Question de Mme FILLEUL Martine (Nord - SER) publiée le 20/05/2021

Mme Martine Filleul attire l'attention de Mme la ministre de la transition écologique concernant les responsabilités engagées dans le rapport du conseil général de l'environnement sur la pollution environnementale survenue le 10 avril 2020 à l'entreprise Téréos de Thun-Saint-Martin.

Dans la nuit du 9 au 10 avril 2020, suite à la rupture de la digue du bassin d'Iwuy canal, 90 000 m3 d'eau de betterave se répandaient dans l'Escaut, entraînant une catastrophe écologique et la mort de milliers de poissons, faute d'oxygène.

À la demande du préfet, une inspectrice générale de santé publique et vétérinaire et un ingénieur divisionnaire de l'industrie et des mines ont rendu leurs conclusions dans un rapport de 82 pages.

Dans leur rapport, il est évoqué que, malgré les constats faits par les différents services chacun de leur côté, « aucun service de l'État, ni aucun établissement public n'alertent la préfecture d'un risque grave pour l'environnement ».

De plus, l'enquête révèle la responsabilité de l'entreprise Tereos. En effet, elle estime que « l'entretien et le contrôle des bassins par l'entreprise ont été insuffisants ». Ce manque a entraîné comme conséquence le manque « de moyens pour limiter l'impact sur l'environnement en cas d'accident ». C'est pourquoi ces manquements successifs ont augmenté le risque de pollution de cette entreprise.

Elle souhaite connaître les suites données à ce rapport et la reconnaissance de responsabilités de l'État et de l'entreprise Téréos dans cette catastrophe écologique.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargé de la biodiversité publiée le 14/07/2021

Réponse apportée en séance publique le 13/07/2021

M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, auteure de la question n° 1690, adressée à Mme la ministre de la transition écologique.

Mme Martine Filleul. Dans la nuit du 9 au 10 avril 2020, la digue d'un bassin de la sucrerie Tereos à Thun-Saint-Martin, dans le Nord, s'est rompue, engendrant la fuite de 90 000 mètres cubes d'eaux polluées dans l'Escaut.

Cet événement est une des pires catastrophes écologiques survenues dans la région depuis des décennies.

Selon l'Office français de la biodiversité, l'OFB, 12 millions de poissons sont morts – autrement dit, 70 % de la population piscicole a disparu – et 40 % de la flore a été détruite, sans compter le développement d'une espèce parasite.

Il ressort des conclusions du rapport analysant l'accident, d'une part, que l'entreprise Tereos n'aurait pas respecté la réglementation, l'entretien des bassins et digues n'étant pas satisfaisant, et, d'autre part, que la prise de conscience par les services de l'État de la gravité de la pollution aurait été trop tardive. En effet, les services compétents pour la qualité de l'eau n'ont pas été associés dès le début à la gestion de l'accident.

Aucune coordination des services de l'État n'a ensuite été mise en place pour organiser le suivi de la pollution. De plus, des acteurs qui auraient pu contribuer à la surveillance du milieu aquatique et à la gestion de ces conséquences n'ont été ni informés ni associés. Enfin, les autorités compétentes en Belgique n'ont pas été prévenues à temps.

Ces manquements successifs de l'entreprise et des services de l'État posent question.

Quels sont les moyens réels donnés à l'État pour contrôler le respect par les entreprises des mesures environnementales ? Comment mieux coordonner la réponse des services étatiques face à ce type de crise ?

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État auprès de la ministre de la transition écologique, chargée de la biodiversité. Madame la sénatrice Filleul, vous m'interrogez sur la terrible pollution environnementale survenue le 10 avril 2020 sur le site de l'entreprise Tereos de Thun-Saint-Martin.

Nous avons été très sensibles à cet accident dramatique pour les milieux aquatiques. À la demande du ministère, une mission a été diligentée pour analyser cet incident et ses conséquences afin d'en dégager les retours d'expérience nécessaires. Les recommandations du rapport remis à cette occasion ont déjà été totalement prises en compte et, pour la plupart d'entre elles, complètement mises en œuvre.

Le préfet consolidera en un seul arrêté l'ensemble des obligations réglementaires du site, après examen par l'inspection des installations classées des études mises à jour par Tereos.

Un protocole définissant plus précisément le rôle des différents services de l'État en cas de pollution touchant les milieux aquatiques et impliquant pleinement l'Office français de la biodiversité (OFB) est en cours de finalisation.

Un comité de pilotage relatif à la restauration écologique de l'Escaut a été mis en place – il s'est déjà réuni trois fois – et associe toutes les parties prenantes, dont les riverains.

Par ailleurs, l'inspection des installations classées a inspecté chaque site agro-industriel des Hauts-de-France comportant d'importants bassins de lagunage dès 2020. La remise en eau des bassins, elle, n'a été autorisée qu'après la réalisation d'études et de travaux.

Concernant la question de la responsabilité pénale, une procédure judiciaire est en cours, qui devra déterminer les causes de l'accident, ainsi que les manquements imputables à l'exploitant. En parallèle, le préfet va engager la procédure en responsabilité environnementale de Tereos.

Dans ce cadre, Tereos a admis sa responsabilité sur le linéaire français. Cette procédure permettra de prescrire à l'exploitant les mesures de réparations environnementales adaptées après qualification des dommages causés par la pollution.

Après arrêté préfectoral et sur proposition d'un groupe d'experts intégrant les parties prenantes, sera présentée prochainement au conseil départemental de l'environnement et des risques sanitaires et technologiques (Coderst) du Nord une prescription de restauration des zones d'habitat propices à la reproduction piscicole sur plusieurs secteurs de l'Escaut.

Enfin, le ministère a mis en place un dispositif de vigilance renforcée pour les sites faisant l'objet d'incidents réguliers ou de non-conformité. Tereos en fera bien évidemment partie.

M. le président. La parole est à Mme Martine Filleul, pour la réplique.

Mme Martine Filleul. Vous m'informez des conclusions d'un rapport que je connaissais d'ores et déjà. Cette réponse me laisse donc partiellement insatisfaite. Je continue à m'interroger : qui paiera la note ?

La Cour des comptes européenne, dans un rapport spécial consacré au principe pollueur-payeur, souligne que ce sont souvent, en bout de chaîne, les citoyens de l'Union européenne qui paient la facture de ces dégâts environnementaux.

Quid également des moyens accordés par l'État pour contrôler les entreprises tant en amont, avant les accidents, qu'en aval, pour mesurer l'efficacité des mesures qu'elles mettent en place ?

M. le président. Veuillez conclure !

Mme Martine Filleul. L'entreprise Tereos met en œuvre des réparations, notamment par un rempoissonnement, dont on ne connaît pas l'effectivité…

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