Question de M. MARIE Didier (Seine-Maritime - SER) publiée le 18/03/2021

M. Didier Marie attire l'attention de M. le ministre de l'Europe et des affaires étrangères sur les difficultés rencontrées par les « Américains accidentels ».

Depuis l'entrée en vigueur de l'accord franco-américain du 14 novembre 2013 relatif à la mise en œuvre de la loi américaine « Foreign Account Tax Compliance Act » dite FATCA , de nombreux Français ont découvert qu'ils étaient citoyens américains, ignorant que le seul fait de naître aux États-Unis même par accident, à l'occasion d'un bref séjour ou d'une escale, leur conférait la citoyenneté américaine.

Dans ce contexte, les accords intergouvernementaux conclus entre les États-Unis et les États membres de l'Union européenne prévoient un transfert d'informations. En effet, depuis l'entrée en vigueur du FATCA, les banques européennes ont pour obligation de déclarer les clients présentant des indices d'américanité, et donc susceptibles d'être des « US persons ». Ces banques doivent fournir à l'internal revenue service américain des informations détaillées sur ces comptes.

Or, le Parlement européen, dans une résolution du 5 juillet 2018, indique que ce transfert d'informations pourrait constituer une violation des règles de l'Union en matière de protection des données. La résolution souligne également « la nécessité de protéger comme il se doit les données à caractère personnel transmises aux États-Unis dans le cadre de la loi FATCA, conformément aux législations nationales et européenne en matière de protection des données ».

Ainsi, il demande au ministre de l'Europe et des affaires étrangères d'intervenir auprès de son homologue américain pour garantir que le transfert d'informations soit conforme au règlement général sur la protection des données (RGPD).

Aussi, il demande si des négociations, à l'échelle nationale et européenne, sont en cours afin de répondre aux difficultés fiscales et bancaires rencontrées par nos compatriotes franco-américains.

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Réponse du Ministère de l'Europe et des affaires étrangères publiée le 01/04/2021

Les "Américains accidentels", citoyens français également ressortissants américains du fait de leur lieu de naissance, sont assujettis à des obligations au regard de la législation fiscale américaine, en dépit de l'absence de lien particulier effectif avec ce pays. En 2010, une loi américaine (Foreign Account Tax Compliance Act ou "loi Fatca") a créé l'obligation, pour tous les établissements financiers, de transmettre, à l'administration fiscale américaine, des informations détaillées sur les comptes détenus directement ou indirectement par des contribuables américains. Le 14 novembre 2013, la France a signé l'accord intergouvernemental "Fatca"qui permet d'éviter une transmission directe, puisqu'il charge la direction générale des finances publiques (DGFiP) de la réception de ces données auprès des établissements financiers, puis de leur envoi à l'Internal Revenue Service (IRS), l'agence fédérale américaine chargée du recouvrement de l'impôt. Cet accord intergouvernemental apporte des garanties aux titulaires de comptes (protection des données personnelles, limitations des comptes financiers devant faire l'objet d'une déclaration). En l'absence d'accord, ces garanties seraient supprimées et les"Américains accidentels" continueraient d'être assujettis à l'obligation de déclarer leurs revenus à l'IRS et, le cas échéant, de payer l'impôt correspondant, puisque cette obligation découle du principe américain même d'imposition. En outre, les banques, placées dans une relation directe avec l'IRS, seraient alors susceptibles de redoubler de prudence vis-à-vis de leurs clients de nationalité américaine, ce qui renforcerait les difficultés bancaires qu'ils peuvent rencontrer à ce jour. Depuis plusieurs années, le Gouvernement, par le biais du ministère de l'Europe et des affaires étrangères et du ministère de l'économie, des finances et de la relance, sollicite l'attention des autorités américaines sur ces situations particulières et plaide en faveur d'une renonciation à la nationalité américaine facilitée pour ces "Américains accidentels", étant entendu que les conditions d'octroi de la nationalité et le principe de l'imposition sur la base de la citoyenneté relèvent de la compétence souveraine des États-Unis. Les demandes relayées à de nombreuses reprises, à Paris comme aux États-Unis, qui ont également mobilisé d'autres États européens dans le même sens, ont abouti à des avancées significatives, sur plusieurs plans : sur le plan administratif, les services de l'ambassade et des consulats des États-Unis en France ont été réceptifs aux arguments français et ont mis en place un guichet spécial et une page internet dédiée en langue française afin de faciliter les démarches des personnes souhaitant renoncer à la nationalité américaine. Des informations sont également disponibles sur le site de l'ambassade de France aux États-Unis. La procédure a également été allégée et l'obtention d'un numéro de sécurité sociale n'est ainsi plus nécessaire pour ce faire. Le service chargé des renonciations à la nationalité américaine de l'ambassade des États-Unis en France est actuellement fermé et rouvrira lorsque la situation sanitaire le permettra. L'ambassade des États-Unis en France a indiqué au ministère de l'Europe et des affaires étrangères que les personnes concernées peuvent l'interroger sur ce sujet via l'adresse courriel : citizeninfo@state.gov ; sur le plan fiscal, l'IRS a présenté le 6 septembre 2019 une procédure d'amnistie particulière, et compte tenu de seuils élevés, de nombreux binationaux décidant de renoncer à leur nationalité américaine peuvent échapper aux arriérés d'impôts américains. Le 15 octobre 2019, l'IRS a également étayé ses instructions existantes pour préciser les obligations des institutions financières en matière de collecte et de transmission du numéro d'identifiant fiscal (Tax identification number, TIN) auprès de leurs clients détenant la nationalité américaine. Elles ont été reprises et commentées dans la doctrine de l'administration fiscale française, et expressément rappelées à la Fédération bancaire française (FBF). Depuis ces précisions, l'administration française n'a pas eu connaissance - sinon de manière très limitée - de cas de clôtures forcées de comptes détenus par des « Américains accidentels » de la part de leurs établissements bancaires, même si des complications administratives peuvent subsister pour ces personnes. Le Gouvernement va poursuivre, en lien avec ses partenaires européens, un dialogue actif avec la nouvelle administration américaine afin d'obtenir des avancées complémentaires, aussi bien dans le sens d'une réciprocité accrue des échanges d'informations fiscales avec les États-Unis que d'une facilitation des démarches pour les « Américains accidentels ».

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