Question de Mme JOSEPH Else (Ardennes - Les Républicains) publiée le 06/05/2021

Mme Else Joseph interroge Mme la ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie, sur la portée des mesures annoncées dans le domaine de l'aide à domicile le 1er avril 2021. En effet, la revalorisation salariale pour les aides à domicile de 15 % prévue au 1er octobre 2021 ne concerne que les salariés des seules structures associatives. Si une telle annonce est bienvenue, il faut cependant que tous les acteurs puissent sans exclusion bénéficier de cette revalorisation pour que l'aide à domicile soit efficacement appuyée. Dans les années à venir, il sera de plus en plus nécessaire de soutenir toutes les structures qui interviennent à domicile auprès des personnes dépendantes, notamment les personnes âgées. La crise actuelle a en effet révélé la nécessité de mieux accompagner les personnes fragiles à domicile. Il est anormal que tout le secteur des entreprises qui emploie pourtant 200 000 salariés soit exclu de ces mesures de revalorisation, alors que ces salariés réalisent des missions identiques à celles effectuées par les salariés employés par les associations. Cela constitue ainsi une discrimination profondément déloyale et incompréhensible entre des salariés qui effectuent pourtant les mêmes tâches. Cela conduit par ailleurs à fragiliser les finances des départements, qui sont intervenus, notamment récemment pour attribuer une prime pour les salariés qui travaillent dans l'aide à domicile. Outre l'inclusion des salariés du secteur privé des entreprises qui interviennent auprès des publics dépendants, l'instauration d'un tarif national socle de référence de 26 euros par heure pour l'allocation personnalisée et autonomie (APA) et la prestation de compensation du handicap (PCH), versée par le département, est également une mesure réclamée par les entreprises qui interviennent dans le domaine de l'aide à domicile. Elle lui demande donc ce que le Gouvernement envisage pour que tous les salariés qui aident les publics fragiles à domicile soient concernés par les récentes mesures annoncées le 1er avril 2021. Il convient clairement d'éviter toute distorsion dans le domaine de l'aide à domicile pour appuyer tout ce secteur.

- page 2876


Réponse du Ministère auprès du ministre des solidarités et de la santé - Autonomie publiée le 29/09/2021

Réponse apportée en séance publique le 28/09/2021

Mme le président. La parole est à Mme Else Joseph, auteure de la question n° 1667, adressée à Mme la ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie.

Mme Else Joseph. Madame la ministre, il y a un an, dans le cadre des accords du Ségur de la santé, beaucoup déploraient l'absence du secteur de l'aide à domicile des mesures de revalorisation salariale des métiers difficiles.

Cet oubli avait été ressenti de façon très injuste, d'abord par les acteurs eux-mêmes, dévoués et aux prises avec de véritables difficultés, mais aussi par tous ceux qui ont pris les devants, comme les conseils départementaux, qui avaient institué des primes. Dans cette crise, de nombreuses initiatives ont été prises sur le terrain.

Les critiques ont porté, et j'en suis heureuse. On a ainsi annoncé la refonte de l'avenant 43, avec une refonte complète de la grille conventionnelle destinée à augmenter le salaire des personnels des services d'aide et d'accompagnement à domicile (SAAD) ainsi que ceux des services de soins infirmiers à domicile (Ssiad).

Cette augmentation doit entrer en vigueur au 1er octobre 2021. On annonce également que l'État contribuera à hauteur de 200 millions d'euros annuels au financement des conseils départementaux.

Ces décisions sont certes heureuses, mais elles auront un impact majeur sur les conseils départementaux. Et il ne suffit pas de réagir sur le coup, car il y a un trou dans les mesures de revalorisation.

Il faut aussi réfléchir à long terme et voir plus en amont les problèmes de recrutement qui se poseront. Peut-on réagir par du simple saupoudrage ? Comment rendre la profession attractive, autant que le travail en établissements d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou à l'hôpital ? Comment faciliter le recrutement en nombre conséquent ? Madame la ministre, que compte faire le Gouvernement pour apporter des réponses durables, efficaces, et pas seulement conjoncturelles ? Pourrait-il y avoir des garanties sur les compensations annoncées ?

