Question de Mme SAINT-PÉ Denise (Pyrénées-Atlantiques - UC) publiée le 24/06/2021

Mme Denise Saint-Pé souhaite interroger M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation sur la pertinence de soumettre des productions traditionnelles telles que l'ossau-iraty au système du nutri-score.
Ce fromage au lait de brebis traditionnel, fabriqué dans les Pyrénées-Atlantiques, est classé en appellation d'origine contrôlée (AOC) depuis 1980 et en appellation d'origine protégée (AOP) depuis 1996.
Il s'agit d'un produit traditionnel, de grande qualité, tant par sa fabrication (lait cru non chauffé), que par le mode d'élevage de la filière ovine concernée (pâturage en estives basco-béarnaises).
Or, cette spécialité est aujourd'hui confrontée à un déficit d'image en raison du dispositif nutri-score qui lui est appliqué.
En effet, ce fromage est classé D dans cette grille, alors que des produits industriels transformés se voient paradoxalement attribuer des notes bien meilleures.
À un moment où le consommateur souhaite légitimement être informé des produits qu'il va trouver dans son assiette, il est paradoxal que le nutri-score, qui limite l'information à la simple composition nutritionnelle, devienne prédominant.
Il convient de rappeler que le cahier des charges des AOC et AOP est très strict et que les modes de fabrication ainsi que la composition des produits ne peuvent pas être modifiés, ce qui ne permet pas d'adapter leur composition pour répondre aux exigences du nutri-score.
De plus, Santé publique France envisage d'interdire la publicité des aliments notés D et E, pour préserver les enfants et adolescents du marketing publicitaire, ce qui entraînera l'impossibilité d'assurer la promotion de tels produits sous indication géographique.
Cette situation lui semble aller à l'encontre de la préservation de notre agriculture traditionnelle alors même que le consommateur paraît la demander en privilégiant les circuits courts.
Aussi, elle lui demande s'il serait envisageable de ne pas soumettre de telles productions traditionnelles au système du nutri-score, inadapté dans ces cas-là.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargé de la jeunesse et de l'engagement publiée le 14/07/2021

Réponse apportée en séance publique le 13/07/2021

M. le président. La parole est à Mme Denise Saint-Pé, auteur de la question n° 1736, adressée à M. le ministre de l'agriculture et de l'alimentation.

Mme Denise Saint-Pé. Madame la secrétaire d'État, permettez-moi de questionner la pertinence de soumettre des productions traditionnelles telles que l'Ossau-Iraty au système du Nutri-score.

Ce fromage au lait de brebis, fabriqué dans les Pyrénées-Atlantiques, est classé en appellation d'origine contrôlée (AOC) depuis 1980 et en appellation d'origine protégée (AOP) depuis 1996.

Il s'agit d'un produit traditionnel, de grande qualité, tant par sa fabrication – du lait cru non chauff頖 que par le mode d'élevage de la filière ovine concernée : le pâturage en estives basco-béarnaises.

Or cette spécialité est aujourd'hui confrontée à un déficit d'image en raison du dispositif Nutri-score qui lui est appliqué. En effet, elle est classée D dans cette grille, alors que des produits industriels transformés se voient paradoxalement attribuer des notes bien meilleures.

À un moment où le consommateur souhaite légitimement être informé des produits qu'il va trouver dans son assiette, il est paradoxal que le Nutri-score, qui limite l'information à la simple composition nutritionnelle, devienne prédominant.

Il convient de le rappeler, le cahier des charges des AOC et AOP est très strict et les modes de fabrication ainsi que la composition des produits ne peuvent pas être modifiés, ce qui ne permet pas d'adapter leur composition pour répondre aux exigences du Nutri-score.

De plus, Santé publique France envisage d'interdire la publicité des aliments notés D et E pour préserver les enfants et adolescents du marketing publicitaire, ce qui entraînera l'impossibilité d'assurer la promotion de tels produits sous indication géographique.

Cette situation me semble aller à l'encontre de la préservation de notre agriculture traditionnelle, alors même qu'elle paraît répondre à une demande du consommateur qui privilégie les circuits courts.

