Question de M. LECONTE Jean-Yves (Français établis hors de France - SER) publiée le 15/04/2021

M. Jean-Yves Leconte attire l'attention de M. le ministre des solidarités et de la santé sur l'exigence d'une durée de cotisation minimum de 15 ans, posée par le b du 4° de l'article L. 160-3 du code de la sécurité sociale, durée nécessaire pour que les pensionnées du régime français établis à l'étranger puissent bénéficier d'une prise en charge de leurs soins médicaux effectués lors d'un séjour en France.
En effet, cet article de loi impose, pour pouvoir bénéficier de ce droit, une exigence de 15 années de cotisations en France, sauf accord bilatéral de sécurité sociale dérogatoire plus favorable.
Or, d'une part, l'article 6 du règlement (CE) n° 883/2004 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 portant sur la coordination des systèmes de sécurité sociale dispose que : « À moins que le présent règlement en dispose autrement, l'institution compétente d'un État-membre dont la législation subordonne l'acquisition, le maintien, la durée ou le recouvrement du droit aux prestations, l'admission au bénéfice d'une législation, l'accès à l'assurance obligatoire, facultative […] à l'accomplissement de périodes d'assurance, d'emploi, d'activité non salariée ou de résidence tient compte, dans la mesure nécessaire, des périodes d'assurances, d'emploi, d'activité non salariée ou de résidence accomplies sous la législation de tout autre État-membre, comme s'il s'agissait de période accomplies sous la législation qu'elle applique. »
Ainsi, il lui demande de bien vouloir lui confirmer que les durées de cotisation requises à l'article L. 160-3 du code de la sécurité sociale et à l'instruction n° DSS/DACI/2019/173 du 1er juillet 2019 relative à la prise en charge des frais de santé lors des séjours temporaires en France des pensionnés résidant à l'étranger, publiée au Bulletin officiel du ministère des solidarités et de la santé le 15 septembre 2019, s'entendent bien comme cinq, dix ou quinze ans de cotisations à l'assurance retraite dans l'ensemble des pays de l'Union européenne et non uniquement en France. Il rappelle qu'il lui a déjà demandé cela via une question écrite déposée le 23 janvier 2020 et restée sans réponse depuis plus d'un an.
D'autre part, des accord bilatéraux de sécurité sociale, dérogatoires du droit commun, permettent selon les pays de résidence des retraités de bénéficier de dispositions plus favorables, et tel est notamment le cas de la convention franco-marocaine qui prévoit à son article 16 que trois mois de cotisations suffisent à ouvrir des droits à la prise en charge des soins en France pour les retraités français résidant au Maroc. Pourtant, plusieurs retraités établis au Maroc, et relevant donc bien de cette convention, ont reçu fin mars 2021 des courriers émis par la caisse primaire d'assurance-maladie (CPAM) de Seine-et-Marne – compétente en l'espèce - leur indiquant qu'ils devaient justifier désormais de quinze ans de cotisations au régime général et les invitant à régulariser leur situation en justifiant de cela, faute de quoi ils ne pourraient à l'issue de 30 jours continuer à bénéficier de la couverture de leurs soins en France par le régime général. Ainsi, de nombreux retraités risquent d'être privés de leurs droits à une prise en charge, du fait d'une mauvaise application de la convention précitée. Il lui demande donc également que son ministère réagisse au plus vite en donnant instructions à la CPAM concernée de contacter chacun des intéressés, en leur adressant rapidement un message rectificatif leur confirmant qu'il s'agissait en réalité d'une erreur. Ceci est d'autant plus nécessaire que les recours auprès de la commission des recours amiables ne peuvent se faire que par voie postale à l'adresse de la CPAM de Seine-et-Marne, aucune adresse électronique n'étant dédiée actuellement, et ce alors même que le Maroc a annoncé récemment la fin de liaisons aériennes avec la France en raison des conditions sanitaires (et donc des transports de courriers par voie aérienne). Une action urgente du ministère est donc requise.

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Réponse du Secrétariat d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargé de la jeunesse et de l'engagement publiée le 21/07/2021

Réponse apportée en séance publique le 20/07/2021

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, auteur de la question n° 1641, adressée à M. le ministre des solidarités et de la santé.

M. Jean-Yves Leconte. Ma question porte sur l'exigence d'une durée minimum de quinze ans de cotisations en France, posée par l'article L. 160-3 du code de la sécurité sociale et adoptée à la demande du Gouvernement en 2018. C'est la condition pour que les pensionnés d'un régime français établis à l'étranger puissent bénéficier d'une prise en charge de leurs soins médicaux effectués lors d'un séjour temporaire en France.