Mme le président. La parole est à Mme la ministre déléguée.

Mme Brigitte Bourguignon, ministre déléguée auprès du ministre des solidarités et de la santé, chargée de l'autonomie. Madame la sénatrice Else Joseph, cela fait longtemps que les aides à domicile, notamment du secteur associatif, espéraient une revalorisation salariale, alors qu'il leur fallait dix-sept ans d'expérience pour avoir un salaire supérieur au SMIC. Ce n'était plus acceptable. Révélé par la crise, l'engagement de ces professionnels les honore. C'est un métier noble, souvent exercé par des femmes à temps partiel, qui mériterait davantage de reconnaissance, à l'exemple de la prime covid, dont j'ai obtenu le financement dès mon arrivée à l'été 2020. Seuls quinze départements sur cent s'étaient engagés. Aujourd'hui, les cent départements ont versé cette prime.

Nous aurons de plus en plus besoin de ces métiers. Nous devons même les créer par dizaines de milliers pour accompagner le souhait massif de nos concitoyens de vivre à domicile le plus longtemps possible, même lorsqu'une perte d'autonomie les atteint.

Il fallait donc apporter une première réponse aux salariés de la branche de l'aide à domicile. Ils l'attendaient. Ils ont ouvert des négociations conventionnelles, et j'ai agréé leurs accords l'été dernier. La loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) a permis de faire en sorte que l'État accompagne le financement de cette revalorisation, qui entrera en vigueur dans trois jours. Le coût de cette revalorisation pour les départements, qui en assument la compétence, sera allégé de moitié, et même de 70 % en 2021. C'est historique, tant par les montants mobilisés que par la démarche partenariale.

Mais vous avez raison, cela ne concerne que les aides à domicile exerçant dans un réseau associatif. Nous avons besoin d'accompagner toutes les structures du domicile, y compris celles du secteur privé commercial, pour leur permettre de mieux rémunérer et mieux former leurs salariés, et ainsi de rendre ces emplois plus attractifs.

C'est pourquoi, comme le Premier ministre l'a annoncé jeudi dernier, il sera proposé au législateur de créer un tarif plancher national applicable par tous les départements pour revaloriser les plans APA (allocation personnalisée d'autonomie) et PCH (prestation de compensation du handicap). Cette disposition sera portée dans le cadre du prochain PLFSS, avec un montant pour ce tarif socle de 22 euros par heure applicable à partir du 1er janvier 2022, garanti par un financement d'État pérenne. Il permettra aux SAAD, quels que soient leur statut et leur département d'implantation, d'être mieux financés, et ainsi de permettre les augmentations salariales légitimes des aides à domicile.

Madame la sénatrice, je suis mobilisée depuis le premier jour pour accomplir cette réforme de justice pour des salariés trop longtemps invisibles, et dont l'engagement conditionne la promesse de pouvoir vieillir chez soi.

Mme le président. La parole est à Mme Else Joseph, pour la réplique.

Mme Else Joseph. Madame la ministre, j'entends bien votre réponse. Je ne voulais évidemment nullement remettre en cause par mes propos la revalorisation de ces métiers difficiles.

Je me fais simplement le porte-parole des conseils départementaux, notamment de celui des Ardennes, qui, vous le savez, n'a pas un budget énorme.

Cette revalorisation nécessaire engendrera déjà un surcoût de 910 000 euros pour notre département à partir du 1er octobre et jusqu'à la fin de l'année 2021.

Certes, une compensation de l'État est annoncée, mais nous connaissons un peu la chanson… Cette compensation sera de 50 % en 2022. Quid de la suite ? Pour mon département, ce sera 6 millions d'euros de reste à charge sur un budget de 400 millions d'euros… Je suis donc très inquiète, madame la ministre.

- page 8434

Page mise à jour le