Question de M. SALMON Daniel (Ille-et-Vilaine - GEST) publiée le 17/06/2021

Question posée en séance publique le 16/06/2021

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

M. Daniel Salmon. Ma question s'adressait à Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique et solidaire.

Lundi dernier, nous apprenions que l'EPR de Taishan, en Chine, connaissait une augmentation de la concentration de certains gaz rares dans le circuit primaire de son réacteur n° 1.

Les autorités chinoises se veulent rassurantes, le taux de radiation se situant dans les limites autorisées par les normes chinoises, limites toutefois trois fois supérieures aux normes françaises. Cette géométrie variable permet d'éviter l'arrêt du réacteur…

Mme la ministre Pompili tenait, mardi matin, les propos suivants à la radio : « Il ne faut pas qu'on ait une réflexion sur notre politique énergétique en partant d'un fait. » Certes, mais les faits sont têtus, ou plutôt les défauts et incidents s'accumulent depuis de nombreuses années !

À Flamanville, ont été pointées des défaillances sur le béton, les soudures, le pont polaire, les valves construites à l'envers, les piquages, ou encore les accidents du travail. Et je ne déroule pas toute la liste.

À cela s'ajoutent les dérives financières : plus de 20 milliards d'euros en 2020, soit six fois plus que le coût initialement prévu, et un retard de livraison qui approche les dix ans.

En Finlande, matériels et matériaux souffrent de défauts. Le retard de livraison est tel – plus de treize ans – que les équipements sont déjà trop vieux et doivent être remplacés. Le surcoût est de 7 milliards d'euros, dont près de 800 millions d'euros à la charge de l'État.

En Angleterre, Hinkley Point connaît également retards et dérive des coûts. La Cour des comptes évoque, au sujet des EPR, un échec opérationnel, des dérives des coûts et des délais considérables. Madame la ministre, tout le monde le sait, le coût du mégawattheure nucléaire est largement sous-estimé.

À l'aune de ce que l'on peut qualifier de fiasco industriel, vous semble-t-il pertinent de poursuivre cet engagement à construire de nouveaux EPR, plutôt que de mettre le cap de manière résolue vers la sobriété, les énergies renouvelables et les technologies de stockage ? (Applaudissements sur les travées du groupe GEST. – M. André Gattolin applaudit également.)


Réponse du Ministère auprès de la ministre de la transition écologique - Logement publiée le 17/06/2021

Réponse apportée en séance publique le 16/06/2021

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du logement.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée auprès de la ministre de la transition écologique, chargée du logement. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, monsieur Salmon, je voudrais tout d'abord vous rappeler que les deux EPR de Taishan, dont vous parlez, ont été construits en coopération entre la Chine et les industriels français et qu'ils sont exploités par une société chinoise, dont EDF est un actionnaire minoritaire et Framatome un prestataire.

L'exploitation et la sûreté relèvent donc des autorités chinoises et de leur responsabilité souveraine. Il ne m'appartient pas de m'y substituer, même si, bien sûr, nos contacts sont fréquents.

Au-delà de la situation chinoise, vous posez la question du mix énergétique en France. La réponse est simple : notre politique énergétique est un mix avec diversification et résilience. Il n'est pas responsable de proposer aux Français une seule énergie, quelle qu'elle soit, comme solution au problème de la transition écologique dans notre pays.

Tous les pays du monde font en sorte de ne pas dépendre d'une seule source d'énergie pour la production d'électricité. Nous avons besoin de solutions de rechange.

Le nucléaire, comme toutes les énergies, présente des avantages : il est décarboné. Il présente également des inconvénients, parmi lesquels la gestion des déchets à long terme, mais aussi, peut-être de façon peut-être moins connue, la mobilisation des cours d'eau pour les opérations de refroidissement.

C'est pour cela que nous avons l'intention de diminuer, d'ici à 2035, la part du nucléaire dans notre mix électrique, de 70 % à 50 %. À ce jour, le seul projet d'EPR que nous développons en France est celui de Flamanville. À la suite du rapport de la Cour des comptes, l'État a demandé à EDF de mettre en œuvre l'intégralité des recommandations de l'audit conduit par Jean-Martin Folz.

La diversification de notre mix reposera sur les énergies renouvelables : nous passerons à 25 % en 2020 et à 40 % en 2030, en développant, comme le prévoit la programmation pluriannuelle de l'énergie, le solaire, la méthanisation, l'hydrogène, l'éolien terrestre et maritime.

Ces moyens nous permettront de produire une électricité qui restera, comme elle l'est aujourd'hui, l'une des plus décarbonées d'Europe. (Mme Patricia Schillinger et M. François Patriat applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. Daniel Salmon, pour la réplique.

M. Daniel Salmon. Avouons-le, la vitrine est fissurée. Le coût sur lequel nous nous étions fondés est exponentiel : nous en sommes à peu près à 120 euros du mégawattheure pour l'EPR, alors que les appels d'offres pour l'éolien et le solaire sont, aujourd'hui, aux alentours de 60 euros.

Nous vous l'avons dit et redit, cet artifice nous amène dans une impasse. (Applaudissements sur les travées du groupe GEST.)

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