de dépose d'office des affiches par le maire, après mise en demeure du candidat et de substitution du préfet en cas de carence du maire, le cas échéant. S'agissant de l'affichage électoral hors des emplacements réglementaires, à l'instar des « locaux de campagne mobile », sur lesquels seraient affichées des affiches de campagne (camion, bus, kakemonos etc.), l'article L. 51 du code électoral prohibe ce type de pratique revenant à apposer les affiches en dehors des emplacements légalement autorisés – emplacements réservés aux candidats et panneaux d'affichage d'expression libre. Par ailleurs, de telles pratiques sont encadrées par la règlementation du code de l'environnement. En effet, le code de l'environnement définit la publicité comme "toute inscription,forme ou image, destinée à informer le public ou à attirer son attention"(L. 581-3) et prévoit que"la publicité sur les véhicules terrestres, sur l'eau ou dans les airs peut être réglementée, subordonnée à autorisation ou interdite, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat" (L. 581-15). Les affiches de propagande à caractère politique constituent bien des publicités au sens de ces dispositions (voir CAA Nantes, 29 sept. 2009, Assoc. Front national et a., n° 08NT02733). Elles sont par conséquent sujettes aux mesures de police et sanctions prévues aux articles L. 581-27 et suivants de ce même code selon les modalités suivantes. Ainsi, l'article L. 581-27 du code de l'environnement prévoit qu'en cas de constatation d'une publicité irrégulière au regard de la législation et de la réglementation en vigueur, "l'autorité compétente en matière de police prend un arrêté ordonnant, dans les cinq jours, soit la suppression, soit la mise en conformité avec ces dispositions" de la publicité en cause. En tout état de cause, l'appréciation du respect de la législation du code de l'environnement appartient souverainement au juge qui statue in concreto sur la base de critères relatifs aux modalités d'utilisation du véhicule similaires à ceux évoqués supra dans le cadre du code de l'environnement (affectation principale du véhicule, stationnement prolongé ou circulation à vitesse réduite etc.). Enfin, il est à noter que de nombreux modes alternatifs à l'affichage électoral sont autorisés durant la campagne électorale, jusqu'à la veille du scrutin, à l'image de la distribution de tracts, la campagne par voie de presse, radio ou télévision, la campagne par Internet, les réunions publiques etc. Au vu de l'ensemble de ces éléments, le Gouvernement n'entend pas à ce jour proposer d'évolution de l'article L. 51 du code électoral.

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