Question de M. MENONVILLE Franck (Meuse - Les Indépendants) publiée le 08/07/2021

Question posée en séance publique le 07/07/2021

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville, pour le groupe Les Indépendants - République et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.)

M. Franck Menonville. Monsieur le ministre, le redémarrage de l'économie mondiale exerce une pression sur les matières premières, dont nous sommes souvent dépendants, entraînant ainsi des difficultés d'approvisionnement pour nombre d'entreprises.

Nous avons pourtant au cœur de nos territoires une matière première de qualité en quantité : le bois. Pourtant, cette filière est confrontée à de graves difficultés d'approvisionnement. Faut-il le rappeler, la forêt française est la quatrième surface boisée de l'Union européenne. Notre filière bois représente 440 000 emplois, 60 000 entreprises et 60 milliards d'euros de chiffre d'affaires.

Or la demande mondiale grandissante pour nos essences, et particulièrement nos chênes, et l'absence de régulation de nos exportations entraînent de lourdes conséquences sur nos territoires.

En effet, à l'heure actuelle, un chêne récolté sur trois part en Chine sans transformation ni valeur ajoutée pour le territoire. Force est de le constater, les scieries sont contraintes de fonctionner en sous-régime. Elles sont appelées à chômer et fonctionnent aujourd'hui à 60 % de leurs capacités de production. La région Grand Est se trouve particulièrement concernée, du fait de la proximité des ports belges.

Face à ce phénomène, de nombreux pays réagissent, afin de protéger leur filière. Je pense notamment aux États-Unis et à la Russie, qui ont déjà mis en place des mesures de protection.

Pendant que la Chine importe nos bois, elle protège ses forêts et y investit pour l'avenir. Même si la labellisation Union européenne a porté ses fruits dans la forêt publique, ce n'est absolument pas suffisant à ce jour !

Monsieur le ministre, il est donc urgent d'agir. Si aucune mesure de régulation n'est prise, c'est toute la filière qui sera touchée. Que comptez-vous faire pour préserver et mieux valoriser nos ressources et, ainsi, mieux garantir l'approvisionnement de la filière ? Si rien n'est fait, des entreprises disparaîtront ! (Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées des groupes UC et Les Républicains.)


Réponse du Ministère de l'agriculture et de l'alimentation publiée le 08/07/2021

Réponse apportée en séance publique le 07/07/2021

M. le président. La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

M. Julien Denormandie, ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Monsieur le sénateur Franck Menonville, je vous remercie de pointer du doigt ce sujet très compliqué, qui suscite une profonde inquiétude pour l'ensemble de l'activité forestière de notre pays.

Du fait de la tension sur les marchés des matières premières, nous voyons arriver des traders qui viennent spéculer sur les offres de vente de bois, particulièrement les grumes de chêne, mais aussi d'autres essences forestières. Ce faisant, ils captent la ressource forestière et empêchent les scieries de notre territoire de la transformer.

Ce sujet, que nous connaissons depuis longtemps, prend des proportions considérables et constitue une véritable source d'inquiétude.

Premièrement, nous avons réuni à plusieurs reprises la filière, pour mettre en place des dispositifs, tels que le label Union européenne. Toutefois, ce dernier ne concerne que le chêne et seulement dans les ventes publiques. L'Office national des forêts (ONF) est déjà engagé dans ce dispositif et plusieurs vendeurs privés y entrent aujourd'hui.

Deuxièmement, la contractualisation, qui doit être amplifiée, constitue un élément important. Si elle est nécessaire, elle ne sera pas suffisante à court terme, car elle prend du temps.

Troisièmement, il convient de porter le sujet au niveau européen, et je m'y emploie en tant que ministre de l'agriculture et de l'alimentation. Vous l'avez dit, d'autres puissances forestières ont pris des mesures.

Quatrièmement, il est nécessaire de mettre en place des certificats de qualification – le Sénat a récemment adopté une telle mesure –, pour que seules les personnes bénéficiant de ces certificats puissent répondre aux appels d'offres. Souvenez-vous de la loi Macron dans le BTP ! (M. Stéphane Piednoir ironise.) C'est exactement la même logique que vous avez adoptée, mesdames, messieurs les sénateurs, sur ce sujet.

Il nous faudra peut-être aller encore plus loin. Je pense notamment à d'éventuelles mesures fiscales, dont nous débattrons. Quoi qu'il en soit, soyez-en sûr, monsieur le sénateur, il s'agit d'un vrai sujet de préoccupation, que nous prenons à bras-le-corps avec les acteurs de la filière. Notre bois français doit bénéficier à notre forêt française. (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP.)

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