Question de M. HINGRAY Jean (Vosges - UC) publiée le 18/03/2021

M. Jean Hingray attire l'attention de Mme la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales sur l'absence d'un soutien institutionnel organisé dès lors qu'un élu local, conseiller départemental, conseiller régional, maire, adjoint ou conseiller municipal est violemment pris à parti soit en face à face, soit par courrier ou via les réseaux sociaux par un ou plusieurs administrés.
Alors que les agents territoriaux bénéficient à bon droit dans leur immense majorité d'un accompagnement de leur centre de gestion prévoyant des interventions destinées à mieux prévenir ou maîtriser les risques psychosociaux, les près de 520 000 élus locaux que comptent notre pays sont livrés à eux-mêmes et souvent très démunis face aux agressions dont ils sont de plus en plus fréquemment l'objet.
Accélérant les tensions, catalysant les conflits, abaissant les seuils du passage à l'acte, la crise liée à la Covid-19 a très certainement contribué à l'accroissement du nombre d'agressions inter ou extra familiales. Les constats établis par les forces de police en témoignent. En lien avec le contexte actuel de crise sanitaire, les agents territoriaux ont pu bénéficier de dispositifs de soutien psychologique exceptionnels. Au cours de l'été dernier, les agressions perpétrées contre de nombreux élus (Miribel-Les-Échelles, Croisilles, Saint-Philippe-d'Aiguille…) et notamment celui, mortel du maire de Signes, ont retentit comme un signal d'alarme, le sujet faisant d'ailleurs la une des médias. Certes les peines prononcées sont aggravées lorsqu'elles relèvent de violences commises à l'encontre d'un élu. En revanche, aucun dispositif ne semble prévu et opérationnel pour traiter de situations moins caractérisables et qui relèvent bien davantage du harcèlement. Ni cellule de soutien, ni support d'arbitrage ou de conciliation ne sont mis à leur disposition pour tenter de réduire le niveau des pressions dont ils sont les victimes.
Il souhaite l'interroger sur la mise en œuvre d'un véritable écosystème d'accompagnement des élus qui viendra à terme renforcer leur statut et contribuera à pérenniser leur engagement public si précieux pour la Nation et la République.

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Réponse du Ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales publiée le 20/05/2021

Le Gouvernement est déterminé à garantir la sécurité de l'ensemble des élus de la République, quelles que soient leurs fonctions. C'est d'ailleurs pourquoi, dans le contexte d'augmentation du nombre d'actes commis à l'encontre des maires et des élus locaux comme nationaux, plusieurs mesures ont été prises afin que les élus soient mieux accompagnés face à ces violences. L'article L. 2123-35 du code général des collectivités territoriales (CGCT) institue un régime dit de protection fonctionnelle au profit des élus locaux : « la commune est tenue de protéger le maire ou les élus municipaux le suppléant ou ayant reçu délégation contre les violences, menaces ou outrages dont ils pourraient être victimes à l'occasion ou du fait de leurs fonctions et de réparer, le cas échéant, le préjudice qui en est résulté ». La protection de la commune à ces élus ne s'étend pas seulement aux violences, menaces ou outrages, mais également aux voies de fait, injures ou diffamations dont ils pourraient être victimes à l'occasion ou du fait de leurs fonctions (CAA Marseille, 3 février 2011, req. n° 09MA01028). Elle doit être accordée par délibération du conseil municipal, sous réserve néanmoins que les faits aient été commis sur la victime en sa qualité d'élu. Des dispositions similaires, prévues par les articles L. 3123-29 et L. 4135-29 du CGCT, s'appliquent aux présidents, vice-présidents et aux élus titulaires d'une délégation des conseils départementaux et régionaux. La protection fonctionnelle des élus locaux constitue donc un dispositif juridiquement très protecteur, comparable au régime de protection dont bénéficient les agents publics. Toutefois, les coûts induits par le recours à cette protection (frais d'avocat et de procédure, etc.) peuvent parfois représenter des sommes importantes. L'article 104 de la loi n° 2019-1467 du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique a donc instauré l'obligation pour toutes les communes de souscrire un contrat d'assurance visant à couvrir les frais résultant de ses obligations pour la protection fonctionnelle de ses élus. Ce contrat d'assurance doit en outre inclure un dispositif d'assistance psychologique et de conseil afin de ne pas laisser seuls les élus exposés aux violences, et pour renforcer leur accompagnement. Cette mesure permet donc à la fois de lever les obstacles financiers que les communes sont susceptibles de rencontrer pour assurer la protection de leurs élus et pour réparer les préjudices qu'ils ont subis, et d'organiser leur accompagnement par des équipes spécialisées dans ce domaine. Elle est en outre respectueuse de la liberté de chaque commune de choisir l'organisme qui accompagne ses élus. Les communes de moins de 3 500 habitants sont de plus soutenues financièrement pour la souscription de ce contrat. Les coûts qui en résultent pour elles sont en effet compensés par l'État, dans les conditions fixées par le décret n° 2020-1072 du 18 août 2020 fixant le barème relatif à la compensation par l'État des sommes payées par les communes de moins de 3 500 habitants pour la souscription des contrats d'assurance relatifs à la protection fonctionnelle de leurs élus. Cette compensation prend la forme d'un dispositif simple et automatique, une dotation forfaitaire annuelle, dont le montant varie selon la strate démographique des communes, afin de correspondre à l'effectif de leur conseil municipal. En outre, par une circulaire du 7 septembre 2020 relative au traitement judiciaire des infractions commises à l'encontre des personnes investies d'un mandat électif et au renforcement du suivi judiciaire des affaires pénales les concernant, le ministre de la justice a indiqué qu'il convenait dorénavant de retenir des qualifications pénales prenant en compte la qualité des victimes lorsqu'elles sont investies d'un mandat électif. Dans le cas d'un élu insulté ou agressé verbalement, la qualification d'outrage sur personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public doit ainsi être retenue, plutôt que celle d'injure. Cette circulaire rappelle également l'importance d'une réponse pénale systématique et rapide dans le cas de ces agressions, d'un traitement diligent des plaintes des élus et d'un suivi et d'un accueil personnalisé compte-tenu des contraintes qui sont les leurs.

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