Question de Mme POUMIROL Émilienne (Haute-Garonne - SER) publiée le 08/04/2021

Question posée en séance publique le 07/04/2021

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Mme Émilienne Poumirol. Le 21 février 2018, la Cour de justice de l'Union européenne a rendu un arrêt dit Matzak selon lequel le temps d'astreinte d'un sapeur-pompier volontaire doit être considéré comme un temps de travail au sens de la directive européenne de 2003. Pourtant, la loi française du 20 juillet 2011 a reconnu la spécificité du volontariat, qu'elle définit comme un engagement citoyen libre qui ne saurait être assimilé à une charge de travail.

La transposition et l'application de cet arrêt inquiètent beaucoup, non seulement les sapeurs-pompiers, mais aussi les élus, qu'ils soient locaux ou nationaux. Cette transposition rendrait en effet impossible la conciliation d'un engagement volontaire et d'une activité professionnelle. Elle pourrait ainsi porter gravement atteinte à notre modèle de sécurité civile, fait de la complémentarité entre professionnels et volontaires, dont la force est unanimement reconnue.

Or, de façon unilatérale et sans concertation, monsieur le ministre de l'intérieur, vous avez initié, en novembre, une demande auprès des directeurs de SDIS qui laisse penser que la France pourrait se diriger vers l'assimilation des volontaires à des travailleurs, et ce de façon abusive et infondée. Vos deux prédécesseurs, M. Collomb au Congrès national des sapeurs-pompiers à Ajaccio et M. Castaner devant le Parlement, avaient affirmé la volonté du Gouvernement de pérenniser et de renforcer le volontariat, dont nous connaissons l'importance fondamentale sur nos territoires. Pouvez-vous nous préciser vos intentions ? (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)


Réponse du Ministère auprès du ministre de l'intérieur - Citoyenneté publiée le 08/04/2021

Réponse apportée en séance publique le 07/04/2021

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la citoyenneté.

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur, chargée de la citoyenneté. La Cour de justice de l'Union européenne a jugé que les sapeurs-pompiers volontaires belges devaient être, en raison des circonstances d'emploi contraignantes qui leur sont propres, considérés comme des travailleurs au sens de la DETT. Vous avez parfaitement raison de le rappeler, madame la sénatrice Poumirol, cette décision a suscité des inquiétudes dans les SDIS et parmi un certain nombre d'élus.

Les échanges dont le Gouvernement français a pris l'initiative avec la Commission européenne nous ont permis de le confirmer formellement, cet arrêt n'implique aucunement que les 200 000 sapeurs-pompiers volontaires français soient qualifiés de travailleurs. Le Gouvernement est, comme vous, pleinement attaché au statut particulier et au modèle de volontariat français.

Chaque cas d'espèce doit être examiné en fonction de ses caractéristiques propres. Cette décision ne remet pas en cause notre modèle du volontariat. Toutefois, il est vrai, ce modèle nous semble devoir être sécurisé, en traitant les situations locales, probablement minoritaires, qui risqueraient de le fragiliser devant les juridictions.

Le ministère de l'intérieur n'a naturellement aucune volonté de transposer la DETT aux sapeurs-pompiers volontaires, dont je voudrais saluer l'engagement, particulièrement en cette période de pandémie. Il ne saurait être question pour nous de rester sans agir pour traiter les fragilités juridiques qui peuvent exister.

Sur ce dossier sensible, mais structurant pour le modèle français de la sécurité civile, le Gouvernement veut privilégier la concertation, vous l'avez rappelé. Nous avons demandé aux préfets et aux directeurs généraux de la sécurité civile et de la gestion des crises de lancer une large concertation sur les nécessaires adaptations du modèle actuel de volontariat. Les messages du Gouvernement dont vous faites mention avaient justement pour but de préparer cette concertation. Elle est menée en liaison étroite avec les SDIS, intéressés au premier chef, et avec leurs partenaires, les acteurs de la sécurité civile, les élus.

Il est évident que l'ensemble des besoins opérationnels doit être analysé et les réponses adaptées tant au quotidien des sapeurs-pompiers volontaires et des SDIS…

M. le président. Il faut conclure !

Mme Marlène Schiappa, ministre déléguée. … qu'aux crises exceptionnelles comme celle que nous connaissons à l'heure actuelle. (Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.)

M. le président. La parole est à Mme Émilienne Poumirol, pour la réplique.

Mme Émilienne Poumirol. Madame la ministre, vous n'avez guère dissipé nos inquiétudes. Le volontariat, vous l'avez rappelé, est une activité altruiste et généreuse au bénéfice de nos populations qui ne saurait en aucun cas être considérée comme un travail : c'est un engagement citoyen fort !

Ce n'est pas une étude de quelques cas spéciaux que nous vous demandons. L'ensemble des sapeurs-pompiers de France attend l'écriture d'une nouvelle directive spécifique et non une simple dérogation au cas par cas. La France présidera, en janvier prochain, l'Union européenne : voilà une belle occasion de conclure ce dossier ! (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

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