Or l'article 6 du règlement européen du 29 avril 2004 sur la coordination des systèmes de sécurité sociale prévoit que l'institution compétente d'un État membre dont la législation subordonne l'acquisition, le maintien, la durée ou le recouvrement des droits aux prestations, l'admission au bénéfice d'une législation, l'accès à l'assurance obligatoire ou facultative, à l'accomplissement de périodes d'assurance ou de résidence, tient compte des périodes d'assurance ou de résidence accomplies sous la législation de tout autre État membre, comme s'il s'agissait de périodes accomplies sous la législation qu'elle applique.

Aussi, je vous demande, madame la secrétaire d'État, de bien vouloir confirmer que la durée de cotisation requise à l'article L. 160-3 du code de la sécurité sociale s'entend bien comme quinze ans de cotisations à l'assurance retraite dans l'ensemble des pays de l'Union européenne, et non pas uniquement en France.

En outre, des accords bilatéraux de sécurité sociale plus favorables permettent aux retraités, selon les pays de résidence, de bénéficier de dispositions dérogatoires.

Tel est le cas des conventions franco-marocaine et franco-tunisienne, qui prévoient que trois mois de cotisations suffisent à ouvrir des droits à la prise en charge des soins en France pour des retraités monopensionnés français résidant dans l'un de ces pays.

Pourtant, plusieurs retraités qui y résident ont reçu, depuis la fin du mois de mars 2021, des courriers émis par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne, les invitant à régulariser leur situation en justifiant de quinze ans de cotisations, faute de quoi ils ne pourraient plus continuer à bénéficier de la couverture de leurs soins en France par le régime général.

Je vous demande donc que les intéressés reçoivent enfin un message rectificatif leur confirmant qu'il s'agissait en réalité d'une erreur et leur indiquant, parce qu'ils relèvent de ces conventions, qu'ils pourront bien continuer à bénéficier d'une prise en charge de leurs soins effectués en France.

C'est d'autant plus nécessaire que les recours auprès de la Commission de recours amiable ne peuvent être adressés que par voie postale à la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne, aucune adresse électronique n'y étant dédiée à ce jour.

Une action urgente du Gouvernement est donc requise, afin que tous nos compatriotes retraités établis à l'étranger ne se voient pas violemment privés de leurs droits en méconnaissance de nos accords internationaux.

M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État auprès du ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, chargée de la jeunesse et de l'engagement. Vous interrogez le ministre des solidarités et de la santé sur l'exigence légale d'une durée de cotisations minimum de quinze ans, conditionnant la prise en charge des frais de santé des pensionnés résidant à l'étranger lors de séjours temporaires en France.

Un dispositif transitoire a été prévu par une instruction en date du 1er juillet 2019, permettant un aménagement de cette mesure pour les personnes ayant cotisé entre cinq et dix ans à un régime français. Mais ce ne sont que des éléments posant le contexte.

Dans un arrêt du 2 avril 2021, le Conseil d'État a annulé les dispositions transitoires prévues par cette instruction, au motif qu'elles constituaient une règle nouvelle non prévue. Cet arrêt a eu pour effet d'entraîner la clôture des droits des pensionnés résidant à l'étranger et n'ayant pas cumulé quinze années de cotisations en France.

Le Conseil d'État a également considéré que, en subordonnant la prise en charge de ces soins à la condition que la pension résulte d'une durée minimale de cotisation à un régime français, le législateur a entendu concilier l'exigence constitutionnelle de bon emploi des deniers publics et le droit à la protection de la santé.

Dans son ensemble, cette disposition permet ainsi aujourd'hui d'assurer la prise en charge des soins de plus de 780 000 pensionnés d'un régime français résidant à l'étranger lors de leurs séjours temporaires en France.

Un courrier d'information a été envoyé à ces personnes préalablement à la clôture de leurs droits, afin qu'elles puissent envisager une prise en charge alternative. Il convient toutefois de noter que cette condition de durée d'assurance de quinze ans ne s'applique pas aux personnes relevant d'une convention bilatérale de sécurité sociale avec la France.

Un rappel sera fait auprès de l'ensemble des caisses primaires d'assurance maladie, de telle sorte que les dispositions figurant dans les conventions bilatérales soient bien respectées.

M. le président. La parole est à M. Jean-Yves Leconte, pour la réplique.

M. Jean-Yves Leconte. Je prends note de cette dernière information, madame la secrétaire d'État.

Néanmoins, vous ne répondez absolument pas à mes interrogations sur le règlement européen ! De plus, vous faites comme si toutes les difficultés venaient de l'arrêt du Conseil d'État. Or les courriers de la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-et-Marne sont antérieurs à cet arrêt et n'y sont liés en aucune manière.

M. le président. Il faut conclure, mon cher collègue.

M. Jean-Yves Leconte. Le problème de base, c'est le choix qu'a fait votre gouvernement de priver des dizaines de milliers de pensionnés résidant à l'étranger de leur possibilité de continuer à bénéficier de soins en France, et cela dure depuis un moment. Vous devez trouver une solution pour ces personnes !

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