Question de M. MAUREY Hervé (Eure - UC) publiée le 20/05/2021

M. Hervé Maurey attire l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur la part de la dotation forfaitaire attribuée en fonction de la population.
L'une des composantes de la dotation forfaitaire est calculée en fonction de la population des communes. Son montant est fixé en appliquant un coefficient logarithmique qui va de 1 pour la plus petite strate de communes (moins de 500 habitants) à 2 pour la plus grande (plus de 200 000 habitants).
Une commune de moins de 500 habitants se voit ainsi attribuer une dotation deux fois moins importante par habitant (64,46 €) qu'une commune de plus de 200 000 habitants (128,93 €).
Ce principe qui postule qu'un citoyen rural vaudrait deux fois moins qu'un citoyen urbain est difficilement acceptable sur le principe.
La réalité des charges que supportent les communes en fonction de leur taille – notamment les charges de centralité – ne justifie par ailleurs pas une telle différence de traitement.
En effet, dans son rapport remis au Parlement en application de l'article 257 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019, le Gouvernement indique lui-même que « le coefficient logarithmique ne reflète pas parfaitement les charges des collectivités », notamment « le poids des charges des communes de moins de 500 habitants semble sous-estimé ». Il reprend ainsi un constat déjà formulé par des analyses économétriques en 2012 et le rapport parlementaire intitulé « Pour une dotation globale de fonctionnement équitable et transparente : osons la réforme » de 2015.
Malgré ces nombreux travaux, et le consensus autour de cette question, ce coefficient logarithmique n'a toujours pas été modifié et le Gouvernement ne semble pas vouloir réellement procéder à sa révision.
Dans le cadre de la discussion du projet de loi de finances pour 2021, le Sénat a adopté un amendement qui avait pour vocation de réduire, dans un premier temps, cet écart. Cette disposition supprimée par l'Assemblée nationale n'a pas été retenue dans le texte final. Une récente étude a montré l'effet positif qu'aurait eu cette disposition pour les plus petites communes s'il avait été adopté définitivement.
Lors de la discussion des amendements sur le sujet, le Gouvernement qui s'est opposé à toute modification de ces règles de calcul, a renvoyé – une nouvelle fois – vers des travaux complémentaires.
Aussi, il aimerait savoir où en sont ces travaux et si elle a l'intention de modifier réellement les règles de calcul de la dotation forfaitaire pour plus d'équité entre communes rurales et communes urbaines.

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Réponse du Ministère auprès de la ministre des armées - Mémoire et anciens combattants publiée le 29/09/2021

Réponse apportée en séance publique le 28/09/2021

Mme le président. La parole est à M. Hervé Maurey, auteur de la question n° 1680, adressée à Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

M. Hervé Maurey. Madame la ministre, malgré les demandes répétées des élus ruraux et des parlementaires, malgré différents rapports sur le sujet, les règles de répartition de la dotation globale de fonctionnement (DGF) entre communes demeurent toujours aussi injustes.

Comme vous le savez, la part de la dotation forfaitaire par habitant varie du simple au double entre une commune rurale et une commune urbaine. Cette situation est totalement inacceptable et injustifiable.

En effet, les études menées sur la réalité des charges supportées par les communes en fonction de leur taille montrent que la règle de calcul appliquée sous-estime les charges des communes de petite taille. Ce constat ancien a été confirmé par un rapport gouvernemental en 2020.

Le Sénat a adopté dans le cadre du projet de loi de finances pour 2021 un amendement qui réduisait cette inégalité. Malgré le caractère progressif et mesuré de cette proposition, la disposition a été supprimée à l'Assemblée nationale à la demande du Gouvernement, ce dernier renvoyant à des réflexions complémentaires et ultérieures.

Tout le monde s'accorde donc à dire qu'il faut revoir la règle, mais la situation demeure en l'état, comme en témoigne, malheureusement, le projet de loi de finances pour 2022, qui nous a été présenté la semaine dernière, puisque ce texte ne prévoit rien en la matière.

