Question de M. TABAROT Philippe (Alpes-Maritimes - Les Républicains) publiée le 22/04/2021

M. Philippe Tabarot attire l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance, sur la situation économique critique des travailleurs indépendants.
Les mesures mises en place par l'État en soutien aux entreprises face à la crise sanitaire ne répondent pas à la réalité financière des travailleurs indépendants, comme le confirme une étude de l'institut Odoxa sur l'année 2020. Le salaire moyen des indépendants a chuté de 17 %, avec un chiffre d'affaires moyen de 38 679 euros annuels. 60 % déclarent que leur revenu net est insuffisant pour vivre correctement et certains sont passés sous la barre du seuil de pauvreté. En effet, ils étaient 25 % à gagner moins de 1 000 euros par mois en 2019, ils sont désormais 34 %. Si beaucoup ont arrêté leur activité suite à une fermeture administrative, si d'autres ont fait face à des retards de paiement, 43 % de ces professionnels ont délibérément choisi de réduire leur activité, découragés par les contraintes administratives.
En parallèle, des propositions de la confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), il souhaiterait savoir si des mesures spécifiques sont envisagées comme la suspension de l'inscription au fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP), pour ceux n'ayant jamais connu d'incident et le report des échéances de prêts pour l'achat d'une résidence principale en fin de prêt, comme cela peut être le cas pour les échéances de prêt professionnelles.

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Réponse du Ministère de l'économie, des finances et de la relance publiée le 24/03/2022

Le Gouvernement est très attentif à la situation économique des professionnels et des très petites entreprises durant la crise. Au préalable, il convient de rappeler que les indépendants ont pu bénéficier du soutien du fonds de solidarité, qui a permis le versement d'aides pouvant atteindre 200 000€ par mois en période de restrictions sanitaires. Les établissements bancaires se sont engagés dès le début de la crise sanitaire à apporter une « attention particulière aux situations individuelles de leurs clients commerçants, professionnels, petites et moyennes entreprises, impactés dans les secteurs d'activité les plus directement exposés ». Cet engagement prévoit ainsi la mise en place de procédures accélérées d'instruction de crédit pour les situations de trésorerie tendues, ou encore des reports jusqu'à six mois des remboursements de crédits pour les entreprises. Ces engagements couvrent donc la situation des professionnels et chefs de très petites, petites et moyennes entreprises ayant contracté des prêts personnels pour leur activité. Il convient de souligner par ailleurs qu'en cas de difficultés, les contrats de crédit aux particuliers – qu'il s'agisse des crédits immobiliers ou des crédits à la consommation - prévoient en général déjà des stipulations permettant de moduler le rythme de remboursement. Au-delà même de ces clauses, les emprunteurs peuvent solliciter, dans le cadre de leur relation habituelle avec les prêteurs, des reports d'échéance via la signature d'avenants. En pratique, compte tenu du contexte, les établissements prêteurs ont une attitude de bienveillance à l'égard de leurs clients. Outre ses inconvénients au regard des priorités que le Gouvernement souhaite assigner au secteur bancaire, l'utilité d'une action de l'État dans ce domaine n'est donc pas avérée. S'agissant du Fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP), il doit être d'abord rappelé que le FICP ne répertorie que les crédits souscrits par les indépendants à titre personnel, sans lien avec leur activité professionnelle. Le FICP, prévu aux articles L. 751-1 à L. 751-6 du code de la consommation, et dont la gestion est assurée par la Banque de France, répertorie : (i) les incidents de remboursement caractérisés, déclarés par les établissements de crédit, qui concernent des crédits accordés à des  personnes physiques pour des besoins non professionnels  (non remboursement de deux mensualités consécutives ; utilisation abusive de l'autorisation de découvert ; non-remboursement du découvert) ;   (ii) les mesures prises dans le cadre d'une procédure de surendettement. [1] Ensuite, le FICP est un important élément de protection des personnes physiques, et contribue fortement à prévenir le risque de surendettement personnel. En effet, conformément aux dispositions prévues à l'article L. 312-16 du code de la consommation, le FICP doit être obligatoirement consulté par les établissements de crédit en amont de l'octroi (i) d'un crédit à la consommation ou immobilier, (ii) d'une autorisation de découvert remboursable dans un délai supérieur à un mois ou (iii) de la reconduction annuelle d'un contrat de crédit renouvelable. Les établissements de crédit ont, en outre, la possibilité de le consulter avant d'octroyer d'autres types de crédit ou un moyen de paiement. Cette consultation obligatoire permet d'éclairer la décision finale du prêteur et d'enrichir son analyse de la solvabilité de l'emprunter, et ainsi de prévenir tout risque d'impayés. Il doit par ailleurs être souligné que l'inscription au FICP ne constitue qu'un élément d'information pour le prêteur, et n'emporte aucunement interdiction de contracter un crédit. La suspension de l'inscription des indépendants au FICP pourrait ainsi avoir des conséquences contreproductives, tant pour les indépendants que pour les prêteurs : - pour les emprunteurs, le FICP est un élément protecteur, car il contribue à limiter le risque d'un endettement excessif. Outre la protection contre un endettement excessif, l'inscription au FICP permet également pour les particuliers concernés de bénéficier de dispositifs protecteurs : (i) plafonnement automatique des frais d'incident bancaire ; et (ii) obligation pour les établissements de crédit de leur proposer l'offre spécifique à la clientèle fragile. - pour les prêteurs, une suspension du FICP reviendrait à les priver d'un outil important de leur analyse crédit. Ceci pourrait avoir des conséquences très préjudiciables sur le marché : risque de hausse de taux de défaut (compte tenu d'une moins bonne analyse des risques crédit), hausse des taux pratiqués en conséquence, ce qui conduirait à contraindre l'accès au crédit. Par ailleurs, les informations relatives aux incidents de paiement sont enregistrées dans le FICP dès que les établissements habilités à effectuer cette démarche se manifestent auprès de la Banque de France. Ces informations sont radiées du fichier dès lors que l'établissement ou l'organisme qui a déclaré l'incident déclare que le paiement intégral des sommes dues est effectué. En tout état de cause, ces informations ne peuvent être conservées dans le fichier pendant plus de cinq ans à compter de la date d'enregistrement par la Banque de France de l'incident ayant entrainé la déclaration (article L. 752-1 du code de la consommation.) ------------------------ [1] Un particulier est inscrit au FICP dès la phase de dépôt de son dossier de surendettement, même si la recevabilité du dossier n'est pas acquise.

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