Aussi, madame la secrétaire d'État, serait-il envisageable de ne pas soumettre les productions traditionnelles au système du Nutri-score, celui-ci paraissant inadapté dans ces cas-là ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l'engagement. Madame la sénatrice Denise Saint-Pé, notre gastronomie est la plus belle des richesses de notre pays. La France, c'est d'abord ses fromages, ses paysages, ses terroirs et ses agriculteurs. J'apporterai à votre question la réponse qui m'a été fournie par le ministre de l'agriculture et de l'alimentation, dont je vais vous faire lecture pour être la plus exhaustive possible.

Le logo Nutri-score, issu d'une démarche scientifique innovante et inclusive et fondé sur le dialogue entre les parties prenantes, offre aux consommateurs une information lisible, qui facilite la compréhension.

La démarche d'engagement de chaque producteur en faveur du Nutri-score est volontaire, en conformité avec le droit européen. Le Nutri-score est aujourd'hui plébiscité par les Français. En juillet 2020, plus de 415 entreprises étaient engagées dans cette démarche en France, et les parts de marché des produits affichant le Nutri-score représentaient environ 50 % des volumes de ventes ; 94 % des Français ont déclaré être favorables à la présence de cette information sur les emballages.

Sa diffusion rapide suscite toutefois des questions légitimes, que vous avez soulevées, madame la sénatrice. Vous avez évoqué celle des fromages sous AOP. D'autres sont apparues : pourquoi les frites n'ont-elles pas de Nutri-score ? Le Nutri-score prend-il en compte les additifs ? Une large campagne de communication de Santé publique France est en cours de diffusion pour répondre à ces questions.

Le Nutri-score et les signes officiels d'identification de la qualité et de l'origine (SIQO) répondent à des objectifs différents. Les SIQO constituent une garantie pour les consommateurs en termes de qualité, de savoir-faire, de protection de l'environnement, d'origine et de terroir, alors que le Nutri-score les informe sur la qualité nutritionnelle des produits transformés et permet donc de les comparer.

Si les fromages sont classés, dans leur très grande majorité, en D et parfois en E, c'est parce qu'ils contiennent des quantités importantes de graisses saturées de sel et qu'ils sont également caloriques.

Le ministère de l'agriculture et de l'alimentation a toutefois demandé, en lien avec le ministère de la santé, que le comité scientifique institué au niveau européen se saisisse de la question des fromages, afin de mieux traduire la corrélation entre les teneurs en protéines et en calcium des fromages.

Quoi qu'il en soit, cela ne doit pas pour autant exclure ces produits de notre consommation équilibrée : le Nutri-score est une information supplémentaire donnée aux consommateurs ; il ne saurait être l'unique paramètre de leur choix.

Ce n'est en tout cas pas la position du Gouvernement. Je l'ai rappelé au début de mon propos, notre pays est riche de ses terroirs, de ses produits sous signe de qualité, et de sa gastronomie reconnue dans le monde entier, qu'il faut protéger et soutenir.

Nous pensons qu'il vaut mieux nous pencher sur les spécificités nutritionnelles des produits sous AOP. Ainsi, sept pays sont désormais engagés dans cette démarche : la France, la Belgique, l'Espagne, l'Allemagne, les Pays-Bas, le Luxembourg et la Suisse. Un comité composé d'experts scientifiques, réuni pour la première fois le 12 février dernier, aura pour mission d'évaluer la pertinence scientifique des propositions d'évolution du mode de calcul du Nutri-score. La France tentera d'influer, dans le cadre de ce comité, pour que soient prises en compte les spécificités de nos AOP.

Voilà, madame la sénatrice, des éléments de réponse en faveur de notre ambition collective de protéger nos produits agricoles et les femmes et les hommes qui font vivre les savoir-faire.

M. le président. La parole est à Mme Denise Saint-Pé, pour la réplique.

Mme Denise Saint-Pé. Madame la secrétaire d'État, il faut absolument que la France arrive à obtenir de l'Union européenne qu'elle reconnaisse cette spécificité de l'économie montagnarde, comme le demandent nos concitoyens.

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