Question de Mme GATEL Françoise (Ille-et-Vilaine - UC) publiée le 08/04/2021

Question posée en séance publique le 07/04/2021

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour le groupe Union Centriste. (Applaudissements sur les travées du groupe UC.)

Mme Françoise Gatel. Monsieur le garde des sceaux, le président du Sénat dit régulièrement qu'ils sont à portée d'engueulade ; aujourd'hui, ils sont à portée de coups et d'injures, comme leurs familles et leurs biens.

En 2020, 1 300 agressions d'élus ont été recensées, soit trois fois plus qu'en 2019. Pourtant, après la mort tragique du maire de Signes en 2019, le Sénat et l'Assemblée nationale ont adopté des mesures législatives pour protéger les élus.

Le ministère de la justice a adressé aux procureurs deux circulaires les invitant à recueillir avec attention les plaintes des élus et leur demandant de recourir aux sanctions prévues par la loi.

Aujourd'hui, le ministère de l'intérieur met à disposition des élus 350 négociateurs de la gendarmerie pour les aider à gérer les conflits et la désescalade.

On pourrait donc penser que la volonté est là. Je crois d'ailleurs que c'est le cas, monsieur le garde des sceaux. Pour autant, les circulaires circulent… et je n'oserais penser qu'elles circulent comme des bouteilles à la mer…

C'est pourquoi je souhaite vous interroger. Nous ne savons pas quels sont les effets des circulaires que vous avez adressées. Pourriez-vous nous fournir un bilan de leur application ? Par ailleurs, seriez-vous favorable à ce qu'un bilan annuel des sanctions prises à l'encontre des agresseurs d'élus soit dressé, afin que ceux-ci sachent que ces agressions ne sont pas impunies ? (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains et RDSE.)


Réponse du Ministère de la justice publiée le 08/04/2021

Réponse apportée en séance publique le 07/04/2021

M. le président. La parole est à M. le garde des sceaux.

M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice. Madame la sénatrice Françoise Gatel, toute attaque contre un élu est une attaque contre la République, parce que ce sont les élus qui font vivre la République et la démocratie.

On ne peut donc pas, vous avez raison, se payer de mots. Vous avez rappelé les circulaires que j'ai prises et qui ont succédé aux circulaires prises par ma prédécesseure. Elles ont d'ores et déjà porté leurs fruits en termes de condamnation : celles-ci ont doublé et 62 % d'entre elles sont des condamnations à de l'emprisonnement, celui-ci ayant augmenté de 10 %.

Je vous rejoins sur le fait que les circulaires circulent, mais je peux tout de même vous dire qu'elles sont lues, notamment par les procureurs. Ces derniers ont ainsi mis en place des partenariats très étroits avec les différents intervenants concernés, en particulier les élus territoriaux. Ces partenariats ont été rendus possibles par la mise en place de la justice de proximité qui m'a été demandée par M. le Premier ministre : elle a permis le recrutement d'agents dédiés à ces questions.

Voilà où nous en sommes. Ces pratiques vont être étendues à l'ensemble du territoire national grâce à un moteur de recherche mis à la disposition de tous les magistrats sur l'intranet du ministère.

Madame la sénatrice Gatel, vous êtes aussi présidente de la délégation sénatoriale aux collectivités territoriales et j'irai vendredi sur vos terres, à Rennes. Un partenariat particulier y a été mis en place et l'une des personnes embauchées dans le cadre de la justice de proximité est exclusivement dédiée à la relation entre le parquet et les élus locaux. D'ailleurs, le parquet s'apprête à signer une convention avec l'AMF (Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité) et l'AMRF (Association des maires ruraux de France).

Il est absolument essentiel que nous luttions contre les violences faites aux élus. Mon engagement sur cette question est, je vous prie de le croire, madame la sénatrice, total et inébranlable. Je le redis, il est absolument essentiel de protéger les élus et, donc, la République ! (Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées du groupe UC.)

M. le président. La parole est à Mme Françoise Gatel, pour la réplique.

Mme Françoise Gatel. Je vous remercie de votre action, monsieur le garde des sceaux. Chaque sénateur aurait pu poser cette question. Je pense à cet instant, comme nous tous, au maire de Signes, mais aussi à celui de Bron, près de Lyon, qui doit aujourd'hui exercer son mandat sous protection policière.

Vous l'avez dit, monsieur le garde des sceaux, les agressions contre les élus sont des agressions contre la République et ces agressions minent la République. Faisons très attention à ce que cette peur qui apparaît chez les élus ne commence pas à rendre plus épars les rangs de l'armée des fantassins de la République dont nous avons besoin – ce sont eux qui la font au quotidien et elle leur doit justice ! (Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains, RDPI, INDEP et RDSE.)

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