Je souhaiterais donc savoir, madame la ministre, si, d'ici à l'adoption du projet de loi de finances pour 2022, le Gouvernement compte travailler enfin et réellement avec les parlementaires engagés sur ce sujet pour modifier la règle.

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée auprès de la ministre des armées, chargée de la mémoire et des anciens combattants. Monsieur le sénateur, votre question porte sur un sujet auquel je sais le Sénat très attentif, celui des règles de répartition de la dotation forfaitaire entre communes.

C'est une question sur laquelle circulent tout de même beaucoup d'interprétations erronées, et il faut redonner au sujet sa vraie portée, en rappelant que ce coefficient sert uniquement à traduire dans l'attribution des aides de l'État le fait que les communes, en règle générale, supportent d'autant plus de charges qu'elles comptent d'habitants. C'est un constat évident, documenté et, je crois, largement partagé sur le terrain. On ne peut pas dire qu'un urbain vaut deux ruraux : ce n'est pas entendable, et c'est démenti, surtout, par les faits.

En 2021, les communes urbaines, au sens de l'Insee, ont reçu 166 euros de dotation par habitant, contre 160 euros pour les communes rurales. En effet, au-delà de la dotation forfaitaire, dans le calcul de laquelle joue le coefficient logarithmique, les communes rurales reçoivent aussi d'autres aides.

Je pense en particulier à la dotation de solidarité rurale, dont le montant s'élève à 1,8 milliard d'euros. Cette année encore, le Gouvernement propose d'augmenter cette dotation de 95 millions d'euros dans le projet de loi de finances, ce qui portera à 455 millions d'euros sa progression depuis le début du quinquennat.

Je pense aussi à la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR), qui s'élèvera toujours à 1,46 milliard d'euros en 2022, ce qui fait 5,2 milliards d'euros sur ce quinquennat contre 3,5 milliards d'euros sous le précédent.

En ce qui concerne les évolutions que vous appelez de vos vœux, M. Joël Giraud, secrétaire d'État auprès de la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, chargé de la ruralité, a proposé à l'association des maires ruraux de France de formuler des propositions, mais en coordination avec les autres associations d'élus – villes moyennes, petites villes ou grands centres urbains –, car le Gouvernement ne souhaite pas réformer la DGF contre la volonté des élus et sans esprit de consensus.

Le président du comité des finances locales a d'ores et déjà indiqué que les travaux du groupe, qui se poursuivent depuis deux ans, se prolongeront en 2022. Je crois qu'il faut saisir cette opportunité pour en débattre sereinement et surtout de façon coordonnée, quelle que soit la taille de nos collectivités.

Mme le président. La parole est à M. Hervé Maurey, pour la réplique.

M. Hervé Maurey. Madame la ministre, je suis assez étonné par votre réponse. Vous commencez par expliquer que, finalement, tout cela est très justifié, ce qui est tout de même assez surprenant, parce que, jusqu'alors, on avait plutôt entendu les membres des gouvernements précédents reconnaître qu'il y avait un vrai problème et qu'il fallait se pencher dessus. Là, vous nous dites finalement de circuler, qu'il n'y a rien à voir, et qu'il n'est pas gênant que la dotation forfaitaire varie du simple au double en fonction de la taille de la commune. C'est une nouveauté, j'en prends acte, le Sénat en prend acte et je suis certain que les maires ruraux apprécieront et qu'ils en prendront acte également.

Dans le même temps, vous nous dites tout de même qu'on va continuer à réfléchir, jusqu'en 2022… C'est ce qu'on nous dit chaque année. Pour être très direct avec vous, cela nous donne, une fois de plus, le sentiment d'être menés en bateau, ce qui est extrêmement désagréable pour les nombreux élus concernés.

Le Sénat, une fois de plus, évoquera ce sujet lors de la discussion du prochain projet de loi de finances en espérant – on peut toujours espérer – être enfin entendus par le Gouvernement !

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